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1029. D'ailleurs, la signification du jugement adressée aux héritiers n'est pas soumise à toutes les formalités prescrites pour la validité des significations ordinaires. Par une exception aux règles générales, l'art. 447 dispose expressément que la « signification pourra être faite aux héritiers collectivement et sans désignation des noms et qualités.» Cette disposition est fondée sur ce qu'il est possible que les héritiers ne soient pas connus ; et comme le dit M. Carré, L. de la pr., quest. 1603, elle exprime que la signification peut être faite par exemple, aux héritiers de tel, demeurant, lors de son décès, à..., son domicile, et cela à l'imitation de l'art. 2149 c. civ. qui permet de prendre des inscriptions sous la simple désignation du défunt (V. aussi conf. M. Pigeau, t. 1, p. 564). Nous avons établi suprà, nos 775 et 776, que ce mode de procéder ne pourrait pas être suivi pour la signification de l'acte d'appel.

1030. Nous inclinerions aussi à penser que même pour la signification du jugement, la faculté qui est accordée par la loi devrait cesser lorsque les héritiers ont pris qualité après l'expiration des délais pour faire inventaire et délibérer. « Dès cette époque, dit avec raison M. Rivoire, de l'Appel, no 207, il ne saurait plus y avoir d'incertitude; les héritiers sont désormais connus, le sort de la succession est fixé; il y aurait les plus graves inconvénients à faire une signification aussi importante dans le domicile d'une personne décédée depuis longtemps. » La| signification semblerait devoir rentrer alors dans les conditions ordinaires; la partie qui aurait gagné son procès devrait la faire aux héritiers individuellement à personne ou domicile,

c'est l'art. 68 et non l'art. 61 qui devait être rappelé dans l'article 447, et que c'est par erreur que ce dernier a été énoncé, attendu que la remise de la copie étant seule obligatoire dans la signification dont il s'agit ici, l'art. 68 qui prescrit cette formalité devait seul être rappelé. D'autres formalités encore sont nécessaires, comme nous venons de le dire, formalités que l'art. 61 consacre; et cela explique et justifie la mention que l'art. 417 fait de ce dernier article. -V. conf. M. Rivoire, de l'Appel, n° 207. 1032. Il est, avons-nous dit, des circonstances non pré. vues par la loi qui sont cependant susceptibles de suspendre le délai de l'appel ou d'en proroger le cours. La convention des parties serait une de ces circonstances, et selon l'opinion des auteurs on ne pourrait s'empêcher de voir une convention de cette espèce dans le compromis qui aurait suivi la signification du jugement. - V. conf. MM. Chauveau sur Carré, quest. 1598, et Rivoire, de l'Appel, no 208.

1033. Il a été jugé, dans le sens de cette doctrine, que st les parties compromettent sur l'appel, les délais sont suspendus pendant la durée du compromis; et que si le compromis est annulé, l'appel est recevable à compter du jour où le compromis a pris fin, pendant un espace de temps égal à celui qui restait à courir au moment où le compromis a eu lieu (Riom, 4 août 1818) (1).

1034. Mais on a décidé, sous l'empire des anciens principes, que l'opposition à la rédaction du dispositif d'un jugement ne suspend point le délai de l'appel; et qu'ainsi, le délai court du jour même de la signification du premier jugement, et non du

1031. Ajoutons, en terminant sur cette cause de suspension, que si l'art. 447 autorise une signification collective, sans dési-jugement de débouté de l'opposition (Cass., 11 fruct. an 11) (2); gnation des noms et qualités des héritiers, ce n'est pas à dire qu'il affranchisse cette signification de toutes les formalités. Get article les y soumet expressément, au contraire, en disant dans son deuxième paragraphe que les délais ne reprendront leur cours « qu'après la signification du jugement faite au domicile du défunt, avec les formalités prescrites en l'art. 61. » La signification doit donc contenir la date, le nom du requérant, la personne à qui la copie a été laissée. Sous ce rapport, nous ne partageons pas l'opinion de quelques auteurs (V. MM. Carré et son annotateur Chauveau, quest., 1602, et Boitard, t. 3, p. 63), qui pensent que

si l'exercice d'une action ou de la faculté d'appeler d'un jugement eût été assujetti à la prescription pendant le délai accordé pour faire inventaire et pour délibérer;-Considérant, sur le deuxième moyen, que Borin, grandpère de Désiré-Robin Duvernay, décéda le 4 germ. an 10;- Que l'inventaire fut clos le 15 prair. an 10, et par conséquent dans le délai de deux mois onze jours, à partir du 4 germ. ;· Que, quoique le délai de trois mois accordé par l'ordonnance de 1667 pour prendre inventaire ne fût pas expiré, il suffisait cependant, aux termes de cette ordonnance, que l'inventaire eût été clos avant la fin de ce délai pour que le délai de quarante jours accordé pour délibérer commençât à courir; Que ce délai pour délibérer finissait par conséquent le 25 mess. an 10, c'est-à-dire deux mois deux jours avant l'acte d'appel du 27 fructidor de la même année; Considérant, néanmoins, que le délai de l'appel a été suspendu depuis le 4 germ. an 10, époque du décès dudit Borin, jusqu'au 25 mess. an 10, époque du terme du délai pour délibérer; - Considérant qu'au 4 germ. an 10, il ne s'était écoulé que vingt-six jours depuis la signification, faite le 8 vent. de la même année, du même jugement de première instance du 6 pluv. précédent; - Qu'il restait par conséquent encore un délai de deux mois quatre jours pour compléter, avec ces vingt-six jours, le délai de trois mois accordé pour l'appel; - Que ce délai de deux mois quatre jours, à partir du 25 mess. an 10, n'a fini que le 29 fruct. an 10;-Que, par conséquent, l'appel émis dudit jugement le 27 fruct. an 10 l'a été dans le délai de trois mois accordé par la loi; - Rejette. Du 11 avril 1815.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Vergès, rap.

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(1) (Abonnat C. Monnier.) — LA Cour; Considérant que si le jugement a été signifié le 5 juillet 1817, et si l'appel n'est intervenu que le 2 janv. 1818, il est constant, en fait, que, par un compromis authentique du 1er août 1817, les parties remirent à un arbitre convenu le droit de prononcer en dernier ressort sur tout ce qui avait fait l'objet de leur litige; qu'elles sortirent ainsi du ressort judiciaire, de ses formes, de ses règles, et ne durent plus s'en occuper. Considérant que, bien que l'arbitre n'ait point prononcé dans le délai légal qui s'observe à défaut du délai conventionnel, et si les parties sont ainsi rentrées dans le cercle judiciaire dont elles seraient momentanément sorties, on ne saurait compter le temps de la durée du compromis comme un temps utile pour faire courir le délai d'appel; que, loin qu'on puisse induire en ce cas l'acquiescement tacite

proposition incontestable et qui devrait encore être suivie. Il est de principe, en effet, que le jugement une fois signé par le président et le greffier, ne peut plus être changé dans sa rédaction. L'art. 144 admet, à la vérité, l'avoué à s'opposer aux qualités du jugement, c'est-à-dire à la rédaction du point de fait et du point de droit qui est l'ouvrage de l'avoué de la partie adverse; mais, à l'égard des motifs et du dispositif, qui sont l'œuvre du juge, la voie de l'appel, de la cassation ou de la requête civile est la seule ressource de la partie lésée : l'opposition est une voie évidemment irrégulière et nulle.

que fait présumer ordinairement le non-appel dans les trois mois de la signification d'un jugement, le compromis y résiste, au contraire, indépendamment de ce qu'il y aurait manquement à la foi promise par celle des parties qui voudrait compter pour rien le compromis; — Considérant qu'après avoir défalqué le temps du compromis, et lors même qu'on compterait le temps antérieur et le temps postérieur aux trois mois du compromis, il ne se trouverait point, au cas présent, trois mois utilement écoulés depuis la signification du jugement; - Sans s'arrêter à la fin de non-recevoir, etc.

Du 4 août 1818.-C. de Riom.

(2) Espèce :- (Guérin C. Husson.)- En vertu d'un jugement qu'ils avaient obtenu, les enfants Guérin firent commandement au sieur Husson, leur ancien tuteur, de leur payer différentes sommes. Opposition de Husson. Le 25 therm. an 6, jugement du tribunal des Ardennes, qui ordonna la continuation des poursuites pour 9,988 fr., payables en numéraire. - Le 26 fruct. suivant, signification du jugement à Husson, qui forma opposition à la rédaction, prétendant que le tribunal avait prononcé que les 9,988 fr. ne seraient payés que d'après la réduction, et non pas en numéraire, ainsi que le portait l'expédition du jugement.-Le 16 brum. an 7, jugement par défaut qui adopta ce changement. Sur l'opposition des enfants Guérin, un jugement contradictoire, en date du 2 vent. an 8, maintint la première rédaction. - Le 24 du même mois, appel des deux jugements par Husson. - Les enfants Guérin lui opposent qu'il n'a appelé qu'après les trois mois.

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Le 22 germ. an 9, jugement du tribunal d'appel de Metz qui rejette la fin de non-recevoir et accueille l'appel, par le motif que l'opposition à la rédaction des jugements étant en usage dans le ressort du tribunal des Ardennes, le délai d'appel n'avait pu courir qu'à partir du jugement de débouté de l'opposition. Pourvoi des enfants Guérin. — Jugement. LE TRIBUNAL; Vu l'art. 14, tit. 5, loi du 24 août 1790, et l'art. 5, tit. 27, ordonn. de 1667;-Et attendu, 1° que le jugement du 25 therm. an 6 avait été signifié depuis plus de trois mois, lorsque le demandeur en a fait appel; 2° que le délai de trois mois, dans lequel il aurait dû être interjeté, n'a pu être suspendu ni prorogé par la demande en prétendue correction de ce jugement, qui était une véritable demande en réformation de ce qu'il avait statué au fond sur la prétention des mineurs Guérin d'être

ment de juges a pour objet de réunir des procédures éparses, de les concentrer, d'amener une seule décision sur un même litige. La dignité de la justice y gagne, puisqu'on évite la contrariété des jugements, et les parties elles-mêmes ont moins de frais et de lenteurs à subir. - De là résultait une conséquence toute naturelle c'est que, lorsque, la procédure commencée et la cour de cassation saisie, la question lui a paru assez grave pour mettre les parties en présence par un arrêt de soit communiqué, tout devait rester in statu quo; il ne fallait pas qu'en se hâtant les tribunaux rendissent inutile la décision à venir, ou que les parties pussent changer leur position. Or, ce que la raison dictail d'elle-même, la loi l'a sanctionné par l'art. 14 du règlement de 1737... Mais tout ce qui est en dehors de l'instance devait-il également être paralysé? Le bon sens dit que non, puisqu'il n'y a, soit pour la justice, soit pour les parties, nul intérêt à suspendre l'exercice d'un droit qui ne naft pas de l'instance, mais au contraire en est indépendant; c'est aussi ce que la loi a déclaré par l'art. 16 du règlement précité, lequel excepte du sursis prononcé par l'art. 14 les actes ou procédures purement conservatoires, tels que reprises d'instance, saisies, oppositions aux décrets, scellés, etc. Ainsi, les parties restent, pour ces actes et pro

1035. En est-il de même de l'instance en règlement de juges introduite devant la cour de cassation? Le délai de l'appel | est-il suspendu par une pareille instance? La question s'est élevée récemment et a élé gravement controversée. On disait, pour la négative, que le code de procédure a établi, dans les art. 445, 446, 447 et 448, les seules exceptions à la règle qui veut que l'appel soit interjeté dans les trois mois, à peine de déchéance. Parmi ces exceptions, on ne voit pas figurer celle qui résulterait du pourvoi en règlement de juges.-L'ordonnance spéciale de 1737 n'a pas pour conséquence de créer cette exception. A la vérité l'art. 14 est ainsi conçu : « Lorsque le demandeur (en règlement de juges) se sera conformé à la disposition des art. 9, 10, 11 et 12, toutes poursuites demeurent sursies dans toutes les juridictions qui seront saisies des différends des parties, à compter du jour de la signification des lettres ou de l'arrêt, et ladite surséance aura lieu à peine de nullité. » C'est en exécution de cet article qu'un arrêt de soit communiqué autorise le demandeur en règlement à assigner son adversaire sur les fins de sa demande, toutes choses demeurant en état. Mais s'il résulte soit de ces dernières expressions, soit de l'art. 14 précité, que toutes nouvelles poursuites sont défendues devant les tribunaux déjà saisis, et même que les instances introduites n'ont pas à craindre de péremp-cédures, ce qu'elles étaient avant l'instance en règlement de tion pendant l'instance en règlement de juges, parce que res quæ tempore perœunt, semel inclusæ judicio, salvæ permanent, il n'en résulte pas, en outre, que, si un tribunal s'est dessaisi en statuant au fond, et si les parties sont menacées d'une déchéance, elles ne puissent saisir le degré supérieur par un acte qui includat litem judicio, de peur que le droit ne périsse: ce n'est pas là une poursuite devant une juridiction saisie, c'est un acte qui saisit une nouvelle juridiction et prévient une déchéance. — Au surplus, l'art. 16 du règlement tranche la question. « N'entendons comprendre, porte cet article, sous le nom de poursuites et procédures mentionnées dans les deux articles précédents, les actes ou procédures purement conservatoires, tels que les reprises d'instances, les saisies en vertu de titres exécutoires, oppositions aux décrets, scellés ou autres actes de pareille nature et qualité, qui pourront être faits nonobstant la signification des lettres ou de l'arrêt qui aurait introduit le règlement de juges, même pendant l'instruction de l'instance en notre conseil, sans que la cassation en puisse être demandée comme de procédures attentatoires. »— En présence de termes aussi clairs, il ne reste plus qu'à se demandant que la cour de cassation est saisie..... >> der si l'appel est un acte purement conservatoire dans le sens de l'ordonnance. L'appel a tellement ce caractère, qu'une jurisprudence unanime avait reconnu une qualité suffisante pour le former au maire d'une commune, quoique non encore autorisé à cet effet, et que, conformément à cette jurisprudence, l'art. 55 de la loi du 18 juillet 1837, venant après l'art. 49 qui défend à toute commune de se pourvoir devant un autre degré de juridiction sans une nouvelle autorisation du conseil de préfecture, accorde toutefois au maire la faculté de faire, sans autorisation préalable, a tous actes conservatoires ou interruptifs de déchéance... »

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1036. Cependant la cour de cassation ne s'est pas arrétée à ces considérations; elle a décidé, au contraire, que le délai de l'appel est suspendu de plein droit pendant l'instance en règlement de juges introduite devant la cour de cassation, à partir de la notification de l'arrêt de soit communiqué; l'acte d'appel ne pourrait être considéré comme un des actes purement conservatoires qui sont autorisés pendant l'instance en règlement (Req., 7 déc. 1841, Michault-Delannoy, V. suprà, no 270). Cette grave décision, de laquelle il résulte que les causes suspensives du délai d'appel ne sont pas toutes, ainsi que nous l'avons dit, déterminées par le code de procédure, n'a fait que confirmer la doctrine émise devant la cour de cassation par M. l'avocat général Delangle, qui a réfuté victorieusement, ce nous semble, les raisons qui viennent d'être exposées. « Il faut se pénétrer, a dit ce magistrat, de ce qu'a voulu le règlement de 1737. Le règle

payés en numéraire, lequel jugement, étant une fois expédié, et même signifié, ne pouvait être régulièrement attaqué que par la voie ordinaire de l'appel, s'il prononçait une condamnation injuste, ou par celle de l'inscription en faux, si sa rédaction était contraire à ce qui avait été prononcé; d'où il suit que le jugement attaqué, en déclarant cette procédure

juges, jouissant des mêmes droits et conséquemment liées par les mêmes devoirs. Pourquoi en serait-il autrement? Des tiers peuvent être intéressés aux saisies, aux décrets, aux scellés : de quel droit les tenir en suspens pour des débats qui leur sont étrangers? Et les parties elles-mêmes, pourquoi les priver sans nécessité de la faculté de faire des actes conservatoires? Quand il s'agit des instances dont il faut régler le sort, on comprend l'inaction; elle est de l'essence des règlements, puisqu'on ne saurait régler ce qui est fixé. Mais quand il s'agit d'actes en dehors de ces instances et qui n'y portent aucune atteinte, il y aurait absurdité à leur appliquer la prohibition d'agir. Ces principes posés, que faut-il décider relativement à l'appel? En d'autres termes, l'appel est-il un acte purement conservatoire, indépendant des instances mises en question par la demande en règlement? Non; car s'il est conservatoire en ce qu'il empêche une déchéance, il constitue un acte de poursuite en ce qu'il crée une nouvelle instance; en tout cas, il n'est pas étranger au but du règlement, et cette raison suffit pour le rendre impraticable pen

1037. Les cas dans lesquels les parties se trouvent en présence de plusieurs adversaires sont aussi susceptibles de fournir d'autres exemples, sinon de suspension, du moins de prorogation des délais de l'appel. Nous voulons parler des circonstances dans lesquelles un appel interjeté profite à une partie intéressée et la relève d'une déchéance qu'elle aurait encourue, sans le secours que lui prête l'action de l'un de ses coïntéressés plus diligent. Nous avons déjà exposé les principes de la matière en parlant des personnes auxquelles profite l'appel et de celles auxquelles l'appel peut être opposé (V. suprà, notre chap. 3). Nous n'aurons donc guère ici qu'à présenter les applications.

1038. On sait que, sous l'empire des lois romaines, lorsque plusieurs parties avaient été condamnées par un seul et même jugement, et qu'elles avaient les mêmes moyens de défense, l'appel interjeté par l'une profitait aux autres : Quod est rescriptum (dit la L. 10, § 4, D., De appellat. et relat.), in communi causa quoties alter appellat, aller non, alterius victoriam ei proficere qui non provocavit, hoc ita demùm probandum est, si una eademque causa fuit defensionis..... Ceterùm si diversœ, alia causa est. Dans le cas où la défense avait été commune, il n'était pas même nécessaire que les consorts intervinssent pour que la réformation obtenue par celui qui avait appelé leur profitât; c'est ce que porte la loi 1, C., Si unus ex plur. appell. -On sait également que ces dispositions sont contraires à celles du code de procédure et même à l'ancienne jurisprudence française, et qu'en principe on ne doit aujourd'hui consulter que les art. 443 et 444

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c. pr. civ. Or, ces articles sont conçus en termes généraux et n'admettent aucune distinction; le délai de l'appel est de rigueur et le même pour toutes personnes; d'où il suit que la déchéance encourue ne peut pas être réparée par l'appel d'un tiers. Telle est aussi l'opinion de M. Merlin, Quest de dr., v° Appel, § 15, n° 2. Il faut néanmoins admettre une exception qui est fondée sur la nature des choses autant que sur les principes du droit : si l'objet de la contestation est indivisible, il est évident que les diligences de l'une des parties doivent profiter aux autres. C'est aussi l'opinion de MM. Carré, Analyse raisonnée, t. 2, quest. 1453; Pigeau, t. 2, 10; Poncet, Traité des jugements, t. 1, no 305, p. 498; Favard de Langlade, Répert., t. 1, p. 171; Demiau, 345; Berriat, 2, 414; Thomine, 1, 670.

(1) Espèce:-(Rolfi C. Dogliotti.)-L'hospice de Mondovi avait donné à bail, par acte du 10 fév. 1800, une manufacture de laine au sieur Aimo, qui avait pour caution solidaire le sieur Zucchi, pour certificateurs de caution les sieurs Rolfi et Colombo, et pour certificateurs de ces derniers les

sieurs Gervasio et Louis Dogliotti.-Jean Dogliotti, héritier de ce dernier, assigna Aimo en résiliation de bail, par le motif que l'adjudicataire et ses cautions avaient diminué les sûretés promises. Aimo appela en garantie Zucchi et Gervasio. La commission administrative des hospices poursuivit aussi la résiliation du bail, Le 5 mars 1807, jugement rendu en faveur des hospices et de Jean Dogliotti; le bail fut résilié, et Aimo fut condamné comme débiteur principal, Gervasio et Zucchi en qualité de garants, et Rolfi et Colombo comme certificateurs, à payer aux hospices la somme de 59,000 fr. Le 6 avril suivant, signification de ce jugement à la requête de Dogliotti et des hospices. Le lendemain 7, Gervasio et Rolfi signifièrent une simple déclaration d'appel, se réservant de faire assigner pour y donner suite. Le 16, Gervasio seul fit donner assignation aux intimés et à Rolfi lui-même; celui-ci comparut, et, le 26 juin, il signifia des griefs d'appel. Dans la crainte que son appel, irrégulier pour défaut d'assignation, ne fût déclaré nul, et que celui de Gervasio ne pût lui profiter, Rolfi signifia, le 25 janv. 1808, plus de six mois après la signification du jugement, un nouvel acte d'appel contenant assignation. - Les intimés ont soutenu qu'il n'était pas recevable, l'appel ayant été tardif. Rolfi répondait qu'il avait satisfait à la loi et conservé tous ses droits, en déclarant son appel en temps utile, en paraissant sur l'assignation et en signifiant des griefs; - Que, d'ailleurs, cette exception aurait dû être présentée in limine litis avant toute défense au fond, et que les héritiers se sont rendus non recevables à la proposer, en faisant signifier des conclusions tendantes à la confirmation des jugements. - Arrêt.

-

LA COUR; Vu les art. 443 et 456 c. pr.;-Attendu que le jugement en appel a été signifié, à la requête des intimés, au sieur Rolfi par exploit du 6 avril 1807; - Que, par acte du 7 du même mois, Rolfi ayant signifié aux intimés de vouloir se rendre appelant dudit jugement, sans les avoir cependant assignés à comparaitre par-devant cette cour dans le délai de la loi, cet acte ne peut, aux termes de l'art. 456 c. pr., figurer légalement comme une interjection d'appel; — Que, quoiqu'en l'écriture du 26 juin 1807, Rolfi parût ensuite de l'assignation donnée par Gervasio, et ait incidemment interjeté appel du susdit jugement vis-à-vis de la commission des hospices, et dans le chef qui avait accueilli la demande en résiliation du bail et prononcé la condamnation subsidiaire de Rolfi, réclamée par la commission; cette interjection incidente n'aurait pu mieux profiter à Rolfi que le précédent acte de déclaration d'appel, vu que ce n'est qu'à l'intimé que l'art. 443 du code permet d'interjeter incidemment appel en tout état de cause; et que Rolfi, vis-à-vis de la commission des hospices, qui n'était point appelant, ne pourrait jamais être considéré comme intimé; - Qu'en conséquence, l'appel que Rolfi a interjeté du susdit jugement, en vertu de l'exploit du 25 janvier de cette année, étant postérieur de six mois et plus à l'expiration du terme péremptoire des trois mois, fixé par la loi pour interjeter appel, ne peut être recevable; — Qu'en vain Rolfi, pour soutenir le contraire, invoque le prescrit par l'art. 173 du code, portant que toute nullité d'exploit ou d'acte de procédure est couverta, si elle n'est proposée avant toute défense ou exception; car, quoiqu'il soit vrai de dire que les intimés, en faisant signifier leurs écrits touchant le fond au sieur Rolfi, et en demandant que le jugement en appel fût confirmé, quant à tous les intéressés, aient défendu et excipé au fond, avant que d'opposer à Rolfi la fin de non-recevoir dont il s'agit, il est cependant à observer qu'une telle exception, comme tendante à établir la forclusion de Rolfi pour interjeter et introduire l'appel, n'est substantiellement qu'une exception d'incompétence absolue des juges d'appel, non comprise, et même spécifiquement réservée par la disposition de l'article cité, et conséquemment proposable en tout état de cause, comme fondée sur des principes d'ordre public, d'après lesquels il n'appartient aucunement aux parties de proroger, par leur fait, la juridiction au delà des lermes fixés par la loi; - Que, cela posé, il n'échoit plus d'entrer dans Fexamen du point de savoir s'il soit ou non avenu le cas de la résiliation du bail dont en l'acte public du 10 fév. 1800, cette question ayant uniquement été élevée par le sieur Rolfi, qui, d'après ce qu'on vient d'observer,

1039. D'après ces principes, l'appel interjeté par une partie ne profite pas à ses litisconsorts, quand même ceux-ci auraient fait une déclaration d'appel, mais non suivie d'assignation, et auraient, sur la citation à eux donnée par l'appelant, signifié des griefs d'appel (Turin, 6 juill. 1808) (1).

1040. De même, une partie qui est hors des délais pour appeler, ne peut demander d'être reçue à adhérer à l'appel interjeté, en temps utile, par ses consorts, ou en profiter, alors, d'ailleurs, que l'objet en litige n'est pas indivisible (Metz, 12 janv. 1821; Toulouse, 27 avril 1827) (2).

1041. Cependant l'appel interjeté, en temps utile, par l'une des parties, profite à toutes celles qui, dans la même affaire, ont le même intérêt et peuvent faire valoir les mêmes moyens

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l'appel de la veuve Lecoin; - Attendu que si, lorsqu'il s'agit d'une obli(2) 1re Espèce (Ducroix C. Foulon et Lecoin.) — LA COUR; — Sur gation indivisible, l'appel d'un des coobligés condamnés profite aux autres coobligés qui n'auraient pas appelé, il n'en est pas de même lorsque, comme au cas particulier, il s'agit seulement d'une obligation, commune à la vérité, mais néanmoins divisible, de telle manière que chacun des coobligés n'en soit respectivement tenu que pour sa part et portion virile; dans ce cas, il est incontestable que l'appel ne profite qu'à ceux des coobligés condamnés qui l'ont interjeté, sauf cependant la réduction proportionnelle de l'obligation, si les appelants parviennent à s'en faire décharger pour leurs parts et portions; ainsi, l'appel de la veuve Lecoin, n'ayant point été déclaré dans le délai, est absolument irrecevable, et elle ne peut aucunement se prévaloir de celui interjeté par la veuve Foulon ; - Sur l'appel de la veuve Foulon; Attendu, 1° que, s'agissant d'une rente constituée au capital de 1,800 liv. tournois que Nicolas Foulon a prise à son compte pendant sa première communauté, cette obligation ne peut peser sur la seconde que jusqu'à concurrence des arrérages, si aucuns en étaient dus, et nullement à l'égard du capital de la rente, qui est resté à la charge de la première communauté, ainsi que cela résulte du § 5, art. 1409 c. civ.; c'est donc mal à propos que la veuve Foulon a été condamnée personnellement; elle ne pouvait l'être que comme tutrice de sa fille, héritière pour moitié de son père, et, à ce titre, débitrice pour un quart de ladite constitution; - Attendu, 2o, au fond, que la délégation contenue en l'acte de vente du 9 fév. 1789 a pris entre Foulon et Ducroix lo caractère d'un contrat parfait au moyen de l'exécution que lui a donnée le premier, et de l'acceptation qu'en a faite celui-ci, qui non-seulement a reçu la grosse de cet acte, comme devenant son titre principal, mais en-` core a pris inscription sur ses nouveaux débiteurs, le 3 mai 1808, en vertu de ce même titre ; Attendu que l'adjudication du 22 mai 1809 est, au contraire, demeurée un acte étranger aux héritiers Ducroix, que l'on ne peut obliger à en accepter les stipulations; En conséquence, sans s'arrêter à l'appel de la veuve Lecoin, dans lequel elle l'a déclaré non recevable, sur l'appel de la veuve Foulon; A mis l'appellation et ce dont est appel au néant, en ce que ladite veuve aurait été condamnée aux fins de la demande, tant en son nom personnel que comme mère et tutrice de Desirée Foulon; -Émendant, quant à ce, la condamne seulement en cette qualité, et la décharge de la condamnation personnelle contre elle prononcée, le jugement au résidu sortissant son effet, etc.

Du 12 janv. 1821.-C. de Metz.-M. Girard d'Hannoncelles, 1er pr. 2o Espèce: - (Duston C. Constans.) — 3 janv. 1826, jugement du tribunal civil de Lavaur, qui prononce sur les contestations survenues entre les dames Duston, Constans et la demoiselle Devoisin, à raison du partage de la succession de leur père. La dame Duston le fait signifier à toutes les parties. — Le sieur Constans étant venu à mourir, ses enfants s'en sont rendus appelants, en temps utile, dans un intérêt qui n'était pas celui de leur mère. Celle-ci, après avoir reconnu la nullité d'un appel qu'elle avait interjeté hors du délai voulu par la loi, demande à être reçue dans l'instance comme adhérant à celui de ses enfants, vu qu'elle avait le même intérêt à faire annuler le jugement, et qu'elle l'attaquait par les mêmes moyens. -La dame Duston oppose une fin de non-recevoir, fondée sur les dispositions précises et rigoureuses des art. 443 et 444 c. pr. - Arrêt, LA COUR; Attendu que la dame Constans, ne pouvant utiliser ni l'appel du 4 février, ni celui du 22 du même mois, est aujourd'hui, et était déjà, le 28 juill. 1826, hors des délais pour appeler; qu'aussi elle se borna à demander d'être reçue à adhérer à l'appel de ses enfants, ou a en profiter; mais qu'une telle prétention ne serait recevable qu'autant que celte dame serait dans les délais pour appeler elle-même, ou qu'autant que l'objet en litige serait indivisible; qu'il est déjà prouvé qu'elle n'est point dans le premier cas; qu'elle n'est pas également dans le second, puisqu'il n'y a rien d'inconciliable à ce que les intérêts de la dot soient pris sur une quote de biens plus considérable que celle attribuée définitivement à la dame Saint-Sauveur; que la perte manifeste qui en résulle pour elle, et

(Turin, 28 fév. 1810 et 5 prair. an 12) (1).- Cette décision n'est point inconciliable avec les principes reconnus par la même cour dans l'arrêt du 6 juill. 1808 (aff. Rolfi, V. no 1039). En effet, dans l'espèce actuelle, il ne s'agit pas seulement de la qualité de litisconsorts, ni même de l'identité d'intérêt; il s'agit du lien qui unissait entre eux un garant et un garanti. Le garant avait pris expressément le fait et cause du garanti, de sorte que, comme les juges l'ont déclaré, la cause de l'un était la cause de l'autre; l'appel devait donc leur être déclaré commun (V. suprà, n's 598 et suiv.). Faute d'avoir fait cette remarque particulière sur l'espèce de la cause, M. Merlin, loc. cit., refuse toute autorité aux arrêts de la cour de Turin que nous rapportons ici.

1042. Il a été décidé, avant le code de procédure, dans le même sens, que bien qu'une partie n'ait pas interjeté appel d'un jugement rendu contre elle, cependant les juges d'appel peuvent la faire profiter du bénéfice du jugement qui l'annule sur l'appel d'une autre partie qui avait constamment eu le même intérêt dans l'instance, si surtout elle avait formé opposition à ce jugement (Req., 14 flor. an 10) (2).

1043. M. Carré, Analyse rais., t. 2, p. 15, quest. 1433, pense qu'il y a une différence entre appeler après le délai d'un jugement contre lequel des litisconsorts se sont utilement pourvus par la même voie, et se prévaloir d'un jugement qu'on a laissé passer en force de chose jugée, pour renouveler en première in

l'intérêt qu'elle inspire, dès lors, ne peuvent pas faire fléchir les principes en matière d'appel; - Par ces motifs; Vidant le renvoi au conseil; Disant droit aux parties, sans avoir égard à la demande en adhésion de ladite dame; Réformant, quant à ce, et dans le seul intérêt des enfants Constans Saint-Sauveur, le jugement du 3 janv. 1826; - Ordonne, etc. Du 27 avril 1827.-C. de Toulouse, 2 ch.-M. Debosque, f. f. de pr. (1) 1re Espèce :- (Tapparelli C. Satta.) — Une obligation de 10,000 liv. de Piémont avait été souscrite par un sieur Fiorina, au profit du sieur Satta, prêtre. Dans cet acte, du 4 avril 1800, le sieur Cavoretto se rendit garant solidaire de Fiorina. Par un autre acte du 2 oct. 1800, un sieur Tapparelli déclara que l'obligation du 4 avril avait été souscrite pour son compte, et qu'il s'obligeait en conséquence à garantir Cavoretto de toutes les suites de cet écrit.- Satta étant mort, ses frères et héritiers attaquèrent Fiorina et Cavoretto, et ce dernier appela en garantie Tapparelli. Tapparelli prit le fait et cause de Cavoretto, et il argua de nullité l'acte du 4 avril 1800, disant qu'il contenait des conventions simulées et réprouvées par les lois; pour le démontrer, il articula plusieurs faits que les frères Satta soutinrent inadmissibles. - Le 25 juillet 1809, jugement qui débouta Tapparelli, déclara Cavoretto tenu à payer aux frères Satta la somme de 10,000 liv. de Piémont, avec les intérêts échus. Ce jugement fut signifié par les frères Satta à tous leurs adversaires. Cavoretto en interjeta appel dans les trois mois de cette signification. Tapparelli en appela aussi, mais après l'expiration du délai. -Les frères Satta reconnurent que l'appel de Cavoretto était admissible; mais ils soutinrent que celui de Tapparelli était non recevable, comme tardif. Celui-ci prétendit avoir été relevé de la déchéance par l'appel de son garant.-Arrêt.

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LA COUR; Considérant que le jugement dont est appel a été rendu contradictoirement entre les parties; Que l'appel relevé par le sieur Cavoretto est en temps utile et d'après les règles de procédure; - Qu'il est de principe sanctionné par plusieurs arrêts de cette cour, que l'appellation interjetée par l'un des colitigeants est censée commune et utile aux autres, pourvu qu'ils aient le même intérêt en affaire et que leurs moyens de défense soient communs avec l'appelant ;-Que, dans l'espèce, on ne peut pas douter que les sieurs Tapparelli et Cavoretto n'aient un intérêt égal en l'instance, et que la cause de l'un ne soit la cause de l'autre, si on retient que l'obligation solidaire du sieur Cavoretto vers le feu prêtre Satta ne subsiste qu'autant que l'écriture du 4 avril 1800 sera déclarée valable et exécutoire; que les moyens du sieur Tapparelli ayant pour but de démontrer la simulation et la fraude qui environnent le contrat, dont, en ladite écriture, ceux-ci frappent aussi directement l'obligation du sieur Cavoretto, et que le sieur Tapparelli ayant pris sur lui le fait et la cause pour le sieur Cavoretto, il en dérive que la défense devient commune et propre aussi avec le même, dès que par là il figure comme garant de celui-ci; Que par conséquent la fin de non-recevoir opposée par les sieurs Satta, comme héritiers du feu prêtre Satta au sieur Tapparelli, à cause que son appel a été relevé après l'expiration du terme des trois mois, ne tient qu'à une simple apparence et ne peut pas être favorablement accueillie; De l'avis de M. Coller, substitut du procureur général; Sans s'arrêter à la fin de non-recevoir opposée, de la part des frères Satta, à l'appel relevé par le sieur Tapparelli, du jugement du 25 juillet dernier échu; Met ce dont est appel au néant;- Émendant, permet au sieur Tapparelli de faire preuve par témoins des faits articulés. Du 28 fév. 1810.-C. de Turin.

-

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stance des prétentions rejetées par ce jugement réformé sur l'appel d'un seul des colitigants. M. Merlin, Quest. de droit; vo Nation, § 2, explique clairement cette différence, par l'exemple des lois romaines. Le motif qui, dans cette législation, faisait déclarer l'appel commun aux parties, était que chacune d'elles pouvant appeler, celles qui ne le faisaient pas étaient censées adhérer implicitement à l'appel des autres. Mais quand celui qui appelle en avait seul le droit, on ne peut plus feindre cet appel tacite, de la part de celui qui ne pourrait plus appeler, même expressément, la fiction ne pouvant avoir lieu quand la réalité est impossible. - Il nous semble, d'après la généralité des expressions dont se sert notre code, que ces distinctions ne sont plus fondées, et que le jugement contre lequel l'une des parties n'appelle pas en temps utile, acquiert contre elle l'autorité de la chose jugée, de manière à repousser également l'appel qu'elle voudrait en interjeter en le rattachant à celui de ses litisconsorts, et l'action ultérieure qu'elle tenterait d'introduire, à la faveur de la réformation obtenue par une partie plus diligente, sauf, néanmoins, comme nous l'avons dit suprà, les cas d'indivisibilité et de solidarité.

1044. Quant à l'indivisibilité, elle fait exception, d'après une jurisprudence constante, à la règle d'après laquelle l'appel est personnel (Bourges, 16 août 1809; Caen, 26 juin 1837; Colmar, 28 déc. 1839; Bruxelles, 27 janv. 1844) (3).

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(3) 1 Espèce :-(Thomas C. Tenaille.) — LA COUR; rant que la veuve Beaumont et les sieurs Tenaille-Chèvre et TenailleMillery étaient en cause devant les premiers juges, et que l'appel au respect de la veuve Beaumont a été interjeté en temps utile; — Qu'à la vérité, au respect des autres, il ne l'a été que deux ans après; mais que l'appel signifié à l'une des parties vaut contre toutes; qu'autrement la même condamnation pourrait être anéantie à l'égard d'une partie et subsister contre l'autre, ce qui répugne au principe sur l'indivisibilité des jugements; Déclare l'appel recevable au respect du sieur Te

naille, etc.

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Du 16 août 1809.-C. de Bourges.-M. Sallé, pr.

2o Espèce : (Beaumont C. Lainey.) — LA COUR ; - Considérant, sur la première question, qu'il est vrai que les grosse et expédition délivrées à la partie, selon les formalités prescrites par les art. 141, 146, 545 et 1040 c. pr., sont les seules susceptibles d'exécution directes, et en vertu desquelles cette partie puisse saisir et exproprier son débiteur ; mais que la simple signification d'un jugement n'est point un acte d'exécution, et qu'elle n'a d'autre but que de faire connaître à la partie le jugement rendu contre elle, et de faire courir les délais de l'appel; Que, pour atteindre ce but, il est véritablement indifférent que l'expédition de ce jugement ait été délivrée à la partie qui signifie ou à toute autre qui a figuré au procès; qu'exiger pour ce cas les formalités prescrites pour l'exécution, ce serait ajouter sans nécessité à la loi, et créer des nullités qu'elle n'a pas prononcées ;-Qu'ainsi, la signification du 22 nov. 1836 ayant suffi pour avertir Beaumont de l'existence du jugement rendu contre lui et faire courir les délais de l'appel, il est vrai de dire que cet appel, interjeté plus de trois mois après la signification du jugement, serait non recevable, si les autres moyens que Beaumont présente pour le faire accueillir n'étaient pas fondés; qu'il convient dès lors d'apprécier le mérite de ces moyens;

Considérant, sur la deuxième question, en droit, que, dans les matières solidaires ou indivisibles, l'appel interjeté en temps utile vis-à-vis de quelques-unes des parties, conserve le droit d'appel vis-à-vis des autres, même après l'expiration du délai d'appel; - Considérant encore qu'en principe général, toutes les fois que deux parties ont le droit d'intenter pour le tout la même action, ce qu'il ne faut pas confondre avec les actions fondées sur la même cause, appartenant à deux ou à plusieurs personnes pour des parts indivises différentes, il n'est pas permis d'admettre deux décisions judiciaires en sens divers; - Considérant, en fait, que Beaumont a interjeté appel contre Pierre et Voisin en temps de droit; Considérant que l'action introduite par Pierre et Voisin contre Beaumont avait pour but de faire déclarer frauduleux un payement de 8,000 fr., que

1045. Ainsi, bien que les délais de l'appel soient expirés, une partie est néanmoins recevable à adhérer à l'appel formé par son consort, lorsque l'objet litigieux est indivisible, comme si, par exemple, il s'agit d'une péremption d'instance (Toulouse, 2 fév. 1828 (1). — Conf. Req., 13 juill. 1830, v° Cassation, arrêt rendu dans la même affaire, et qui rejette le

celui-ci disait avoir fait à Lainey fils pour prix de la charge de commissaire-priseur à Granville, qu'il a achetée de lui, lesquels 8,000 fr. devaient, selon Pierre et Voisin, rester entre les mains de Beaumont, pour assurer le service d'une rente viagère de 1,200 fr., due au sieur Lesauvage, ancien titulaire de cette charge, de laquelle rente ils étaient garants;

Considérant que, de leur côté, les époux Lainey, cautions de leur fils, approchés au procès par Pierre et Voisin, arguaient également de fraude le payement de 8,000 fr. que Beaumont prétendait avoir fait; ils soutenaient aussi qu'il avait conservé cette somme en ses mains pour acquitter la rente due à Lesauvage; Considérant que, dans leurs conclusions devant le premier juge, Pierre et Voisin demandaient que Beaumont fat condamné à payer la rente de Lesauvage ou à verser, soit dans leurs mains, soit dans les mains des époux Lainey, le capital de 8,000 fr.; que les époux Lainey demandaient aussi, dans leurs conclusions, que Beaumont fût condamné à servir la rente ou à payer soit en leurs mains, soit dans celles de Pierre et de Voisin, les 8,000 fr. prix de la charge vendue par leurs fils; -Que, sur les conclusions, il intervint, le 10 août 1836, jugement qui prononça ces condamnations; - Considérant qu'il résulte de ces faits que le sujet unique du procès était un payement frauduleux imputé à Beaumont;-Que l'action formée par les époux Lainey était absolument la même que celle formée par Pierre et Voisin, qu'ils avaient les mêmes intérêts et faisaient valoir les mêmes moyens; Que les procédures se sont faites ensemble et dans un but commun; enfin, qu'il n'y avait qu'une seule et même contestation qui a été terminée par un seul et même jugement; - Considérant que ce jugement, conforme aux conclusions de Voisin et des époux Lainey, donne expressément à chacun d'eux le droit de demander le payement total de la créance, et que le payement fait à l'un d'eux libère le débiteur, ce qui constitue la solidarité entre les créanciers, aux termes de l'art. 1197 c. civ.;-Considérant, dès lors, que la nature des choses ne permet pas qu'il y ait deux décisions différentes à l'égard de Voisin et des époux Lainey, l'une en faveur des derniers, qui disent que Beaumont doit encore les 8,000 fr. prix de sa charge, et que cette somme servira à payer la rente de Lesauvage; l'autre au contraire, qui juge que Beaumont ne doit rien, et que Voisin acquittera cette rente, en sorte que l'une des deux décisions déclarerait l'action fondée pour le tout, l'autre la rejeterait pour le tout; - Considérant que la matière étant ainsi solidaire et indivisible dans son objet, l'appel porté contre Voisin et Pierre (les 24 et 27 août 1836) a eu pour effet de remettre en question la cause à l'égard des époux Lainey;- Qu'il a suffi de les appeler au procès, sans interjeter à leur égard un appel particulier; -Par ces motifs, etc.

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formée par les héritiers Page contre Dasque.-Cette demande est rejetée. -Un seul des héritiers Page interjette appel.-Mais, à l'audience, les autres héritiers, qui avaient été intimés, déclarent adhérer à l'appel, en invoquant le principe de l'indivisibilité en matière de péremption.-Arrêt.

LA COUR;-Attendu qu'il est de principe qu'une partie, dans un jugement, qui n'en a point appelé de son chef dans les délais de la loi, est recevable, néanmoins, à adhérer à l'appel relevé par les autres parties, lorsque l'objet du jugement de l'appel est indivisible;-Que ce caractère d'indivisibilité se rencontre dans l'espèce actuelle, puisqu'une instance, une procédure, et les actes dont elle se compose, ne sauraient être tout à la fois détruits et maintenus;-Reçoit les parties de Tourneville à adhérer à l'appel de la partie d'Astre, etc.

Du 2 fév. 1828.-C. de Toulouse, 2 ch.-M. de Caumont, pr.

(2) 1 Espèce :-(Fournier père C. Fournier fils.)-En 1814, les enfants de deux lits de la dame Mollé partagèrent sa succession en deux parts seulement l'une pour la demoiselle Allard, représentant la ligne du premier lit; et l'autre pour les enfants Fournier, du second lit. Presque tous les copartageants étaient mineurs; cependant, on n'observa aucune des formalités voulues par la loi.-En 1817, un des enfants Fournier, devenu majeur, prit sa part des meubles dans la portion afférente à la branche à laquelle il appartenait; mais les immeubles restèrent indivis jusqu'en 1830. -A cette époque, Fournier père, dont les droits n'étaient pas non plus liquidés, assigna ses enfants pour ouïr ordonner le partage de la part des biens qui leur étaient échus par le partage de 1814.-Simon Fournier, l'un d'eux, déniant l'effet de ce partage fait pendant sa minorité, en demanda an général, et il appela en cause la demoiselle Allard, femme Dorcé. · Le 6 août 1830, jugement du tribunal des Sables-d'Olonne, qui, attendu l'exécution donnée par Simon Fournier au partage de 1814, depuis sa majorité, déclare ce partage définitif, et ordonne le partage de la portion dévolue à sa ligne. Simon Fournier interjeta appel dans les délais, seulement vis-à-vis son père et la dame Dorcé. Ce ne fut que tardivement qu'il dénonça son appel à son frère et à sa sœur.-Ses adversaires soutinrent que cet appel, non recevable vis-à-vis certains d'entre eux, l'était vis-à-vis toutes les parties, attendu qu'il s'agissait d'une matière indivisible. Le 15 déc. 1831, arrêt de la cour de Poitiers qui adopte ce système, en ces termes:«‹. -« Attendu que l'action principale sur laquelle est intervenu, le 6 août 1830, le jugement dont est appel, avait pour objet le partage provoqué par Fournier père, contre Jean Fournier, Marie-Anne Fournier, veuve Burcier, et Simon Fournier, ses enfants, des biens immeubles qui étaient restés communs et indivis entre le père et ses trois enfants, par l'événement du partage antérieur, fait au mois de janvier, 1814, entre ledit Fournier père, pour lui et ses trois enfants, d'une part, Étienne Allard et Louise Allard, devenue épouse Dorcé, dans une communauté et (Schneider et Baumler C. Emm. et Benj. Lewy.)—continuation de communauté faisant partie de la masse qui fut alors divisée,

Du 26 juin 1837.-C. de Caen, 4o ch.-M. Pigeon de Saint-Pair, 1er pr.

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3 Espèce LA COUR; - Après en avoir délibéré en chambre du conseil; - Attendu, sur la fin de non-recevoir opposée aux parties de Neyremand à raison de la prétendue tardiveté de son appel, qu'en matière indivisible, l'appel utile de l'un des colitigants relève l'appel tardif de ses consorts; - Que la contestation liée entre les parties avait pour unique objet de faire décider si le contrat du 24 fév. 1836 renfermait un engagement loyal, ou s'il ne couvrait qu'une convention pignorative, un prêt déguisé, et tellement usuraire, que, dans un cas donné, le prêteur pouvait, du chef des emprunteurs, être investi d'une masse de biens-fonds excédant considérablement la valeur de la somme prêtée;-Qu'un litige de ce genre, intéressant les bonnes mœurs et l'ordre public, constitue évidemment une matière indivisible, puisqu'en pareille occurrence on ne saurait concevoir deux décisions opposées, l'une proscrivant le contrat comme entaché d'un vice radical, et déguisant un profit illicite; l'autre le laissant debout avec un sceau d'apparente légitimité, et une prime cachée à la fraude; - Que l'appel des parties de Paris a été interjeté dans les délais, et que, dès lors, cet appel, refluant sur la tardiveté de l'appel des parties de Neyremand, lui prête appui et efficacité.....

Du 28 déc. 1839.-C. de Colmar, 1re ch.-M. Rossée, 1er pr.

4 Espèce:-(Lector.)-LA COUR ; Sur les fins de non-recevoir dirigées contre l'appel; Attendu qu'eu égard à l'état de la cause et à la qualité des parties, les demandes de remise faites devant le premier juge ne peuvent valoir acquiescement, et qu'il en est de même des réponses faites par la dame Lector et consignées dans les exploits qui lui ont été notifiés;-Attendu, d'ailleurs, qu'il s'agit dans l'espèce d'un objet indivisible, et qu'il y a des mineurs en cause qui ne peuvent être liés par les déclarations de leur mère.

Du 27 janv. 1844.-C. d'appel de Bruxelles, 2 ch.

-

d'autre part;
Attendu que, sur les exceptions de Simon Fournier fils
tendant à ne pas prendre pour base du partage à faire le partage de jan-
vier 1814, et, au contraire, à le faire déclarer nul, ledit Allard et les
époux Dorcé furent appelés et mis en cause; — Que, dans cet état de la
cause, le tribunal dont est appel a eu à statuer et a statué sur deux choses
distinctes la première, sur la validité ou invalidité d'un partage de jan-
vier 1814, et la deuxième, sur le partage demandé par Fournier père contre
ses trois enfants, et consenti par deux d'entre eux qui devenaient ainsi
demandeurs en partage; que ce jugement, intervenu le 6 août 1830, a dé-
cidé, contradictoirement entre toutes les parties, que le partage de 1814,
qui avait été exécuté par les parties, et notamment par Simon Fournier,
pendant plus de dix ans, depuis sa majorité, ne pouvait pas être rescindé,
et devait être maintenu, et a ordonné au surplus le partage demandé par
Fournier père, J. Fournier et la veuve Burcier; - Attendu que le juge-
ment signifié le 8 septembre à Simon Fournier fils, à la requête de Four-
nier père, de Jean Fournier et de la veuve Burcier, est devenu l'objet de
l'appel formé par Simon Fournier fils; mais que son appel n'a été interjeté
en temps utile, le 22 sept. 1830, qu'à l'encontre de Fournier père, de
Pierre-Étienne Allard et des époux Dorcé; d'où suit que la réformation
n'en étant pas demandéc, contre Jean Fournier, ce jugement, quant à
eux, a acquis l'autorité de la chose jugée;-Attendu qu'en matière indi-
visible, comme l'était la demande principale en partage, formée par Four-
nier père et deux de ses enfants, comme en matière où figurent, soit des
copropriétaires, soit des débiteurs solidaires ayant tous le même intérêt et
puisse et doive quelquefois profiter aux autres; mais qu'il n'en est pas
des moyens de défense communs, on conçoit que l'appel interjeté par l'un
ainsi au préjudice de celles des parties instanciées ayant un intérêt con-
traire et contre lesquelles l'appel n'a pas été interjeté; que, pour celles-là,
le jugement non valablement attaqué est souverain, et qu'il n'est plus sus-

(1) Espèce :—(Page C. Dasquo,)-Demande en péremption d'instance, ceptible de remettre en question les droits qu'il leur confère; - Attendr TOME IV.

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