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plus grande aisance pour bien cultiver les trois cents arpens de terres labourables qui Jui restent; les engrais lui manquent moins, puisqu'il n'a plus que cent arpens à couvrir au lieu de cent trente-trois un tiers: bienfaits d'où découlent tous les autres.

Ces cent trente-trois arpens mal fumés ne peuvent rien produire de bon; dans quelques années où par hasard les pluies sont répétées heureusement, l'ancien fermier regagne par les bienfaits de l'atmosphère la dose d'engrais qui manque à sa terre ; on sait que l'eau, à temps utile, est le meilleur de tous; mais ce bienfait passager ne se fait sentir que sur la récolte présente, tandis que l'action des fumiers mis abondamment se fait remarquer pendant plusieurs années.

Il est encore d'autres vérités qui prouvent le mérite de l'assolement par quart, elles vont se trouver détaillées dans les explications qui suivent.

CHAPITRE Ier.

Jachères semées en fourrages.

L'origine des jachères vient probablement de l'impossibilité qu'avoient reconnue les premiers cultivateurs, de pouvoir toujours mettre

que

des grains l'un sur l'autre avec succès. Sûrement le grain mis sur la jachère vient mieux que grains sur grains : mais que n'avoient-ils essayé si les grains, mis sur les plantes fourrageuses, viendroient moins bons que sur les jachères nues? n'avoient-ils calculé même si les grands avantages résultant des fourrages qu'ils auroient obtenus sur leurs jachères n'auroient pas balancé le moins de grenaison qu'ils redoutoient par suite sur leurs récoltes? Ils auroient vu que plus ce que l'on appelle frésis, c'est-à-dire les fourrages mis sur les jachères, sont bons, plus les blés mis ensuite sont excellens.

En effet, un sol naturellement brûlant, laissé nu à l'action du soleil d'été, doit perdre par l'évaporation l'état de fraîcheur qui lui est propre, et qu'il faut qu'il ait constamment toute l'année pour conserver toute sa force végétative. Le seul moyen de le préserver de cette ardeur du soleil d'été, est donc de le couvrir d'une nape de verdure fourrageuse qui fasse l'effet d'une pièce de bois laissée au bord de la forêt, qui, dérangée de place présente une terre fraîche et poreuse où une infinité de germes ne demandent qu'à se développer. Cette terre, toute fraîche décou

verte, labourée et soumise à l'action de la végétation, feroit des merveilles; mon fourrage, ôté de dessus ma jachère et recevant de suite les labours pour automne, fait le même effet.

Les frésis ne diminuent donc point la grenaison des blés ou seigles qui suivent, et ils donnent au fermier, privé de prairies naturelles, une infinité de fourrages, sans lesquels il faudroit qu'il achetât du foin pour faire exister ses chevaux. Ce fourrage, appelé bizailles, donné aux chevaux sans être battu leur tient lieu, en partie, d'avoine. Quoiqu'il convienne de battre une portion ou la totalité de ces bizailles, pour faire les graines nécessaires à l'ensemencement suivant, elles sont toujours coupées quand elles ont encore un bouquet de fleur au haut de leurs tiges, et par conséquent avant que l'état de maturité entier et parfait ait altéré, 'effrité le sol. Ces graines reçoivent leur dernier caractère de maturité après la fauchaison, pendant qu'elles sont en ondins sur la terre; d'ailleurs, toute graine coupée un peu verte n'en est que plus hâtive. Si, pour avoir plus de graine, on attendoit la dernière fleur, les premières cosses du bas de la tige s'ouvriroient, s'égraineroient, et le

fourrage en outre, perdant toute verdure auroit moins de qualité.

Il convient de varier ces bizailles, pour en faire un emploi bien entendu envers tels qu tels animaux, pour que celui qui se récolte plus facilement offre une ressource contre celui que trop de pluies dans le moment de la fenaison gâte plus facilement. Le lentillon est la plante par excellence, quoique de moindre hauteur, poussant très-rapprochées, dans le champ elle offre le coup-d'œil d'un superbe tapis, donne beaucoup de bottes et d'un poids très-lourd. Sa tige très-fine est séchée après la pluie par le moindre rayon de soleil, tandis que le pois, la vesce à tige creuse et très-spongieuse, présentent plus de difficulté pour resécher, de manière qu'intempérie égale, le fourrage du lentillon conserve beaucoup plus de qualité et de verdure. Au battage, rien n'en est perdu; le fleurin qui se détache sous le fléau, donné aux brebis, est infiniment laiteux. Cette plante passe pour être dangereuse par son trop de grain, mais il n'y a de dangereux que la main aveugle qui la donne; c'est pourquoi il convient de la faire secouer pour connoître la ration que l'on administre. Le fourrage battu reste tout aussi appétissant, et

l'on trouve par-là sa semence et souvent un résidu à vendre à ses voisins.

Toutes ces bizailles sont estimées à bas prix, à 24 livres le cent de bottes ; elles sont données aux chevaux, botte de pois ou vesce, etc., pour botte de foin, qui se vend aujourd'hui 45 livres le cent, souvent 60 livres. Où en seroit l'agriculteur maître de poste, sans cette ressource? il faudroit qu'il trouvât 10,000 livres, puisque les 5,000 livres, valeur de ses bizailles, lui évitent la dépense de 10,000 livres de foin environ, sauf les années où il survient des gelées printannières, des sécheresses, ou d'autres fléaux trop ordinaires dans les sables, et qui y détruisent tout.

Les semences faites sur une portion des jachères, pour être mangées en vert par les bestiaux, donnent au fermier, qui n'a pas de prairies naturelles dans son emploi, un moyen d'entretenir et bien nourrir, dès qu'il lui plaît de mettre au parc, un troupeau nombreux, qui ne pourroit l'être qu'à l'ouverture des chaumes. On sait qu'en Juin et Juillet, il se trouve dans tous les pays infiniment peu de pâture; le fermier qui se trouve entouré de petites cultures à légumes, où la terre est toujours noire, est encore d'autant

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