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cours formé contre un arrêt de la Cour de cassation. Il s'agissait de caractériser la nature de rentes foncières ou féodales. L'administration s'était formellement dessaisie de ces sortes de questions. La Cour de cassation, au contraire, avait jugé que l'autorité judiciaire n'était pas compétente pour en connaitre, que le litige appartenait à l'administration qui, d'ailleurs, refusait de s'en saisir. Le décret du 11 juin 1808 déclara sans effet et comme non avenu l'arrêt de la Cour de cassation et renvoya les parties devant elle, en état de pourvoi. Il est à peine besoin de dire qu'un pareil précédent n'a plus qu'un intérêt historique, les conflits entre les tribunaux administratifs et les tribunaux judiciaires, qu'ils aient un caractère positif ou négatif, étant aujourd'hui soumis à des règles et à une législation spéciales.

4769. — Il est bien entendu que les effets de l'arrêt rendu par la chambre des requêtes, soit qu'il s'agisse d'un arrêt d'admission, soit qu'il s'agisse d'un arrêt de rejet, sont dominés par la règle générale en vertu de laquelle les décisions de justice ne profitent ou ne nuisent qu'aux parties qui sont à l'instance; or, devant la chambre des requêtes, ne sont à l'instance que la partie au nom de laquelle la requête en pourvoi a été présentée, et la partie ou les parties contre lesquelles le pourvoi a été dirigé. 4770. Mais l'arrêt ne termine pas le débat au regard des autres parties en cause au cas où, vis-à-vis d'elles, les délais du pourvoi ne sont pas expirés; aucune disposition de loi n'oblige la partie qui a succombé dans une instance à diriger son pourvoi contre tous ceux qui bénéficient de la décision rendue; elle peut choisir parmi ses adversaires et ne diriger sa requête, d'abord, que contre l'un d'eux, quitte à s'adresser plus tard aux autres si ceux-ci n'ont pas pris, par la signification de l'arrêt, soin de faire courir les délais; il ne pourrait y avoir d'exception que pour le cas d'indivisibilité; il est manifeste que l'arrêt de rejet rendu sur pourvoi formé en matière indivisible doit profiter à toutes les parties dont l'intérêt est compris dans l'objet indivisible sur lequel il a été statué.

4771. De même, l'effet de la décision intervenue devant la chambre des requêtes sur le pourvoi doit être exactement limité à la décision contre laquelle le pourvoi a été dirigé. Nous avons dit précédemment (V. suprà, n. 1835), qu'au cas de rejet du pourvoi formé contre un jugement ou un arrêt, ce rejet était définitif et avait pour résultat de donner au jugement ou à l'arrêt l'autorité de chose irrévocablement jugée, que les moyens invoqués fussent pris du fond ou de la forme; mais encore fautil que l'effet du rejet ne dépasse pas la décision attaquée. Ainsi, dans le cas où le pourvoi n'aurait été dirigé que contre une décision interlocutoire ou provisionnelle, le rejet qui serait prononcé sur un pourvoi limité de la sorte ne saurait avoir pour conséquence d'enlever au demandeur en cassation le droit de former ultérieurement un pourvoi contre le jugement ou l'arrêt définitif intervenu sur le fond même du litige.

4772. — Nous ne parlons que des décisions interlocutoires ou provisionnelles; les décisions simplement préparatoires ne pouvant être frappées d'appel qu'en même temps que les jugements ou arrêts définitifs, et le pourvoi en cassation n'étant recevable qu'au regard des jugements ou arrêts contre lesquels n'existe plus d'autre mode de recours, il ne peut être question ici de ces sortes de décisions. - V. suprà, n. 700 et s.

4773. Le rejet du pourvoi par la chambre des requêtes entraîne la condamnation à l'amende, c'est-à-dire l'attribution au Trésor public de la somme qui a dû être consignée pour que le pourvoi put être examiné; nous nous sommes précédemment préoccupés de la consignation de l'amende, au point de vue de la recevabilité du pourvoi et nous avons expliqué dans quelles conditions cette consignation devait être effectuée; nous devons nous préoccuper ici des conditions dans lesquelles intervient la condamnation à l'amende comme conséquence accessoire du rejet de la requête en pourvoi.

4774. C'est encore au règlement de 1738 qu'il faut demander l'énoncé de ces conditions. L'art. 25, tit. 4, 1re part., porte: « En cas que, sur le rapport de la requête en cassation, le demandeur se trouve non-recevable ou mal fondé dans sa demande, il sera rendu arrêt par lequel le demandeur sera débouté de sa demande ou déclaré non-recevable, s'il y échet, et, dans l'un et l'autre cas, il sera condamné par le même arrêt en l'amende de 150 livres ou de 75 livres, suivant la distinction portée par l'art. 5 ci-dessus >>. V. suprà, n. 203.

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4775. Aux termes de l'art. 36 du Règlement de 1738,

<«<l'amende portée par l'article précédent ne pourra être remise, ni modérée, sous quelque prétexte que ce soit; mais elle pourra être augmentée, s'il est ainsi ordonné, en statuant sur ladite demande en cassation ». La dernière partie de cet article est abrogée en vertu du principe qui a aboli toutes les amendes discrétionnaires (V. suprà, v° Amende, n. 308); mais la première subsiste et conserve toute son énergie.

4776. Le demandeur en cassation qui se désiste de son pourvoi, n'est pas fondé à demander la restitution de l'amende consignée, laquelle reste ainsi acquise au Trésor public; la restitution ne devant avoir lieu qu'au cas de cassation de la décision attaquée. Cass., 24 févr. 1835, Maze. [S. 35.1.273, P. chr.]; 24 févr. 1835, Leroux, [Ibid.]; 22 juin 1836, Desmortiers, [S. 36.1.927, P. chr.]; 27 févr. 1850, Chantraine, [S. 50.1.384, P. 50.2.49, D. 50.1.184]

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4777. Toutefois, il a été jugé que l'amende consignée sur un pourvoi formé contre un arrêt doit être restituée, lorsque l'arrêt attaqué ayant été annulé par la juridiction compétente, à la suite d'un conflit élevé par l'autorité administrative, le demandeur en cassation se désiste de son pourvoi, comme étant dès lors sans objet. Cass., 4 juill. 1826, Bérard, [S. et P. chr.] 4778.-... Que, lorsque plusieurs demandeurs en cassation ont consigné chacun une amende, quoiqu'ils eussent tous le même intérêt, qu'ils aient procédé conjointement, et qu'ainsi une seule amende fut suffisante, ils peuvent, en cas de rejet, demander la restitution des amendes inutilement consignées. - Cass., 3 août 1825, Les assurances de Nantes, [S. et P. chr.] 4779. — L'arrêt d'admission, qui n'est qu'une décision provisoire, comportant un examen par la chambre civile, laisse les choses en l'état relativement aux sommes consignées à titre d'amende; la consignation demeure jusqu'à ce que la chambre civile ait statué sur le mérite du pourvoi.

4780. - Le principe général, d'après lequel toute partie qui succombe doit être condamnée aux dépens, reçoit son application devant la Cour de cassation comme devant les autres juridictions. La partie, dont le pourvoi est rejeté par la chambre des requètes succombe dans son instance en pourvoi; conséquemment, elle est condamnée aux dépens de cette instance.V. infrà, vo Frais et dépens.

4781. L'arrêt d'admission, par cela même qu'il autorise le demandeur à porter son pourvoi devant la chambre civile, a pour conséquence de le mettre en demeure de notifier la décision intervenue devant la chambre des requètes, dans le délai imparti par la loi, à la partie contre laquelle le pourvoi a été dirigé, avec assignation à comparaitre devant la chambre civile. - V. suprà, n. 1417 et s.

4782. Il faut assimiler aux arrêts de rejet proprement dits les arrêts prononçant la déchéance du pourvoi, soit qu'il ait été formé en dehors des délais, soit que le demandeur ait omis d'accomplir quelqu'une des formalités exigées par la loi à peine de nullité, telles que la consignation de l'amende, la production des pièces nécessaires, etc. (V. suprà, n. 8 et s.), et aussi les arrêts donnant acte du désistement du pourvoi (V. suprà, n. 1035 et s.). Dès lors que ces sortes de décisions ont pour conséquence de faire disparaître le recours formé contre le jugement où l'arrêt en dernier ressort, elles ont le même effet que les arrêts de rejet et doivent leur être assimilées.

4783. - Il faut encore signaler, en dehors des arrêts d'admission et de rejet, une sorte d'arrêts qui interviennent sur une matière spéciale placée dans les attributions de la chambre des requêtes nous voulons parler des règlements de juges. Sur ce point, V. infrà, vo Réglement de juges.

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4784. La chambre civile ne rend, à proprement parler, que deux sortes d'arrêts des arrêts de rejet et des arrêts de cassation. Nous répétons ici une observation déjà présentée à propos des arrêts de rejet rendus par la chambre des requêtes, à savoir qu'il faut comprendre dans cette catégorie les arrêts prononçant la déchéance du pourvoi, ou donnant acte du désistement du pourvoi, en un mot, toutes les décisions qui ont pour résultat d'écarter le recours exercé contre la décision attaquée.

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SECTION I.

Arrêts de rejet.

4785. Les arrêts de rejet rendus par la chambre civile, contrairement à ceux qui sont rendus par la chambre des requêtes (V. suprà, n. 4748), comportent la rédaction de qualités qui sont rédigées par le conseiller rapporteur. L'arrêt n'est plus simplement inscrit au pied de la requête en pourvoi; il est consigné dans une minute séparée. Exception, toutefois, est faite en matière électorale; l'arrêt, à la chambre civile comme à la chambre des requêtes, est inscrit, sans qualités, à la suite du pourvoi. 4786. Les arrêts de rejet proprement dits, les arrêts prononçant déchéance ou donnant acte du désistement du pourvoi ne produisent point, quand ils sont rendus par la chambre civile, des effets différents de ceux produits quand ils sont rendus par la chambre des requêtes. Les uns et les autres ont pour résultat de donner irrévocablement à la décision attaquée l'autorité de la chose jugée. V. suprà, n. 4755 et s.

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d'autres parties demanderesses en cassation, s'est pourvu par
une requête distincte, et a consigné une amende, indépendam-
ment de celle qui avait été consignée par ses cointéressés, a
droit, en cas de rejet du pourvoi, à la restitution de cette
amende, encore bien que son pourvoi soit fondé sur un moyen
distinct et différent. Cass., 3 avr. 1839, Darcel, [S. 39.1.257,
et la note de G. Massé, P. 39.1.587]
4803. Que, lorsque, sur deux pourvois ayant un objet
commun et indivisible, il a été consigné une amende pour cha-
cun d'eux, la restitution de l'une de ces amendes doit être or-
donnée, au cas de rejet des pourvois. Cass., 29 nov. 1853,
Bienaymé, [S. 55.1.135, P. 55.1.427] — Sur la question de sa-
voir combien il doit être déposé d'amendes au cas où il y a plu-
sieurs demandeurs, V. suprà, n. 325 et s.

...

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4804.... Que restitution doit être ordonnée, en cas de rejet du pourvoi, de l'amende consignée pour un pourvoi surabondamment formé contre des chefs accessoires de la décision attaquée, en réalité compris dans le pourvoi principal. — Cass.,

4787. Si, en principe, les arrêts de rejet rendus par la Juin 1852, Pantard, [D. 54.1.433]

chambre civile produisent les mêmes effets que ceux rendus par la chambre des requêtes, nous devons signaler toutefois, d'une part, une aggravation dans la condamnation pénale accessoire, c'est-à-dire dans le chiffre de l'amende qui doit être prononcée contre le plaideur succombant dans son pourvoi, et une condamnation accessoire que ne comportait pas le rejet prononcé par la chambre des requêtes, nous voulons parler de l'indemnité qui doit être allouée au défendeur.

4788-4797. L'art. 35, tit. 4, 1re part. du règlement de 1738 porte: « Le demandeur en cassation qui succombera dans sa demande, après un arrêt de soit communiqué, sera condamné en trois cents livres d'amende envers Sa Majesté, et en cent cinquante livres envers la partie, si l'arrêt ou le jugement dont la cassation était demandée, a été rendu contradictoirement, et à la moitié seulement desdites sommes, si l'arrêt ou le jugement a été rendu par défaut ou par forclusion dans lesquelles sommes sera comprise celle qui aura été consignée par le demandeur en cassation, suivant l'art. 5 ci-dessus. » L'art. 5 est celui qui prescrit la consignation au moment de la formation du pourvoi.

4798. Cet article, ainsi qu'on le voit, édicte contre le demandeur qui succombe dans son pourvoi deux pénalités : une amende envers le Trésor public, une indemnité à payer au défendeur; nous nous occuperons plus loin de l'indemnité et des dépens; examinons d'abord ce qui concerne l'amende.

4799. I. Amende. L'art. 37 du règlement de 1738 porte « L'amende sera acquise de plein droit, quand même il aurait été omis d'y prononcer, et en quelques termes que l'arrêt qui rejettera la demande en cassation soit conçu, ce qui aura pareillement lieu dans le cas porté dans l'art. 25 ci-dessus ». L'art. 25 est celui qui prévoit le rejet par la section des mémoires ou des requêtes. On le voit, par les termes même employés, le législateur a voulu que l'avertissement donné au mécontent fùt de telle nature, qu'en aucun cas il ne pût espérer se soustraire à la pénalité édictée contre le plaideur téméraire.

4800. Disons, toutefois, que la condamnation à l'amende ne doit intervenir qu'au cas où le demandeur succombe complètement dans le pourvoi sur lequel la chambre civile a eu à se prononcer. Il arrive fréquemment, en effet, que cette chambre rejette sur un certain nomore de moyens et casse sur les autres, c'est-à-dire, qu'elle ne prononce qu'une cassation partielle; cette cassation suffit, quelque minime que soit l'importance du chef qui a entraîné la cassation, ce chef ne concernâtil qu'une partie accessoire telle que les dépens, pour que la restitution de l'amende dût être ordonnée. Dès lors, en effet, que, sur un point quelconque, le pourvoi est reconnu bien fondé, on ne saurait punir la partie de l'avoir formé.

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4801. De même, la condamnation à l'amende ne doit pas atteindre plus de plaideurs qu'il n'est nécessaire, et dépasser l'intérêt qui est réellement en jeu dans l'instance. Ainsi, il a été jugé que bien que le pourvoi formé par un créancier contre l'arrêt qui fait grief à son débiteur doive être rejeté, et le demandeur condamné aux dépens, alors que le débiteur s'est pourvu lui-même, la restitution de l'amende consignée par le créancier peut être ordonnée par la Cour. Cass., 10 janv. 1855, Dejouye-Desroches, [S. 55.1.15, P. 55.1.293, D. 55.1.169] 4802. Que celui qui, ayant un intérêt commun avec

4805. La jonction de deux pourvois pour être statué par un seul et même arrêt n'entraine pas nécessairement la restitution d'une des amendes. Cette restitution peut, sans doute, être demandée et ordonnée; mais elle n'est pas de droit. Il se peut très-bien que les pourvois, quoique joints, conservent un caractère distinct, auquel cas les deux amendes doivent demeurer consignées et acquises au Trésor public. C'est à la Cour qu'il appartient de décider la question. V. Cass., 1er avr. 1889, Chargeurs réunis, [S. 91.1.534, P. 91.1.1297, D. 90.1.257) 4806. De même que, devant la chambre des requêtes, le désistement du pourvoi ne peut éviter au demandeur la condamnation à la simple amende édictée par l'art. 25 du règlement, de même le désistement produit après la signification de l'arrêt d'admission et l'assignation devant la chambre civile ne saurait empêcher la condamnation à la double amende édictée par l'art. 36, si cette chambre est appelée à statuer.

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4807. Nous faisons cette restriction, par le motif que si le désistement a été accepté par le défendeur et que, d'un commun accord, l'affaire ayant été retirée du rôle, la Cour n'ait pas eu à rendre arrêt, comme il n'y a de consignée que l'amende de 150 fr. qui doit être déposée au moment de la formation du pourvoi, c'est seulement cette somme qui est acquise au Trésor public. Pour que la partie pût être contrainte à verser une nouvelle somme de 150 fr., il faudrait un ordre de justice; or, cet ordre n'existant pas dans les conditions que nous venons d'indiquer, le recouvrement est impossible. Sur le désistement du pourvoi, V. suprà, n. 1035 et s.

4808. L'amende prononcée par la chambre civile, lorsqu'elle rejette le pourvoi, est double de celle prononcée par la chambre des requêtes (V. suprà, n. 203 et s.). Un arrêt de déchéance du pourvoi rendu par la chambre civile aurait pour conséquence, comme un arrêt de rejet proprement dit, d'entrainer la condamnation à la double amende. Il en serait ainsi, notamment, au cas où la déchéance serait prononcée pour signification de l'arrêt d'admission après l'expiration des délais impartis par la loi. 4809. En certaines matières, telles que l'expropriation pour cause d'utilité publique, les pourvois formés en matière électorale, les recours arrivent directement devant la chambre civile, sans subir l'épreuve préalable de l'examen par la chambre des requêtes; quel est l'effet de ce mode de procéder relativement à l'amende?

4810. Nous avons vu (suprà, n. 221) qu'en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, l'obligation de consigner l'amende existe comme en toute autre matière, ce qui veut dire qu'aucune exception n'est faite à la règle en vertu de laquelle la partie qui succombe dans son pourvoi doit être condamnée à l'amende.

4811. Mais, par cela même que les affaires d'expropriation sont portées directement devant la chambre civile, elles ne comportent pas la double amende à laquelle est soumis le demandeur en cassation qui succombe devant la chambre civile, apres examen de la chambre des requêtes; c'est une seule amende qui est prononcée. Cass., 9 janv. 1839, Riant, S. 39.1.129, P. 46.2.657] 4812. De plus, si le pourvoi n'a été dirigé que contre le jugement d'expropriation, comme les expropriés ne sont pas appelés à ce jugement, il y a lieu de l'assimiler, quant à l'amende à

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consigner, aux jugements par défaut; par suite, la consignation. n'est que de 75 fr., et c'est à ce chiffre qu'est réduite la condamnation à l'amende, au cas de rejet du pourvoi. arrêt. V. suprà, n. 223.

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Même

4813. Si le pourvoi est formé contre la décision du jury d'expropriation, l'amende sera de 150 ou de 75 fr., suivant que, devant le jury, le débat aura été contradictoire ou que le demandeur en cassation ne se sera pas présenté. — Cass., 12 déc. 1882, Levesque et Polo, [S. 84.1.294, P. 84.1.703, D. 84.1.164] 4814. Nous venons de distinguer le pourvoi formé contre le jugement d'expropriation et le pourvoi formé contre la décision du jury; il se peut qu'il l'ait été en même temps contre l'une et l'autre de ces deux décisions. Mais alors, s'il est dirigé distinctement contre le jugement d'expropriation et contre la décision du jury, c'est-à-dire, contre des décisions émanant de juridictions différentes, deux amendes doivent être consignées pour que le pourvoi soit déclaré recevable, et, par suite, au cas de rejet, condamnation à une double amende doit être prononcée. Même arrêt.

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4815. Si le pourvoi est déclaré non-recevable pour défaut de consignation d'amende, le demandeur en cassation doit être condamné, envers le Trésor, au paiement des amendes non consignées. Même arrêt.

4816. Lorsque le pourvoi a été rejeté par la chambre civile et que le demandeur a été condamné à l'amende de 300 fr. envers le Trésor public, comme il n'y a pas de consignation d'amende supplémentaire pour les affaires dans lesquelles il y a eu admission et que, par suite, la consignation n'est que la moitié de l'amende prononcée, il y a lieu, de la part de l'administration de l'enregistrement, à recouvrement du surplus; dans ce but, un extrait de l'arrêt portant condamnation à l'amende est remis par le greffe au receveur de l'enregistrement, lequel poursuit, contre les condamnés solvables, le recouvrement complet de l'amende.

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4817. L'indemnité attribuée au défendeur, par l'art. 36 du Règlement de 1738, a pour but de le dédommager des frais que doit ou peut lui occasionner le pourvoi formé contre une décision rendue à son profit. - V. suprà, n. 210 et s.

été déclaré non-recevable.

4818. L'indemnité est le corollaire du rejet. Dès lors qu'il y a cassation sur un pourvoi formé, il n'y a pas lieu à indemnité, même envers des parties vis-à-vis desquelles le pourvoi aurait Cass., 9 févr. 1887, Moureau, [S. 90.1.500, P. 90.1.1223, D. 87.1.269] 4819. Remarquons que, d'après les termes mêmes employés par le règlement, l'amende et l'indemnité sont deux choses corrélatives, intimement liées l'une à l'autre, ne pouvant exister l'une sans l'autre. Et, en effet, l'indemnité à payer au défendeur n'est, en quelque sorte, qu'une fraction de l'amende, si bien que là où il n'y a pas d'amende, il ne peut y avoir d'indemnité. V. Cass., 23 oct. 1888, Julienne frères, [S. 89.4. 409, P. 89.1.1022, D. 89.1.167] - Crépon, Du pourvoi en cassation, t. 3, n. 1906.

4820.- La règle en vertu de laquelle il n'y a de condamnation à l'indemnité, qu'autant qu'il y a condamnation à l'amende, souffre, toutefois, exception en ce qui concerne les administrations publiques. Celles-ci, ainsi que nous l'avons vu précédemment, ne sont pas condamnées à l'amende, mais elles sont, comme tout autre plaideur, condamnées à l'indemnité envers le défendeur.

4821. Et, en effet, si l'on comprend bien que le Trésor public ne puisse être condamné à se verser à lui-même une somme sortie de ses caisses, on ne comprendrait plus que, visà-vis du défendeur qu'il a témérairement obligé à des démarches et à des frais inutiles, sa qualité pût le soustraire aux réparations que la loi a cru devoir imposer aux autres plaideurs envers leurs adversaires. Le règlement de 1738 ne fait, sur ce point, aucune distinction.

4822. L'art. 436, C. instr. crim., a reproduit, quant à la partie civile qui succombe dans son recours en cassation, soit en matière criminelle, soit en matière correctionnelle ou de po lice, la disposition du règlement de 1738 relative à l'indemnité due au défendeur; cette partie doit être condamnée à une indemnité de 150 fr. et aux frais envers la partie acquittée. 4823. - L'administration forestière avait élevé la prétention, en tant qu'administration publique, d'être dispensée du paiement de cette indemnité. Mais la Cour de cassation a décidé que l'art. 436 assujettit les administrations ou régies de l'État, qui succom

bent dans leur recours en cassation, à la condamnation aux frais et à l'indemnité de 150 fr. envers le prévenu acquitté, absous ou renvoyé; que l'article ne distingue pas entre les diverses administrations publiques, non plus qu'entre le cas où celles-ci agissent pour obtenir des réparations civiles, et celui où elles provoquent l'application d'une peine. Cass., 28 août 1868, Drouet, [S. 69.1.189, P. 69.442, D. 68.1.510] Ces principes, bien qu'énoncés en matière criminelle, mais au regard d'une partie civile, sont manifestement applicables en matière civile. 4824.

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L'indemnité à payer au défendeur doit être prononcée en toutes les matières qui comportent la condamnation à l'amende, dans les matières spéciales comme dans les matières de droit commun. Ainsi en est-il particulièrement lorsqu'il y a rejet du pourvoi formé en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique. L'indemnité, suivant la règle générale, n'étant que la moitié du chiffre de l'amende, est de 37 fr. 50, au cas de pourvoi dirigé contre le jugement d'expropriation, et de 75 fr., au cas de pourvoi formé contre une décision contradictoire du jury. Elle ne serait que de la moitié de cette somme, si le demandeur Cass., en cassation ne s'était pas présenté devant le jury. 12 déc. 1882 (2 arrêts), Levesque, [S. 84.1.294, P. 84.1.703, D. 84.1.164]; 18 déc. 1882, Héricourt, [Ibid.]

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4825. La disposition de l'art. 35 du règlement de 1738 est absolue; elle ne distingue pas, relativement à l'allocation de l'indemnité qui doit être payée au défendeur, entre le cas où celui-ci a comparu sur l'assignation à lui donnée et le cas où il a fait défaut; on en a conclu que la condamnation à l'indemnité devait être prononcée, même au profit du défendeur défaillant. C'est là une jurisprudence constamment suivie par la chambre civile et appliquée en toutes matières comportant l'amende, notamment en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.

Cass.,

5 mars 1872, Commune de Vauxrenard, [S. 73.1.176, P. 73.406, D. 73.1.63]

4826. Mais, d'un autre côté, l'application de la disposition en vertu de laquelle le demandeur en cassation qui succombe dans son pourvoi doit verser une indemnité au défendeur doit être exactement maintenue dans les termes où elle a été formulée. Ainsi, c'est uniquement en faveur du défendeur que l'indemnité a été édictée et doit être prononcée, non, par exemple, ne faveur d'une partie intervenante. Il a été jugé, en ce sens, qu'il n'y a pas lieu, en cassant les arrêts attaqués, d'accorder l'indemnité de 150 fr. réclamée par l'adjudicataire sur surenchère d'un bien vendu par voie de saisie immobilière, appelé en cause devant la Cour de cassation par le saisi qui s'était pourvu contre l'arrêt rendu sur l'appel du jugement d'adjudication définitive. — Cass., 24 janv. 1843, Lamotte, [P. chr.]

4827.

--

On s'est posé la question de savoir si la partie qui succombe est tenue à autant d'indemnités qu'il y a de parties défenderesses, et l'on a répondu que, dans le silence gardé par le règlement sur cette question, l'affirmative ne peut souffrir de doute. Nous tirons, non point du silence gardé, mais du langage tenu par le règlement, une conséquence diamétralement opposée. Le règlement dit, d'une façon absolue, que le demandeur en cassation qui succombera dans sa demande, après un arrêt de soit communiqué, sera condamné en 300 livres d'amende envers Sa Majesté, et en 150 livres envers la partie; il ne se serait manifestement point exprimé de la sorte si le demandeur avait dû être condamné à payer autant d'indemnités de 150 fr. qu'il y aurait eu de parties défenderesses au procès. Avec le système que nous combattons, on arriverait à ce résultat bizarre qu'alors que l'indemnité ne doit être qu'une fraction de l'amende, cette fraction, en se multipliant par le nombre des défendeurs, pourrait arriver à dépasser énormément le chiffre de l'amende elle-même. Hâtonsnous d'ajouter que la pratique est depuis longtemps fixée dans le sens que nous soutenons être le seul en conformité avec les termes du règlement on ne condamne qu'à une seule indemnité qui se partage entre tous les défendeurs au pourvoi.

4828.III. Dépens. Le règlement de 1738 ne s'occupe pas de déterminer contre quelles parties devra être prononcée la condamnation aux dépens, dans le cas de rejet du pourvoi. Dans le silence du règlement, on applique aux arrêts rendus par la Cour de cassation la règle générale, d'après laquelle la partie qui succombe doit être condamnée aux dépens. Et, de fait, cette règle est d'une application tellement naturelle, sinon nécessaire, que l'on comprend aisément qu'on n'ait pas cru utile de la rappeler. Disons toutefois que, devant les autres juridictions, lorsque plusieurs parties succombent dans une instance, le juge a un

pouvoir discrétionnaire pour répartir entre elles les dépens, et que, devant la Cour de cassation, celle-ci, bien que, parmi les parties demanderesses dont le pourvoi est rejeté, il puisse y avoir des inégalités dans le rôle joué et, par suite, dans la responsabilité à supporter, s'est toujours refusée à faire une ventilation, une répartition des dépens. Nous verrons plus loin qu'il en est de même pour la condamnation aux dépens qui intervient contre les défendeurs au cas d'un arrêt de cassation. La formule dont la Cour se sert dans le dispositif de ses arrêts est simplement celle-ci : « condamne le demandeur ou les demandeurs aux dépens liquidés à la somme de... », ce qui, au cas où il y a pluralité de demandeurs, comporte la division égale entre eux tous du chiffre des dépens.

4829. La formule que nous venons de reproduire indique l'accomplissement de la prescription contenue dans l'art. 2, tit. 16, 2o part., qui porte: « Les dépens qui seront adjugés par les arrêts rendus par défaut ou par forclusion, et les frais et coûts des arrêts sur requête, lorsque la condamnation en aura été prononcée, seront liquidés par lesdits arrêts; et ce, sur un simple mémoire des frais faits par la partie qui obtiendra lesdits arrêts, lequel sera signé de son avocat, et remis au sieur rapporteur avant son rapport ». Ces formes ne sont plus suivies; le mémoire dont il est ici question n'est pas remis au conseiller rapporteur; en fait, les frais sont liquidés par les soins du greffier de la chambre civile.

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4830. Lorsque le préfet agit dans un intérêt public, spécialement, lorsqu'il conteste la qualité d'étranger prétendue par un individu inscrit sur les listes de recrutement, pour se soustraire aux obligations du service militaire, s'il succombe dans le pourvoi formé contre l'arrêt qui l'a débouté de ses conclusions, il ne doit pas être condamné aux dépens et, par suite, il ne peut davantage être condamné à l'indemnité envers le défendeur. Dans ces conditions, il en est, quant aux dépens, de l'arrêt de rejet rendu par la Cour de cassation, comme de l'arrêt d'acquittement rendu en matière correctionnelle; l'Etat supporte les frais faits par son représentant dans l'intérêt de la poursuite, et la partie défenderesse ceux faits dans l'intérêt de sa défense. Et, comme en regard d'une pareille situation, il n'y a de condamnation aux frais à prononcer contre aucune des parties en cause, ni contre le préfet, à cause de la qualité en laquelle il procède, ni contre le défendeur, parce qu'il gagne son procès, la Cour de cassation se borne à prononcer purement et simplement le rejet et garde absolument le silence sur la question des dépens. V. Cass., 26 févr. 1890, Préfet du Nord, [D. 90.1.326]

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SECTION II.

Arrêts de cassation.

4831. Parlons d'abord de la forme de ces arrêts. Elle diffère des arrêts de rejet par l'en-tête et par la fin de l'arrêt, autrement dit par la formule du dispositif; le reste, c'est-à-dire, tout ce qui concerne, à proprement parler, les qualités de l'arrêt, indication du nom des parties, de la qualité en laquelle elles agissent, énonciation du point de fait, de la procédure suivie est semblable dans les deux sortes d'arrêts. Même obligation pour le rapporteur d'écrire l'arrêt en entier de sa main. 4832. - Pour ce qui est de l'en-tête, tandis que les arrêts de rejet ne visent aucun article de loi, les arrêts de cassation, au contraire, non seulement visent les dispositions de loi que la Cour considère comme ayant été violées par l'arrêt dont elle casse la décision, mais encore reproduisent le texte même de ces dispositions. En procédant ainsi, on ne fait qu'obéir à une prescription formelle de la loi : « L'intitulé du jugement de cassation, dit l'art. 17, L. 27 nov. 1790, portera toujours, avec les noms des parties, l'objet de leur demande, et le dispositif contiendra le texte de la loi ou des lois sur lesquelles la décision sera appuyée. » 4833. Quant à la partie qui termine l'arrêt, celle qui suit les motifs, et qu'on appelle plus spécialement le dispositif, elle diffère nécessairement de la partie finale des arrêts de rejet, puisqu'elle a pour objet de consacrer une solution diametralement contraire. La formule adoptée par la chambre civile, et soigneusement maintenue dans son texte par les présidents et les rapporteurs, ayant une particulière importance, en ce sens

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qu'elle résume et condense en quelques lignes les effets de la cassation, nous croyons devoir la reproduire en son entier. 4834. Elle est ainsi conçue : « Par ces motifs, la Cour casse et annule l'arrêt rendu entre les parties par la cour d'appel de le ...., remet, en conséquence, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt, et pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de à ce désignée par délibération spéciale prise en la chambre du conseil; ordonne la restitution de l'amende consignée, condamne le défendeur aux dépens liquidés à la somme de en ce non compris les coût, enregistrement et signification du présent arrêt; ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera imprimé et sera transcrit sur les registres de la cour d'appel de en marge ou à la suite de l'arrêt cassé. Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre civile, dans son audience publique du ..... ». Suivent les signatures du conseiller rapporteur, du président et du greffier. Cette formule, que la Cour a fait imprimer à l'usage de ses membres, est remise à chaque magistrat au moment où il entre à la chambre civile.

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ท.

4835. Cette formule comporte toutefois, suivant les circonstances, certaines modifications. Telle que nous venons de la reproduire, elle ne s'applique qu'à la cassation totale, comprise dans ces termes dont rien ne vient restreindre la portée : « Casse et annule l'arrêt rendu par la cour de ....., en date du Lorsque la cassation n'est plus totale, mais simplement partielle, l'arrêt doit soigneusement expliquer, dans son dispositif, sur quels points porte la cassation et quels points, au contraire, de la décision attaquée demeurent acquis à la partie en faveur de laquelle ils ont été tranchés. La Cour le fait généralement en cette forme: « Casse et annule l'arrêt rendu par la cour de en date du mais seulement, en ce qui concerne suit l'indication des chefs sur lesquels porte la cassation; tous les chefs qui ne sont pas visés dans cette indication, demeurent, par cela même, à l'abri des effets de la cassation.

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4836. Quelques autres modifications de moindre importance résultent encore, par exemple, du cas où le demandeur est pourvu de l'assistance; alors le défendeur est condamné aux dépens envers l'administration de l'enregistrement et des domaines. S'il s'agit d'une affaire d'expropriation pour cause d'utilité publique, tous les actes faits en ces sortes d'affaires devant, en vertu de l'art. 58, L. 3 mai 1841, être visés pour timbre et enregistrés gratis, lorsqu'il y a lieu à la formalité de l'enregistre ment, on doit retrancher du dispositif de l'arrêt de cassation. dans la partie concernant la condamnation aux dépens, ce qui a trait à l'enregistrement de l'arrêt.

4837. Avant d'examiner plus en détail l'effet de la cassation sur le litige à l'occasion duquel avait été rendue la décision cassée, indiquons tout de suite les conséquences immédiates que produit la cassation prononcée.

4838. -((

Lorsque le demandeur aura obtenu la cassation par lui demandée, dit l'art. 38, tit. 4, 1re part. du règlement de 1738, l'amende consignée lui sera rendue, sans aucun délai, en quelques termes que l'arrêt qui aura égard à ladite demande soit conçu, et quand même il aurait été omis d'ordonner que ladite amende serait rendue ». Ce qui veut dire que la restitution de l'amende consignée par le démandeur en cassation est de plein droit, dès lors que la demande a réussi et que la cassation à été prononcée.

4839. - Et il en est ainsi, comme nous l'avons déjà expliqué, que la cassation soit totale ou partielle; la restitution de l'amende ne saurait être partiellement ordonnée; elle est purement et simplement ordonnée pour le tout, dès lors que le demandeur en cassation a été reconnu bien fondé à se pourvoir contre un chef quelconque de la décision attaquée.

4840. Jugé que la cassation du chef d'un arrêt qui prononce sur une demande principale entraîne l'annulation des autres chefs du même arrêt relatifs aux exceptions ou demandes reconventionnelles opposées à cette demande principale: de tele sorte que, bien que dans ce cas il n'y ait pas lieu de statuer sur le pourvoi formé quant aux exceptions et demandes reconventionnelles, par le défendeur au pourvoi principal, il y a lieu néanmoins d'ordonner la restitution de l'amende consignée par le défendeur sur son pourvoi. Cass., 9 juin 1852, Pautard, S. 52.1.733, P. 53.2.378, D. 54.1.433]

4841. - Pour que l'amende consignée soit restituée, il fant remettre au receveur de l'enregistrement auquel la consignation

a été faite 1o un extrait sur papier timbré de l'arrêt en ce qui concerne la cassation de l'arrêt attaqué et la restitution de l'amende, et énonçant en totalité l'enregistrement de l'arrêt; 2o la quittance de consignation d'amende. Lettre du receveur de l'enregistrement de la Cour de cassation, 25 therm. an IX.

TITRE IV.

EFFETS DE LA CASSATION.

CHAPITRE I.

A QUI PROFITE LA CASSATION ET CONTRE QUI ELLE PRODUIT

-

SES EFFETS.

4842. La réponse à la question que nous venons de poser se trouve dans une partie de la formule du dispositif que nous avons ci-dessus reproduit : « Remet, dit le dispositif, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt »; les parties, c'est-à-dire, les parties qui étaient en instance devant la Cour de cassation, non celles qui étaient en instance devant la cour d'appel lorsqu'est intervenu l'arrêt cassé. Le demandeur en cassation a été maître de choisir dans la décision les points qu'il considérait comme lui faisant grief et de limiter son pourvoi à ces points; de même, il a été maître de choisir parmi ses adversaires, lorsqu'il s'est agi de porter son recours devant la Cour suprême, d'attaquer les uns et de négliger les autres; mais alors, au cas de succès de son pourvoi, l'effet en sera limité et aux chefs spécialement visés et aux parties défenderesses contre lesquelles ce pourvoi aura été nommément dirigé; quant aux autres, il demeurera res inter alios acta.

-

4843. Jugé, en conformité de ces principes, que la cassation d'un jugement ne profite qu'aux parties qui l'ont demandée. Il en est ainsi, notamment, lorsque la décision attaquée a été rendue contre plusieurs cohéritiers, et que le pourvoi n'a été formé que par quelques-uns d'entre eux. Cass., 24 pluv. an VII, Versaud, [S. et P. chr.]; - 27 mai 1808, Coulot, [S. et P. chr.] 4844. Par conséquent, la cassation, pour violation des règles de compétence, d'un arrêt de la chambre d'accusation portant renvoi de plusieurs prévenus devant la juridiction correctionnelle, prononcée sur le pourvoi formé par une partie seulement des prévenus, doit être restreinte à ces prévenus; elle ne peut, sous prétexte d'indivisibilité du délit et de la procédure, être étendue aux prévenus qui ne se sont pas pourvus. - Cass., 5 déc. 1846, Drouillard, [S. 46.1.871, P. 47.1.71, D. 47.1.36] Cette décision est, il est vrai, rendue en matière criminelle; mais on en peut tirer un argument à fortiori, au regard des parties figurant dans un procès civil, bien moins favorables que celles engagées dans une poursuite criminelle.

4845. D'ailleurs il a été jugé, au point de vue purement civil, que la cassation d'un jugement ou arrêt ne profite qu'aux parties qui l'ont demandée. Ainsi et spécialement, dans le cas où une partie qui a été condamnée à une portion des dépens ne s'est pas pourvue contre l'arrêt qui a prononcé cette condamnation, la cassation de ce même arrêt sur le pourvoi formé par une autre partie n'autorise pas la Cour de renvoi à décharger la première de la condamnation aux dépens prononcée contre elle: il y a sur ce point chose jugée. Cass., 24 mai 1854, Rousseau-Moisant, [S. 55.1.737, P. 55.2.42, D. 54.1.179]

4816. Et il en est ainsi quand bien même la partie qui ne s'est pas pourvue en cassation a été appelée en cause sur le pourvoi de l'autre, alors qu'elle a un intérèt tout à fait distinct et séparé de celui des autres, et que d'ailleurs elle n'a pas comparu sur son appel en cause. Même arrèt.

4847. Jugé encore, en ce sens, que la cassation d'un arrêt qui avait à tort reconnu à une partie, agissant en qualité d'administrateur provisoire d'une communauté religieuse, qualité pour poursuivre contre une ancienne supérieure de cette communauté la reddiion de ses comptes, ne saurait avoir pour conséquence la cassation de l'arrêt qui, depuis la décision cassée, est intervenu sur la demande formée, même par voie de

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reprise d'instance, par la nouvelle supérieure de la communauté, lorsque, d'une part, l'arrêt cassé n'avait statué que sur un incident de l'instance et que, d'autre part, la nouvelle supérieure n'avait pas été partie à l'arrêt de cassation. Cass., 18 janv. 1859, De de Meillac, [P. 59.301, D. 59.1.69] 4848. Que lorsqu'un arrêt a repoussé les conclusions de tous les cessionnaires, alors que les uns se fondaient, pour prétendre à un droit de préférence, sur la date de la signification des transports à eux consentis, tandis que les autres faisaient valoir la subrogation à un privilège de copartageant, et que cet arrêt a ordonné que la distribution aurait lieu purement et simplement au mare le franc, si les premiers se sont seuls pourvus, la cassation qu'ils obtiennent ne profite qu'à eux et ne saurait avoir pour résultat de faire revivre les prétentions des autres cessionnaires. Cass., 26 mai 1886, Couet, [S. 86.1. 256, P. 86.619, D. 86 1.281]

...

4849. Que lorsqu'une partie a été mise hors de cause par l'arrêt attaqué, comme n'étant pas passible de l'action du demandeur, si le pourvoi n'a pas été dirigé contre cette partie de l'arrêt, elle est devenue définitive, malgré la cassation obtenue. Cass., 26 févr. 1840, Roche, [S. 40.1.622, P. 40.1. 697

4850. Toutefois, il a été jugé, relativement aux créanciers agissant au nom de leur débiteur, que les créanciers d'un débiteur condamné par un arrêt peuvent, dans le silence de celui-ci, former un pourvoi en cassation en vertu de l'art. 1166, et, dans le cas où le pourvoi qu'ils ont formé l'a été à la fois comme exerçant les droits de leur débiteur et en leur nom personnel, il suffit que ce pourvoi n'ait pas été rejeté sous le premier rapport, pour que la cassation prononcée par suite de l'admission d'un moyen qui leur était personnel, et qui renvoie les parties dans le même état où elles étaient avant l'arrêt, remette tout en question, à l'égard du créancier devant la cour de renvoi. Cass., 24 nov. 1840, Cie du Phénix, [S. 41.1.45, P. 40.2.729]

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4851. Le principe que la cassation ne profite qu'à la partie qui s'est pourvue reçoit d'ailleurs exception, quand il y a des intérêts solidaires et indivisibles. Il en est du recours en cassation comme il en est de l'appel qui, en matière indivisible ou solidaire, lorsqu'il a été interjeté en temps utile par un des coobligés, profite aux autres coobligés et les relève tant de la déchéance par eux encourue pour défaut d'appel dans les délais que de la fin de non-recevoir résultant de l'exécution par eux donnée au jugement. — V. suprà, vo Appel (mat. civ.), n. 1691

et s.

4852. Jugé, par application de ces principes, qu'au cas de condamnation solidairement prononcée contre deux parties, la cassation à l'égard de l'une des parties de la décision prononçant cette condamnation, entraîne cassation à l'égard de l'autre. -Cass., 4 juin 1883, Ordener, [S. 84.1.113, P. 84.1.232, D. 83. 1.385

4853. En matière de garantie, la Cour suprême, relativement à la question de savoir à qui profite la cassation, applique encore les mèmes règles qu'aux effets de l'appel, en la même matière, c'est-à-dire, qu'elle fait dépendre les effets de la cassation au regard de la partie, garant ou garanti, qui ne s'est pas pourvue, de la question de savoir s'il existe un lien nécessaire de dépendance et de subordination entre la demande principale et la demande en garantie.

4854. L'existence de ce lien est le cas le plus ordinaire; il peut arriver toutefois que le lien ne se rencontre pas, et alors on retombe sous la règle générale d'après laquelle la cassation ne profite qu'à la partie qui s'est pourvue. – V. suprà, vo Appel (mat. civ.), n. 1741 et s.

4855. Jugé en conformité de ces principes que la cassation obtenue par le demandeur originaire, profite au défendeur originaire en ce qui touche l'action en garantie qu'il avait formée contre d'autres individus, par suite de l'action dont il était l'objet. Cass., 4 juin 1810, Dervieux, [S. et P. chr.]

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...

4856.- Que la cassation sur le pourvoi du garant doit être également prononcée à l'égard du garanti, lorsqu'il existe entre la demande principale et la demande en garantie un lien nécessaire de dépendance et de subordination. Cass., 9 avr. 1884, Chemin de fer de Paris-Lyon-Méditerranée, [S. 84.1.292, P. 84. 1.701, D. 84.1.237]

4857.- Que le recours en garantie formé contre le garant se rattachant par un lien nécessaire de dépendance et de

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