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DROIT CIVIL. - TIT. 2, CHAP. 2, SECT. 1, ART. 3.

976. Et à l'égard de l'arrestation provisoire, il a été décidé. 1o que la loi du 10 sept. 1807, laquelle autorise l'arrestation provisoire de l'étranger débiteur envers un Français, ne pouvait recevoir d'application qu'autant que l'obligation aurait été primi

s'être soumis, quand il a pris toutes les précautions nécessaires pour s'y Boustraire; Attendu qu'on ne pourrait interpréter l'art. 14 dans un 'sens aussi étrange, sans décider, d'une manière générale et absolue, que las négociants de tous les points du globe ne pourront souscrire une obligation quelconque, un seul effet négociable surtout, sans renoncer par cela seul au bénéfice de la règle actor sequitur forum rei, sans se soumettre par cela seul à quitter leur pays, leurs affaires, leurs juges naturels, pour se soumettre à la juridiction des tribunaux français, auxquels cependant ils n'ont pas dû penser en contractant directement avec tout autre qu'un Français;

Attendu que, si la disposition de l'art. 14 se justifie par l'esprit de nationalité qui a pu animer le législateur français, en ce qui touche l'obligation contractée en France par l'étranger au moment peut-être où il recevait sur cette terre hospitalière, suivant l'expression du législateur, des secours pécuniaires, il n'en est peut-être pas ainsi en ce qui touche l'obligation contractée à l'étranger par un étranger envers un Français, qui, sans donner ni hospitalité ni secours, n'a fait qu'une affaire de commerce ordinaire, qu'il est allé provoquer au domicile de l'étranger: or, une disposition aussi peu facile à expliquer, aussi exorbitante du droit commun, ne peut raisonnablement et sans danger s'étendre au delà de son texte littéral sur la seule intention prêtée au législateur; Attendu que tel est l'embarras de ceux qui, d'après cette intention supposée du législateur, voudraient étendre le sens de l'art. 14 au delà de son texte exprès, qu'en l'élargissant, pour y comprendre les obligations négociables dont il a été parlé plus haut, ils se croient obligés de le restreindre, pour en exclure les obligations civiles, dont le transport a été fait autrement que par la voie de l'ordre ou de l'endossement; - Attendu que la position d'un débiteur ne peut pas être aggravée sans son fait; que, si l'étranger sait qu'en s'engageant envers tout autre qu'un Français, son engagement pourra cependant, par la voie d'un endossement ou autre, avoir un jour un Français pour créancier, il a dû croire du moins qu'il lui suffisait de ne pas contracter directement avec un Français, que rien ne peut contraindre à accepter la créance, pour ne pas subir les conséquences de l'art. 14 c. civ.; Attendu que le créancier originaire de la créance négociée n'ayant pas le droit d'appeler le souscripteur étranger devant les tribunaux français, ne peut, par la cession de cette créance à un Français, lui donner le droit qu'il n'a pas lui-même d'appeler le débiteur devant les tribunaux de France, d'après la maxime nemo plus juris ad alium transferre potest quàm ipse habet; Attendu, d'après tout ce qui vient d'être dit, que les sieurs Chaulin et Lassalle, parties de Me Rane, qui, s'ils sont devenus les créanciers de Bewsher, n'ont pas cependant directement contracté avec lui, qui n'ont pu recevoir par le transport que les droits qu'avait leur cédant lui-même, ne peuvent invoquer l'exception de l'art. 14 ci-dessus, et demeurent soumis à la règle générale qui les obligeait d'appeler Biougue devant ses juges naturels ; Met l'appellation et ce dont est appel au néant; déclare irrégulière, nulle et non recevable la demande des sieurs Chaulin et Lassalle, comme incompétemment formée.

Du 5 juill. 1832.-C. de Poitiers, 2 ch.

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(1) 1ro Espèce: — (N...)—LA COUR; Considérant qu'en général les tribunaux sont incompétents pour statuer sur les conventions qui ont eu lieu hors de leur territoire; Que l'art. 14 c. civ. ne fait exception à cette règle générale que pour le cas où un étranger se serait engagé hors du royaume envers un Belge; auquel cas ledit art. 14 permet d'attraire l'étranger devant les tribunaux des Pays-Bas ; Considérant que la loi du 10 sept. 1807, concernant la contrainte par corps contre des étrangers, n'a étendu en rien la compétence des tribunaux des PaysBas, mais a seulement voulu donner à tous les jugements de condamnation rendus en ce pays contre les étrangers, un moyen d'exécution qui, selon les lois générales du royaume, n'aurait pu être employé que dans certains cas déterminés; - Que l'on peut d'autant moins chercher dans cette loi une extension de la compétence du juge, qu'elle n'est qu'une loi exceptionnelle rendue en raison des circonstances de l'époque, afin de prévenir que les habitants du royaume, qui dans ce temps se trouvaient dans l'obligation de traiter tous les jours avec des étrangers, ne souffrissent aucun dommage, en ce que les étrangers ne possédant souvent aucune propriété dans le royaume, les moyens ordinaires d'exécution sur les biens ne pouvaient pas suffisamment avoir effet contre eux, etc; Par ces motifs, met l'appellation au neant. Du 25 mars 1826.-C. sup. de Bruxelles.-M. Duvigneau, c. conf.

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tivement souscrite au profit d'un Français (C. su 25 mars 1826; Aix, 25 août 1828; Pau, 27 m n° 267, et notre traité de la Contrainte par cor Toutefois, il a été reconnu qu'on doit co

raison du montant de ce billet, mais qu'il n'en résult ait eu une obligation contractée par le débiteur étrang cier français;- Considérant que ce n'est que dans ce y a lieu d'ordonner l'arrestation provisoire contre le dé domicilié, autorisée par la loi du 10 sept. 1807; que clairement des motifs de cette loi, tels qu'ils ont été combinaison de cette loi avec l'art. 14 c. civ., dont ell rollaire; Considérant, en outre, que l'endossement profit des sieurs Altaras et comp., de Marseille, qu'un et après qu'un jugement de condamnation avait été Sturta, par le tribunal de commerce de Gênes, sur la p père et fils, de Gênes; que l'effet de ce jugement a ét vation; que, dès ce moment, ce n'est plus la lettre d jugement de condamnation, qui est devenu le véritable que les intimés aient demandé le rejet de ce jugement pas produit en forme légale et qu'il n'avait pas été s ils n'en ont pas formellement nié l'existence, et que, d tence résulte de toutes les circonstances de la cause; qu sonnable ne peut s'élever a cet égard, et qu'il résulte lettre, produit par les intimés eux-mêmes, qu'ils ava de ce jugement;-Ordonne que Sturta sera mis en liberté Du 25 août 1828.-C. d'Aix.-MM. Dessoliers et Defou, 3o Espèce: (Hervas C. Legoanère.) Le sieur espagnol, était assigné, ainsi que les liquidateurs de Sagastizabal et autres, de la Corogne, dont il avait é par les sieurs Legoanère, Français, pour rendre compte avaient été confiées pour en opérer le recouvrement, ou, condamner par corps à leur en payer les intérêts.-L'i dante devant le tribunal de la Seine, lorsque le sieur He pour se rendre a Bayonne. Les sieurs Legoanère obt dent du tribunal de cette ville une ordonnance qui les au réter le sieur Hervas provisoirement, en vertu de la loi s'il ne payait ou ne fournissait caution, ou ne justifiait en France, d'immeubles suffisants pour répondre de la s Hervas arrêté et emprisonné, en vertu de cette ordonnan réformation et la nullité de son emprisonnement. moyens contre le procès-verbal de capture le premie que le domicile des sieurs Legoanère n'y aurait pas été in de ce que l'ordonnance du président n'aurait pas été si fier, quoique rendue au palais de justice; le troisieme lui, Hervas, n'aurait jamais contracté d'engagement env goanère, n'ayant été mandataire que de la maison Sag répondait pour les sieurs Legoanère : 1° que leur domic ment indiqué au procès-verbal de capture, puisqu'il y é meuraient à la Corogne; 2° qu'il n'est pas prescrit, à que de simples ordonnances laissées à la faculté du jug par le greffier; 3o enfin, qu'il était justifié que les traite vas sur la maison Lopez et Sagastizabal avaient été la pr Legoanère, leurs auteurs, dont ils étaient héritiers; que c' lité que l'ordonnance avait été requise et son exécution la capture avait donc été légalement faite. - 29 avril 18 tribunal civil de Bayonne, qui rejette les deux premiers mettant le troisième, prononce la mise en liberté du sie Appel par les sieurs Legoanère. Appel par le sieur donnance du président. Les mêmes moyens ont ét sieurs Legoanère ont soutenu de plus que le tribunal pour prononcer sur l'ordonnance du 21 avril.-Arrêt.

LA COUR; Attendu, en ce qui touche, au fond, 1 ordonnance, que la disposition de l'art. 2 de la loi du 8 férant évidemment à l'art. 1 de cette loi, il en résulte qu l'étranger ne peut être ordonnée que dans le cas où l' poursuivi en France : or, comme cette faculté n'est acco c. civ. que dans le seul cas où l'obligation a été contra envers un Français, il s'ensuit que ce n'est non plus que peut y avoir lieu à l'application de la mesure rigoure l'art. 2 de la loi du 8 sept. 1807; et, dès lors, étant cor que le sieur Hervas, partie de Branthomme, en supposa teur des sieurs Legoanère, parties de Déjernon, ne s obligé qu'envers un Espagnol, il en résulte que c'est pa plication de la loi précitée qu'il a été privé de sa liberté a lieu à infirmer l'ordonnance dont est appel; - Atte dommages-intérêts, que si l'on doit, en général, user ceux qui, témérairement, portent atteinte à la liberté in lieu, dans l'appréciation des dommages-intérêts, à prend tion le plus ou moins de bonne foi de la partie qui a pr de l'arrestation; or comme, dans l'espèce, tout prouve q

ger qui a souscrit un billet à ordre au profit d'un autre étranger, comme s'étant directement obligé envers le Français qui devient, par un endossement régulier, propriétaire du billet, si ce billet a été rédigé en France, en langue française et à courte échéance, et qu'en conséquence l'étranger, souscripteur du billet, peut être arrêté provisoirement à la requête du Français, aux termes de la loi du 10 sept. 1807 (Douai, 7 mai 1828, aff. Williams Robert, V. no 315).

277. Par application de la règle qui considère l'art. 14 comme établi en faveur du porteur français d'effets de commerce souscrits entre étrangers, il a été décidé que les dispositions de la loi française établies en matière de délai de signification de protét, étaient applicables à l'égard du souscripteur étranger, bien que d'après la loi du pays de ce dernier le protêt doive être fait à une époque plus rapprochée (arg. Aix, 5 fév. 1832, aff. Schilizzi, V. no 419-8°). Sans doute, la position du débiteur ne doit point être aggravée, et celui qui crée un effet de commerce, entend ne s'obliger que conformément aux lois de son pays. Ce principe est vrai en thèse ordinaire; mais il doit être combiné avec les nécessités du droit des gens, surtout quand le débiteur souffre bien moins un préjudice, une aggravation dans sa position, qu'il ne subit une conséquence accidentelle qu'il a dû naturellement prévoir et qui résulte de l'essence même des choses. En effet, celui qui souscrit une traite ou qui l'endosse, doit s'a!tendre à ce que, par des transmissions successives, elle pourra passer entre les mains d'individus appartenant à des nations soumises à des lois différentes; et c'est particulièrement à l'égard d'un tireur, résidant à l'étranger, ou dans un lieu qui est le centre d'un grand commerce, qu'il est raisonnable d'admettre cette supposition. C'est pour un contrat pareil qu'il est nécessaire d'assouplir les règles de la loi d'une nation aux exigences des lois qui régissent les signataires subséquents. Or, dans le contrat dont il s'agit, il nous semble judicieux de considérer tout souscripteur ou endosseur comme le débiteur de l'effet, vis-à-vis de celui à qui il l'aura transmis; et si, d'une part, la condition de cet endosseur ne peut être empirée par le fait du porteur, envers lequel il n'aura entendu s'obliger que suivant le pacte de son propre domicile, il suffira, d'autre part, que le recours soit exercé contre lui dans les délais et suivant la loi de son pays, pour qu'il n'ait aucune objection à élever contre le porteur : il devra rembourser ce dernier sans murmure, sauf à s'adresser à son tour aux endosseurs qui le précèdent, conformément à la loi municipale de ceux-ci, combinée, si elle est silencieuse, avec la raison et la nécessité des choses. Dans ce cas, il importera peu que la loi municipale de l'un des obligés porte que le protêt devra lui être signifié le jour même de sa date; cette disposition ne devra point être entendue dans un sens judaïque; elle devra se

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goanère ont agi de bonne foi, il y a lieu à n'accorder qu'une indemnité proportionnée au préjudice réel reconnu éprouvé par le sieur Hervas, et dont la cour peut apprécier la quotité; - Attendu, quant à la contrainte par corps, qu'elle ne doit être ordonnée, aux termes de l'art. 126, pour des dommages-intérêts, qu'autant qu'ils excèdent 300 fr.; - Attendu, quant à la solidarité demandée, que ne pouvant être ordonnée, en l'absence de conventions des parties, que dans le seul cas où la loi la déclare de plein droit, et que l'espèce actuelle ne se trouvant point au nombre de ces cas, cette demande ne peut être accueillie; - Disant droit aux appels des parties, et les unissant, annule le jugement du 29 avril dernier, comme incompétemment rendu; sans s'arrêter aux moyens de forme plaidés contre l'ordonnance du 21 du même mois, réforme ladite ordonnance au fond; et, procédant par nouveau jugé, déclare qu'il n'y avait pas lieu à accorder l'autorisation demandée de faire arrêter provisoirement le sieur Hervas; par suite, annule le procès-verbal d'arrestation et d'écrou dudit Hervas; Ordonne que celui-ci sera mis en liberté à l'instant de ia présentation du présent arrêt au concierge de la maison d'arrêt; Condamne les sieurs Legoanère aux dépens et en 500 fr. de dommages-❘ intérêts envers le sieur Hervas; Déboute ce dernier de ses demandes en solidarité.

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restreindre aux cas ordinaires où le protêt serait dressé contre lui; mais si, avant de s'attaquer à lui, on a été obligé de parcourir une longue série d'endosseurs, il y a là un cas de force majeure qui s'oppose absolument à ce qu'on déclare déchu celui qui n'a fait les notifications légales que postérieurement, si, d'ailleurs, il s'est renfermé dans les délais que sa loi personnelle lui imposait.

278. Relativement aux obligations civiles souscrites entre étrangers et qui ont été cédées à des Français, il a été jugé qu'un Français cessionnaire d'une telle créance consentie en pays étranger au profit d'un étranger, n'est pas autorisé à assigner le débiteur en payement devant les tribunaux français (Paris, 27 mars 1835 (1).— Conf. motifs de l'arrêt de Douai, du 27 fév. 1828, aff. Ranc, V. no 275). Mais nous ne croyons pas que les motifs sur lesquels cette jurisprudence se fonde puissent être invoqués par les étrangers à l'encontre d'un cessionnaire français. Les raisons qu'on a fait valoir ne s'appliquent qu'à des cas ordinaires et non à celui tout exceptionnel et de faveur nationale que prévoit l'art. 14 c. civ. Les lois romaines citées par Merlin (V. n° 274), applicables en matière de contrats, ne peuvent être transportées en matière de juridiction; elle ne peuvent l'être surtout lorsque la pensée du législateur a été manifestée d'une manière aussi certaine et qu'on voit dans la discussion du conseil d'État qu'il a permis de traduire devant les tribunaux de France un étranger qui s'est obligé, même dans son pays, envers un Français. L'argument tiré de ce qui se passait sous l'empire du privilége de committimus n'est pas plus péremptoire; car c'était en faveur de l'égalité civile que l'extension en était défendue. Que, d'ailleurs, si le principe qu'on ne peut céder à autrui plus de droits qu'on n'en a, avait une valeur réelle dans l'hypothèse qu'on examine, il faudrait aller jusqu'à dire que le droit créé au profit d'un étranger contre un regnicole, ne pourrait, par voie de donation ou de succession, arriver à un Français nanti du privilége que l'art. 14 a établi dans l'intérêt des nationaux : la raison d'inapplicabilité serait identiquement la même. Or, qui oserait, en présence des termes généraux de l'art. 14, aller jusque-là ?— Revenons au vrai. Le droit du cessionnaire est-il réel, légitime? L'affirmative sur ce point doit enchaîner la compétence comme la justice des tribunaux. Telle est aussi l'opinion de M. Pardessus (t. 6, no 1478), qui ne fait d'exception que pour le cas où la cession est frauduleuse et a eu pour objet de distraire collusoirement l'étranger de ses juges naturels.

Et c'est en ce sens, en effet, qu'il a été décidé que l'étranger pouvait toujours fournir la preuve qu'un endossement n'avait eu lieu sur un billet par lui souscrit que dans le but de le soustraire à ses juges naturels, et repousser par ce moyen la compétence des tribunaux français (Douai, 12 janv. 1852) (2).

provisoirement Behr-Abraham, et l'assigne ensuite devant le tribunal de commerce. Behr-Abraham soutient qu'il ne peut être justiciable des tribunaux français, attendu que sa créance a été consentie en faveur d'un étranger et non d'un Français. Jugement qui accueille le déclinatoire. — Appel. — Arrêt.

LA COUR ; Considérant qu'aux termes de l'art. 14 c. civ., l'étranger ne peut être cité devant les tribunaux français que pour l'exécution des obligations par lui contractées envers des Français, soit en France, soit en pays étranger; -- Considérant que l'obligation dont il s'agit dans l'espèce, aurait été contractée en pays étranger envers un étranger, et qu'il ne s'agit pas de lettres de change ou autres valeurs semblables, en vertu desquelles le tireur ou l'accepteur s'oblige de fait envers tous ceux qui, étrangers ou non, peuvent devenir endosseurs ou porteurs; - Considérant, d'ailleurs, que les circonstances dans lesquelles le transport a été consenti au profit de Doumerc, tendent à établir qu'il n'a eu lieu que pour éluder, soit l'art. 14 c. civ., soit la loi en vertu de laquelle il ne peut y avoir lieu à l'arrestation provisoire d'un étranger à la requête d'un etranger; - Confirme, etc. pr.

Du 27 mars 1855.-C. de Paris, 1re ch.-M. Miller,

(2) Espèce: - (Bloqué C. Prior.) — L'Anglais Williams Prior avait souscrit à Londres un traite au profit des sieurs Hesketh, Anglais. - II tomba en Tallite, et vint s'établir en France. Ceux-ci furent admis au passif de sa faillite, et ensuite endossèrent la traite au profit du sieur Bloqué, Français. — Bloqué obtient, sur requête du président de PontAudemer, l'autorisation de faire arrêter provisoirement Williams Prior. - L'incarcération a lieu. Après le procès-verbal d'écrou, ce dernier demande à être conduit en référé devant le président : l'huissier s'y re

279. Conformément à notre manière de voir, il a été décidé : 1° qu'un Français peut citer un étranger devant les tribunaux français, alors même qu'il s'agit d'une donation faite en pays étranger entre deux étrangers, si elle comprenait des blens situés en France qui font l'objet du procès (Req., 26 vent. an 6) (1); 2° Que lorsqu'une action en pétition d'hérédité d'un étranger qui laisse pour héritier, dans une ligne des étrangers, et dans l'autre des regnicoles, a été poursuivie et jugée devant les tribunaux français, ceux-ci sont compétents pour connaître de l'exécution d'une donation faite en pays étranger par l'un des héritiers au défunt, et par suite de la question de savoir si les biens réclamés par celui-ci ont fait partie ou non de cette donation (Req., 2 fév. 1832, aff. Fuentès, V. Compét. civ. des trib. d'arr., n° 80).

280. Du principe que les héritiers succèdent aux droits actifs et passifs de leur auteur, il résulte que les héritiers du Français qui pouvait invoquer en sa faveur l'art. 14 c. civ., ont, comme lui,

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fuse, par le motif que cette demande aurait dû être faite avant l'entrée dans la prison. Mais le référé a lieu le lendemain, et le président, au lieu de statuer, renvoie les parties devant le tribunal. Prior soutient que son arrestation est nulle: 1° parce que l'huissier avait refusé de le conduire en référé; 2° parce que le titre en vertu duquel elle était opérée avait été créé au profit d'un étranger et transmis par un endossement simulé à un Français; 3° parce qu'il était en faillite et que par conséquent on ne pouvait plus exercer contre lui la contrainte par corps. Jugement qui annule P'emprisonnement. Appel de ce jugement par Bloqué. De son côté, Williams Prior appelle de l'ordonnance autorisan! son arrestation. Bloqué lui oppose que l'appel de cette ordonnance aurait dû être interjeté dans la quinzaine de la signification. — Arrêt. LA COUR; Considérant que le délai pour porter appel est en général de trois mois, et qu'il ne peut être différent que pour les cas particuliers indiqués par la loi; Considérant que l'art. 809 c. pr. civ., qui exige que l'appel des ordonnances de référé soit interjeté dans la quinzaine, n'est pas applicable aux ordonnances que le juge a le droit de rendre pour autoriser l'arrestation provisoire d'un étranger, suivant les dispositions de l'art. 2 de la loi du 10 sept. 1807; Considérant, en effet, que cette arrestation provisoire est une mesure conservatrice autorisée par une loi spéciale, et que le délai pour porter appel de l'ordonnance qui l'a autorisée est celui fixé par la règle générale, et non celui déterminé par une disposition particulière qui y est étrangère; Considérant que l'appel de l'ordonnance du 7 novembre ayant été interjeté dans les trois mois, est, dès lors, recevable ; Considérant, relativement à l'ord. du 4 décembre, qui a renvoyé les parties devant le tribunal de Pont-Lévêque, que le juge n'a fait aucun grief à Williams Prior en ne statuant pas seul sur le référé, et que la jurisprudence a autorisé les magistrats à renvoyer devant le tribunal les contestations qu'ils ne croient pas devoir résoudre seuls sur un référé; Considérant que Williams Prior n'a demandé à être conduit devant le juge pour être statué en référé, relativement à son emprisonnement, qu'après avoir été mis en prison, et lorsqu'on allait signer l'écrou qui était déjà rédigé, ainsi que cela résulte du procès-verbal de l'huissier; Considérant, d'ailleurs, que l'arrestation de Williams Prior, ayant eu lieu en vertu de la loi du 10 sep!. 1807, n'était pas soumise à toutes les formalités exigées pour l'emprisonnement, à peine de nullité, par le code de procédure civile, et qu'il s'ensuit que, dans le cas dont il s'agit, l'emprisonnement provisoire de Williams Prior ne peut être déclaré nul et irrégulier; Considérant qu'on doit accorder acte aux parties de leurs soutiens ou méconnaissance, sauf a la cour à les apprécier; Considérant qu'il n'y a pas de motifs suffisants pour demander, dans le cas dont il s'agit, au ministère des relations extérieures, des renseignements sur la législation anglaise sur les points de droit sur lesquels la cour doit statuer; Considérant qu'un étranger peut être traduit devant les tribunaux français pour les obligations par lui contractées en pays étrangers envers des Français (art. 14 c. civ.); - Considérant que les lettres de change et les billets à ordre sont des effets de commerce qui obligent l'accepteur, non-seulement envers celui avec lequel il a contracté directement, mais encore envers ceux au profit desquels la lettre de change ou le billet à ordre ont été régulièrement endossés de manière à leur en transmettre la propriété ; Considérant que l'accepteur est, dès lors, réputé s'être obligé envers le tiers porteur de la même manière que s'il avait traité directement avec lui ;Considérant que les effets de commerce sont, par leur nature, destinés à être négociés, et que celui qui les a souscrits doit s'attendre à devenir le débiteur d'individus qui lui sont inconnus et qui peuvent être étrangers au pays où l'obligation a été signée; Considérant qu'il est vrai qu'en France, lorsque le débiteur est en état de faillite, les créanciers ne peuvent plus individuellement exercer contre lui la contrainte par corps, mais que cela n'est applicable qu'à ceux qui se sont soumis aux formalités imposées au failli par le code de commerce; Considérant qu'effectivement celui qui n'a pas rempli les formalités exigées, et qui a soustrait sa

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la faculté de saisir la juridiction française, et réciproquement que les héritiers de l'étranger placé sous l'empire de cet article peuvent être traduits devant les juges français. — C'est ainsi qu'il a été jugé qu'un Français peut traduire un étranger ou ses héritiers devant nos tribunaux à raison d'une obligation par lui contractée envers ce Français en pays étranger, alors même que ses héritiers n'ont point de résidence en France. Il en est ainsi surtout lorsque cet étranger se trouve obligé solidairement avec d'autres codébiteurs français (Rej., 1er juill. 1829, aff. Vérac, V. Compét. com., no 362).

281. Mais devrait-on admettre notre doctrine dans l'hypothèse où les héritiers du Français créancier seraient étrangers. Nous pensons qu'il y a lieu de distinguer. Si l'action avait déjà été formée par le Français, ses héritiers étrangers pourraient la suivre, parce qu'alors le tribunal aurait été valablement saisi, et qu'il ne peut dépendre des parties de le dessaisir. Mais si le Français était décédé avant d'avoir formé sa demande,

personne et ses biens, ne peut, à l'égard de chacun de ses créanciers invoquer les dispositions introduites en faveur du commerçant malbeureux et de bonne foi, et qu'alors chacun d'eux peut, avec plus de raison, user contre lui de la contrainte par corps à laquelle il avait droit;

Considérant qu'il est suffisamment établi que la législation anglaise est conforme, sur les points qu'on vient d'examiner, à la législation française, et que la raison indique que la faveur due au commerce veut qu'il en soit ainsi;

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Considérant, en fait, que le billet à ordre de 500 livres sterling, dont il s'agit, a été accepté à Londres, au mois d'oct. 1830, par Williams Prior, Anglais, au profit de Hesketh, aussi Anglais, et payable en janv. 1831, en Angleterre; Considérant qu'un endossement régulier dans la forme annonce que la propriété de ce billet à ordre a été transmise, le 8 janv. 1831, à Bloqué, qui est Français; - Considérant que, d'après les principes ci-dessus exposés, si la négociation n'est pas simulée, Bloqué, dernier propriétaire du billet à ordre, a eu le droit de traduire Williams Prior devant les tribunaux français, et de profiter de la loi du 10 sept. 1807; Considérant que la faillite de Williams Prior, arrivée en déc. 1830, ne peut être un obstacle aux poursuites de Bloqué, parce que tout concourt à établir que Williams Prior n'a pas rempli les obligations que les lois anglaises imposent, comme les lois françaises, aux faillis, et qu'il s'est soustrait aux poursuites de ses créanciers, puisqu'il est passé en France immédiatement après sa faillite, sous le faux nom de Williams Peter; Considérant, d'ailleurs, que s'il avait rempli les formalités qui auraient empêché qu'il ne fût considéré comme félon, suivant la loi anglaise, ce serait à lui à le prouver, ce qu'il ne fait pas; - Considérant, en effet, que l'état de failli qu'il invoque étant une exception, c'est à lui qu'il incombe de fournir la preuve qu'il a fait ce qui était nécessaire pour en profiter; Considérant qu'il est certain que le billet à ordre dont il est question avait été présenté à la commission des faillites, en Angleterre, avant la date donnée à l'endossement au profit de Bloqué, ainsi que cela résulte du vu daté qui se trouve sur ce billet; - Mais considérant, d'après ce qui a été dit précédemment, que, si la faillite fixe les droits des créanciers entre eux, chaque créancier conservant ses droits et actions contre le failli de mauvaise foi, qui, au lieu de se soumettre aux devoirs qui lui sont imposés, a soustrait sa personne et ses biens, le créancier Hesketh a pu valablement négocier son billet à ordre par voie d'endossement, après la faillite et après avoir présenté ce billet à la commission de faillite, de la même manière que si la faillite n'avait pas eu lieu, parce que, si quelqu'un avait droit de s'en plaindre, il n'y a que les créanciers, et non pas Williams Prior, qui ne peut se faire un titre de sa conduite déloyale pour ne pas acquitter une obligation qui n'était même pas exigible à la date donnée à l'endossement, s'il n'y avait pas eu de faillite; Considérant que l'endossement consenti par Hesketh doit, dès lors, produire, au profit de Bloqué, les mêmes effets contre Williams Prior que s'il n'y avait pas eu de faillite; Mais considérant que Williams Prior a un intérêt légitime à soutenir que la négociation du billet consenti à Bloqué est simulée, puisque, sans cette négociation, les tribunaux français ne seraient pas compétents, et l'arrestation provisoire n'aurait pu être ordonnée; Considérant que l'époque à laquelle l'endossement a dû avoir lieu, et la non-garantie qui y est stipulée, peuvent faire douter de la sincérité de la négociation; · Considérant que, d'après les faits de la cause, on doit ordonner, avant de statuer au fond, ainsi que sur les dommages-intérêts et les dépens, la preuve des faits articulés qui sont concluants et admissibles.

Du 12 janv. 1832.-C. de Douai, 1re ch.

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(1) (Poch C. Coste.) LE TRIBUNAL; Considérant que le droit public en France garantit les Français de l'obligation d'aller plaider en pays étranger contre leurs débiteurs étrangers, lorsque ceux-ci ont des biens situés sur le territoire français; - Rejette.

Du 26 vent. an 6, C. C., sect. req.-MM. Gauthier, pr.-Marraud, rap.

nous ne déciderions pas de même, car ici on ne pourrait pas dire qu'il y a continuation d'une instance, droit acquis pour les parties d'être jugées par un tribunal saisi; or, le demandeur ne pourrait invoquer les termes de l'art. 14 puisqu'il est étranger, et que cet article ne statue qu'en faveur des Français. En vain il prétendrait qu'il exerce les droits du créancier décédé, parmi lesquels se trouve celui de changer la règle de compétence; on lui répondrait que le défunt n'avait pas un droit acquis à modifier la règle précitée, mais une simple espérance d'user de cette faculté quand son droit serait devenu exigible, faculté qu'il ne peut plus exercer puisqu'il est décédé, et que ses héritiers ne peuvent invoquer de leur chef puisqu'ils sont étrangers.

282. Au surplus, nous n'appliquerions même pas l'art. 14 contre les héritiers de l'étranger en ce qui concerne les actions nées du testament de cet étranger au profit d'un légataire français. La raison en est que toute succession s'ouvre au lieu du domicile du défunt, et que c'est au tribunal du lieu de l'ouverture qu'il appartient de connaître des actions qui y sont relatives; enfin c'est la loi du domicile qui détermine la faculté de tester. C'est par application de ces principes qu'il a été décidé que les héritiers d'un ambassadeur, domiciliés en pays étranger, ne pouvaient être assignés en France, pour l'exécution du testament, par un légataire français, en vertu d'un testament fait en France par cet ambassadeur (Paris, 22 juill. 1815, aff. Lainé, V. Agent diplom., no 82).

283. S'il existe un traité qui déroge à l'art. 14, entre la nation à laquelle appartient l'étranger débiteur et la France, nul doute qu'on doit suivre les dispositions de ce traité. C'est donc avec raison qu'on a jugé: 1° que la disposition du traité conclu le 18 juill. 1838 entre la France et la Suisse portant que, dans les affaires litigieuses personnelles ou de commerce, le demandeur sera tenu de poursuivre son action devant les juges naturels du défendeur, est obligatoire sous les deux seules exceptions qu'il contient dans son art. 3; qu'elle ne saurait être déclarée inconstitutionnelle sous prétexte qu'elle serait contraire à l'art. 14 c. civ.; et cela, même en matière de lettre de change, et même au cas où le Suisse est appelé en garantie (Nancy, 2 avr. 1849, aff. Pingeon, D. P. 49. 2. 171); 2° Que l'exception faite par l'art. 3 du traité pour le cas où les parties sont présentes dans le lieu même où le contrat a été passé, ne s'entend que d'une présence au moment des poursuites, et non au jour où l'acte a (1) Espèce : (Mabille et Joanni C. Suchet et Morni.) — En 1824, des Français formèrent une société de commerce. D'après l'acte social, le siége de l'établissement était fixé à Paris. Il fut stipulé que les difficultés qui s'élèveraient entre les associés seraient jugées par des arbitres nommés par le tribunal (lequel ne fut pas autrement désigné dans l'acte). - Les sieurs Mabille et Joanni, Genevois, s'associèrent à l'entreprise, et achetèrent un certain nombre d'actions dont le montant devait, dans un délai fixé, être versé dans la caisse sociale. Mais n'ayant pas opéré leur versement à l'époque convenue, Mabille et Joanni furent assignés devant le tribunal de commerce de Paris. Ils en déclinèrent la compétence, en invoquant les traités de 1803 et 1820 entre la France et la Suisse, aux termes desquels les Suisses, défendeurs, doivent être cités devant le tribunal de leur domicile. Il est vrai, disaient-ils, qu'en matière de société l'arbitrage est forcé; mais cette règle n'est applicable qu'au cas où la société est formée réellement. Or, dans l'espèce, nous prétendons qu'elle ne l'est pas, et dès lors que la question à juger est celle de l'existence ou de la non-existence de la société, il n'y a pas lieu de s'écarter des règles ordinaires de la compétence. Le 7 fév. 1827, jugement qui, rejetant le déclinatoire proposé, retient la cause, et renvoie les parties devant des arbitres : «Attendu que la demande des sieurs Morni et Suchet résulte de l'engagement que Mabille et Joanni ont contracté à Genève en 1825, lequel porte textuellement qu'ils s'engagent à payer à la compagnie des remorqueurs du Rhône, à la caisse sociale à Paris, la somme de..., pour prix d'actions sur ladite compagnie, dont ils se sont rendus souscripteurs en qualité de commanditaires, s'obligeant de verser le montant de leurs actions aux époques, dans les termes, et de la manière indiqués par les statuts de ladite compagnie, auxquels ils s'obligent de se conformer; Attendu, en fait, que ladite société, sous la raison Courteaux et compagnie, a été établie à Paris; - Attendu, d'ailleurs, que, par l'art. 24 des statuts de ladite société, il est stipulé que, s'il s'élevait quelques difficultés entre les parties contractantes pour l'exécution du présent acte de société, elles seraient jugées par des arbitres nommés par les parties, ou d'office par le tribunal, ce qui ne peut s'entendre que de celui de Paris; - Que les traités de 1803 et 1820 entre le gouvernement français et les

été souscrit en France (même arrêt);-3° Que, quant à la seconde exception introduite dans le même article du traité pour le cas où les parties seraient convenues de juges, elle ne se trouve pas réalisée par cela que l'effet de commerce aurait été souscrit par le Suisse en France (même arrêt);-4° Que lorsque, dans le cas d'une société originairement contractée entre les Français, l'acte social porte que le siége principal de la société sera établi en France, et que les difficultés qui s'élèveraient entre les associés seront jugées par des arbitres nommés par le tribunal (sans autre désignation de ce tribunal), s'il arrive que des Suisses s'engagent à faire partie de la société, ils sont, par suite de leur adhésion, sans réserve, à l'acte social, soumis, pour les demandes dirigées contre eux par leurs coassociés, à la juridiction du tribunal dans le ressort duquel se trouve le siége principal de la société, et ils ne peuvent se prévaloir des traités politiques aux termes desquels les Suisses, défendeurs, doivent être pousuivis devant les juges de leur domicile (Paris, 2 júill, 1828) (1); — 5° Qu'en exécution de l'art. 3, § 1, du traité entre la France et la Suisse, du 18 juill. 1828, un Français ne peut actionner un Suisse, à raison d'opérations de commerce, devant les tribunaux français, mais seulement devant les tribunaux suisses, et réciproquement; qu'en conséquence", doit être annulé pour incompétence u ingement rendu par défaut contre un Suisse, par un tribunal français, sur la demande d'un Français (Cass., 12 nov. 1832 (2);. V. n° 254).

284. Il n'est pas douteux qu'un Français ait la faculté de renoncer au bénéfice que lui ouvre l'art. 14, car cet article n'est point une disposition d'ordre public, mais une simple faveur que la loi réserve à nos nationaux. Telle est l'opinion de MM. Legat, p. 298; Guichard, no 237; Coin-Delisle, n° 15, et Fœlix, Dr. intern. priv., no 159.—Il a été jugé, dans le même sens : 1° qu'un Français n'est plus recevable à renouveler en France, contre un étranger, l'action dont il s'est formellement désisté en pays étranger, en y consentant, devant les tribunaux de ce pays, l'annulation du titre de sa créance; et spécialement, que si, porteur d'un titre argué de faux, il s'est expressément engagé à abandonner toute poursuite contre l'étranger, en cas que le faux fût constaté par experts, il ne peut plus, après cette constatation, et quand les poursuites ont été réellement abandonnées en pays étranger, recommencer le procès en France (Paris, 14 juill. 1809) (3); -2° Que le Français qui a librement choisi la juridiction étrangère pour vider un débat existant entre lui et un États suisses stipulent qu'en matière personnelle les défendeurs seront poursuivis devant les juges de leur domicile, à moins que les parties ne fussent convenues de juges par-devant lesquels elles se seraient engagées à discuter leurs difficultés; - Attendu, en droit, que toutes les contestations relatives à l'exécution d'un acte social doivent être nécessairement portées devant les juges du siége principal de ladite société ; —Que les défendeurs n'ont fait contre ce principe de droit aucune réserve, et que, par conséquent, ils ont tacitement reconnu, ainsi que tous les actionnaires, la juridiction du tribunal de Paris. » — Appel. — Arrêt. LA COUR; Adoptant les motifs des premiers juges; - Confirme. Du 2 juill. 1828.-C. de Paris.-M. de Haussy, pr.

(2) (Intérêt de la loi. Aff. Serrane.) LA COUR;

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Vu l'art. 3,

§ 1, du traité conclu le 18 juill. 1828, entre la France et la Suisse, lequel est ainsi conçu : « Dans les affaires litigieuses, personnelles ou de commerce, qui ne pourront se terminer à l'amiable ou sans la voie des tribunaux, le demandeur sera obligé de poursuivre son action devant les Attendu que, malgré des dispositions juges naturels du défendeur ; »> aussi formelles, le tribunal de commerce de Montpellier a rendu, le 4 janv. 1831, un jugement par défaut contre le sieur David Grandjean, ca baretier, demeurant aux Verrières suisses, canton de Neufchâtel, au profit du sieur Louis Serrane, marchand de vins, demeurant à Montpellier; Attendu que ce jugement a été rendu en dernier ressort, puisque la somme réclamée par ledit sieur Serrane ne se porte qu'à 141 fr.; - Attendu,

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en outre, que ce jugement a été notifié au nom dudit sieur Serrane, le 22 mars 1831, au parquet du procureur du roi du tribunal de première instance de Montpellier, qui l'a transmis le même jour au ministre des relations extérieures; ....Casse dans l'intérêt de la loi. Du 12 nov. 1832.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Vergès, rap. (3) Espèce :-(Maupas C. hérit. Sieveking.)-Maupas, porteur d'un billet de banque de 60,000 marcs signé Sieveking, poursuit les héritiers du prétendu signataire, négociant de Hambourg, devant le questeur de cette ville. Le billet est argué de faux. Durand, mandataire de Maupas, s'engage formellement à se désister de l'action, et à remettre ce

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étranger, à raison d'obligations contractées à l'étranger, ne peut | Zachariæ, t. 1, p. 58; Carré et Chauveau, Lois de la procéd., être recevable, lorsqu'il a succombé devant les tribunaux étran- art. 171, note 1. - Cette solution est motivée sur ce que le congers, à porter la même demande devant les tribunaux français; trat judiciaire, formé devant un tribunal étranger, n'a, pas plus on dirait en vain que c'est conférer l'autorité de la chose jugée en que la chose qui y est jugée, un caractère légal et définitif en France à des jugements étrangers; qu'il en est surtout ainsi à France; que le droit accordé par l'art. 14 est inhérent à la qual'égard d'une femme française qui, pour saisir la juridiction lité de Français, inaliénable, à l'abri de toute fin de non-recevoir, étrangère, s'est fait autoriser par les tribunaux français, et qui a comme constitutif d'un privilége qui repose principalement sur porté son action en pays étranger, lorsqu'il était à sa connais- un motif de droit public. Et il a été jugé : 1° que l'exception de sance que le défendeur possédait des immeubles en France (Req., litispendance ne pouvant s'appliquer à des causes pendantes de24 fév. 1846, aff. Bonneau, D. P. 46. 1. 153) ; — 3o Enfin que vant des tribunaux de différents royaumes, il en résulte qu'un le Français qui a assigné un étranger pour obligations contrac- étranger, d'abord actionné dans son pays et ensuite en France, tées en pays étranger, et par exemple pour délivrance de legs, n'est pas recevable à demander pour litispendance le renvoi de la devant un tribunal étranger où la succession s'est ouverte, peut cause devant les juges de son pays (Trèves, 18 mars 1807 (2); être réputé avoir renoncé à la faculté que lui accordait l'art. 14 Req., 7 sept. 1808, aff. Ingelhein, V. no 268; Montpellier, 12 de se pourvoir devant les tribunaux français; et que par suite juill. 1826, aff. Travy, V. no 541); - 2° Que le Français qui a ces derniers peuvent se déclarer incompétents pour connaître du saisi les tribunaux étrangers de la connaissance d'un litige et suivi litige (Rej., 14 fév. 1837) (1). son adversaire dans tous les degrés de la juridiction étrangère, conserve néanmoins le droit de soumettre en France la même demande à l'appréciation des tribunaux français (Paris, 22 juin 1843, aff. prince de Capoue, D. P. 45. 1. 77).

285. Si la reioncration est expresse, il n'y a pas de difficulté; le Français qui l'aura faite ne pourra pas revenir sur sa déterminalton, à moins qu'elle ne lui ait été surprise. Mais en ce qui concerne la renonciation tacite, il y a controverse sur le petat de savoir de quels faits elle peut s'induire.-Suivant M. Fœlix, no 139 et 143, elle résulte notamment d'une action formée par le Français contre un étranger devant un tribunal étranger, et de l'élection de domicile qu'il aurait faite dans un lieu étranger dans une convention conclue avec un étranger.-Mais la renonciation ne résulterait-elle pas de ce que le Français aurait cité son débiteur devant un tribunal étranger? - Plusieurs auteurs ont enseigné que la circonstance que le Français aurait déjà saisi la Juridiction étrangère ne pouvait pas par elle-même enlever à ce Français le bénéfice de l'art. 14 c. civ., si, d'ailleurs, il n'avait point renoncé à la compétence des tribunaux français. Telle est l'opinion de MM. Guichard, no 246; Bioche, Dict. de proc., n° 22; billet à M. de Bourrienne, ministre plénipotentiaire de France, si le faux est déclaré par experts. 12 sept. 1805, des experts reconnaissent le faux. - L'action est abandonnée. Mais, plus tard, Durand et Maupas forment opposition en France sur divers débiteurs des héritiers Sieveking. 5 fév. 1809, jugement qui en ordonne la mainlevée. Appel. Arrêt.

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LA COUR; Vu le procès-verbal fait à Hambourg le 12 sept. 1805, duquel il résulte que Maupas, représenté par son fondé de pouvoir, d'après la vérification sur sa propre demande, s'est formellement désisté de sa prétention, même a consenti l'annulation du billet, ainsi que sa remise entre les mains du ministre de France à Hambourg, qui pourrait en faire tel usage qu'il jugerait à propos, renonçant ledit Maupas à pouvoir jamais s'en ressaisir sous aucun prétexte; Attendu qu'après un tel jugement prononcé par Maupas contre lui-même, et exécuté à l'instant, il ne peut lui être permis de renouveler son action; Confirme, etc. Du 14 juill. 1809.-C. de Paris.-Aud. sol.

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(1) Espèce (Veuve Cabanon C. Hermet.) Timmermann, négociant espagnol, décède à Londres, où il avait une maison de commerce. Par son testament, reçu par des notaires, à Paris, il avait institué les sieurs Hermet, ses neveux, ses légataires universels: l'un habitait Londres et l'autre Paris. Dans le même testament, il avait fait un legs de 50,000 fr. à la dame Ruberta Timmermann, sa sœur, veuve d'un nommé Gabanon, Français, décédé à Cadix, où elle-même continuait de résider. - Celle-ci a formé une première demande en délivrance de legs devant les tribunaux d'Angleterre, lieu de l'ouverture de la succession; mais, éffrayée de la lenteur des formes de la justice anglaise, elle intente une seconde action devant le tribunal de la Seine, se fondant sur sa qualité de Française et sur l'art. 14 c. civ. - On lui objecte : 1o que son mari avait perdu sa qualité de Français par le seul fait de son mariage avec une femme espagnole, suivi d'un établissement dans ce pays; 2° l'art. 59 c. pr., qui attribue aux tribunaux du lieu de l'ouverture de la succession toutes les demandes y relatives, jusqu'au partage inclusivement; 3° la litispendance qui résulte de sa première demande portée devant les tribunaux d'Angleterre.

Jugement du tribunal de la Seine qui rejette cette exception d'incompétence. Appel.

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286. Comme conséquence de ce système, il a été décidé : 1° qu'en principe général, et à moins de stipulations diplomatiques contraires, l'étranger traduit par un Français devant un tribunal français ne peut exciper de'ce qu'une instance semblable est liée devant les juges de son propre pays, ni demander, par suite, son renvoi à ces derniers juges pour cause de litispendance: l'art. 171 c. pr. ne s'applique qu'à des instances engagées devant des tribunaux français (Rej., 16 fév. 1842, aff. Bouffier, V. Succession); — 2o Que le Français peut poursuivre devant les tribunaux français un étranger non résidant en France, même après avoir saisi de son action les tribunaux de cet étranger, tant qu'il n'a pas été pris devant le juge étranger des conclusions contradictoires sur le fond du procès; qu'ainsi, l'étranger peut

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soit devant ceux d'Espagne ou d'Angleterre, où la succession dont s'agit s'est ouverte, a elle-même saisi les tribunaux anglais où les parties se trouvent en instance. »>-- Pourvoi. - Arrêt (ap. délib. en ch. du cons.). LA COUR; - Attendu que l'art. 14 c. civ., en autorisant le Français à actionner, en France, un étranger pour raison des obligations contractées par celui-ci en pays étranger, a établi, en faveur du Français, une faculté à laquelle il peut renoncer, d'après les principes du droit comAttendu que, dans ses qualités, l'arrêt constate, en fait, que la demanderesse, lorsqu'elle a intenté son action, en France, contre les défendeurs, avait déjà actionné ces derniers devant un tribunal anglais, en délivrance de son legs, et qu'une instance à ce sujet était encore pendante devant ce tribunal étranger; -Qu'en tirant de ce fait la conséquence que la demanderesse avait renoncé au bénéfice de l'art. 14, la cour royale, en se déclarant, par suite, incompétente pour statuer sur l'action portée devant elle, n'a violé ni cet art. 14 c. civ. ni l'art. 171 c. pr. civ., et n'a commis aucun excès de pouvoir; - Rejette.

Du 14 fév. 1837.-C. C., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Piet, rap.-Tarbé, av. gén., c. conf.-Beguin et Scribe, av.

(2) (Reynach.) - La cour; Considérant que, d'après le droit public reçu en France, et consacré par plusieurs arrêts de la cour de cassation, les jugements rendus en pays étrangers entre un Français et un étranger ne peuvent être exécutés ni avoir un effet en France contre un Français; que celui-ci est autorisé à débattre de nouveau ses droits devant les juges naturels ; - Que, si la chose jugée en pays étranger n'est pas un obstacle pour saisir de nouveau le juge français de la même cause, la simple litispendance doit d'autant moins l'être que le débiteur avait promis hypothèque sur ses biens, et qu'un jugement étranger ne peut pas conférer cette hypothèque au créancier sur les biens du débiteur situés en France, puisque, d'après l'art. 2123 c. civ., « l'hypothèque ne peut résulter des jugements rendus en pays étrangers qu'autant qu'ils ont été déclarés exécutoires par un tribunal français, sans préjudice des dispositions contraires qui peuvent être dans les lois politiques ou dans les traités, et qu'il n'apparaissait pas d'un pareil traité entre le gouvernement français et le souverain du comte de.....;- Que l'art. 14 c. civ. a introdait une exception formelle en faveur des Français à la règle reçue par le droit romain actor sequitur forum rei, et qu'il est du devoir de leurs juges de les en faire jouir; Enfin, que les nouveaux citoyens français doivent participer aux mêmes avantages que les anciens, et que déterminer la compétence des tribunaux d'après le code civil dans les actions introduites sous son empire, quoique dérivant d'une obligation antérieure, n'est pas lui donner un effet rétroactif, la simple juridiction et la forme de procéder n'aitérant pas les effets du contrat; - Met l'appellation au néant.

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Du 18 mars (et non du 15 ou 18 mai) 1807.-C. de Trèves.

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