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minel. L'impartialité du juge est trop souvent mise en doute, et il perd de son prestige devant l'opinion, qui va quelquefois jusqu'à l'accuser d'être l'instrument de la passion ou de la haine.

Une haute cour de justice, choisie dans la haute magistrature, ayant pour jurés des membres des conseils généraux de toute la France, réprimera seule les attentats contre le chef de l'État et la sûreté publique.

L'Empereur disait au conseil d'État : « Une constitution est l'œuvre du temps; on ne saurait laisser une trop large voie aux améliorations. » Aussi la constitution présente n'a-t-elle fixé que ce qu'il était impossible de laisser incertain. Elle n'a pas enfermé dans un cercle infranchissable les destinées d'un grand peuple; elle a laissé aux changements une assez large voie pour qu'il y ait, dans les grandes crises, d'autres moyens de salut que l'expédient désastreux des révolutions.

Le sénat peut, de concert avec le Gouvernement, modifier tout ce qui n'est pas fondamental dans la constitution; mais quant aux modifications à apporter aux bases premières, sanctionnées par vos suffrages, elles ne peuvent devenir définitives qu'après avoir reçu votre ratification.

Ainsi, le peuple reste toujours maître de sa destinée. Rien de fondamental ne se fait en dehors de sa volonté.

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Telles sont les idées, tels sont les principes dont vous m'avez autorisé à faire l'application. Puisse

cette constitution donner à notre patrie des jours calmes et prospères! Puisse-t-elle prévenir le retour de ces luttes intestines où la victoire, quelque légitime qu'elle soit, est toujours chèrement achetée! Puisse la sanction, que vous avez donnée à mes efforts, être bénie du ciel! Alors la paix sera assurée au dedans et au dehors, mes vœux seront comblés, ma mission sera accomplie!

Palais des Tuileries, le 44 janvier 1852.

LOUIS-NAPOLÉON BONAPARTE.

CONSTITUTION

FAITE

EN VERTU DES POUVOIRS DÉLÉGUÉS PAR LE PEUPLE FRANÇAIS A LOUIS-NAPOLÉON BONAPARTE

par le vote des 20 et 21 décembre 1851.

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE,

Considérant que le peuple français a été appelé à se prononcer sur la résolution suivante :

<< Le peuple veut le maintien de l'autorité de >> Louis-Napoléon Bonaparte, et lui donne les pou>> voirs nécessaires pour faire une constitution d'a» près les bases établies dans sa proclamation du » 2 décembre;

Considérant que les bases proposées à l'acceptation du peuple étaient :

» 1° Un chef responsable nommé pour dix ans; » 2o Des ministres dépendants du pouvoir exé>>> cutif seul;

» 3° Un conseil d'État formé des hommes les plus » distingués, préparant les lois et en soutenant la >> discussion devant le corps législatif;

» 4° Un corps législatif discutant et votant les lois, » nommé par le suffrage universel, sans scrutin de >> liste qui fausse l'élection ;

» 5° Une seconde assemblée formée de toutes les >> illustrations du pays, pouvoir pondérateur, gardien » du pacte fondamental et des libertés publiques; >> Considérant que le peuple a répondu affirmativement par sept millions cinq cent mille suffrages,

PROMULGUE LA CONSTITUTION DONT LA TENEUR SUIT :

TITRE Ier.

Art. 1. La constitution reconnaît, confirme et garantit les grands principes proclamés en 1789, et qui sont la base du droit public des Français.

TITRE II.

FORMES DU GOUVERNEMENT DE LA RÉPUblique.

Art. 2. Le Gouvernement de la République française est confié pour dix ans au prince Louis-Napoléon Bonaparte, Président actuel de la République.

Art. 3. Le Président de la République gouverne

au moyen des ministres, du conseil d'Etat, du sénat et du corps législatif.

Art. 4. La puissance législative s'exerce collectivement par le Président de la République, le sénat et le corps législatif.

TITRE III.

DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE.

Art. 5. Le Président de la République est responsable devant le peuple français, auquel il a toujours le droit de faire appel.

Art. 6. Le Président de la République est le chef de l'État; il commande les forces de terre et de mer, déclare la guerre, fait les traités de paix, d'alliance et de commerce, nomme à tous les emplois, fait les règlements et décrets nécessaires pour l'exécution des lois.

Art. 7. La justice se rend en son nom.
Art. 8. Il a seul l'initiative des lois.

Art. 9. Il a le droit de faire grâce.

Art. 10. Il sanctionne et promulgue les lois et les sénatus-consultes.

Art. 11. Il présente, tous les ans, au sénat et au corps législatif, par un message, l'état des affaires de la République.

Art. 12. Il a le droit de déclarer l'état de siége dans un ou plusieurs départements, sauf à en référer au sénat dans le plus bref délai.

Les conséquences de l'état de siége sont réglées par la loi.

Art. 13. Les ministres ne dépendent que du chef de l'État; ils ne sont responsables, que chacun en ce qui le concerne, des actes du Gouvernement; il n'y a point de solidarité entre eux; il ne peuvent être mis en accusation que par le sénat.

Art. 14. Les ministres, les membres du sénat, du corps législatif et du conseil d'État, les officiers de terre et de mer, les magistrats et les fonctionnaires publics prêtent le serment ainsi conçu :

Je jure obéissance à la constitution et fidélité au Président.

Art. 15. Un sénatus-consulte fixe la somme allouée annuellement au Président de la République pour toute la durée de ses fonctions.

Art. 16. Si le Président de la République meurt avant l'expiration de son mandat, le sénat convoque la nation pour procéder à une nouvelle élection.

Art. 17. Le chef de l'État a le droit, par un acte secret et déposé aux archives du sénat, de désigner au peuple le nom du citoyen qu'il recommande, dans l'intérêt de la France, à la confiance du peuple et à ses suffrages.

Art. 18. Jusqu'à l'élection du nouveau Président de la République, le président du sénat gouverne avec le concours des ministres en fonctions, qui se forment en conseil de gouvernement, et délibèrent à la majorité des voix.

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