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telle, sans quoi il n'obtiendrait point l'indulgence.

Celui, au contraire, qui, en se confessant de bonne foi, oublie une faute mortelle, n'est pas obligé de retourner la confesser pour gagner l'indulgence; car sa confession ayant été sacramentelle, il a tout à la fois satisfait à l'intention du souverain pontife, et opéré sa réconciliation avec Dieu. Il suffira donc qu'il soumette ce péché oublié aux clefs de l'Eglise en temps convenable, c'està-dire dans sa prochaine confession, s'il se confesse souvent, ou le plus tôt qu'il pourra commodément, s'il n'est pas dans l'usage de se confesser souvent.

12. 2 QUESTION. Celui qui doit faire la communion pascale et gagner le jubilé à peu près en même temps, est-il obligé de se confesser deux fois ?

Il n'y a pas de doute que si la personne s'était confessée dans le courant de l'année, il n'y aurait pas obligation pour elle de se confesser deux fois, parce que n'étant pas obligée de se confesser pour la communion pascale lorsqu'on est en état de grâce, la confession qu'on fait alors peut remplir l'uvre prescrite pour le jubilé. Devrait-on porter le même jugement si on ne s'était pas confessé dans le cours de l'année ? Nous pensons qu'on devrait se confesser deux fois; parce que Benoît XIV ayant déclaré qu'une œuvre prescrite à un autre titre ne peut servir pour le jubilé, il s'ensuit que le fidèle étant obligé de se confesser pour satisfaire à la confession annuelle, il ne peut par cette confession gagner le jubilé. Ce n'est pas sans surprise que dans le jubilé accordé à l'avénement de Pie IX, nous avons vu prescrire une double communion au temps de Pâques, sans qu'on ait fait mention d'une double confession pour ceux qui ne s'étaient pas confessés dans le cours de l'année

§ 2. De la communion requise pour gagner le jubilé. 13. Il y a des auteurs qui font des bulles à leur manière, arrangent les mots de façon que la communion ne serait pas rigoureusement nécessaire. Ainsi Ferraris et plusieurs docteurs après lui disent que si la bulle s'exprimait ainsi : Omnibus confessis et sacra communione refectis, il ne serait pas nécessaire de communier dans le temps du jubilé, à ceux qui l'auront fait quelques jours auparavant. Mais le texte des bulles est exprès, la communion e-tune œuvre essentielle. Il est de plus bien certain que la communion prescrite est une bonne communion, qu'une communion sacrilége ne suffirait pas; car on ne peut supposer que l'intention de l'Eglise ait élé de reconnaître comme suffisante un semblable crime. On peut faire la communion à toutes les époques du temps du jubilé.

Les théologiens, dit Mgr Bouvier, demanden, 1° si une communion faite par un homme qui se croit de bonne foi en état de grâce, tandis qu'il n'y est pas, suffit-elle pour le jubilé? Quelques-uns le nient, parce que celle sorte de communion n'est point Viviliante, ni telle par conséquent que le

Souverain pontife est censé l'exiger. D'ai!leurs, pour obtenir l'effet du jubilé, il faut être en état de grâce; or, l'homme dont il s'agit n'y est pas comme on le suppose: donc sa communion ne suffit point. Cette opinion, soutenue par Viva, n'est certainement pas sans fondement.

« D'autres théologiens cependant font une distinction qui paraît assez juste: ou cet homme, disent-ils, a une contrition suffisante pour être justifié par le sacrement de Pénitence, s'il lui était administré; dans ce cas l'Eucharistie reçue de bonne foi lui remet ses péchés, et il gagne le jubilé ou il n'a pas même ce degré de contrition dont nous parlons, et alors il ne peut gagner le jubilé ; mais il ne doit s'en prendre qu'à lui-même (Collet, p. 186).

« Si une personne ne pouvait communier dans le temps marqué sans qu'il y eût de sa faute, ou parce qu'elle aurait rompu le jeûne involontairement le dernier jour du jubilé où elle devait communier, ou par une autre cause quelconque, elle ne serait pas nécessairement privée pour cela de l'indulgence: le confesseur aurait le droit ou de différer le

jubilé à son égard, ou de changer l'obligation

de communier dans une autre œuvre de

piété, de religion ou de charité, selon ce que nous dirons plus loin. »>

14. 2° Peut-on satisfaire par une seule communion au devoir pascal et à la condition prescrite pour le jubilé ? - Nous avons vu depuis quelques années deux jubilés fixés au temps pascal dans quelques diocèses : fondés sur ce principe de Benoît XIV, qu'on ne peut remplir la condition d'une indullitre, plusieurs évêques prescrivirent deux gence par une œuvre prescrite à un autre communions; d'autres, pour faciliter l'accomplissement du devoir pascal, sollicitèrent à Rome la grâce de pouvoir accorder à leurs diocésains la facilité de satisfaire au devoir pascal et à la communion du jubilé par une seule communion. Rome refusa d'accéder à leur désir et prescrivit une seconde communion. C'est donc aujourd'hui une chose certaine qu'on ne peut satisfaire par une seule communion au devoir pascal et à la communion prescrite pour le jubilé.

§ 3. De la visite des églises, prescrite par la bulle du jubilé.

15. Dans toutes les bulles qui concernent le jubilé, il y a des visites d'églises prescrites. Rien en effet n'était plus convenable puisque nos églises sont la maison de Dieu, que tous les jours les grands mystères de la religion s'y renouvellent. Mais il faut les visiter avec un esprit de foi et de piété. Voici comment on doit faire ces visites.

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tigué que l'on soit, il est nécessaire de visiler les quatre basiliques le même jour pour faire une station: c'est ce qui résulte bien clairement du texte des bulles. Mais il n'est pas nécessaire que le trajet se fasse à pied; on peut, avec moins de mérite, il est vrai, aller à cheval ou en voiture: les auteurs n'en font aucune difficulté, et nous l'avons vu pratiquer à Rome, pendant le jubilé de 1825, par les personnes les plus pieuses.

« Comme il y a deux manières de compter le jour à Rome, et en général dans l'Eglise catholique, on a disputé pour savoir si la visite devait se faire dans l'espace du jour civil ou du jour ecclésiastique. On apportait, dans la discussion, des raisons plausibles de part et d'autre. Benoît XIV mit tout le monde d'accord en déclarant dans sa bulle Peregrinantes, pour le jubilé de 1750, qu'on pouvait prendre l'un ou l'autre à sa volonté. Clément XIV et Pie VI firent la même chose en 1774 et 1775; Léon XII a renouvelé cette disposition dans ses deux bulles de 1824 et 1825. Il est plus d'usage en France de s'en tenir aux limites du jour naturel ou civil pour faire ses stations, mais on est libre de choisir et de suivre, si on l'aime mieux, la supputation ecclésiastique.

ire QUESTION. Est-il nécessaire pour gagner le jubilé à Rome, d'entrer dans les basiliques par la porte sainte ? On répond généralement que non; car aucune bulle ne l'a prescrit jusqu'ici comme condition essentielle, et Benoît XIV a déclaré formellement dans sa bulle Convocatis, du 25 novembre 1749, §. 49, que cela n'était point d'obligation.

« 2 QUESTION. Ceux qui étant partis pour Rome sont arrêtés en route par la mort, la maladie, ou quelque autre cause, ou bien qui, étant arrivés à Rome, ne peuvent terminer ni méme commencer leurs stations, gagnent-ils l'indulgence? Benoît XIV déclara dans la bulle Peregrinantes, §. 7, que tous ceux-là jouiraient des avantages du jubilé, en se confessant et en communiant. Clément XIV et Léon XII leur ont accordé la même faveur.

« 3 QUESTION. En visitant les églises déterminées est-il nécessaire d'y faire quelques prières ? Il est d'abord certain que, dans les intentions des souverains pontifes, la visite des églises doit être un acte de religion: par conséquent ceux qui ne se proposeraient que de satisfaire leur curiosité ne rempliraient point la condition prescrite; aussi les bulles marquent-elles qu'on y doit prier avec piété. Il est même assez d'usage à Rome de réciter le Rosaire en allant d'une église à l'autre, et on a des formules de prières pour être récitées en différents endroits de chacune d'elles à la porte sainte, à l'autel du SaintSacrement, à l'autel de la sainte Vierge, etc.: mais on convient que tout cela, quoique très-louable, n'est pas nécessaire. Il suffit d'entrer dans l'église avec un sentiment religieux et l'intention au moins virtuelle de gagner le jubilé, et d'y faire de véritables prières, n'importe en quel endroit, confor

mément aux fins que le pape s'est propo· sées. Voici comme Léon XII exprime ces fins: Qui ecclesias devote visitaverint, ibique pro sanctæ Ecclesiæ exaltatione, hæreseon extirpatione, catholicorum principum concordia, et christiani populi salute ac tranquillitate pias ad Deum preces effuderint.....

«4 QUESTION. Faut-il une prière vocale? Beaucoup de docteurs pensent qu'une prière purement mentale (Ferraris, art. 3, n. 17) suffirait; mais d'autres en très-grand nombre prétendent qu'une prière vocale est absolument nécessaire: ce sentiment, étant d'ailleurs le plus sûr, doit être suivi.

« 5 QUESTION. Combien de temps faut-il prier? Lorsque la bulle ne détermine rien sur le temps pendant lequel il faut prier, une prière très-courte suffit, pourvu qu'elle puisse réellement s'appeler prière. Une simple aspiration ne serait point assez, mais un Pater et un Ave, l'un ou l'autre, ou quelque chose d'équivalent, remplirait la condition exigée.

Lorsque la bulle porte qu'on priera pendant quelque temps, per aliquod temporis spatium, on convient que cinq fois le Pater et l'Ave, ou d'autres prières à peu près équivalentes, sont autant qu'il en faut pour n'avoir rien à craindre. A plus forte raison celui qui dit ou entend la messe dans ladite église, avec le dessein d'y faire la station, n'est tenu à rien de plus.

«6 QUESTION. Faut-il garder le silence en allant d'une église à l'autre? Il est très-louable de le faire dans un esprit de mortification et de pénitence; mais cette pratique n'étant point commandée, n'est point une condition essentielle au jubilé.

«7 QUESTION. Si la foule ne permet pas d'entrer dans l'église que l'on doit visiter, que faut-il faire? On satisfera en faisant sa prière à la porte, ou même dans le cimetière, à la suite des fidèles qui y sont restés, parce qu'on ne fait qu'un tout avec eux, et qu'on est censé être moralement à l'église. Si au contraire il s'agissait de visiter un autel ou une des chapelles intérieures de l'église, il faudrait y entrer. Dans le cas où l'on dût visiter plusieurs autels ou plusieurs chapelles, il faudrait un mouvement corporel vers chacun d'eux ou chacune d'elles avant de faire la prière qui y correspond, et cela dans l'intention de les visiter.

« 8 QUESTION. Peut-on visiter une église deux fois dans le même jour, et satisfaire aux intentions de la bulle qui ne requiert qu'un certain nombre de visites; ou bien satisferait-on pour deux jours, en comptant des premières aux secondes vépres: par exemple, faisant les stations à Rome, je finis aujourd'hui la visite des quatre basiliques, vers trois ou quatre heures après midi, par Saint-Jean de Latran; je sors de l'église; un moment après, j'y rentre et je recommence mes visites pour le jour de demain, selon la supputation ecclésiastique; je m'en reviens je m'en reviens par Sainte-Marie-Majeure que je visite aussi demain j'irai après midi visiter les deux autres églises, et lorsque j'aurai terminé, je les visiterai de même une seconde

fois pour après demain, et ainsi de sutte pendani quinze jours? Est-ce là remplir suffisam ment les intentions du souverain pontife (1)? Il y a des auteurs qui l'ont cru, et leur opinion n'est pas sans fondement; car les bulles ne demandent que l'acte d'une visite pieuse, et le temps pouvant être compté depuis les premières vêpres jusqu'au lendemain à la fin du crépuscule, il ne paraît pas qu'on allât véritablement contre le texte de la bulle Néanmoins le plus grand nombre semble se prononcer contre ce sentiment, et les fidèles n'ont point recours à ce moyen expéditif qui diminuerait presque de moitié la peine des stations. Je croirais difficilement d'ailleurs que cette pratique ne fût pas opposée aux paroles mêmes de la bulle, qui exige la visite des églises: Per quindecim continuos vel interpolatos dies, sive naturales, sive ecclesiasticos, nimirum a primis vesperis unius diei usque al integrum ipsius subsequentis diei vespertinum crepusculum, devote visitaverint.

« 9° QUESTION. Un évêque peut-il augmenter ou diminuer le nombre des stations fixées par le souverain pontife? Le pape seul accorde la grâce du jubilé; les évêques ne sont que délégués par lui pour le publier et en déterminer les conditions. Ils ne peuvent donc y rien changer de leur propre autorité. S'ils augmentaient le nombre des stations celles qu'ils ajouteraient ne serviraient de rien pour l'indulgence; et celles qu'ils retrancheraient l'empêcheraient de produire son effet; car une seule station est communément regardée comme un motif considérable, lors même qu'il en faut trente.

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10 QUESTION. S'il n'y a pas quatre églises dans un endroit, ou si elles sont trop éloignées, que doit faire l'évêque ? En vertu d'une coutume qui est reçue partout, il peut, quand il le juge expédient, désigner une chapelle, un autel, une croix, ou quelque autre objet de vénération publique pour remplacer l'église qui manque où qui est trop éloignée. Lorsque cette désignation est faite, le curé et le confesseur n'ont pas le droit d'y rien changer, excepté pour les malades, les infirmes el généralement ceux qui sont dans l'impossibilité de visiter les lieux assignés, comme nous le dirons dans le chapitre suivant, § 5. Si, au contraire, l'évêque charge les curés de faire la désignation, c'est à'eux seuls d'y pourvoir. Il n'est pas douteux que l'évêque puisse confier cette faculté à ses curés, d'après le texte de la bulle; et pour ce qui concerne les paroisses de la campagne, il n'est guère possible de faire autrement.

11 QUESTION. Si une église ou une chapelle désignée par l'évêque venait à tomber ou à être brûlée dans le temps même des stations, que faudrait-il faire? On recourrait à l'évêque qui désignerait un autre lieu à visiter, et prorogerait le temps du jubilé, s'il le fallait, en faveur de ceux qui, à cause de cet accident, seraient privés de ses avantages:

(1) Tout ce que nous disons sur la visite des églises à Rome est applicable aux stations déterminées par

nous verrons plus loin qu'il en a le droit : dans ce cas, Collet (pag. 216) pense qu'ii n'est pas nécessaire de recommencer les stations que l'on a déjà faites. Rien ne me pa · raît plus juste. »>

ARTICLE II.

Des œuvres spéciales au jubilé ordinaire.

16. Il paraît qu'autrefois on ordonnait des processions aux jubilés extraordinaires. Il n'y en a pas eu d'ordonnées par les bulles des papes Léon XII, Grégoire XVI et Pie IX, accordant indulgence en forme de jubilé à l'occasion de leur avénement au souverain pontificat. Les processions existent encore dans le grand jubilé. Les fidèles ne sont pas tenus d'y assister; car les bulles sont dins la forme disjonctive vis-à-vis d'eux, et leur laissent l'option entre assister aux processions et visiter une ou plusieurs églises. On peut donc suivre la procession, ou si on l'aime mieux, faire les visites prescrites pour les remplacer.

ARTICLE III.

Des œuvres spéciales au jubilé extraordinaire.

17. il y a deux sortes d'œuvres prescrites dans le jubilé extraordinaire : c'est le jeûne et l'aumône.

§ 1er. Du jeûne prescrit pour gagner le jubilé extraordinaire.

18. Le jeûne a toujours été regardé comme un moyen d'apaiser la colère du ciel et d'altirer sur nous ses bénédictions; il ne fayt donc pas être surpris que l'Eglise l'ait prescrit pour gagner la grâce ineffable du jubilé; elle prescrit trois jours de jeûne : les mercredi, vendredi et samedi d'une même scmaine. On doit l'observer suivant la coutume de garder les jours de jeûne de pays où l'on se trouve. Ce jeûne oblige tout le monde sans exception, les jeunes et les vieux, les sains et les malades. L'Église, en prescrivant le jeûne, a compris qu'il serait très-difficile à plusieurs fidèles de l'observer: pour ne pas leur rendre impossible le gain de l'indulgence, elle a permis au confesseur de le com

muer contre d'autres œuvres. Ainsi celui qui ne peut jeûner ni garder l'abstinence, et qui veut gagner le jubilé, doit se faire relever de cette obligation.

La pratique de l'Eglise étant de donuer quelquefois des jubilés en carème, on en couclut qu'on peut satisfaire au jeûne requis à cet effet, en satisfaisant à la loi de l'Eglise. § 2. De l'aumône prescrite pour gagner le jubilé.

or 1° 19. L'aumône, dit Mgr Bouvier, est une œuvre de miséricorde strictement prescrite à ceux qui peuvent la faire, selon l'état et les circonstances où ils se trouvent rien n'est plus recommandé dans l'Ecriture; elle nous est représentée par Daniel (cap. iv, v. 24), par

les évêques dans l'extension du jubilé et dans les jubiles extraordinaires.

l'auteur de l'Ecclésiastique (c. mi, v. 33) et par Jésus-Christ lui-même (Luc., x1, 41), comme un moyen de racheter les péchés. Par là même il était convenable que, dans la distribution des indulgences qui ont pour objet d'effacer la peine due au péché, les pontifes romains commandassent l'aumône comme moyen propre à obtenir cette grâce. Elle est d'ailleurs une sorte de complément da jeûne, puisqu'en jeûnant on se retranche de quoi soulager ceux qui souffrent.

« 2° L'aumône, aussi bien que le jeûne, est commandée dans le jubilé extraordinaire comme condition essentielle de l'indulgence: il faut donc nécessairement la faire ou obtenir une commutation légitime de celui qui a le droit de l'accorder. Les pauvres n'en sont pas plus exempts que les riches: c'est du moins le sentiment de presque tous les théologiens, et le seul qui doive être suivi. Les religieux, les religieuses, les femmes mariées, les enfants de famille, et en un mot lous sans exception, sont assujettis à cette condition; s'ils ne possèdent rien, ils doivent demander ce qui leur est nécessaire, les enfants à leurs parents, les femmes à leurs maris, les religieux et religieuses à leur supérieur ou supérieure, et les pauvres à ceux qui sont dans le cas de faire l'aumône: s'ils ne peuvent l'obtenir, ils auront recours à la commutation (Collet, p. 228; Ferraris, art. 3, n. 39, etc.).

3° Tout le monde convient qu'il n'est pas nécessaire de faire l'aumône en personne : un autre peut la faire pour nous, même de ses propres deniers, pourvu qu'elle soit faite à notre intention et de notre consentement: un père de famille peut la faire pour sa femme, ses enfants et ses domestiques; un supérieur de communauté pour ses religieux, une supérieure pour ses religieuses, mais ils doivent avertir leurs inférieurs de ce qu'ils sont dans l'intention de faire; car il est nécessaire que la bonne œuvre de l'aumône soit censée appartenir devant Dieu à ceux à qui elle doit profiter, et pour cela il faut au moins un acte de leur volonté (Ferraris, ibid.).

« 4° Les théologiens distinguent deux sortes d'aumônes, l'une qui est relative à tous les besoins du corps, et l'autre aux besoins de l'âme ils appellent la première corporelle, et la seconde spirituelle. Quand il est question de l'aumône, sans rien ajouter, on entend toujours parler de l'aumône corporelle: les œuvres de charité spirituelle, que que excellentes qu'elles fussent, ne suffiraient donc pas pour remplir les intentions de la bulle qui exigerait l'aumône. Du reste il n'est pas nécessaire de donner de l'or ou de l'argent: du pain, du vin, des habits, en un mot Tout ce qui est estimable à prix d'argent et peut être utile à un malheureux, constitue l'aumône corporelle, et dès lors suffit pleinement pour remplir les intentions du souverain pontife.

« 5 Pour déterminer la quotité qu'il faut donner, on doit avant tout considérer les paroles de la bulle: si elle prescrivait une

valeur déterminée, ce qu'elle ne fait jamais, il n'y a point de doute qu'il ne fallût s'en t»nir là. Si elle portait que chacun ferait l'aumône selon ses facultés, il est sûr que les riches seraient tenus à beaucoup plus que les pauvres probablement il résulterait de là de nombreuses difficultés pour les confesseurs et de grands embarras pour les consciences timorées : aussi ne se sert-on poiat ordinairement de semblables expressions; on se contente de dire qu'il faudra faire l'aumône; on ajoute même que chacun la fera selon sun bon plaisir, à sa volonté, à sa dévotion, comme l'esprit de charité le lui suggérera, etc. D'après cela, quelque petite qu on la suppose, pourvu qu'elle puisse être appelée aumône, et ne soit pas plutôt une espèce de dérision relativement à la person::e qui la fait et à celui qu'on prétend soulager, elle remplira la condition prescrite, quoique peut-être elle soit loin de satisfaire au précepte naturel et divin de l'aumône. Des évêques ont déclaré qu'une aumône de cinq centimes était suffisante pour satisfaire à là bulle.

« 6° Comme la bulle ne décide ni la classe ni les qualités des personnes à qui il faut faire l'aumône, il suffit de donner à ceux qui out des besoins corporels, quoiqu'ils ne soient ni les plus misérables, ni ceux qu'on devrait soulager de préférence: on satisferait même en donnant à un hôpital, à une communauté ou à une église pauvre, quelque chose qui pût lui être utile.

20.1 QUESTION. Dans le cas où la pauvreté de celui à qui on fait l'aumône ne serait qu'ap parente, gagnerait-on tout de même le jubilé ? Les docteurs répondent généralement que oui car dès que l'on se dépouille en faveur de celui qu'on croit de bonne foi être pauvre, on fait véritablement l'aumône, selon l'acception naturelle du terme, et cela suffit pour remplir la condition de la bulle. Exiger le contraire ne serait ni prudent, ni conforme à la vraie charité, ni même possible.

21. & 2° QUESTION. Mais si on eût confié son aumône à un commissionnaire qui ne l'eût point remise, ou qui ne la remit qu'après que le temps marqué pour le jubilé serait expiré, gagnerait-on également l'indulgence? Celle question est très-controversée plusieurs soutiennent, non sans fondement, que dans ce cas on gagnerait le jubilé, parce que l'aumône est censée faite dès qu'on s'est dépouillé dans l'intention de soulager les pauvres ; nous venons de dire qu'on satisfaisait à la condition prescrite en donnant de bonne foi à un pauvre apparent; pourquoi ne satisferait-on pas de même quand on confie son aumône de bonne foi à un homme infidè e, qui ne la remet pas, ou la remet plus tard qu'on ne pensait en la lui confiant?

D'autres nient que dans ce cas on puisse prétendre aux grâces du jubilé, parce que, disent-ils, l'aumône n'a réellement point été faite; il y a seulement eu commission de la faire or la condition n'étant point remplic l'acte qui lui était subordonné est nul. Tel est le sentiment du cardinal de Lugo, de

Collet, de Ferraris et de beaucoup d'autres. 22. « 3 QUESTION. L'aumône doit-elle se faire la semaine où se font les trois jeûnes? Plusieurs ont dit qu'on pouvait la faire indifféremment dans l'une ou l'autre des deux semaines mais l'opinion la plus commune, la plus probable et au moins la plus sûre est que toutes les œuvres prescrites pour cette sorte de jubilé doivent se faire dans la même semaine; et en effet tel paraît être le sens naturel des bulles (Ferraris, art. 3, n° 43).r CHAPITRE III.

DES PRIVILÉGES DU JUBILĖ.

23. Ce qui distingue surtout la grâce du jubilé, ce sont les priviléges qui y sont attachés. Ils ne sont pas toujours les mêmes. C'est dans la bulle spéciale qui l'accorde qu'ils sont contenus; il faut la consulter afin de les connaître. Il y en a cependant qui sont en quelque sorte de droit; nous devons les expliquer. Les uns sont accordés aux fidèles, les autres aux confesscurs.

ARTICLE PREMIER.

Des priviléges accordés directement aux fidèles.

24. Les bulles de jubilé accordent aux fidèles le droit de se choisir le confesseur qu'ils voudront entre ceux qui sont approuvés. Remarquons que l'approbation peut limiter le pouvoir des confesseurs. Ainsi il y en a qui sont approuvés pour les enfants seule ment, d'autres pour tous les séculiers, d'autres dans un certain rayon, quelques-uns pour les religieuses. Les confesseurs doivent se tenir dans la limite de leur approbation. Conséquemment pendant le jubilé un adulte ne pourrait choisir pour son confesseur un prêtre approuvé seulement pour les enfants. Une religieuse ne peut s'adresser à un prêtre qui n'est pas approuvé pour entendre les confessions des religieuses. Il s'éleva dans le siècle dernier un doute par rapport au confesseur que les religieuses peuvent se choisir pendant le temps du jubilé: on demanda si une religieuse pouvait seulement choisir entre les confesseurs approuvés pour sa maison ou entre tous les confesseurs approuvés pour telle ou telle maison religieuse. Benoit XIV leva la difficulté et déclara que les religieuses pouvaient, pendant le jubilé, s'adresser au prêtre approuvé pour les religieuses qu'il leur plaira de choisir. Sans cela, disait ce grand pape, la liste des confesseurs des religieuses ne serait pas agrandie.

25.« Du principe que nous avons établi au sujet de la nécessité de l'approbation de l'évêque diocésain pour gagner le jubilé, disent les Conférences d'Angers (Confér. vi), il s'ensuit, 1 que si un confesseur n'est ap

(1) Instruction de M. Poncet, sur le jubilé de 1722, pag. 20.

(2) Dans le jubilé de 1700, M. le cardinal de Noailles u'avait accordé aux curés de la campagne les pou. voirs extraordinaires qu'en faveur de leurs parois

prouvé que pour confesser dans une certaine paroisse, ou dans une certaine étendue du diocèse seulement, il ne pourra pas entendre

les confessions dans d'autres endroits, même au temps du jubilé; car, le pape ne donnant le pouvoir de confesser et d'absoudre qu'aux prêtres approuvés par l'ordinaire, ils n'en peuvent user qu'autant qu'ils sont approuvés; et ceux dont l'approbation est bornée à certaines personnes, ou à certains lieux, sont pour les autres lieux et pour les autres personnes, comme s'ils ne l'étaient point du tout. 2° Il s'ensuit encore, du même principe, que si l'approbation n'est que pour un temps, et qu'elle expire peu de temps avant le jubilé, ou même pendant le temps marqué pour le gagner, le prêtre qui l'a obtenue ne pourra plus exercer ses fonctions, dès que son approbation sera expirée, parce qu'alors il ne sera plus approuvé (1).

« Lévêque est certainement encore le maître de n'approuver qu'un certain nombre de confi sseurs pour le jubilé, et, de révoquer les pouvoirs des autres; et c'est afin qu'on n'en puisse douter, que quelques souverains pontifes ont marqué expressément dans leurs bulles, que les confesseurs dont ils parlent étaient ceux qui étaient approuvés de l'ordinaire, à l'occasion du présent jubilé. Ce sont les termes de la bulle de Benoît XIII, publiée en 1726.

<< Il s'ensuit encore que si un évêque avait jugé à propos de restreindre un curé à ses paroissiens, celui-ci n'en pourrait confesser d'autres, même dans le temps du jubilé (2). En effet, il est certain que l'évêque peut défendre à un curé de confesser des personnes qui ne seraient pas de sa paroisse. Les curés, par le titre de leur bénéfice, n'ont de juridiction ordinaire que sur leurs paroissiens, comme l'enseignent tous les théologiens et les canonistes: et quoique ce soit un usage établi dans la plupart des diocèses, que les curés confessent des personnes qui ne sont pas de leur paroisse, cet usage n'est point fondé sur un droit que leur donne leur bénéfice il suppose un consentement tacite des supérieurs ecclésiastiques. La faculté de théologie de Paris l'a décidé, en condamnant, en 1735, la proposition suivante : « Les curés « n'ont point besoin de l'approbation expresse «< ou tacite de l'évêque pour entendre la coua fession des autres paroissiens, et les ab« soudre (3;. »

ARTICLE II.

Des priviléges accordés aux confesseurs en faveur de leurs pénitents.

26. Le jubilé doit être un moment de réparation universelle. Il fallait donc que le confesseur fût à même, 1° de guérir toutes les blessures, et, conséquemment, d'absoudre siens.

(3) Prop. 40, tirée d'un ouvrage intitulé: Consultation sur la juridiction et l'approbation nécessai e pour confesser.

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