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ma patrie, et c'est avec bonheur que, dans les lieux mêmes où j'ai souffert, je vous propose un toast en l'honneur des hommes qui sont déterminés, malgré leurs convictions, à respecter les institutions de leur pays. >>

29 juillet. Inauguration du chemin de fer de Tours à Angers.

Le Président de la République y prononce le discours suivant :

<< Messieurs,

>> En parcourant votre ville au milieu des acclamations de la population, je me demandais ce que j'avais fait pour mériter un accueil si flatteur, si enthousiaste.

>> Ce n'est pas seulement parce que je suis le neveu de l'homme qui fit cesser toutes nos dissensions civiles, que vous me recevez avec tant de bienveillance; je ne puis faire pour vous ce que l'Empereur a fait; je n'ai ni son génie, ni sa puissance; mais ce qui explique vos acclamations, c'est que je représente ce système de modération et de conciliation qui a été inauguré par la République. Ce système, qui consiste à ancrer en France, non cette liberté sauvage qui permet à chacun de faire ce qu'il veut, mais la liberté des peuples civilisés, qui permet à chacun de faire ce qui ne peut pas nuire à la communauté.

>>> Sous tous les régimes, il y aura, je le sais, des

oppresseurs et des opprimés; mais tant que je serai Président de la République, il n'y aura pas de parti opprimé.

>> Aucune ville mieux qu'Angers ne comprend, je crois, cette sage politique, et n'est plus dévouée à cette saine et sainte politique que nous voulons tous faire triompher.

» A la ville d'Angers! »

30 juillet.

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Départ du Président d'Angers pour se rendre à Nantes par la Loire.

Une députation envoyée par la ville de Nantes, en tête de laquelle étaient le préfet, le maire et six représentants de la Loire - Inférieure, était venue la veille au-devant du Président de la République, à Angers, sur un bateau à vapeur richement pavoisé.

Arrivée à deux heures dans la ville de Nantes. Discours prononcé par le Président :

<< Le voyage que j'ai fait pour venir ici auprès de vous restera profondément gravé dans mon cœur, car il a été fertile en souvenirs et en espoir. Ce n'est pas sans émotion que j'ai vu ce grand fleuve derrière lequel se sont réfugiés les derniers glorieux bataillons de notre grande armée; ce n'est pas sans émotion que je me suis arrêté avec respect devant le tombeau de Bonchamp; ce n'est pas sans émotion qu'aujourd'hui, assis au milieu de vous, je me trouve en face de la statue de Cambronne. Tous ces souvenirs, si noblement appréciés par vous, me prouvent que,

si le sort le voulait, nous serions encore la grande nation par les armes. Mais il y a une gloire toute aussi grande aujourd'hui : c'est de nous opposer à toute guerre civile et à toute guerre étrangère, et de grandir par le développement progressif de notre industrie et de notre commerce. Voyez cette forêt de mâts qui languit ici dans votre port, elle n'attend qu'une aide pour porter au bout du monde les produits de notre civilisation. Soyons unis, oublions toute cause de dissension, soyons dévoués à l'ordre et aux grands intérêts de notre pays, et bientôt nous. serons encore la grande nation par les arts, par l'industrie, par le commerce. La ville de Nantes, qui me reçoit si bien aujourd'hui, est vivement intéressée dans cette question, car elle est destinée par sa position à atteindre le plus haut degré de prospérité commerciale. Je porte donc un toast à l'avenir de la ville de Nantes et à sa prospérité. »

31 juillet.

Départ de Nantes Saumur. pour Arrivée à Saumur à quatre heures du soir. — Le Président assiste au carrousel de l'école de cavalerie; il distribue lui-même les récompenses aux vainqueurs. Le soir, au banquet qui lui est offert par la ville, il porte le toast suivant :

<<< De toutes les villes que j'ai traversées depuis que j'ai quitté Paris, Saumur n'est point la plus grande, mais elle n'est pas la moins importante; car ce n'est pas seulement par son admirable position, par son commerce qu'elle se distingue, mais c'est encore par

son patriotisme. Ce sentiment est entretenu par la célèbre école qui y est établie; car, dans cet établissement où se forment de si bons officiers, on n'apprend pas seulement à monter à cheval, mais on acquiert ces habitudes de discipline, d'ordre et de hiérarchie qui constituent le bon soldat et aussi le bon citoyen. Ici l'esprit militaire est encore dans toute sa force, et, Dieu en soit loué! il n'est pas près de s'éteindre. N'oublions pas que cet esprit militaire est, dans les temps de crise, la sauvegarde de la patrie.

>> Dans la première révolution, l'Empereur l'a dit, tandis qu'à l'intérieur tous les partis se décimaient et se déshonoraient réciproquement par leurs excès, l'honneur national s'était réfugié dans nos armées.

>> Faisons donc tous nos efforts pour garder intact, pour développer encore, cet esprit militaire; car, croyez-le, si les produits des arts et des sciences méritent toute notre admiration, il y a quelque chose qui la mérite encore davantage, c'est la religion du devoir, c'est la fidélité au drapeau.

» A la ville de Saumur et à son école militaire ! »

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1er août. Arrivée à Tours. - Revue de la garde nationale et des troupes. Visite à la colonie de Mettray. Banquet offert par la ville de Tours; le Prési– dent prononce le discours suivant :

« Je dois remercier d'abord la ville de Tours de l'aimable accueil qu'elle m'a fait; mais je dois dire aussi que les acclamations dont je suis l'objet me

touchent bien plus qu'elles ne m'enorgueillissent. J'ai trop bien connu le malheur pour ne pas être à l'abri des entraînements de la prospérité. Je ne suis pas venu au milieu de vous avec une arrièrepensée, mais pour me montrer tel que je suis, et non tel que la calomnie veut me faire. On a prétendu, on prétend encore aujourd'hui à Paris que le Gouvernement médite quelque entreprise semblable au 18 brumaire. Mais sommes-nous donc dans les mêmes circonstances? Les armées étrangères ontelles envahi notre territoire? La France est-elle déchirée par la guerre civile? Y a-t-il 80,000 familles en émigration? Y a-t-il 400,000 familles mises hors la loi par la loi des suspects? Enfin, la loi est-elle sans vigueur et l'autorité sans force? Non, nous ne sommes pas dans des conditions qui nécessitent de si héroïques remèdes. A mes yeux, la France peut être comparée à un vaisseau qui, après avoir été ballotté par les tempêtes, a trouvé enfin une rade plus ou moins bonne, mais enfin où il a jeté l'ancre. Eh bien ! dans ce cas, il faut radouber le navire, refaire son lest, rétablir ses mâts et sa voilure, avant de se hasarder encore dans la pleine mer. Les lois que nous avons peuvent être plus ou moins défectueuses; mais elle sont susceptibles de perfectionnement. Confiez-vous donc à l'avenir, sans songer ni aux coups d'État ni aux insurrections. Les coups d'État n'ont aucun prétexte, les insurrections n'ont aucune chance de succès; à peine commencées, elles seraient immédiatement réprimées. Ayez confiance

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