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ciation l'ensemble de tous ces frais; il invoque Bacquet, ch. 17, | n. 9, et le nouveau Denisart, vo Caution judicatum solvi, § 2, n. 6. 146.

Mais cette opinion, combattue par Boncenne (t. 3, p. 191), ne nous paraît pas devoir être suivie, par la raison que, s'il y a recours devant une juridiction supérieure, le Français peut réclamer une garantie nouvelle et supplémentaire. -Weiss, p. 775; Mayer, p. 95; Vincent et Pénaud, n. 134.

147. L'estimation du cautionnement ne demeure pas toujours définitivement arrêtée (V. infrà, n. 178 et 179); en effet, rien ne s'oppose à ce que, suivant les circonstances, et s'il survient des incidents inattendus, le tribunal ordonne qu'un supplément sera fourni. Il ne serait pas même, dit M. Boncenne (loc. cit.), dans l'intérêt de l'étranger qu'il en fût autrement; car alors les juges, n'y pouvant plus revenir, se verraient de prime abord forcés à élever la somme pour laquelle une caution devrait ètre fournie bien au-dessus de ce qui pourrait être nécessaire.

V. en ce sens, Favard de Langlade, t. 2, p. 457; Carré, Lois de la procéd., n. 708; Mayer, p. 96; Vincent et Pénaud, n. 103. Contrà, Coin-Delisle, Comment. analyt., Droits civils, p. 48 et 49; Boitard, t. 1, n. 349; Chauveau, sur Carré, n. 708. ...A moins, suivant ce dernier auteur, que le premier jugement ne contînt réserve d'élever la caution, ou bien encore que, par suite d'un contrat judiciaire, le demandeur et le défendeur ne fussent convenus de la somme qui devrait être consignée ou au paiement de laquelle une caution devrait s'obliger.

148. Il a été jugé, dans le premier sens, que la somme fixée d'abord par le juge pour la caution judicatum solvi peut ère augmentée, si, par suite des devoirs ordonnés pour l'instruction de la cause, la première se trouve entièrement épuisée. - Metz, 13 mars 1821, Rouff, [S. et P. chr.] Bruxelles, 20 avr. 1833, Delbove, [S. 34.2.240, P. chr.]; -5 juin 1844, [Pasic., 49.2.332]

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152.

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DE LA CAUTION.

SECTION I.

Matières commerciales.

La caution n'est pas due en matière commerciale (art. 16, C. civ.; 423, C. proc. civ.). La prompte exécution des affaires commerciales, disait le tribun Gary, sur l'art. 16, importe trop à la fortune publique pour qu'on les environne de formalités et de difficultés. Si l'obligation de fournir la caution était de rigueur en matière commerciale, ajoute M. Weiss (op. cit., p. 765), « peu d'étrangers consentiraient à traiter avec nos nationaux, et le commerce français, privé de ses débouchés, serait condamné à une irrémédiable déchéance ». V. Merlin, Quest. de droit, v° Caution judicatum solvi, § 1, n. 3; Coin-Delisle, Droits civils, art. 16, n. 7; Aubry et Rau, t. 8, p. 129, $ 747 bis. Cependant un vou a été formulé et adressé au commencement de l'année 1892, au ministre du Commerce puis au garde des sceaux, pour l'extension de la caution judicatum solvi aux matières commerciales. Les ministres n'y ont pas donné suite, mais la Chambre des députés a été saisie d'une proposition de loi à ce sujet.

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153. Pour apprécier le caractère civil ou commercial de la contestation, les tribunaux ne doivent interroger que la loi française et les règles posées dans les art. 631 et s., C. comm.

Weiss, p. 765; Lyon-Caen et Renault, Traité dr. com., t. 1, n. 183, p. 164. V. aussi Gand, 11 janv. 1890, Baudichon, (Rev. prat. de dr. intern., 1890-91.1.87] — V. suprà, vo Acte de commerce et infrà, vis Commerçant, Compétence.

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154. Mais, même à n'envisager que la loi française, des difficultés peuvent se présenter. Il peut arriver que l'acte litigieux soit commercial pour l'une des parties et civil pour l'autre. Que décider dans ce cas? MM. Lyon-Caen et Renault (t. 1, n. 438, p. 449 et 450) proposent « de considérer la nature qu'a l'acte pour l'étranger demandeur, et de l'exempter de la caution dès que cet acte est commercial à son égard ». Il s'agit d'une dispense à accorder au demandeur. N'est-il pas, par suite, rationnel de tenir compte du caractère qu'a pour lui l'acte litigieux? En ce sens, Mayer, De la caution imposée à l'étranger demandeur, p. 102 et 103; Chausse, Revue critique, 1891, p. 217 et 218. 155. Les mêmes auteurs critiquent le système qui admettrait la dispense, du moment que l'acte litigieux serait commercial pour le défendeur. «On ferait profiter, disent-ils, un étranger ayant fait un acte purement civil pour lui, de ce que l'acte est commercial pour le Français qui a contracté avec lui; ce serait contraire au but de la loi ». Cependant c'est ce système qui se dégage d'un jugement du tribunal de Bruxelles, 5 févr. 1890, Breitkopf, [Rev. prat. de dr. intern., 1890-91.1.174]- Le tribunal de Bruxelles décide que la caution ne peut être réclamée parce que « la demande vise, dans le chef des défendeurs, éditeurs et marchands de musique, une obligation née de l'exercice de leur commerce. »

155 bis. Du moment que le litige est commercial, il n'y a pas à tenir compte de la juridiction saisie; même devant un tribunal civil, un étranger échappe à la caution du moment qu'il s'agit d'une matière commerciale. Lyon-Caen et Renault, t. 1, n. 436, p. 446; Coin-Delisle, n. 7; Favard de Langlade, vo Exception, § 1, n. 2.

156. D'ailleurs, l'art. 423, C. proc. civ., dit en termes formels que l'étranger ne doit pas la caution en matière commerciale, même lorsque la demande est portée devant un tribunal civil dans les lieux où il n'y a pas de tribunal de commerce. Le critérium n'est pas dans la juridiction appelée à statuer, mais dans le caractère de l'acte lui-même. Aussi la dispense est-elle de droit en matière commerciale, aussi bien en appel et devant la Cour de cassation que devant les premiers juges. - Weiss, p. 766.

157. Ainsi, l'étranger qui poursuit devant un tribunal civil l'exequatur d'une décision étrangère sur un litige commercial doit pouvoir agir en justice sans être tenu de fournir la caution judicatum solvi. Cette solution parait d'autant plus s'imposer qu'en droit commun on reconnaît au juge le droit de réviser au fond le procès. Bordeaux, 22 janv. 1840, Tonsend, [D. 40. 2.167] - Trib. Seine, 18 mars 1875, [S. 78.2.15 et P. 78.102 en note]; 3 juill. 1880, [Clunet, 82.615]. Trib. Anvers, 17 juill. 1873, [Rev. dr. int., 1874, p. 281] — Trib. Bruxelles, 2 juill. 1882, Mailhos, [S. 82.4.48, P. 82.2.81] - Trib. Gand, 12 déc. 1888, [Journ. trib., 30 déc. 1888] - Sic, Weiss, loc. cit.: Vincent et Pénaud, v° Caution judicatum solvi, n. 52 et s.; Gerbaut, 87; Mayer, p. 101. V. aussi Trib. Corbeil, 30 nov. 1888, la Loi, 15 déc. 1888] Bruxelles, 15 mars 1841, [Pasier., 42.2. 76]; 25 mars 1861, [Pasier., 61.2.220]

157 bis. Egalement devant la juridiction répressive, l'étranger qui se porte partie civile doit échapper à la caution si le dommage dont il demande la réparation est de nature commerciale. Trib. Bruxelles, 31 oct. 1890, [Rev. prat. de dr. intern., 1892.1.205]

158. L'étranger qui plaide devant une juridiction commerciale peut être obligé, au cours de l'instance, de s'adresser au tribunal civil pour vider un incident, telle qu'une vérification d'écriture; sera-t-il tenu de fournir la caution dans cette instance incidente? La doctrine se prononce presque unanimement pour la négative, par la raison que l'incident n'est qu'un accessoire du procès commercial, et que, obliger le demandeur a présenter caution, ce serait aller à l'encontre du but de célérité qu'a poursuivi le législateur, lorsqu'il a fait exception pour les litiges commerciaux. Metz, 26 mars 1821, Guyaux, [S. et P. chr.] Bruxelles, 25 mars 1861, [Pasier., 61.2.220]- Sic, Aubry et Rau, t. 8, p. 129, § 747 bis ; Lyon-Caen et Renault, t. 1, n. 437, 447; Weiss, 2e édit., p. 765 et 766; Felix, t. 1, p. 302; Mayer, p. 100

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(Ruben de Couder, vo Etranger, n. 41), et la jurisprudence autorise la discussion sur la question dans le cas de saisie-arrêt. Trib. Seine, 9 févr. 1881, Martini, [Clunet, 82.72] -(( Attendu, porte ce jugement du tribunal de la Seine, qu'il a été, il est vrai, jugé que l'étranger peut être affranchi de l'obligation de donner caution, lorsqu'au cours d'une instance devant le tribunal de commerce où il est demandeur, il est contraint de se retirer devant le tribunal civil pour y faire juger une question d'où dépendrait la solution de son procès commercial; par exemple, pour faire vérifier l'écriture déniée par son débiteur; mais attendu que, sans qu'il soit besoin d'examiner le mérite de cette solution ni de rechercher s'il serait permis de l'étendre, comme le pensent certains auteurs, à l'hypothèse d'une demande en validité de saisiearrêt formée pendant une instance commerciale par un demandeur étranger, il suffit de remarquer que, dans l'espèce actuelle, ce demandeur ne saurait prétendre être demandeur en matière de commerce, puisqu'aucune instance commerciale, dont l'instance actuelle pourrait être considérée comme un incident, n'était engagée par lui contre les défendeurs, ni au moment de l'assignation en validité, ni même au jour des plaidoiries ». — V., dans le même sens, Liège, 28 mars 1835, [Pasier., 35.121]

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160. - Les actions en contrefaçon, qui doivent être portées devant les tribunaux civils, peuvent-elles être exercées sans que l'étranger demandeur soit tenu à fournir la caution judicatum solvi, lorsque le débat s'agite entres commerçants? Le délit ou le quasi-délit dont le tribunal est saisi n'a-t-il pas dans ce cas un caractère commercial? En France, la jurisprudence paraît avoir toujours admis que la caution judicatum solvi était due. Paris, 2 juill. 1861, [Pataille, 61.351] Trib. Seine, 31 mars 1875, Pat.. 75.102] Trib, corr. Seine, 31 mai 1881, [Pat., 85.287] Trib. Seine, 4 févr. 1888, de Greinde, [S. 88.2.199, P. 88.1. 1114; - 24 juin 1890, [Prop. ind. (Berne), 90.103] 161.- En Belgique, la question a été très-discutée au sujet des actions en contrefaçon de brevet qui, comme en France, sont de la compétence des tribunaux civils (L. 24 mars 1854). Le système qui accorde la dispense de caution a été énergiquement soutenu par plusieurs auteurs et a été admis par quelques décisions judiciaires. «Voici un commerçant, dit M. Falloise, qui, dans l'exercice et à l'occasion de son commerce, vend, expose en vente des objets contrefaits. Peut-on soutenir sérieusement qu'il commet un quasi-délit civil? La saine logique ne dit-elle pas de primeabord que c'est de la juridiction commerciale que ce négociant est justiciable? L'obligation résultant de ce quasi-délit ne prendt-elle pas naissance dans des actes commerciaux? La loi de 1854 et la jurisprudence décident que c'est la juridiction civile qui est appelée à juger ce commerçant, soit! Cela importe peu.....,`la juridiction qui juge peut-elle influer sur la nature du procès à juger? De la caution judicatum solvi dans les procès en contrefaçon de brevet, Belg. jud., 26 mai 1887. En ce sens Trib. Bruxelles, 2 mars 1887, [le Droit, 29 juill. 1887] — Trib. Liège, 26 mars 1887, [Ibid.]

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162. Cependant, en Belgique comme en France, le tème qui a fini par triompher est celui qui astreint l'étranger à fournir caution dans les procès en contrefaçon; c'est qu'en effet, en attribuant aux tribunaux civils la connaissance de ces procès, le législateur a considéré que les questions de brevet (et l'on peut en dire autant pour les marques en France) rentraient dans les questions de propriété qui ne pouvaient être tranchées par les tribunaux de commerce, mais par les tribunauxi cvils seuls. «Il y avait sans doute là une erreur; mais cette erreur, font justement observer MM. Lyon-Caen et Renault (op. cit., n. 437 bis, p. 448), a été commise par le législateur lui-même. On ne peut la corriger pour déterminer la portée des lois de 1844 et de 1857. Aux yeux du législateur, la compétence des tribunaux civils se déduit de ce que ces contestations sont civiles »><. En ce sens, Revue critique, 1888, p. 370; Weiss, 2o éd., p. 765, note 2.

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163. Pareilles observations ont été faites en Belgique au sujet de la loi belge du 24 mars 1854 sur les brevets : «< Attendu que la loi du 24 mars 1854 a déféré la connaissance des actions relatives à la contrefaçon en matière de brevets exclusivement aux tribunaux civils...; attendu que cette attribution a sa base dans la nature même de ces actions qui ont pour but la réparation d'un droit de propriété, d'un droit civil...; attendu qu'un commerçant qui fait un acte de contrefaçon, ne fait pas un acte de son commerce, mais qu'il porte une atteinte au droit civil du breveté ». Cass. belg., 5 avr. 1888, Soc. du télé

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phone Bell, [S. 88.4.17, P. 88.2.17]; 29 nov. 1888, Grawitz, (S. 89.4.13, P. 89.2.13] Liège, 6 mars 1888, Soc. du téléphone Bell, [S. 88.4.17, P. 88.2.17, et la note de M. Lyon-Caen Trib. Audenarde, 27 avr. 1887, [J. le Droit, 29 juill. 18871Trib. Anvers, 24 févr. 1887, [J. le Droit, 29 juill. 1887) 164. Une question analogue s'est présentée devant le tribunal civil de Bruxelles en matière de contrefaçon littéraire; bien que la loi belge du 22 mars 1886 réserve la connaissance des affaires de propriété littéraire et artistique à la juridiction civile, il a été jugé que la caution judicatum solvi ne pouvait être exigée par des éditeurs assignés pour vente de morceaux de musique contrefaits, lesquels éditeurs et marchands de musique avaient contracté « une obligation née de l'exercice de leur commerce, en vendant, en exposant en vente ou en tenant dans leur magasin, dans un but commercial, des pièces de musique arguées de contrefaçon et dont la vente était prohibée en Belgique ». Trib. Bruxelles, 5 juin 1890, Breitkopf et Hartel, Jurisp. Anvers, 1890.2.99, Rev. prat. de dr. intern., 1890-91.1. 174. V. aussi Trib. Bruxelles, 31 oct. 1890, [Rev. prat, de dr. intern., 1892.1.205]

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SECTION II.

Étranger admis à domicile.

165. Le droit de demander la caution judicatum solvi constituant un droit civil qui ne peut être exercé que vis-à-vis d'un étranger, il est naturel que l'étranger admis à la jouissance des droits civils soit complètement assimilé au Français, qu'il s'agisse pour lui d'échapper à l'obligation de fournir la caution ou du droit de la réclamer à un étranger. - Orléans, 26 juin 1828, Welch, [S. et P. chr.]-Lyon, 20 juin 1873. Sic, Mayer, p. 98; Vincent et Pénaud, vo Caution judicatum solvi, n. 59 et s. Trib. Bruxelles, 11 juill. 1888, de Ziegesaar, [Pand. pér. belg., 1888, 1774; Rev. prat. de dr. intern., 1888, vo Caution julicatum solvi, n. 2 bis; Despagnet, 2o éd., p. 297. Il faut d'ailleurs que l'admission à domicile soit parfaite au moment où l'étranger prétend échapper à la caution; il ne suffit pas qu'il ait fait une demande, il faut que le décret d'autorisation (car il n'est guère possible d'admettre encore des autorisations tacites, depuis la loi du 26 juin 1889) ait été rendu et publié. — Bruxelles, 1er juill 1826. Orléans, 26 juin 1828, précité.

SECTION III.

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§ 1. Étranger consignant la somme fixée par le tribunal. 167. L'art. 167, C. proc. civ., dispose: « Le jugement qui ordonnera la caution fixera la somme... Le demandeur qui consignera cette somme sera dispensé de fournir caution ». En réalité, il ne s'agit pas ici d'une véritable dispense; l'étranger qui consigne une somme comme caution ne fait que réaliser l'obligation dont il est tenu (Weiss, p. 766), et qu'on peut déduire de cet art. 167, C. proc. civ. Mais il n'était guère besoin de l'inscrire dans la loi; il est clair, en effet, que l'étranger qui a consigné préalablement une somme suffisante avec affectation à la garantie des frais et dommages-intérêts pouvant résulter du procès, ne saurait plus être condamné à fournir la caution. — Vincent et Pénaud, vo Caution judicatum solvi, n. 146.

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frais et dommages-intérêts pouvant résulter du procès. Cette exception à la règle se justifie d'elle-même; l'étranger demandeur possédant des immeubles suffisants, le Français se trouve garanti du paiement des frais et dommages-intérêts dont la caution a pour objet d'assurer le recouvrement. Cependant le texte de la loi a fait naître quelques difficultés.

169. On a soutenu que les immeubles devaient être situés dans le ressort de la cour d'appel (art. 2023, C. civ.); Pigeau (Comment. sur le Code de proc. civ., t. 1, p. 376, n. 4 et 5) et Chauveau, sur Carré (n. 708 bis) ont professé cette opinion par la raison que l'étranger étant caution de lui-même, il y a lieu de lui appliquer les règles relatives à la caution. Mais cette assimilation entre l'étranger qui invoque le bénéfice de la disposition finale de l'art. 16, C. civ., et la caution ne nous semble pas devoir être adoptée. V. Joccotton, Des except. de proc., n. 224; Mayer, p. 113 et 114.

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170. M. Coin-Delisle (n. 9) a émis l'opinion que la faveur accordée à l'étranger qui possède des immeubles situés en France n'est attachée qu'aux immeubles situés sur le territoire continental français, et non à ceux situés dans les colonies, car, dit-il, le nom de France employé seul ne s'applique qu'à la métropole V. aussi Bioche et Goujet, vo Judicatum solvi, n. 8; Pigeau, loc. cit.; Chauveau, sur Carré, n. 708 bis. L'argument de texte sur lequel M. Coin-Delisle fonde son opinion n'a qu'une valeur douteuse, car il est impossible de poser en principe que le mot de France ou Français pris seul ne s'applique qu'à la métropole ou à ceux qui l'habitent on trouverait, au besoin, la preuve du contraire dans les art. tt et s., C. civ. Il nous semble donc que rétranger qui justifierait posséder dans une colonie française des immeubles d'une valeur suffisante pour assurer le paiement des frais du procès et des dommages-intérêts, pourrait invoquer le bénéfice de l'exception. La question est cependant encore discutée. V. Mayer, p. 114; Rousseau et Laisney, v Caution judicatum solvi, n. 11. Il ne devrait, au surplus, s'élever aucune difficulté relativement aux immeubles situés en Algérie, surtout en présence de la jurisprudence, qui refuse d'assimiler l'Algérien à l'étranger, en ce qui concerne le paiement de la caution judicatum solvi. V. suprà,

n. 21.

171. Il faut toutefois reconnaître que les immeubles situés dans les colonies seront, le plus souvent, d'une discussion trèsdifficile, et que les juges, n'ayant sous les yeux que des documents de date ancienne, seront presque toujours dans l'impossibilité de reconnaître, à des signes certains pour le présent et rassurants pour l'avenir, la suffisance de ces immeubles; c'est à eux qu'il appartiendra d'apprécier les faits suivant les inspirations de leur conscience; mais nous ne pensons pas que, s'ils considéraient comme suffisant, dans les termes de droit, un immeuble situé aux colonies françaises, leur décision pût être censurée comme contraire à la loi.

172. Pigeau et Chauveau (loc. cit.), par suite de l'assimilation qu'ils ont cherché à établir entre l'étranger et la caution, Soutiennent que la suffisance des biens possédés par l'étranger ne peut être déclarée qu'en observant les règles tracées par la loi pour le cautionnement. V. infrà, vo Cautionnement. Mais la loi ne dit rien de semblable; elle laisse, à cet égard, aux juges plein pouvoir d'appréciation. Mayer, op. cit., P. 114.

173. L'art. 16, à ne s'en tenir qu'à la lettre même de la loi, n'exige pas que l'étranger soit propriétaire des immeubles, il se contente d'une simple possession. Sans vouloir attacher trop d'importance à cette observation, elle doit cepondant conduire à une application très-large de l'exemption du même art. 16. Ainsi l'étranger échappe à la nécessité de fournir la caution bien qu'il n'ait que la propriété indivise des immeubles. Bordeaux, 23 janv. 1849, Tailleson, [S. 51.2.45, P. 51.2.328, D. 51.2.119] Trib. Bruxelles, 28 janv. 1885, Dequisnout, [Pand. belges, 1889, p. 1195

...

174.- Ou encore, bien qu'il n'en soit que nu-propriétaire ou emphyteote. Merlin, Rep., vo Caution judicatum solvi, §1, n. 11; Weiss, 2o éd., p. 767, note 5.

175. Le simple usufruitier peut-il, comme possesseur d'immeubles, réclamer le bénéfice de la dispense de caution? Que l'usufruit soit immeuble, cela n'est pas douteux; mais ce n'est pas seulement au fait de la possession d'immeubles que la loi attache cette dispense; elle veut encore que ces immeubles soient suffisants pour répondre des frais et dommages-intérêts;

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or, Proudhon (Tr. de l'usufruit, t. 1, n. 19) soutient que le défendeur ne serait pas obligé de se contenter de la justification d'un droit d'usufruit immobilier dont la valeur, toujours incertaine, ne pourrait être pour lui d'un recours assuré; et il invoque, comme le décidant ainsi, la loi romaine qui, après avoir dit : « Sciendum est possessores immobilium rerum satisdare non compelli... ajoutait: Eum vero qui tantum usumfructum habet possessorem non esse Ulpianus scripsit (L. 15, § 1, ff., Qui satisdare cogantur). V. aussi Merlin, loc. cit.; Zachariæ, t. 1, p. 79, n. 4 (note 18). - Aujourd'hui encore, bien des auteurs refusent d'assimiler l'usufruitier au possesseur d'immeubles. Aubry et Rau, t. 1, p. 129, note 13; Gerbaut, Compét. des trib. fr. à l'ég. des étrang., p. 111; Mayer, p. 113. Cependant, il nous parait difficile, en raison du pouvoir discrétionnaire dont les juges se trouvent investis dans l'appréciation de la suffisance de l'immeuble, de leur refuser celui de déclarer, eu égard à la modicité des frais, à l'importance annuelle des produits, et aux chances présumées d'existence de l'étranger, que l'usufruit présente une garantie suffisante dans les termes de la loi. V. en ce sens, Bonfils, n. 125; Weiss, 2o éd., p. 767; Despagnet, 2e éd., p. 296.

176. Nous considérons encore que l'étranger est bénéficiaire de l'exemption bien qu'il n'ait pas payé le prix des immeubles (Massé, Droit commercial, t. 2, n. 742). Mais ici nous rencontrons l'opinion contraire de Fœlix. « Le simple possesseur de fait des immeubles, dit cet auteur, ne suffit pas pour invoquer l'exception. Le défendeur peut opposer la circonstance que le demandeur étranger ne justifie pas d'avoir payé le prix d'acquisition des immeubles ». Tr. de dr. int., n. 117.

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177. Mais notre solution serait différente s'il s'agissait d'immeubles litigieux; dans cette hypothèse, l'étranger ne devrait pas être affranchi de l'obligation de fournir la caution. C'est ainsi que le tribunal de Bruxelles a refusé la dispense de caution dans une espèce où les immeubles possédés par l'étranger demandeur avaient fait l'objet d'une disposition dont la validité était précisément en litige. Trib. Bruxelles, 26 nov. 1887, Jutteau Michelet, [Pasicr., 88.3.170, Rev. prat. de dr. intern., 1888, vo Caution judicatum solvi, n. 4 ter] V. aussi Trib. Bruxelles, 8 juin 1885, Jutteau, [eod. loc.] Weiss, op. cit., p. 767, note 2. 178. La question de savoir si les immeubles sont suffisants est évidemment laissée à l'appréciation souveraine du juge. Même lorsqu'ils sont grevés d'hypothèques ils peuvent être jugés suffisants; à l'inverse, on peut admettre que si des inscriptions venaient à être prises au cours d'un procès qui aurait été engagé sans que la caution eût été demandée, en raison même de l'existence des immeubles, la caution pourrait être exigée par le défendeur. Vincent et Pénaud, n. 158. — D'une façon générale,

il semble certain que si des immeubles, réputés d'abord suffisants, perdaient ce caractère au cours du procès, à raison soit de vente, soit de droits réels consentis par le possesseur, le défendeur rentrerait dans le droit d'exiger la caution. Boncenne, t. 3, p. 196. V. suprà, n. 147.

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179. Le jugement qui reconnaît que les immeubles sont suffisants pour entrainer la dispense de caution peut-il permettre de prendre inscription hypothécaire sur ces immeubles? Il paraît qu'à Paris (Mayer, p. 116) on laisse prendre hypothèque en vertu du jugement. Nous estimons que cette pratique ne se justifie pas et que la loi ne l'autorise pas. Le jugement qui décide que les immeubles sont suffisants ne contient aucune condamnation; en vertu de quel titre peut-on prendre inscription? Il ne peut évidemment ici être question d'hypothèque légale (Weiss, p. 767). Il est vrai que l'étranger peut aliéner ses immeubles, les grever d'hypothèque au cours du procès; mais si cet événement se produit le défendeur peut faire annuler les actes comme frauduleux, et demander au tribunal une nouvelle garantie. - Merlin, Repert., vo Caution judicatum solvi, § 1, n. 11; Demolombe, t. 1, n. 259; Weiss, p. 766. -V. suprà, n. 147. 180. Mais le juge pourrait-il ne déclarer les immeubles suffisants qu'à la condition qu'une hypothèque serait consentie au profit du défendeur? Les auteurs se prononcent pour l'affirmative. Demante, t. 1, n. 30 bis-VII; Mayer, p. 116. - Nous pensons qu'on peut reconnaître ce droit au tribunal, mais il est bien entendu que le juge ne peut ordonner qu'une inscription sera prise. Il doit se borner à dire que le demandeur sera tenu de fournir caution faute par lui d'avoir consenti une hypothèque sur ses immeubles.

SECTION V.

Traités diplomatiques.

181.- La France n'a conclu avec les pays étrangers aucun traité ayant exclusivement pour objet la dispense de fournir la caution judicatum solvi; mais cette dispense résulte des dispositions, soit particulières, soit générales, qui se rencontrent dans n grand nombre de conventions internationales.

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§ 1. Conventions contenant des clauses spéciales.

182. - Voici la liste des pays qui ont conclu avec la France des conventions contenant des stipulations expresses sur la dispense de caution judicatum solvi.

183.- Italie (Traité du 24 mars 1760). - «Pour être admis en jugement, est-il dit dans le dernier alinéa de l'art. 22 de ce traité, les sujets respectifs ne seront tenus, de part et d'autre, qu'aux mêmes cautions et formalités qui s'exigent de ceux du propre ressort, suivant l'usage de chaque tribunal ». Bien que le traité de 1760 ait été conclu par l'ancien royaume de Sardaigne, il est reconnu, en Italic comme en France, qu'il régit les relations internationales entre la France et le royaume actuel d'Italie. - V. infrà, vo Traités diplomatiques.

184. Tout plaideur de nationalité italienne, quel que soit le lieu de son origine, échappe donc en France à l'obligation de fournir la caution judicatum solvi. Trib. Tunis, 17 déc. 1888, Alfonso Montefaxo, [Rev. algér., 89.2.135] - Trib. Versailles, 26 mars 1891, A..., [Rev. prat. de dr. intern., 1890-91.1.306] - Trib. Saint-Quentin, 30 oct. 1885, [Clunet, 88.99]. - Sic, Vincent et Pénaud, n. 173.

185. Serbie (Traité du 18 janv. 1883). L'art. 5 de ce traité dispose: « Il ne sera exigé des Français qui auraient à poursuivre une action en Serbie, ou des Serbes qui auraient à poursuivre une action en France, aucune caution ou dépôt auquel ne seraient pas soumis, en France, les citoyens de la nation la plus favorisée, ni aucun droit auquel les nationaux. ne seraient pas soumis d'après les lois du pays. »> 186. Suisse (Traité du 15 juin 1869). L'art. 13 de ce traité est ainsi conçu : «< Il ne sera exigé des Français qui auraient à poursuivre une action en Suisse aucun droit, caution ou dépôt, auxquels ne seraient pas soumis, conformément aux lois du canton où l'action est intentée, les ressortissants suisses des autres cantons; réciproquement, il ne sera exigé des Suisses qui auraient à poursuivre une action en France aucun droit, caution ou dépôt, auxquels ne seraient pas soumis les Français d'après les lois françaises ». -- V. Trib. Vaud, 22 déc. 1885, Clunet, 87.681]- Trib. Tunis, 2 nov. 1888, Ritter, [J. la Loi, 7 déc. 18881

187. La dispense inscrite dans le traité franco-suisse du 15 juin 1869 se rencontrait déjà dans les traités antérieurs conclus entre la France et la Suisse (4 vend. an XII; 18 juill. 1828.

Comme application de ces divers traités franco-suisses, V. Cass., 9 avr. 1807, Sabatier, [S. et P. chr.]; 28 déc. 1831, Trimaille, [S. 32.1.627, P. chr.]-Colmar, 28 mars 1810, Zossler et Ottendorf, [S. et P. chr.]; · 10 janv. 1816, Mettler, [P. chr.]

187 bis. — Le droit à l'assistance en vertu du traité francosuisse appartient non seulement aux ressortissants de l'un des deux Etats résidant sur le territoire de l'autre, mais encore à ceux qui résident dans leur propre partie ou dans un tiers Etat. Trib. fédéral suisse, 9 janv. 1892, Rugnin], [S. et P. 92.4.9]

§ 2. Clause du « libre et facile accès ». Clause du traitement de la nation la plus favorisée.

188. La clause qui se rencontre dans un grand nombre de traités pour accorder aux ressortissants des deux pays contractants libre et facile acces auprès des tribunaux, emporte, suivant la jurisprudence actuelle, dispense de fournir caution. Après quelques hésitations, les tribunaux français se sont prononcés pour cette interprétation, à propos des traités franco-espagnols du 7 janv. 1862 et du 6 févr. 1882. IV. Trib. Seine, 22 févr. 1870, Vilson, D. 70.3.78]; 23 nov. 1880, Ribeyro, [Clunet, 80.575]; 2 avr. 1881, de Vanthrelet, [Clunet, 81.423; 8 juin 1882, Chemin de Lerida, [Clunet, 82.300] - V. aussi 10 mai 1883, Hoo

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189. Les tribunaux espagnols suivent la même jurisprudence en faveur des Français plaidant comme demandeurs contre des Espagnols. Audiencia Madrid, Urage, [Revista de derecho internacional, 1887-88, p. 191]; - 30 sept. 1887, Société générale, [eod. loc., 1887-88, p. 431]

190. Les Russes également ont été affranchis de la caution judicatum solvi en vertu de la clause du libre et facile accès du traité du 1er avr. 1874. Trib. Seine, 15 juin 1887, J. le Droit du 17 juin 1887] Les quelques auteurs qui ont examiné les effets du libre et facile acces, approuvent sur ce point la jurisprudence. Vincent et Pénaud, op. et verb. cit., n. 177 et s.; LyonCaen et Renault, Traité de dr. comm., t. 1, n. 409, p. 400, note 2; R. Vincent, Les étr. dev. les trib. fr., Clause du libre et facile acces, p. 12; Despagnet, 2o édit., p. 297, n. 281; Weiss, 2e édit.. p. 769. V. la liste des pays dont les ressortissants bénéficient de cette clause suprà, vo Assistance judiciaire, n. 753.

191. La clause du traitement de la nation la plus favorisée, qui se rencontre dans un grand nombre de traités, devrait per mettre également à l'étranger d'échapper à l'obligation de fournir la caution, lorsque cette clause, au lieu de ne s'appliquer qu'aux relations commerciales entre deux pays, se réfère à la condition générale des étrangers. - V. Trib. Bastia, 29 avr. 1873, Cordua, [D. 73.3.79] - Paris, 5 mars 1885, et Cass., 22 juill. 1886, da Fonseca, [S. 87.1.69, P. 87.1.147, D. 87.1.227

Vincent, Les étrangers devant les tribunaux français, Clause du traitement de la nation la plus favorisée, p. 26; Despagnet, 2e édit., p. 297, n. 281; Weiss, loc. cit.; note sous Trib. Semr, 26 mars 1890, [Rev. prat. de dr. intern., 1890-91.1.114 et 116

192. Comme traités où la clause du traitement de la nation la plus favorisée revêt ce caractère général, on peut citer ceux que la France a conclus avec la Birmanie (24 janv. 1873, art. 1), le Brésil (7 juin 1826, art. 6), le Siam (15 août 1856, art. 1), la Perse (12 juill. 1855, art. 4 et 5). V. Weiss, loc. cit.

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§ 3. Traités divers.

193. Les traités qui précèdent permettent aux étrangers d'échapper à l'obligation de fournir caution judicatum solvi d'une façon générale, c'est-à-dire dans toutes les matières et dans toutes les instances. Dans d'autres conventions internationales, la dispense de fournir caution affecte un caractère particulier. Il faut citer d'abord les conventions spéciales conclues par la France pour l'admission des étrangers au bénéfice de l'assistance judiciaire. Elles disposent en termes exprès que les indigents assistés seront dispensés de la caution judicatum solvi. La liste de ces conventions est donnée suprà, vo Assistance judiciaire, n.

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194. Dans certains actes diplomatiques, la dispense, qui peut résulter des stipulations particulières qui s'y rencontrent, ne s'applique qu'aux instances ayant rapport aux matières dont s'oc cupent ces traités. Ainsi il a été jugé, à propos de la convention franco-autrichienne pour la protection de la propriété artistique et littéraire, que les dispositions d'un traité accordant aux sujets des deux Etats la même protection qu'aux nationaux et le même recours légal contre toute atteinte portée à leurs droits, emporte pour l'étranger dispense de fournir la caution judicatum solri. Trib. corr. Sens, 7 mars 1888, Strauss, S. 88.2.199, P. 8. 1.1115] Mais cette interprétation de la convention franco-autrichienne du 19 déc. 1866 a été repoussée par la cour de Rouen. Trib. Dieppe, 5 juill. 1891, et Rouen, 3 août 1891, Rev. prat de dr. intern., 1892.1.185]

195. En matière de propriété industrielle, on a soutenu que l'étranger qui poursuit un national pour contrefaçon de brevet, devait échapper à l'obligation de fournir la caution judicatum solvi (en admettant qu'elle soit due en cette matière, V. suprà, n. 160 et s.) depuis la convention d'Union internationale pour la protection de la propriété industrielle du 20 mars 1883 (V. suprà, vo Brevet d'invention, n. 1942 et s.); à la condition, bien entendu, que l'étranger demandeur ait le droit d'invoquer le bénéfice de cette convention. On a fait valoir. l'appui de cette prétention, qu'aux termes de l'art. 2, Tr. 20 mars 1883, l'étranger « a la même protection que le national et le même recours légal contre toute atteinte portée à ses droits »; dès lors, a-t-on dit, il doit être dispensé de la caution judicatum solvi. Ce système a été un moment admis par plusieurs tribu

naux belges. Trib. Audenarde, 8 avr. 1887, [J. le Droit, 29 juill. 1887] Bruxelles, 28 juill. 1887, [J. le Droit, 9 oct. 1887] 196. — Mais il est contraire aux travaux préparatoires de la convention et au protocole de clôture où il est dit, § 3, que « la disposition finale de l'art. 2 de la convention ne porte aucune atteinte à la législation de chacun des Etats contractants en ce qui concerne la procédure suivie devant les tribunaux et la compétence de ces tribunaux ». Aussi ce premier système qui affranchissait l'étranger de la caution a-t-il été condamné par la doctrine et finalement par la jurisprudence belge.elle-même. Cass. belg., 5 avr. 1888, [S. 89.4.13, P. 89.2.13]; 1888, Grawitz, [Ibid.] Gand, 5 janv. 1889, (Journ. des trib., 23 déc. 1888]; - 27 juill. 1887, [Belg. jud., 1888, p. 653], infirmant Trib. Audenarde, 8 avr. 1887, précité. Trib. Bruxelles, 28 déc. 1887, Soc. du téléphone Bell, [S. 88.4.17, P. 88.2.17] Liège, 6 mars 1888, Soc. du téléphone Bell, [Ibid.]

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29 nov.

197. Saisi de la même question, le tribunal de la Seine l'a résolue comme la Cour de cassation de Belgique, c'est-à-dire en maintenant l'application à l'étranger des dispositions des art. 16, C. civ., et 166, C. proc. civ. Cass., 4 févr. 1888, Degreindl, [S. 88.2.199, P. 88.1.1114] Sic, Lyon-Caen, Rev. de dr. int., 1882, p. 193; note dans le Journal des procès en contrefaçon, 1887, p. 298; Mesnil, Marques de fabr. en dr. int., p. 255; La propriété industrielle (Berne), année 1887, p. 47 et 48; année 1888, p. 99; Pouillet, eod. loc., 1888, p. 59; Vincent et Pénaud, Dict. de dr. int. pr., vo Propriété industr., n. 396 et 397; Vincent, Rev. prat. de dr. intern., 1888, eod. verb., n. 28. suprà, vo Brevet d'invention, n. 1672.

- V.

197 bis: Eu matière de propriété littéraire et artistique, il a été également jugé que les dispositions du traité d'Union du 9 sept. 1886 n'emportait pas dispense de fournir la caution judicatum solvi. - Rouen, 3 août 1891, [Rev. prat. de dr. intern., 1892.1.185] — Contrà, Cattreux, Droit d'auteur, 1889, p. 73 et s.

CHAPITRE VII.

DES CHANGEMENTS DANS LA CONDITION DES PARTIES SOIT AVANT L'INSTANCE, SOIT EN COURS D'INSTANCE.

198. Après avoir expliqué que le droit de requérir la caution judicatum solvi, l'obligation de la fournir ou la faculté d'en être affranchi (en laissant de côté la nature du litige) dépendent de la nationalité de l'une et l'autre des parties en cause, de la jouissance des droits civils ou de l'existence de traités diplomatiques, nous devons examiner les conséquences que peut avoir un changement dans la condition des parties soit avant l'introduction de l'instance, soit au cours du procès engagé.

199. Faisons d'abord observer que si la partie en cause est une personne morale ou un incapable ne pouvant agir en justice que par les soins d'un représentant légal, ce n'est pas la nationalité ou la condition juridique de ce représentant qu'il faut envisager, mais bien celle de la personne morale ou physique, mineur, interdit, etc., dont les intérêts sont en discussion devant le tribunal. Ainsi, quand le tuteur plaide, comme c'est le mineur qui est en cause, c'est à la nationalité de ce dernier qu'il faut s'attacher pour savoir si la caution peut être demandée. V. Trib. Seine, 17 janv. 1885, [J. le Droit, 28 janv. 1885] Sic, Labbé, note sous Cass., 16 févr. 1875, [S. 75.1. 193, P. 75.481] V. cep. Bruxelles, 18 nov. 1859, [Pasicr., 62. 2.217]

-

200. S'agit-il d'une société étrangère qui este en justice par les soins d'un liquidateur ou d'un syndic, il faut se fixer, relativement à l'exception de caution judicatum solvi, d'après la nationalité de la société. Trib. Seine, 13 avr. 1877, [Clunet, 78.160] V. toutefois ce qui a été dit pour les sociétés suprà, n. 31 et s.

201. Cependant il a été jugé, en matière de succession, que le curateur à une succession vacante en Algérie ne pouvait être astreint à fournir caution quelle que fût la nationalité du défunt ou des héritiers. - Alger, 25 oct. 1885, [Revue algérienne, 1886, p. 195] Mentionnons encore un arrêt de la cour de Paris décidant que l'étranger revendiquant une succession doit fournir la caution à un exécuteur testamentaire français bien que le légataire universel également défendeur soit étranger. Paris, 24 déc. 1879, [Clunet, 82.92]

202. Nous n'avons pas à nous occuper ici des conditions à remplir pour avoir la qualité de Français, ou pour bénéficier soit de la jouissance des droits civils, soit des dispositions d'un traité; nous nous bornerons à rappeler que le juge saisi de l'incident de caution judicatum solvi a pleine compétence pour rechercher et dire, à cet effet, quelle est la nationalité, française ou étrangère, des parties en cause. V. Vincent et Pénaud, Dict. de dr. int. priv., vo Nationalité, n. 412 et s.

203. Mais venons à l'examen des cas que nous nous proposons d'envisager ici; et parlons, en premier lieu, des modifications pouvant survenir dans la condition des parties antérieurement à l'introduction d'instance; ce sera, par exemple, un changement de nationalité, ou bien la conclusion d'un traité diplomatique, ou bien encore la substitution d'une autre personne à celle qui était, à l'origine, créancier ou débiteur. Quelles vont être les conséquences de ces modifications? Il est admis qu'il ne faut tenir compte que de la condition et de la qualité des parties au moment de l'introduction de l'instance.

204. — Il suit de là, comme l'écrit M. Weiss, que le créancier, étranger au jour de la naissance de son droit et devenu Français antérieurement à l'instance, que l'héritier et le cessionnaire français d'un créancier étranger ne sont pas astreints à fournir la caution judicatum solvi. Bonfils, Compét. des trib. franç., n. 120; Gerbaut, Compét. des trib. franç. à l'ég. des étr., p. 57; Weiss, Tr. élém. de dr. int. priv., p. 759; de Folleville, De la naturalisation, n. 684; Vincent et Pénaud, Dict. de dr. int. priv., vo Caution judicatum solvi, n. 24 et s.

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205. Par contre, celui qui de Français est devenu étranger peut être astreint à fournir la caution, même lorsqu'il s'agit d'une obligation antérieure à son changement de nationalité. De Folleville, op. cit., n. 682, p. 519; Weiss, p. 760.

206. La caution sera due également par le demandeur étranger qui a succédé, par héritage ou par cession, aux droits d'un Français. Paris, 24 févr. 1877, [Clunet, 77.38] Seine, 13 avr. 1877, [Clunet, 78.160]

Trib.

207. Ce que nous venons de dire à l'égard du demandeur s'applique également au défendeur. Du moment que la partie défenderesse appartient à la nationalité française au début de l'instance, elle peut exiger la caution judicatum solvi, sans qu'il y ait à tenir compte de sa nationalité antérieure ou de celle de la personne dont elle peut être l'ayant-droit. De même, il importe peu que le défendeur, de nationalité étrangère, ait obtenu la jouissance des droits civils par autorisation d'établir son domicile en France postérieurement à la naissance de son obligation vis-à-vis d'un autre étranger. Il peut réclamer du demandeur la caution judicatum solvi comme le ferait un Français. Weiss,

loc. cit.; Gerbaut, p. 58; Aubry et Rau, t. 8, p. 129, § 747 bis, note 15; Vincent et Pénaud, op. cit., n. 7.

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208. Supposons maintenant que le changement de condition se produise en cours d'instance: un des plaideurs change de nationalité ou bien un Français est substitué à un étranger, et vice versa, ou bien encore un traité diplomatique entre en vigueur ou cesse d'être applicable. Ces modifications doivent nécessairement avoir des conséquences relativement à la caution judicatum solvi.-V. Trib. Seine, 17 janv. 1885, [J. le Droit, 28 janv. 1885]; — 3 mai 1888, [J. le Droit, 5 mai 1888] Ainsi, serait passible de la caution le demandeur qui, en cours d'instance, deviendrait étranger. Trib. Seine, 3 mai 1888, précité. Mais la caution ne pourrait être ordonnée que pour les frais postérieurs à ce changement de condition; de plus, elle devrait être requise, à peine de déchéance pour cause de renonciation tacite, aussitôt après le changement et avant tout nouvel acte de procédure.

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209. Par contre, si, au cours d'un procès, l'étranger était admis à la jouissance des droits civils, s'il acquérait la qualité de Français, la caution qu'il aurait été condamné à fournir serait déchargée. Bruxelles, 1er juill. 1826, [cité par Vincent et Pénaud, vo Caution judicatum solvi, n. 142]. Mais ce ne serait que pour l'avenir et non pour le passé.

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210. De même, si une convention diplomatique dispensant de la caution intervenait au cours de l'instance, elle n'aurait pas d'effet rétroactif; l'étranger ne pourrait demander restitution de la somme par lui déposée à titre de caution pour les frais déjà exposés. Trib. Seine, 1er oct. 1862, [Gaz. des trib., 7 oct. 1862] V. aussi Paris, 29 juin 1889, Drissler, [Rev. prat. de dr. intern., 1889, vo Caution judicatum solvi, n. 16]

RÉPERTOIRE.

Tome IX.

74

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