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lonté de rétablir l'Empire. Confiant dans votre patriotisme et vos lumières, je vous ai convoqués pour délibérer légalement sur cette grave question et vous remettre le soin de régler le nouvel ordre de choses. Si vous l'adoptez, vous penserez sans doute, comme moi, que la constitution de 1852 doit être maintenue, et alors les modifications reconnues indispensables ne toucheront en rien aux bases fondamentales.

>> Le changement qui se prépare portera principalement sur la forme et cependant reprendre le symbole impérial est pour la France d'une immense signification. En effet, dans le rétablissement de l'Empire, le peuple trouve une garantie à ses intérêts et une satisfaction à son juste orgueil : ce rétablissement garantit ses intérêts en assurant l'avenir, en fermant l'ère des révolutions, en consacrant encore les conquêtes de 89. Il satisfait son juste orgueil, parce que, relevant avec liberté et avec réflexion ce qu'il y a trente-sept ans l'Europe entière avait renversé par la force des armes au milieu des désastres de la patrie, le peuple venge noblement ses revers sans faire de victimes, sans menacer aucune indépendance, sans troubler la paix du monde.

>> Je ne me dissimule pas néanmoins tout ce qu'il y a de redoutable à accepter aujourd'hui et à mettre sur sa tête la couronne de Napoléon; mais ces appréhensions diminuent par la pensée que, représentant à tant de titres la cause du peuple et la volonté

nationale, ce sera la nation qui, en m'élevant au trône, se couronnera elle-même.

» Fait au palais de Saint-Cloud, le 4 novembre 1852. »

7 novembre 1852.

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Réponse au discours de

M. Mesnard, vice-président du sénat, remettant à Son Altesse Impériale le sénatus-consulte relatif au rétablissement de l'Empire.

<< Messieurs les sénateurs,

» Je remercie le sénat de l'empressement avec lequel il a répondu au vou du pays, en délibérant sur le rétablissement de l'Empire et en rédigeant le sénatus-consulte qui doit être soumis à l'acceptation du peuple.

>> Lorsqu'il y a quarante-huit ans, dans ce même palais, dans cette même salle et dans des circonstances analogues, le sénat vint offrir la couronne au chef de ma famille, l'Empereur répondit par ces paroles mémorables: Mon esprit ne serait plus avec ma postérité du jour où elle cesserait de mériter l'amour et la confiance de la grande nation.

» Eh bien! aujourd'hui ce qui touche le plus mon cœur, c'est de penser que l'esprit de l'Empereur est avec moi, que sa pensée me guide, que son ombre me protége, puisque, par une démarche solennelle, vous venez, au nom du peuple français, me prouver que j'ai mérité la confiance du pays. Je n'ai

pas besoin de vous dire que ma préoccupation constante sera de travailler avec vous à la grandeur et à la prospérité de la France. »

25 novembre 1852.- Message au Corps législatif.

« Messieurs les députés,

» Je vous ai rappelés de vos départements pour vous associer au grand acte qui va s'accomplir. Quoique le sénat et le peuple aient seuls le droit de modifier la Constitution, j'ai voulu que le corps politique issu comme moi du suffrage universel vînt attester au monde la spontanéité du mouvement national qui me porte à l'empire. Je tiens à ce que ce soit vous qui, en constatant la liberté du vote et le nombre des suffrages, fassiez sortir de votre déclaration toute la légitimité de mon pouvoir. Aujourd'hui, en effet, déclarer que l'autorité repose sur un droit incontestable, c'est lui donner la force nécessaire pour fonder quelque chose de durable et assurer la prospérité du pays.

>> Le Gouvernement, vous le savez, ne fera que changer de forme. Dévoué aux grands intérêts que l'intelligence enfante et que la paix développe, il se contiendra, comme dans le passé, dans les limites de la modération; car le succès n'enfle jamais d'orgueil l'âme de ceux qui ne voient dans leur élévation nouvelle qu'un devoir plus grand imposé par

le peuple, qu'une mission plus élevée confiée par la Providence.

>> Fait au palais de Saint-Cloud, le 25 novembre 1852.

» Signé LOUIS-NAPOLÉON. »

Paris, 1er décembre 1852. — Aujourd'hui, à huit heures et demie, tous les membres du corps législatif, ayant à leur tête M. Billault, président, et les membres du bureau, se sont rendus, escortés par un escadron de cavalerie, au palais de Saint-Cloud. Ils avaient été précédés par tous les membres du sénat ayant à leur tête M. Mesnard, premier viceprésident, et les membres du bureau. MM. les conseillers d'Etat s'étaient également rendus à SaintCloud.

A neuf heures moins un quart, l'Empereur, accompagné du prince Jérôme, son oncle, et du prince Napoléon Bonaparte, précédé de M. le comte Bacciochi, maître des cérémonies, de M. Feuillet de Conches, maître des cérémonies adjoint, de ses aides de camp et de ses officiers d'ordonnance, et suivi de tous ses ministres et de M. Baroche, vice-président du conseil d'État, membre du conseil des ministres, s'est rendu dans la grande galerie, où un trône avait été placé sur une estrade, au fond de la salle.

Derrière le trône se trouvaient MM. les conseillers

d'État; la maison militaire de l'Empereur a pris sa place un peu en avant; Sa Majesté, ayant à sa droite le prince Jérôme et à sa gauche le prince Napoléon Bonaparte, derrière elle tous ses ministres, s'est placée en avant du trône.

M. le président du corps législatif et M. le viceprésident du sénat prennent successivement la parole. L'Empereur leur répond :

« Messieurs,
"

>> Le nouveau règne que vous inaugurez aujourd'hui n'a pas pour origine, comme tant d'autres dans l'histoire, la violence, la conquête ou la ruse. Il est, vous venez de le déclarer, le résultat légal de la volonté de tout un peuple, qui consolide, au milieu du calme, ce qu'il avait fondé au sein des agitations. Je suis pénétré de reconnaissance envers la nation, qui, trois fois en quatre années, m'a soutenu de ses suffrages, et chaque fois n'a augmenté sa majorité que pour accroître mon pouvoir.

>> Mais plus le pouvoir gagne en étendue et en force vitale, plus il a besoin d'hommes éclairés comme ceux qui m'entourent chaque jour, d'hommes indépendants comme ceux auxquels je m'adresse pour m'aider de leurs conseils, pour ramener mon autorité dans de justes limites, si elle pouvait s'en écarter jamais.

» Je prends dès aujourd'hui, avec la couronne, le nom de Napoléon III, parce que la logique du peuple me l'a déjà donné dans ses acclamations,

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