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mai 1855, Guillot, [S. 36.4.63, P. 56.2.373, D. 55.1.241] - V. suprà, n. 2246 et s.

2860. Mines. Lorsqu'il a toujours été soutenu, dans un procès, par le défendeur éventuel, et reconnu même par les demandeurs, qu'un puits dont la fermeture était réclamée était un puits d'exploitation, et que ceux-ci se prétendaient seulement fondés à le maintenir et à le continuer comme étant propriétaires du terrain où il était ouvert, ils ne peuvent alléguer pour la première fois, devant la Cour de cassation, qu'il ne s'agissait que de travaux de recherches et d'explorations qui ne pouvaient leur être interdits aux termes de l'art. 552, C. civ. Cass., 31 mai 1839, Cie des mines de Manganèse, [S. 59.1.721, P. 59.1175, D. 39.1.413]

2861. Notaire. - D'après l'art. 14, L. 25 vent. an XI, les actes notariés doivent être signés par les parties; les notaires doivent en faire mention à la fin de l'acte; et si les parties ne savent ou ne peuvent signer, le notaire doit faire mention de leur déclaration à cet égard; tout acte fait en contravention à cette disposition est déclaré nul par l'art. 68 de la même loi. — V. suprà, vo Acte notarié, n. 545 et s.

2862. La nullité, si elle existe, est nécessairement une nullité d'ordre public, pouvant être demandée par toute partie intéressée; par suite, il appartient à la Cour de cassation de vérifier si les formalités prescrites par le législateur ont été effectivement accomplies, et de contrôler les appréciations émises à cet égard par les juges du fond. - Cass., 20 mars 1889, Epoux Maffre, S. 90.1.15, P. 90.1.21, D. 89.1.429]

2863. Presse. - On ne peut proposer devant la Cour de cassation le fait d'avoir donné, dans le délai prescrit, un mandat à un avoué pour former opposition à un arrêt par défaut, en matière de presse, si ce moyen n'a pas été invoqué devant les juges du fond. Cass., 28 août 1834, Laroze, [P. chr.]

§4. Cas où l'on n'a pas reconnu la nouveauté du moyen. 2864. Les décisions que nous avons reproduites et examinées aux paragraphes précédents, en même temps qu'elles indiquent dans quels cas il y a moyen nouveau, irrecevable devant la Cour de cassation, indiquent aussi, par à contrario, dans quels cas le moyen ne peut pas être écarté par l'exception de nouveauté. Il résulte, en effet, de ces décisions que toutes les fois que le moyen a été soumis à l'examen du juge du fond par des conclusions explicites, ou mème simplement implicites, ou, alors même qu'il n'apparait pas, par le texte des conclusions, que le moyen ait été proposé, toutes les fois qu'il ressort des termes du jugement ou de l'arrêt, que le moyen a été examiné par le juge, on ne pourra le soutenir irrecevable comme nou

veau.

2865.- En dehors de ces arrêts, on peut en signaler d'autres d'ailleurs dans lesquels la Cour suprême a écarté directement l'exception tirée de la nouveauté du moyen.

2866. Appel. Lorsqu'un moyen a été proposé en première instance, que, le tribunal l'a même implicitement accueilli par son dispositif et que sur l'appel interjeté de ce jugement, l'intimé a conclu à sa confirmation, par l'effet dévolutif de l'appel, le juge du second degré se trouvant saisi de toutes les questions tranchées par le jugement qui lui est soumis, se trouve par là même saisi du moyen présenté devant les premiers juges; par suite, lorsque ce moyen est reproduit devant la Cour de cassation, on ne peut lui opposer l'exception de nouveauté. Cass., 8 janv. 1878, Demalvilain, [S. 78.1.113, P. 78.1178, D. 79.1.457]

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2867. Une partie est recevable à proposer devant la Cour de cassation un moyen qu'elle avait invoqué en première instance, et qu'elle a implicitement relevé en appel en demandant la confirmation par adoption de motifs du jugement rendu conformément à ses conclusions. Cass., 18 avr. 1883, Chemin de fer des Charentes, [S. 83.1.361, P. 83.1.929, D. 84.1.25]

2868.- Jugé, encore, en ce sens, qu'on ne saurait considérer comme nouveau devant la Cour de cassation un moyen invoqué en première instance et non reproduit explicitement en appel, si la partie a pris en appel des conclusions qui, par leur généralité, comprennent ce moyen. Cass., 13 mars 1876, Peyrelongue, S. 76.1.361, P. 76.873, D. 76.1.342] Donation. Le moyen invoqué par le tiers acquéreur d'un immeuble dotal donné dans un des cas prévus par la loi, et fondé sur ce que la revendication en aurait été admise

2869.

contre lui, pour cause de simulation de la donation, sans constatation de sa mauvaise foi, est opposable devant la Cour de cassation du moment que les juges du fond ont été saisis de la question de validité du titre, ce qui comprenait nécessairement l'exception de bonne foi. On ne saurait voir là un moyen nouveau. Cass., 30 mars 1874, Petit et Chabrier, [S. 74.1.353, P. 74.891, D. 75.1.258]

2870. Eaux. Le moyen tiré de ce que les eaux d'un ruisseau auxquelles une partie prétend avoir un droit exclusif sont imprescriptibles, comme res nullius, peut être proposé pour la première fois devant la Cour de cassation, un tel moyen n'étant qu'un motif de droit, et non un moyen nouveau. Cass., 11 janv. 1881, Raynaud, [S. 81.1.197, P. 81.1.489, D. 81.1.134) 2871.- Enregistrement. Dans une instance engagée avec l'enregistrement, la partie qui a soutenu qu'il n'y avait lieu à aucune perception de droit a, par cela même, soutenu qu'il no pouvait lui être réclamé aucun droit de mutation à titre gratuit. Par suite, lorsque, devant la Cour de cassation, elle invoque un moyen de nullité tiré de ce qu'en tous cas, elle ne pouvait être assujettie qu'à un droit de mutation à titre onéreux, ce moyen ne peut être déclaré irrecevable comme nouveau, dès lors qu'il est implicitement contenu dans les conclusions prises au cours de l'instance. Cass., 9 avr. 1856, Nolé, [S. 56.1.541, P. 56. 2.489, D. 56.1.157] 2872. Exception. Les appelants qui ont demandé à la cour d'appel la réformation du jugement qui avait repoussé leur demande en nullité d'un testament par une exception de ratification tacite tirée de l'exécution de l'acte testamentaire, ont par là même conclu virtuellement au rejet de cette exception. Par suite, ne saurait être considéré comme nouveau devant la Cour de cassation, le moyen tiré de ce que l'arrêt a accueilli cette exception, sans constater que l'acte d'exécution a été accompli dans les conditions légales indispensables pour entrainer la ratification. Cass., 9 janv. 1884, Baudoin, [S. 84.1.375, P. 84.1.954, D. 84.1.231]

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2873. Exces de pouvoir. S'il est vrai que la partie qui n'a pas formé appel, pour cause d'incompétence absolue, d'un jugement rendu en dernier ressort, n'est pas recevable à exciper de cette incompétence devant la Cour de cassation parce qu'elle pouvait interjeter appel du chef dont il s'agit (C. proc. civ., art. 454), cette fin de non-recevoir ne s'attache qu'au moyen tiré de l'incompétence et non pas à celui tiré de l'excès de pouvoir. -En conséquence, est recevable le pourvoi fondé sur ce qu'un jugement, rendu en dernier ressort, aurait commis un excès de pouvoir en établissant une taxe que l'autorité administrative avait seule le droit de régler, encore que le demandeur n'aurait pas interjeté appel de ce chef. Cass., 9 mai 1876, Comte de Bouillé et Ville de Nevers, (S. 76.1.265, P. 76.633] - V. aussi Cass., 17 nov. 1862, Godefroy, (S. 63.1.100, P. 63.323]; — 26 juin 1867, Chassenoix, [S. 67.1.290, P. 67.750]

2874.

Fruits. Lorsque les conclusions prises devant les juges du fond tendaient à la restitution des fruits échus pendant toute la durée de la possession, on ne peut considérer comme nouveau le moyen de cassation fondé sur ce que l'arrêt attaqué n'a pas accordé les fruits échus depuis la demande en justice. Cass., 8 mars 1852, Lesport, [S. 52.1.497, P. 56.4. 83, D. 52.1.186]

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2875. Ne saurait être considéré Hypothèque légale. comme nouveau le moyen pris de ce qu'un arrêt a ordonné à tort le maintien de l'hypothèque légale de la femme jusqu'à la prestation d'une caution par le mari, alors qu'en première instance et en appel le demandeur a conclu à ce que l'hypothèque inscrite fût déclarée éteinte. Cass., 27 juin 1876, Syndic Pelorson, S. 77.1.241, P. 77.625, D. 77.1.121] 2876. Ne peut être considéré comme nouveau le moyen de cassation tiré de l'incompétence du tribunal de commerce et fondé sur ce que des billets à ordre ne seraient que de simples promesses, en raison, soit de la condition, soit des réserves qui s'y trouvent insérées, lorsque, tant en première instance qu'en appel, ladite incompétence a été opposée en raison du caractère purement civil des billets. Cass., 11 août 1873, Corbineau, S. 75.1.169, P. 75.393, D. 74.1.82] Dans l'espèce sur laquelle est intervenu l'arrêt ci-dessus de la chambre civile, l'incompétence du tribunal de commerce avait été opposée, tant en première instance qu'en appel, par le demandeur en cassation; mais, suivant le défendeur au pourvoi, c'était sur la qualité de non-commerçant du souscripteur des

billets à ordre que l'exception d'incompétence avait été fondée, tandis que, devant la Cour de cassation, elle était opposée en raison des réserves et surtout de la condition qui avaient été insérées dans les billets, réserves et condition qui devaient, disait-on, avoir pour effet de faire dégénérer les billets souscrits en simples promesses. Cette fin de non-recevoir a été rejetée par le motif que le caractère purement civil des billets ayant été invoqué devant les premiers juges et en appel, le tribunal et la Cour avaient été mis à même de statuer sur tous les moyens de nature à justifier l'exception d'incompétence. On remarquera la différence qui existe entre la question ainsi jugée et celle de savoir si l'incompétence du tribunal de commerce aurait pu être opposée, pour la première fois, devant la Cour de cassation. V. sur cette dernière question, suprà, n. 2279 et s.

2877. Intérêts. Nous avons vu précédemment (V. suprà, n. 2480 et s.), que la question des intérêts qui se trouve accessoirement jointe à la demande principale en condamnation d'une somme déterminée comporte, le plus ordinairement, des constatations et des appréciations que les juges du fond doivent avoir été provoqués à faire; il faut donc, sous peine de rendre applicable l'exception de nouveauté, que le moyen leur ait été soumis par les conclusions des parties. Mais quand peut-on dire que le moyen se trouve mentionné dans les conclusions? La réponse est facile, lorsqu'il s'agit d'une mention formelle et expresse, elle l'est beaucoup moins quand il ne s'agit plus que d'une mention implicite. La question se pose surtout au regard d'un appel conçu en termes généraux, frappant le jugement tout entier, sans que le grief relatif à la capitalisation, ou au point de départ des intérêts, ait été spécialement visé dans de pareilles conditions, le moyen invoqué devant la Cour de cassation, et tiré de la violation de l'art. 1153, C. civ., doit-il être considéré comme nouveau?

2878.- La Cour de cassation répond négativement à cette question N'est pas nouveau, a-t-elle décidé, et peut dès lors être présenté devant la Cour de cassation, bien qu'il n'ait pas été l'objet de conclusions spéciales devant la cour d'appel, le moyen pris de ce qu'un arrêt a accordé à tort les intérêts d'une somme d'argent à partir du jour où l'obligation a pris naissance, si la partie qui invoque ce moyen a conclu d'une manière générale, en appel, à ce que le jugement de première instance (prononçant condamnation au paiement du principal et des intérêts, à dater de la date en question), fùt infirmé, et les défendeurs déboutés de toutes demandes, fins et conclusions ».

Cass., 22 févr. 1882, Cie du chemin de fer du vieux port de Marseille, [S. 84.1.270, P. 84.1.663, D. 82.1.396] On a invoqué en sens contraire deux arrêts de la chambre des requêtes des 13 janv. 1857, de Valmy, [S. 57.1.81, P. 57.398, D. 57.1. 106]; et 20 mai 1879, Cie d'assurance le Phénix, [S. 81.1.452, P. 81.1.1172, D. 80.1.35] - Dans l'espèce de ces deux arrêts, les parties avaient été condamnées solidairement à des dommages-intérêts et aux dépens, en première instance. Sur l'appel, les parties avaient conclu à l'infirmation générale du jugement, sans conclure spécialement à l'infirmation en ce qui touche la solidarité; et la cour d'appel avait confirmé le jugement. La chambre des requêtes a décidé que, devant la Cour de cassation, les parties ne pouvaient relever le moyen tiré de ce que la solidarité aurait été à tort prononcée contre elles, ce moyen n'ayant pas été spécialement présenté aux juges d'appel. Nous avons précédemment apprécié cette doctrine de la chambre des requêtes en matière de solidarité (V. suprà, n. 2565 et s.) et montré qu'elle avait été condamnée par la chambre civile. Celleci n'a fait qu'appliquer à la matière des intérêts la jurisprudence qu'elle avait très justement adoptée en matière de condamnations solidaires. Dans l'espèce actuelle, en première instance, la partie est condamnée au paiement d'une certaine somme avec intérêts à partir de telle époque. Appel par la partie, qui conclut en termes généraux à l'infirmation du jugement et au débouté du demandeur; la cour d'appel confirme le jugement. Devant la Cour de cassation, la partie condamnée présente un moyen tiré de ce qu'elle n'aurait pas dû être condamnée à payer les intérêts à partir de l'époque en question. Le moyen n'est pas nouveau, dit la chambre civile, car la formule générale d'infirmation du jugement, contenue dans les conclusions d'appel, mettait la cour en demeure de vérifier toutes les dispositions de la demande et du jugement, notamment celle relative au point de départ des intérêts. V. suprà,

n. 2370.

2879. La chambre civile a d'ailleurs confirmé sa jurisprudence par un arrêt du 25 mai 1887, la Mutuelle, [S. 87.1. 385, P. 87.1.935), qui décide, ainsi que celui rapporté au numéro précédent, que, lorsque les conclusions prises par l'appelant portent sur toute la contestation, elles comprennent, par cela même, le point de départ des intérêts; que par suite, ne peut être considéré comme nouveau le moyen tiré de ce que le point de départ des intérêts aurait été fixé contrairement aux dispositions de l'art. 1153, C. civ. 2880.

Sur la question de savoir si la violation de l'art. 1154, relatif à la capitalisation des intérêts peut être invoquée pour la première fois devant la Cour de cassation, V. suprà, n. 2162 et s.

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2881. Nom. Lorsque les demandeurs n'ont pas expressément visé l'art. 1, L. 28 juill. 1824, sur la propriété des noms et les art. 544 et 545, C. civ., à l'appui de leurs prétentions devant les juges du fait, s'il ressort des qualités de l'arrêt attaqué que, tant en première instance qu'en appel, ils ont soutenu qu'un nom était leur propriété exclusive et qu'ils ont formellement conclu à ce qu'il fut fait défense à leur adversaire d'employer ce nom, même avec les mots « selon la recette de », le moyen de cassation présenté par le pourvoi et tiré de la violation des articles précités n'est pas nouveau. Cass., 14 mars 1881, Landon, [D. 81.1.378] 2882. Preuve. La partie contre laquelle la preuve testimoniale a été admise en première instance, faute par elle d'en avoir contesté la pertinence et l'admissibilité et qui, en appel, a conclu purement et simplement au rejet de la preuve, doit être réputée avoir implicitement conclu à ce que la demande fut rejetée, tant au point de vue de l'admissibilité qu'à celui de la pertinence; par suite, le moyen de cassation tiré de la violation des règles de la preuve, en ce que l'arrêt attaqué a admis la preuve testimoniale en dehors des cas prévus par la loi, ne saurait être considéré comme nouveau. Cass., 17 nov. 1858, Fournier, (S. 39.1.905, P. 59.804, D. 58.1.459]

2883. Propriété. Une partie ne propose pas devant la Cour suprême un moyen nouveau en attaquant la décision des premiers juges qui reconnaît à son adversaire un droit d'usage sur les biens dont elle réclamait la propriété entière en première instance et en appel. - Cass., 23 mai 1837, Préfet des PyrénéesOrientales, [S. 37.1.805, P. 37.1.478]

2884. - Protét. Le moyen pris de ce qu'un protêt annulé comme tardif était fait en temps utile, par suite d'une prorogation de délai résultant d'une disposition législative non invoquée devant les juges du fond, constitue, non un moyen nouveau, mais un simple argument qui peut être employé pour la première fois devant la Cour de cassation. Cass., 24 juin 1856, Boullé, S. 56.1.824, P. 57.505, D. 56.1.254) - C'était un argument, en ce sens qu'il ne changeait pas la question à juger, qui était celle de savoir si le protêt était ou n'était pas tardif. Mais pour que l'argument ne devint pas un moyen nouveau, il faliait que la disposition législative invoquée ne fût, ni contestée, ni contestable; car, s'il y avait eu contestation possible sur l'applicabilité de la loi invoquée, alors il y aurait eu une question nouvelle à juger, et, par conséquent, un moyen

nouveau.

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2885. Testament. Les juges auxquels on demande la nullité d'un acte comme contraire aux dispositions de la loi doivent, s'ils prononcent cette nullité, en admettre toutes les conséquences légales. Ainsi, les juges saisis de la demande du légataire institué par un premier testament à fin de nullité d'un second testament, comme fait par un mineur au profit de son tuteur, et tendant, par suite, à l'exécution du premier testament doivent, en annulant le second testament, conformément à l'art. 907, C. civ., l'annuler aussi dans son effet révocatoire. comme conséquence de l'incapacité du mineur pour donner à son tuteur, et cela bien que là captation, qui seule était articulée pour lui enlever cet effet révocatoire, n'ait point été établie. Le défaut d'annulation du testament dans son effet réve catoire peut donc être proposé contre l'arrêt devant la Cour de cassation et ne saurait être considéré comme moyen nouveau. Cass., 11 mai 1864, Bauquesne, [S. 64.1.261, P. 64.846, D. 64.1.187] 2885 bis. Usufruit. Ne saurait être considéré comme nouveau devant la Cour de cassation le moyen tiré de la violation de l'art. 610, C. civ. (sur le mode de contribution du légataire de l'usufruit au paiement d'une rente viagère), alors que le de

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que ce moyen repose sur les termes et la portée d'un document qui n'a pas été invoqué devant les juges du fond, et dont ils n'ont pu apprécier la portée (C. civ., art. 1338). Cass., 28 nov. 1888, Bardou, [S. 89.1.80, P. 89.1.165]

2895. Il a été jugé encore, conformément à ces principes, que le moyen tiré de ce que l'existence d'une précédente faillite, clôturée pour insuffisance d'actif, mettait obstacle à la déclaration d'une nouvelle faillite, était non-recevable quand on prétendait l'établir à l'aide de pièces produites pour la première fois devant la Cour de cassation.

2896. — ... Qu'une partie qui, actionnée en destruction d'arbres placés en dehors de la distance légale, a excipé, devant les juges du fait d'un usage contraire à la servitude établie par l'art. 671, C. civ., sans préciser cet usage ni ses conditions d'existence, ne peut reproduire son exception devant la Cour de cassation, en produisant, pour la première fois, les justifications et documents de nature à établir que l'usage prétendu a réellement existé. Cass., 24 mai 1864, Roussel-Leroy, [S. 64.1.411, P. 64.1108, D. 64.1.229] 2897.

...

2886. Le moyen peut être déclaré non-recevable, non seulement comme étant nouveau par lui-même, c'est-à-dire comme n'ayant pas été soumis aux juges du fond, mais encore, alors qu'il aurait été proposé à ceux-ci et rejeté par eux, comme s'appuyant sur la production de documents qui n'ont pas été présentés à leur examen et qui sont introduits dans le débat pour la première fois devant la Cour de cassation. C'est là, à proprement parler, une seconde branche de l'exception de nouQu'on ne peut produire pour la première fois veauté; elle repose toujours sur cette idée qu'on ne peut repro- devant la Cour de cassation des pièces destinées à justifier de cher aux juges d'avoir mal jugé et casser leur décision quand l'inscription sur les listes électorales d'un citoyen dont la radiaon ne les a pas mis à mème d'en rendre une autre. tion a été prononcée par le jugement attaqué. Cass., 14 mai 2887. Nous avons, précédemment, en examinant les 1849, Grebert, [D. 49.1.259]; — 6 mars 1850, Beck, [D. 50.1. moyens ayant un caractère d'ordre public, indiqué des décisions 61] de la Cour de cassation que nous devons rappeler au point de 2898. Qu'on ne saurait être admis à produire utilevue particulier qui nous occupe en ce moment. Ainsi en est-il ment devant la Cour de cassation des documents qui n'ont pas des arrêts qui jugent qu'on ne peut invoquer le principe de la été soumis aux juges du fond, dans le but de faire annuler la séparation des pouvoirs administratif et judiciaire quand c'est décision par laquelle ils ont invalidé un transport de créance, pour la première fois que, devant la Cour de cassation, on pro- comme ne présentant ni signification de la cession au débiteur duit des documents d'où pourrait résulter la violation prétendue. cédé, ni acceptation par lui dans un acte authentique. - Cass., Cass., 11 nov. 1867, Cie du canal du Midi, (S. 68.4.171, P. 68. 28 août 1878, Syndic Bussidan, [S. 79.1.156, P. 79.388, D. 79. 396, D. 68.1.426]; — 9 mai 1868, Cie des salines de l'Est, [S. 69.1. 1.62 414, P. 69.269, D. 68.1.486]; 2899. 2 juin 1873, Ville de Lons-leQue, lorsqu'un arrêt se fonde, pour repousser Saulnier, S. 76.1.349, P. 76.853, D. 75.1.418]. - V. suprà, n. la prétention des demandeurs, sur l'appréciation de divers titres et documents du procès, ces mêmes parties, pour discuter devant la Cour de cassation l'appréciation faite par les juges du fond, s'appuiraient vainement sur la production de l'expédition authentique d'un acte non soumis aux juges d'appel. déc. 1877, Habitants de Fréchamps, [D. 79.1.198] 2900. Que lorsqu'il est déclaré, en fait, par le jugement attaqué, qu'un entrepreneur de travaux publics n'a fourni aucune justification de l'exécution des formalités exigées par le décret du 8 févr. 1868, préalablement à la prise de possession des terrains appartenant au défendeur éventuel, on ne saurait opposer à cette déclaration des documents produits pour la première fois devant la Cour de cassation. Cass., 23 juin 1879, Valentin-Adam, [S. 80.1.127, P. 80.274, D. 80.1.28]

...

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2369 et s.
2888. De l'arrêt qui décide qu'à défaut de toute produc-
tion devant les juges du fond, on ne peut soutenir pour la pre-
mière fois, devant la Cour de cassation, que les juges du fait
auraient dû annuler d'office la cession d'un traité concernant
un service public. Cass., 28 déc. 1880, Crouillère, [S. 82.1.99,
P. 82.1.228, D. 81.1.177]

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2889. -... Des arrêts qui jugent qu'on ne peut proposer pour la première fois, devant la Cour de cassation, le moyen tiré de la déchéance d'un appel formé après l'expiration du délai légal, alors que les pièces établissant l'existence de la signification qui a fait courir ce délai n'ont pas été soumises à la cour d'appel. Cass., 10 juin 1857, Diab, [S. 59.1.75, P. 57.934, D. 59. 1.194); 11 mars 1867, Lemaire, [S. 67.1.300, P. 67.767, D. 67.1.352]; 5 janv. 1875, Syndic Baloute, [S. 76.1.157, P. 76. 373, D. 76 1.15]; — 11 juill. 1883, Chalon, (D. 84.1.61]; mars 1885, Commune de Sourdon, [S. 88.1.148, P. 88.1.358]; 10 nov. 1886, Commune de Saint-Nazaire, [D. 87.1.209] V. suprà, n. 2624. 2890.

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On ne peut, en Cour de cassation, faire valoir un moyen résultant d'une pièce dont on n'a pas fait usage devant les premiers juges. Cass., 29 avr. 1818, Archambault, [S. et P. chr. 2891.-... Surtout, si elle est d'une date postérieure à l'arrêt dénoncé. Cass., 29 juin 1825, Canonne, [S. et P. chr.] 2892. — Jugé pareillement que des documents non produits en première instance et en appel ne peuvent être pris en considération par la Cour de cassation pour la justification d'un arrêt renfermant une violation de loi, abstraction faite de ces documents; la cassation de l'arrêt doit être prononcée sans égard à la production des nouvelles pièces. Cass., 4 févr. 1835, Préfet du Haut-Rhin, [S. 35.1.94, P. chr.] 2893. - Une partie n'est pas recevable à proposer, devant la Cour de cassation, le moyen tiré de l'existence d'un titre que l'arrêt attaqué n'a ni visé ni appliqué, lorsqu'il n'est pas justifié que le titre ait été expressément invoqué dans les conclusions prises par elle devant les juges du fond. Cass., 26 janv. 1875, Pissou, S. 75.1.121, P. 75.281]; - 30 mai 1888, Ville de Marseille, [S. 89.1.299, P. 89.1.739]

2894. Est nouveau, et, par suite, irrecevable devant la Cour de cassation, le moyen tiré de la violation de l'art. 1338, relatif à l'infirmation ou ratification d'une obligation nulle, lors

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2902. — Dans la rigueur des principes, on pourrait soutenir que toutes les ouvertures de cassation se réduisent à une seule classe, savoir la violation de la loi. En effet, comme le fait très-bien remarquer Poncet (Tr. des jugem., t. 2, p. 280), soit qu'un tribunal ait méconnu les règles de sa compétence, ou franchi les bornes de son autorité, soit qu'il ait négligé l'observation des formes judiciaires ou qu'il n'ait pas annulé les irrégularités de ce genre qu'auraient commises les parties ou les officiers ministériels en leur nom; soit qu'en statuant au fond il se soit mis en contradiction formelle avec la loi, ou qu'il en ait fait une fausse application, soit même qu'un tribunal souverain ayant déjà jugé la contestation dans un sens, cette même contestation soit ensuite jugée par un autre tribunal souverain dans un sens tout opposé; il y a toujours, et dans tous ces cas

sans distinction, une contravention expresse aux lois d'organisation judiciaire, ou aux lois de procédure, ou aux lois qui garantissent ou confèrent les droits de toute nature, en matière civile, criminelle ou commerciale, ou enfin à la loi positive qui fait de la chose jugée une présomption juris et de jure, inattaquable et indestructible. Toutefois, comme ces moyens divers de recours, quoique présentant un caractère commun, comportent dans l'application des règles différentes, il est naturel de les distinguer les uns des autres et de les ranger dans des catégories à part, suivant leur nature et leur spécialité.

2903. Rappelons au début de cette étude que la juridiction de la Cour de cassation diffère essentiellement de celle qu'exercent les autres tribunaux qui lui sont subordonnés; qu'elle s'exerce moins dans un intérêt privé que dans l'intérêt public; qu'elle ne connait pas du fond des affaires; enfin qu'elle est appelée à réprimer les contraventions à la loi, et non à connaitre du mal jugé.

2904.-- Pour être utilement invoquées, les ouvertures à cassation doivent rentrer dans l'une des formules suivantes employées par la Cour de cassation pour motiver ses arrêts quand elle donne raison au pourvoi: Violation de la loi, fausse application de la loi, manque de base légale.

SECTION I.

Violation de la loi.

2905. Il semble que ces termes n'aient pas besoin de commentaire et que, par eux-mêmes, ils disent suffisamment ce que l'on doit entendre. Lorsqu'en jugeant le procès au fond, les juges s'écartent d'un texte précis ou qu'ils appliquent à la cause un texte qui ne devrait point s'y rapporter, dans l'un et l'autre cas ils violent ouvertement la loi, et leur décision peut être déférée à la Cour de cassation. « Mais remarquons bien, dit Poncet (t. 2, p. 294), que pour autoriser ce recours il faut qu'il y ait eu contravention à une disposition formelle de la loi écrite; car si le tribunal n'avait fait que se mettre en opposition avec un principe de jurisprudence, ou avec un usage reçu, ou avec une loi abrogée, on ne pourrait pas dire qu'il a contrevenu formellement à la loi. >>

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2905. Retenons ce principe qui domine toute la matière, à savoir que, pour qu'il y ait ouverture à cassation il faut qu'il y ait contravention à une disposition formelle de la loi écrite. C'est la règle qui a été formulée d'une facon précise par l'art. 66 de la constitution du 22 frim. an VIII, ainsi conçu : « Le Tribunal de cassation ne connait pas du fond des affaires, mais il casse les jugements rendus sur des procédures dans lesquelles les formes ont été violées, ou qui contiennent quelque contravention expresse à la loi, et il renvoie le fond du procès au tribunal qui doit en connaitre ». Violation des formes prescrites par la loi, ou violation, au fond, d'une disposition expresse de la loi, cela comprend, en résumé, toute la mission de la Cour de cassation qui ne peut, en effet, anéantir une décision de dernier ressort qu'autant qu'il y a contravention à une loi formelle dans la forme ou dans le fond.

2907. Ces principes étaient d'ailleurs ceux qui régissaient l'ancien Conseil des parties. Suivant Tolosan, pour qu'il puisse y avoir ouverture à cassation, il faut : 1° qu'il y ait une loi vivante et connue des juges que l'on accuse d'y avoir contrevenu; 2o que la disposition de leur jugement soit contradictoire avec celle de cette loi; 30 qu'il n'y ait rien dans le fait particulier de l'affaire qui puisse faire disparaitre cette contravention. On peut dire que ces principes sont encore exacts aujourd'hui.

2908. Il faut, dit la constitution de l'an VIII, pour qu'il y ait ouverture à cassation, qu'on puisse invoquer une contraven tion expresse à la loi. Sur la question de savoir quelles conditions sont nécessaires pour qu'une loi existe et, par suite, pour qu'on soit autorisé à se prévaloir de sa violation devant la Cour de cassation, V. infrà, vo Loi. V. aussi suprà, vis Arrêt du Conseil, Arrété administratif, et infrà, vis Chemins de fer, Culte, Reglement administratif ou de police, Traité international, etc. 2909. - La violation d'un usage peut-elle donner ouverture à cassation? Elle le pouvait sous l'empire de l'ancienne jurisprudence; elle ne le peut plus sous l'empire de notre nouvelle jégislation. Autrefois, en effet, on admettait qu'on pouvait casser

pour violation d'un usage constaté. Cass., 23 fruct. an XI, Royon, [P. chr.]

2910. On admettait aussi que l'usage pouvait abroger la loi, et on en concluait qu'il n'y avait plus à se prévaloir de la violation de la loi abrogée comme ouverture de cassation. C'est ce qu'enseignait d'Aguesseau (dans une Lettre au premier président du parlement de Toulouse, 29 oct. 1736) en ces termes : <«< Toutes les lois sont sujettes à tomber en désuétude; et il est bien certain que, quand cela est arrivé, on ne peut plus tirer un moyen de cassation d'une loi qui a été abrogée tacitement par un usage contraire. >>

2911. - Ces principes ne sont plus suivis aujourd'hui. L'usage est quelque chose de si vague, de si difficile à bien constater, que ce serait aller contre le but du législateur que de permettre de se pourvoir en se fondant sur ce qu'il aurait été contrevenu à l'usage. Berriat Saint-Prix, t. 2, p. 533, note 15; Merlin, Rép., vis Interlocutoire, sect. 2, § 3, art. 1, n. 33, et Péremption, §1. Ici, d'ailleurs, trouve encore son application la règle qui domine toute la matière des ouvertures à cassation, et d'après laquelle on ne peut se pourvoir que pour une violation expresse à la loi; or, l'usage n'est pas la loi, à moins qu'il ne s'y rattache par une disposition formelle.

2912. Il ne suffirait point qu'une disposition de la loi, relativement à la matière qu'elle réglemente, se référât aux usages locaux, comme l'a fait notamment le Code civil dans les art. 663, 671, 674, 1135, 1159, 1736, 1758, 1759, pour qu'on pût invoquer la violation des usages comme moyen de cassation. La plupart de ces usages ont été consignés dans des articles de nos anciennes coutumes; ainsi en est-il pour ce qui concerne la nature et la hauteur de la clôture entre héritages voisins (art. 663, C. civ.), la distance à laquelle on peut planter les arbres de haute tige (art. 671), ou creuser un puits, une fosse d'aisances, etc. (art. 674). IV. Codes Tripier, vo Usages locaux, p. 1398 et s. On ne pourrait manifestement être admis, devant la Cour de cassation, au cas où une décision aurait jugé contrairement à l'usage consigné dans une coutume, à invoquer, d'une part, la violation de l'article du Code qui se réfère aux usages locaux, d'autre part, la violation de la coutume qui a constaté cet usage, par la raison que si cette coutume peut valoir pour la constatation de l'usage dans le passé, elle ne saurait valoir pour l'avenir, l'usage ayant pu se modifier. Il y a là une question de fait qui rentre dans l'appréciation souveraine des juges du fond et, dans de telles conditions que leur décision ne saurait, en ce point, être soumise au contrôle et à la censure de la Cour suprême. Comme l'ont très-bien dit Duranton (t. 1, n. 101 et 102), et Demolombe (t. 1, n. 34), des usages qui ne sont pas consacrés par la loi écrite ne sauraient avoir force de loi; ils ne peuvent être que des éléments d'interprétation, soit de la loi elle-même, soit de la volonté des parties. Aubry et Rau, t. 1, p. 43, § 23; Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 1, p. 29, § 22,

texte et note 7.

2913. De même, l'art. 2, L. 9 juill. 1889, après avoir édicté l'abolition du droit de vaine pâture, porte: « Toutefois, dans l'année de la promulgation de la présente loi, le maintien du droit de vaine pàture fondé sur une ancienne loi ou coutume, sur un usage immémorial ou sur un titre, pourra être réclamé au profit d'une commune, etc. »; il est bien évident que la question de savoir si cet usage local immémorial existe est une pure question de fait qui ne saurait fournir ouverture à cassation. 2914. Il a été jugé, conformément à ces principes, que la violation d'un usage ou d'une jurisprudence qui ne repose sur aucun texte de loi, ne peut donner ouverture à cassation. Cass., 15 janv. 1812, Michel, S. et P. chr.7; 23 janv. 1816. Domaines, S. et P. chr.1; 29 juin 1836, Vasquez, P. chr.; 20 nov. 1837, Balguerie, [P. 39.2.191]; -7 mai 1839, Bonnaud, S. 39.1.353, P. 39.1.504]; — 3 juill. 1844, Fillou, S. 4. 1.667, P. 44.2.2237

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2915. Spécialement, que l'arrêt par lequel il est jugé que l'usage général et constant qui autorise un seul intéressé à recevoir les actes qu'un second notaire valide par sa signature, ne doit pas prévaloir contre le texte formel de la loi; puisque loin de contrevenir à une loi quelconque, il ne fait que s'y conformer. Cass., 7 mars 1839, précité. V. infra, vo Notaire. 2916. Que, lors même qu'un usage est consacré par le Code, il ne doit être considéré comme généralement obligatoire qu'autant qu'il est observé comme loi. Cass., 12 févr. 1861, Leduc, [S. 61.1.327. P. 61.556] - Amiens, 21 déc. 1821, Lan

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drieux, S. et P. chr.] Sic, Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 1, p. 23, § 22, note; Aubry et Rau, t. 1, p. 44, § 25. 2917. Que la question de savoir s'il existe un usage sur tel ou tel point de droit et quel est cet usage est une question de fait, abandonnée à l'appréciation des tribunaux, dont les décisions, à cet égard, ne sont pas soumises au contrôle de la Cour de cassation. Cass., 23 févr. 1814, Montigny, [S. et P. chr.j 24 juill. 1860, Lefranc, [S. 60.1.897, P. 61.52, D. 60.1.320] — Sic, Aubry et Rau, t. 1, p. 44, § 23.

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2918. Dans les contestations commerciales, les usages jouent un rôle assez considérable: usages de place, usages de port, etc.; mais là encore, la constatation des usages locaux, l'appréciation de l'influence qu'ils ont pu avoir sur les conventions rentrent dans le domaine des juges du fait et échappent au contrôle de la Cour de cassation.

2919. Jugé qu'on ne peut proposer comme ouverture à cassation, même la violation d'un usage de commerce. Cass., 14 août 1817, Gazay, [S. et P. chr.]

2920. - Les pouvoirs de la Cour de cassation pourraient, toutefois, s'exercer dans le cas où les juges du fond auraient donné à des usages commerciaux une importance excessive, par exemple s'ils les avaient fait prédominer sur les termes nets et formels d'une convention librement consentie, ou sur les principes de la loi commune.

2921. Ainsi, il a été jugé que l'arrêt qui, pour justifier l'application de l'art. 578, C. comm., se fonde sur un usage qui attribue au simple endos du connaissement l'effet d'une vente de marchandises, n'est pas à l'abri de la cassation. Cass., 11 févr. 1840, Rocca, [S. 40.1.565, P. 40.1.221] 2922. Que si les usages de commerce peuvent être invoqués dans le silence de la loi ou de la convention, ils ne sauraient autoriser le juge à méconnaître les effets que la loi attache à une convention dùment constatée. Cass., 26 mai 1868, Saint, [S. 69.1.33, P. 69.52, D. 68.1.471]; -30 déc. 1879, Lecomte-Dupond, [S. 80.1.199, P. 80.475, D. 80.1.108] 2923.Spécialement, que les juges ne peuvent, sous prétexte de se conformer à un usage local, décider qu'un locataire de sacs n'est tenu, en cas de perte de ces sacs, qu'au paiement d'une année de loyer en sus de leur valeur, quelle qu'ait été la durée de sa jouissance. C'est là méconnaitre les effets légaux du contrat de louage. Cass., 26 mai 1868, précité. 2924. Les usages commerciaux sont surtout invoqués en matière de ventes commerciales; suivant le lieu où le marché est conclu, il importe de savoir à quelles conditions la vente a dû être effectuée au poids net ou au poids brut — s'il y a une tolérance, quelles en sont les proportions; si au lieu d'être ellectuée au poids, la vente l'a été à la mesure, quelle est la capacité de cette mesure, etc. Au cas de contestation sur la question des usages de place ou de port, d'ordinaire, les parties cherchaient à établir ces usages à l'aide de pareres, autrement dit d'attestations délivrées par un certain nombre de négociants; mais il n'était point rare que chacune des parties présentat des parères attestant des usages contradictoires. On a pensé que le législateur devait intervenir pour constater et déterminer les usages, de telle sorte qu'en l'absence de convention, ces constatations s'imposassent aux parties et aux juges: de là la loi du 13 juin 1866.

2925. — La loi du 13 juin 1866, concernant les usages commerciaux, a eu pour but de constater ces usages en matière de ventes commerciales, et de leur donner ainsi force de loi, si on ne s'en est pas écarté par des conventions formelles. Son premier article est ainsi conçu: « Dans les ventes commerciales, les conditions, tares et autres usages indiqués dans le tableau annexé à la présente loi sont applicables dans toute l'étendue de l'empire, à défaut de convention contraire ». La première partie du tableau annexé à la loi indique les règles générales qui, à moins de conventions y dérogeant, seront censées avoir présidé aux ventes effectuées; la seconde partie trace les règles spéciales à certaines marchandises. Le projet de loi, a dit le rapport présenté au Corps législatif, réserve de la façon la plus nette et la plus précise la liberté des transactions, et les dispositions qu'il contient ne sont applicables qu'en l'absence de conventions contraires librement contractées entre les parties. De plus, ces dispositions ne sont que l'expression des usages, des besoins, des convenances du commerce, constatés dans de minutieuses enquêtes provoquées par les chambres de commerce elles-mêmes, qui y ont pris une part très-active, et définitiveREPERTOIRE. Tome IX.

ment formulée par une commission composée de délégués d'un certain nombre de ces chambres ». Il résulte de ces déclarations, comme du texte même de la loi, qu'au cas de convention, les stipulations qui y sont insérées forment la loi souveraine des parties; mais qu'en l'absence de convention, la loi, en y comprenant toutes les dispositions réglementaires qu'elle contient, reprend son empire, de telle sorte que la violation d'une de ces dispositions, quelle qu'elle soit, peut donner ouverture à cassation. V. infra, vo Certificat de coutume.

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2926. - De tout ce que nous avons exposé précédemment, et qui se résume dans l'obligation d'invoquer la violation d'un texte formel de loi pour qu'il puisse y avoir ouverture à cassation, il résulte clairement que la jurisprudence la plus constante, même conforme à la doctrine unanimement formulée par les auteurs, n'a aucune autorité au point de vue de la cassation, qu'elle n'en a pas plus, notamment, qu'un usage dont on entendrait se prévaloir; qu'on ne saurait être admis à proposer comme moyen de cassation la violation de ce qu'on est convenu d'appeler une maxime de jurisprudence. V. suprà, n. 2914. 2927. Il n'est point rare de voir figurer dans les formules de pourvois la violation de maximes qui se traduisent en un brocard de droit romain ou français. Quand ces maximes ne sont invoquées qu'accessoirement à la violation d'un texte indiqué, et pour mieux accentuer cette violation, nous n'avons rien à y redire; mais que si l'on prétendait, sans indication de texte, obtenir la cassation uniquement sur la violation de la maxime invoquée, on se placerait en dehors de la règle fondamentale qui, seule, peut donner à la Cour suprême le droit d'anéantir une décision de dernier ressort.

1.

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2928. Jugé, en conformité de la doctrine que nous avons exposée, que la fausse application d'un texte ne donne ouverture à cassation qu'autant qu'il en résulte la violation formelle de quelque loi. Cass., 14 nov. 1826, Bourbel, [S. et P. chr.] 2929. Que la violation d'une maxime de jurisprudence (telle la maxime Nemo auditur perire volens), ne peut constituer un moyen de cassation qu'autant que cette maxime est revêtue d'un caractère législatif. Cass., 29 déc. 1829, Lespès, [S. et P. chr.]; 23 sept. 1837, Brochet, (S. 39.1.803, P. 37.2.318] 2930. Qu'on ne peut proposer comme moyen de cassation la violation d'une maxime de jurisprudence, à moins que cette maxime ne repose sur un texte de loi. Cass., 29 juin 1836, Vasquez, [S. et P. chr.]

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2931.- Que la contravention aux lois peut seule donner ouverture à cassation; qu'ainsi, un jugement ne peut être cassé sur le seul motif qu'il serait contraire à la jurisprudence des arrêts. Cass., 18 vent. an XI, Meynard, [P. chr.]

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2932. Que la fausse application ou violation prétendue d'un point de jurisprudence ancienne, qui ne repose sur aucun texte précis de la loi, ne peut donner ouverture à cassation. Cass., 11 juin 1825, Rollande, [S. et P. chr.]; 13 juill. 1830, Dasque, P. chr.]; 27 déc. 1830, Sabourin, [S. et P. chr.] 2933. Spécialement, qu'il n'y a pas ouverture à cassation contre un arrêt qui, contrairement à l'usage et à une jurisprudence ancienne, a admis l'appel a minima du ministère public contre un jugement rendu conformément à ses conclusions. Cass., 11 juin 1825, précité.

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2937. Alors même qu'il s'agirait de la violation d'un arrêt de règlement rendu par un parlement. Cass., 23 janv. 1816, Roubier, S. et P. chr.] Sic, Berriat Saint-Prix, t. 2, p. 534, note 4.

2938. Mais, à l'inverse, on ne peut se plaindre en cassation de ce que la jurisprudence a été appliquée, lorsqu'aucun texte de loi ne contrarie cette application. - Cass., 2 mai 1836, Daubuisson, S. 36.1.942, P. chr.]

2939. Est donc à l'abri de la cassation l'arrêt qui, faisant application d'une ancienne jurisprudence à une cause antérieure

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