Page images
PDF
EPUB

2004. Le mandant peut révoquer sa procuration quand bon lui semble, et contraindre, s'il y a lieu, le mandataire à lui remettre, soit l'écrit sous seing privé qui la contient, soit l'original de la procuration si elle a été délivrée en brevet, soit l'expédition, s'il en a été gardé minute. (C. 1282, 1283, 2006.)

2005. La révocation notifiée au seul mandataire ne peut être opposée aux tiers qui ont traité dans l'ignorance de cette révocation, sauf au mandant son recours contre le mandataire. (C. 1165, 1998; Pr. 75, 344 s.)

2006. La constitution d'un nouveau mandataire pour la même affaire vaut révocation du premier, à compter du jour où elle a été notifiée à celui-ci. (C.

2003 s.; Pr. 78.)

2007. Le mandataire peut renoncer au mandat, en notifiant au mandant sa renonciation. - Néanmoins, si cette renonciation préjudicie au mandant, il devra en être indemnisé par le mandataire, à moins que celui-ci ne se trouve dans l'impossibilité de continuer le mandat sans en éprouver lui-même un préjudice considérable. (C. 1146 s., 1372 s., 1991, 2010.)

2008. Si le mandataire ignore la mort du mandant, ou l'une des autres causes qui font cesser le mandat, ce qu'il a fait dans cette ignorance est valide. (C. 1135, 1991, 2010.)

2009. Dans les cas ci-dessus, les engagements du mandataire sont exécutés à l'égard des tiers qui sont de bonne foi. (C. 1135, 2268.)

2010. En cas de mort du mandataire, ses héritiers doivent en donner avis au mandant, et pourvoir, en attendant, à ce que les circonstances exigent pour l'intérêt de celui-ci. (C. 724, 1135, 1373; Pr. 344 s.)

MANIPULE.

Voy. ORNEMENTS SACERDOTAUX.

MARCHANDS.

Voy. COMMERCE.

MARCHANDE (Femme).

Voy. FEMME, n. 4.

MARCHÉ.

Voy. AFFAIRE, Fotre, Louage, Vente. MARI.

Voy. ÉPOUX.

MARIAGE.

1. Tous les peuples ont regardé le mariage comme la base de la société. C'est le mariage qui forme la famille; or, il ne peut y avoir de société bien constituée sans la famille. C'est en effet dans la famille que se trouve le principe de l'ordre, la succession des générations, etc. Nous avons développé ces considérations au mot Époux : nous n'avons pas à y revenir. Nous étudierons donc ici le mariage, 1 comme contrat naturel ; 2° comme sacrement; 3° nous exposerons les devoirs des époux; 4° nous dirons les précautions que doit prendre un pasteur pour disposer ses paroissiens au mariage. Comme nous envisageons ici le mariage principalement sous le rapport chrétien, puisque nous consacrons un article spécial au mariage civil, nous devons présenter quelques considérations sur l'influence du christianisme sur le mariage.

CHAPITRE PREMIER.

INFLUENCE DU CHRISTIANISME SUR LE MARIAGE.

2. Lorsque le christianisme arriva, le mariage était le moins solennel des contrats :

il était parfait par le consentement, et nulle cérémonie religieuse ou civile n'était nécessaire pour en assurer la validité. La communauté apparente d'habitation et de possession d'élat était une preave suffisante de son existence. Lorsque les époux ne pouvaient plus supporter le poids de leur chaîne, la faculté du divorce était ouverte. « Où sont les mariages heureux, disait Tertullien, que la pureté des mœurs rendait si parfaits, qu'il s'est passé plus de cinq cents ans sans qu'il soit arrivé de divorce dans aucune famille. Aujourd'hui en s'épousant on fait vœu de se répudier, et le divorce est comme un fruit du mariage. »>

Vers la fin de la république on faisait mieux. C'est à peine si on se mariait; la corruption des mœurs, la soumission des femmes esclaves, i'égoïsme produit par les malheurs publics, avaient dégoûté les Romains du mariage.... La cité, dépeuplée par les guerres et les proscriptions, était menacée de se dépeupler encore plus par le mépris des institutions qui donnent des citoyens à l'Etat. César avait entrepris de guérir ce mal. Auguste s'y appliqua avec des soins plus efficaces. Il fit rendre les fameuses lois Julia et Pappia Poppea destinées à encourager les mariages et à punir le célibat.

Par ces lois, de grands avantages étaient accordés aux époux et plus encore à ceux qui avaient des enfants. Qu'arriva-t-il de là? C'est, dit Plutarque, qu'on se mariait et l'on avait des enfants, non pour avoir des héritiers, mais pour avoir des héritages. Mais que serait-ce, s'il fallait en croire Juvénal, lorsqu'il met dans la bouche d'un complai sant adultère ce langage effronté : « De quoi te plains-tu, ingrat? te voilà père, c'est moi qui te vaux les jura parentis, c'est par moi que tu pourras être institué héritier, tu recueilleras, et les legs qui le sont faits, et le doux émolument des caducs. Et si j'arrive jusqu'à mettre trois enfants dans ta maison, ne voistu pas les autres avantages que tu as à attendre en sus des caducs? » Quelles mœurs! quelle société !

3. C'est sur ces entrefaites qu'arriva le christianisme, trouvant le mariage ainsi dégradé par l'avarice, souillé dans ce qu'il a de plus saint par les turpitudes de l'amour du gain, reposant politiquement sur la base de l'intérêt. Mais le christianisme n'avait pas été institué pour rester spectateur de cet abaissement. Dans ses principes le mariage doit être le résultat d'une vocation libre; l'union de l'homme et de la femme s'épure au feu de la grâce par l'assistance de l'esprit divin; elle s'élève jusqu'au ciel par la dignité du sacrement. Voy. Troplong, Influence du christianisme sur le droit romain.

Aussi le christianisme opéra une révolution complète sur les unions matrimoniales, surtout lorsqu'il fut en possession de la direction et des jugements concernant les mariages. Les effets de son action sont trop visibles pour qu'il soit inutile de les rappeler ici. Cependant par la plus malheureuse des zensées notre loi civile a entièrement séparé

le mariage, comme contrat civil, de l'institation religieuse. Cette séparation n'en est pas moins très-funeste, quoique les lois civiles françaises sur ce point aient été perfectionnées par les immenses améliorations apportées au mariage par le christianisme. Voy. MARIAGE CIVIL.

CHAPITRE II.

DES CONDITIONS ESSENTIELLES AU MARIAGE.

4. Le mariage est le contrat le plus solennel que nous puissions concevoir. Toutes les conditions requises pour le contrat sont donc essentielles et éminemment essentielles au contrat de mariage. Or, pour toute espèce de contrat il faut, 1° le consentement des parties; 2° la capacité des parties contraclantes; 3 un objet certain; 4° une cause licite. Nous allons exposer chacune de ces conditions par rapport au mariage.

ARTICLE PREMIER.

Du consentement nécessaire pour la validité du mariage.

5. Il n'y a point de doute, disent les Conférences d'Angers, que le consentement mutuel des parties ne soit de l'essence du mariage, puisque c'est un contrat par lequel un homme et une femme se donnent volontairement un pouvoir réciproque sur le corps l'un de l'autre, et s'engagent mutuellement pour toute leur vie à des devoirs indispensables or il ne peut y avoir de contral entre des parties sans leur consentement; par conséquent le mariage se contracte entre un homme et une femme par leur consentement réciproque, et il ne peut se contracter sans ce consentement (1): « Matrimonium in veritate contrahitur per legitimum viri et mulieris consensum (2). Si desit consensus mentalis ex parte unius, ex neutra parte est matrimonium; quia matrimonium consistit in mutua conjunctione. » Ce n'est que par leur consentement mutuel que l'homme et la femme ont pouvoir l'un sur l'autre, cl qu'ils sont engagés à certains devoirs l'un envers l'autre, n'y ayant aucune loi qui donne pouvoir à un tel homme sur le corps d'une telle femme, ni à une telle femme sur le corps d'un tel homme, ou qui leur impose les obligations qui suivent le mariage.

Aussi l'Eglise a toujours demandé, pour la validité du sacrement de mariage, le consentement mutuel des parties. Si bien que le pape Alexandre III, dans le chapitre Cum locum, de sponsal. et matrim., déclare que le mariage se contracte par le seul consentement. Innocent III, dans le chapitre Cum upud, au même titre, dit que le seul consentement des parties qui contractent, suffit pour le mariage (3): « Sufficit ad matrimonium solus consensus illorum, de quorum quarumque conjunctionibus agitur. » Le pape Nicolas 1" l'avait déjà déclaré, répon

(1) Innoc. III, cap. Tua fraternitati, de sponsal. et

matrim.

(2) 9. Thom. in-4. Sent. distinct. 27, quæst. 1, art. 2, q. 4.

dant aux demandes des Bulgares, comme le rapporte Gratien dans le can. Sufficiat, c. 27, q. 2, où ce pape avertit ces peuples que, quand même toutes les autres solennités auraient été observées dans un mariage, et qu'il aurait été consommé, le seul défaut du consentement des parties le rendrait nul (4): « Sufficiat secundum leges solus eorum consensus de quorum conjunc tionibus agitur. Qui consensus, si in nuptiis solus forte defuerit, cætera omnia etiam cum ipso cultu celebrata frustrantur. » Pour être valable le consentement doit être revêtu de certaines conditions. Il doit être intérieur, extérieur, libre, absolu, et fait avec connaissance. Nous allons exposer chacune de ces conditions; nous dirons en même temps les défauts qui les vicient. Enfin nous examinerons si le consentement doit être personnel, ou s'il peut être donné par procureur. § 1. Le consentement doit être interieur.

6. Il est certain que si un homme en épousant une femme, ou une femme en épousant un homme, avait seulement consenti à l'extérieur au mariage et n'y avait néanmoins pas consenti intérieurement, il n'y aurait pas alors eu de mariage dans le for de la conscience. Le pape Innocent III fut consulté sur un mariage où tout l'extérieur avait été bien observé; le consentement verbal existait, mais il manquait le consentement intérieur : il déclara le mariage absolument nul. Voici le motif de sa décision: Quoniam sine consensu cætera nequeunt fœdus perficere conjugale (Cap. Tua nos, De sponsalibus). Le pape Nicolas ne s'exprime pas avec moins d'énergie dans le chap. Sufficiat : Si consensus in nuptiis ipse solus forte defuerit, cætera omnia etiam cum coitu ipso celebrata frustrantur. 7. Cette décision a fait naître de graves difficultés : elle est en effet de nature à causer beaucoup d'embarras. De là naissent deux questions: 1° L'époux qui a donné un consentement intérieur est-il obligé de croire son conjoint qui prétend qu'il n'y a pas de mariage, parce qu'il n'a consenti qu'extérieurement? 2o A quoi peut être tenu celui qui n'a donné qu'un consentement fictif?

1. On convient généralement que le conjoint qui a apporté au mariage toutes les conditions requises de sa part n'est pas obligé de croire son époux qui vient lui dire que son consentement n'est que fictif. Puisqu'il a pu mentir une fois, qui peut assurer qu'il ne ment pas une seconde? Nous avons aussi une règle du droit canon qui confirme cette décision. Innocent III, cap. Per tuas, De Probationibus, s'exprime ainsi : Indignum est ut quod sua voce quispiam dilucide est protestaius, in eumdem casum proprio valeat lestimonio infirmare.

2° Si cependant le consentement n'a été que fictif, quel remède y a-t-il au mal? Le remède, c'est un consentement nouveau. Il

(3) Innoc. III, cap. Cum apud, de sponsalibus et

matrim.

(1) Nicolaus I, apud. Grat. can. Sufficiat, caus. 27, quæst. 2.

est en effet de toute justice que la partie qui a agi de bonne foi, ayant toutes les raisons de croire qu'on en agissait de même avec elle, doit recevoir une indemnité proportionnée au tort qu'on lui a fait. Or, il est évident que l'indemnité ne peut être autre qu'un consentement bien conditionné. Je ne crois pas que dans un tribunal, soit civil, soit ecclésiastique, on recevrait une demande en déclaration de nullité de mariage fondée sur ce seul motif. Voy. REVALIDATION DES MARIAGES, n. 2.

Billuart apporte quelques exceptions à ce principe. Il dit que le conjoint qui a donné un consentement fictif ne serait pas obligé d'en donner un véritable, 1° si les conditions étaient tellement différentes que la femme ait pu aisément se croire trompée. Nous pensons qu'avec la solennité qu'on donne aujourd'hui au mariage, une telle exception est inadmissible; 2 si la femme qu'on croyait vierge ne l'était pas cette exception nous paraft insuffisante; 3° si celui qui n'a donné qu'un consentement fictif venait à contracter un mariage valide avec une autre personne. Il est certain que rien au monde ne peut l'obliger à donner un consentement réel, et à laisser aller son second mariage, quand même, dit saint Thomas, on emploierait l'are terrible de l'excommunication. Il ne devrait pas moins indemniser son fictif conjoint pour l'injure qu'il lui a faite; 4" s'il y avait à craindre de grands malheurs d'un semblable mariage; on peut alors se contenter d'une compensation pécuniaire.

§ 2. Le consentement doit être extérieur.

8. « Le consentement purement intérieur, qui ne paraît point au dehors, disent les Conférences d'Angers, ne suffit pas pour le mariage; car le consentement intérieur n'est autre chose qu'un acte ou mouvement de la volonté qui est inconnu au prochain, jusqu'à ce qu'il soit manifesté au dehors; et le mariage est un contrat qui se passe entre deux personnes qui s'engagent l'une à l'autre. Il est donc absolument nécessaire qu'elles se fassent réciproquement connaître, par quelque signe extérieur, la volonté qu'elles ont de s'unir ensemble par le lien du mariage: autrement il ne se passerait point de contrat entre elles. Ajoutez que le mariage, étant un sacrement, doit être un signe sensible de la grâce invisible que Dieu y a attachée par conséquent, le consentement des parties, qui en est la matière et la forme, doit aussi être extérieur et en quelque manière sensible.

« On exprime ordinairement par des paroles le consentement qu'on donne au mariage, parce que c'est par les paroles que les hommes ont coutume de manifester leurs pensées et leurs intentions: ce qui fait dire au pape Eugène IV, dans le décret aux Arméniens, que les paroles sont la cause efficiente du mariage « Causa efficiens matrimonii est muluus consensus, regulariter per verba de præsenti expressus. » Mais ce mot regulariter, qui veut dire ordinairement, fait connaître que ce pape a cru qu'il n'est pas ab

solument nécessaire, pour la validité du mariage, que le consentement soit exprimé par des paroles, et qu'au défaut des paroles les sigues peuvent suffire. En effet, les sourds et muets peuvent validement contracter mariage sans qu'ils parlent. Le pape Innocent Il l'a décidé dans le chapitre Tue fraternitati, de Sponsal. et matrim. « Surdi et muti possunt contrahere matrimonium per consensum mutuum sine verbis. » Mais il faut qu'ils expriment par des signes visibles leur consentement, qu'ils ne peuvent faire connaître de vive voix, dit ce pape dans le chapitre Cum apud sedem, au même titre : « Cum quod verbis non possit, signis valeat declarare. » Pour la suite, voy. MATIÈRE et FORME.

§ 3. Le consentement doit être libre.

a

9. S'il est de droit naturel que la liberté doit exister dans toutes les conventious, cette liberté est bien plus nécessaire encore dans le contrat de mariage, qui est de sa nature indissoluble, et qui à des conséquences immenses. L'Eglise, ayant voulu sanctionner de sa grande autorité la liberté des mariages, a mis la crainte et la violence au nombre des empêchements dirimants. En developpant les principes qu'elle a établis sur l'empêchement de la crainte, nous ferous connaître en même temps la liberté nécessaire pour la validite du mariage. Ensuite nous dirons comment doit se conduire un époux qui a contracté un mariage sans liberté súlfisante; enfin, nous parlerons des peines portees contre ceux qui emploient la violence pour lorcer quelqu'un a se marier.

1. De la nature de la liberté nécessaire pour la validité du mariage.

10. Lorsque la violence et la crainte laissent la connaissance nécessaire pour un acte humain, elles ne peuvent, de droit naturel, vicier le consentement requis pour la validité du mariage; mais comme un mariage contracté sous l'impression d'une semblable crainte ne pouvait avoir que des suites malheureuses, le droit positif est intervenu: il a déclaré nul tout mariage contracté sous l'impression de la crainte, Voici les dispositions du droit canonique: Cum locum non habeat consensus ubi metus vel coactio intercedit, necesse est ut, ubi consensus cujusdam requiritur, coactionis materia repellatur; matrimonium autem solo consensu contrahitur; el ubi de ipso quæritur, plena debet auctoritate ille gaudere cujus est animus indagandus, ne per timorem dicat sibi placere, quod odit, el sequatur exitus qui de invitis solet nuptiis provenire (Cap. Verticis). Telles sont les expressions du droit canonique qui rendent nul un mariage contracté sous l'impression de la crainte; mais toute espèce de crain:0 ne peut être suffisante pour produire cet effel; car autrement les causes matrimoniales n'auraient pas de stabilité. On exige que la violence et la crainte aient quatre conditions pour qu'elles puissent rendre nul un mariage: 1° qu'elles soient graves; 2° qu'elles solepi

imprimées par une cause extérieure ; 3° qu'elles soient injustes; 4 qu'elles soient employées pour déterminer au mariage.

11. 1. Ce qui constitue la crainte grave n'est pas quelque chose de bien déterminé; il est abandonné à l'appréciation du juge, qui doit examiner l'âge, le sexe, le caractère d'une personne. Un homme fort ne se laisse pas intimider par les menaces d'une faible femme; une jeune fille sans expérience se laisse souvent ébranler, même fortement, par des maux plus apparents que réels; un esprit faible se laisse dominer par la crainte des fantômes, et quelquefois la fantasmagorie fait autant d'impression que les maux qui, dans tout état de cause, sont de nature à produire une crainte grave.

Pour caractériser la crainte absolue, Innocent III, dans le chapitre Consultationi, s'exprime ainsi : De illato metu est cum diligentia inquirendus, si talis metus inveniatur illatus qui cadere potuit in constantem virum. Telle est, selon la glosse sur le chapitre Dilectus, de iis quæ vi metus..... La menace de la mort, de la mutilation de quelque membre, d'une longue prison, de perdre son honneur ou son bien, d'être réduit en servitude, ou de quelque tourment considérable, est de nature à produire une crainte grave. Si la menace de ces maux était faite par une personne qui n'eût pas le pouvoir de les mettre à exécution, il est bien évident qu'elle ne constituerait pas la crainte grave.

Il y a des personnes qui nous sont si chères, que nous craignons autant pour elles les maux que nous redoutons pour nous-mêmes. Il est certain que nous sommes vivement impressionné. on-seulement des grands maux qui peuvent nous arriver à nous-mêmes, mais encore de ceux qu'on peut faire souffrir à nos père et mère, frères et sœurs; aussi les docteurs regardent une crainte semblable, imprimée en vue du mariage à l'un des proches parents des futurs époux, comme une cause de nullité. (Loi du Digeste: Isti quidem, de eo quod metus causa.}

12. 2° La crainte que nous pouvons éprouver peut venir de différentes causes : les unes nous viennent de nous-mêmes ou nous ont été imprimées par des agents nécessaires; les autres nous ont été imprimées par des hommes libres. La maladie, l'enfer, une tempête, peuvent faire une très-vive impression et engager à contracter mariage. Une personne dominée par des passions violentes consent à épouser un homme qu'elle n'épouserait pas si elle ne se sentait trop violemment tentée. Ces sortes de crainte ne portent pas atteinte à la validité du mariage, comme on peut le conclure du chapitre Sunt nobis; de Regularibus. Et en effet, dans ces cas, c'est la volonté qui se porte d'elle-même au mariage, la crainte lui sert seulement d'occasion.

Les casuistes proposent un cas qui appartient autant à la crainte intérieure qu'extérieure. Un médecin habile, qui soigne une personne alleinte d'une maladie grave, la deinande en mariage; celle-ci refuse. Pour la déterminer, il lui déclare que dans le cas où

elle ne voudrait pas consentir, il va l'aban. donner à son malheureux sort, c'est-à-dire à la mort. Vaincue par cette menace, la malade cède; le mariage se célèbre; est-il nul? Non, disent plusieurs docteurs, parce que la crainte procède ab intrinseco. Oui, disent d'autres, parce que la déclaration imprime la crainte ; or cette déclaration est ab extrinseco. Nous pensons qu'il faudrait examiner si ce médecin est nécessaire à la guérison de la malade. S'il était nécessaire, et que la nécessité fût connue de la malade, nous regarderions la crainte comme une cause de nullité. S'il n'était pas nécessaire et qu'il pût être suffisamment remplacé par toute autre personne, la crainte serait plus ab intrinseco, et le mariage ne serait pas nul.

La crainte procède ab extrinseco quand elle est imprimée par un agent humain libre et raisonnable. Les hommes qui peuvent imprimer la crainte peuvent être rangés dans deux classes les uns doivent être comptés parmi ceux à qui nous devons un respect particulier, comme un père, une mère, un iuteur, un puissant seigneur sous la domination duquel on se trouve; les autres sont ceux auxquels on ne doit pas un respect spécial.

Ceux à qui nous devons respect peuvent agir par voie de persuasion, d'autorité, de commandement, sans y joindre la violence et la menace de mauvais traitements. Ils peuvent aussi y joindre les mauvais traitements. Lorsque la crainte est purement révé rentielle, qu'il n'y a que des ordres, ou la persuasion sans menace de mauvais trailements, le mariage est valide, comme en conviennent les canonistes. Ils s'appuient sur la loi 32 ff. De Ritu nuptiarum, qui s'exprime ainsi Si patre cogente duxit uxorem, quam non duceret si sui arbitrii essel, contraxit tamen matrimonium quod inter invilos non contrahitur, maluisse enim hoc videtur.

:

Quand la crainte provient de ceux qui n'ont pas droit à un respect spécial, elle doit évidemment avoir tous les caractères que nous lui avons donnés, en constatant en quoi consiste la gravité de la crainte. Elle doit de plus avoir le mariage pour fin, comme nous allons le dire, pour annuler le mariage.

13. 3° La crainte imprimée pour déterminer quelqu'un à se marier peut être juste ou injuste. La crainte juste est celle que les lois ou les magistrats, en suivant l'ordre de la justice, impriment à ceux qui sont coupables de quelques erreurs. Une telle crainte n'annule pas le mariage, parce qu'elle ne fait pas injure à celui à qui on la fait éprouver Voy. la loi Si mulier, ff. De eo quod metus causa. Cessat edictum quia suum sibi metum ipsa infert. Un prince porte une loi qui condamne à une peine sévère celui qui, ayant abusé d'une fille, ne consent pas à l'épouser. Pressé par cette crainte, un jeune homme épouse la personne dont il a abusé; le mariage est valide. Dans le chap. Pervenit de adulteriis, Grégoire IX impose à un jeune homme qui avait déshonoré une fille l'ordre de l'épouser, ou bien qu'il serait puni

corporellement

c'était déclarer qu'une crainte juste ne nuit nullement à la validité du mariage.

. La crainte est injuste quand quelqu'un menace et fait violence sans en avoir le droit: ainsi un père menace de donner la mort au séducteur de sa fille s'il ne consent à l'épouser il fait abus de son pouvoir et imprime une crainte injuste. S'il le menaçait seulement d'exiger en justice la réparation du dommage que les lois peuvent lui accorder, la crainte serait juste, parce qu'il demeurerait dans son droit. La crainte injuste qui vient des menaces d'une personne qui n'a ni le droit ni l'autorité de les faire, rend nul le consentement qu'elle extorque, parce que la liberté se trouve notablement diminuée par cette sorte de crainte.

14. 4 Les canonistes exigent enfin que la crainte ait été imprimée pour déterminer au mariage. Voyez le canon: Cum locum, de Sponsalibus et matrim. De là Innocent IV conclut que si un prisonnier offrait de luimême sa main à une personne pour sortir de prison, le mariage serait valide, à moins que la détention ne fût injuste et à dessein de le forcer à contracter mariage. On dit encore que si un homme qui a abusé d'une jeune fille était sous le poignard des assassins, et que, pour se tirer de leurs mains, il promit de lui-même, sans y être sollicité, d'épouser la personne déshonorée, le mariage serait valable.

On voit donc que la crainte, pour vicier le consentement requis pour le mariage, doit être griève, injuste, imprimée par une cause étrangère, à dessein d'obliger à consentir au mariage.

II. De la conduite à tenir par les époux qui ont contracté mariage sans liberté suffisante. 15. Le mariage contracté sans une liberté suffisante est radicalement nul. De là il suit que celui qui a contracté mariage malgré lui ne peut sans péché consentir à la consommation du mariage, à moins qu'il ne l'ait rendu valide par un consentement libre et volontaire. S'il veut faire casser son mariage, il doit le faire dans le délai qui lui est accordé par le droit. Car s'il arrivait qu'un mariage fût contracté d'abord par la force, et qu'après que la cause de la violence prétendue a cessé, les parties aient habité ensemble volontairement et sans réclamer pendant un assez long temps, dans ce cas celui qui prétend avoir été forcé n'est pas recevable à se pourvoir en déclaration de nullité du mariage, parce que cette cohabitation volontaire et pendant un long temps fait présumer que le mariage, qui était nul dans son principe, a été ratifié par un consentement survenu depuis. Clément III l'a ainsi décidé d'une cohabitation d'une année et demie. Clém. 111, cap. Ad id, de Sponsal. et matrim. Voyez REVALIDATION DES MARIAges, n. 2. III. Des peines portées contre ceux qui violentent les mariages.

16. Les seigneurs temporels et les magis

trats qui contraignent les personnes sur lesquelles ils ont juridiction à se marier avec quelque personne qu'ils leur indiquent et pour qui elles n'ont pas d'inclination, sont excommuniés par le seul fait, selon la déclaration du concile de Trente, sess. 24, de la Réformation du mariage, chap. 9. Ce canon a été publié dans la plupart des diocèses de France; l'ordonnance de Blois l'a adopté, art. 281.

Il y a quelques docteurs qui soumettent à la loi du concile les pères et mères qui contraignent leurs enfants à se marier: mais en lisant attentivement tout le chapitre IX, on voit que l'excommunication n'est lancée que contre ceux qui jouissent de la juridiction au for extérieur: « Temporalium domianorum ac magistratuum. . . sub earum ju<< ridictione degentes... cum maxime nefa« rium sit... ab eis injurias nasci a quibus « jura exspectantur. Il faut cependant avouer que les pères et mères pèchent lorsqu'ils ne laissent pas à leurs enfants une honnête liberté pour le mariage. (S. Thom. 4 Sent., dist. 29, q. 1, art. 4.)

IV. Le consentement doit être donné avec connaissance.

17. Cette condition est de la nature même du consentement; car on ne peut vouloir ce qu'on ne connaît pas. Celui qui n'aurait pas l'usage de la raison ou qui tomberait dans l'erreur ne pourrait contracter validement. Au mot ERREUR, nous disons quand elle est un obstacle à la validité du mariage. Nous avons uniquement à nous occuper ici du défaut de raison.

18. Il eût été dangereux de laisser les enfants se marier dès l'âge le plus tendre. Aussi la loi canonique a-t-elle déterminé un âge avant lequel il n'est pas permis de se marier. C'est quatorze ans accomplis pour les garçons et douze pour les filles. Cet âge nous parait bien jeune ànous qui sommes sous une latitude tempérée, mais il est même avancé pour les contrées brûlantes du midi. La loi romaine avait déjà fixé le mariage à cet âge. La loi ne s'exprime pas bien clairement sur la nullité du mariage contraclé par les garçons avant quatorze ans et douze par les filles. Depuis le concile de Trente, il parait que la nullité de ces mariages est plus constante; il y a eu plusieurs déclarations des cardinaux dans ce sens. Le droit apporte cependant une exception en faveur de ceux en qui la malice et le développement du corps suppléent à l'âge. In quibus malitia supplet ætatem, id est qui ante pubertatis annos generare possunt.

L'âge ayant été fixé par le droit canonique, on peut certainement en obtenir dispense. Au pape seul appartient le droit d'accorder cette dispense.

Les insensés ne peuvent pas non plus contracter mariage tandis qu'ils n'ont pas l'usage de la raison; mais dans les moments lucides ils peuvent validement donner leur consentement. Nous croyons aussi que les personnes qui ont l'esprit très-faible peuvent

« PreviousContinue »