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mière instance, à l'effet de faire ordonner la saisie de tous les biens, meubles et immeubles, qu'ils possèdent, ainsi que de ceux qui pourraient leur advenir. Le jugement qui interviendra leur ordonnera pareillement de comparaître, dans le mois, devant le procureur général de la cour d'appel (art 10). Les commissaires près les tribunaux de première instance doivent transmettre de suite au procureur général près la cour d'appel de leur ressort les noms, qualités et demeures de ceux qui, domiciliés dans leur arrondissement, ne se sont pas présentés pour requérir acte de leur présence; ils doivent y joindre copie du jugement qui aura ordonné le séquestre, avec les procès-verbaux qui en constateront l'apposition (art. 11). — Le mois expiré sans que l'individu se soit présenté devant le procureur général, celui-ci requerra acte de la plainte qu'il devra rendre contre ceux qui seront dénoncés comme n'ayant pas obéi à l'art. 6 du décret et au jugement rendu en exécution de l'art. 10. Il requerra qu'il soit informé contre eux, comme prévenus du crime d'avoir porté les armes contre la France (art. 12). — La cour donne acte de sa plainte au procureur général, et commet un de ses membres pour procéder à l'audition des témoins et à l'instruction entière du procès (art. 13). Le juge d'instruction doit réunir toutes les pièces qui pourront servir à conviction, telles que lettres, contrôles des régiments, états militaires des puissances ennemies et autres de cette nature qui lui seraient remises. Il entend en déposition les déserteurs étrangers, les soldats français et tous autres qui pourraient lui être indiqués par le procureur général ou qu'il croirait devoir entendre d'office (art. 14). — Quand l'instruction est complète, elle est communiquée au procureur général, qui dresse, s'il y a lieu, l'acte d'accusation: dans le cas où il serait déclaré qu'il y a lieu à accusation, la cour d'appel doit décerner une ordonnance de prise de corps contre l'accusé (art.15). - L'acte d'accusation et l'ordonnance de prise de corps sont notifiés à l'accusé, à son dernier domicile connu; il en est fait annonce au Moniteur et dans les journaux de l'arrondissement et du département (art. 16). — Si l'accusé ne se présente pas dans les dix jours de la notification mentionnée en l'article précédent, le président de la cour rend une ordonnance portant que, si, dans un nouveau délai de dix jours, l'accusé ne se constitue pas, il est déclaré rebelle, et qu'il sera procédé contre lui par contumace (art. 17). Cette ordonnance doit être publiée dans les formes prescrites; et, après l'expiration du nouveau délai de dix jours, il est procédé au jugement de la contumace, le tout conformément aux dispositions des lois sur l'instruction criminelle (art. 18).— Il a été jugé que le ministre de la guerre, chef et commandant général des troupes, a, comme les commandants particuliers des troupes en campagne, le droit de traduire devant la juridiction militaire les transfuges pris les armes à la main (Crim. rej., 28 mai 1824, aff. Vernet, V. Organis. milit.).

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585. La peine prononcée contre l'ex-Français qui n'est pas rentré dans le délai prescrit et qui est convaincu d'avoir été au service militaire de l'étranger au moment où les hostilités ont commencé est la peine de mort (même décret, art. 19 et 26 combinés avec l'art. 3, sect. 1oo, 2o part., c. pén., des 25 sept.-6 oct. 1791, et avec l'art. 27 du décret du 26 août 1811).- Nous avons vu plus haut que l'on s'est souvent appuyé sur l'excessive sévérité des décrets de 1809 et de 1811, pour prétendre qu'ils étaient abrogés; mais nous avons établi qu'il n'en était pas ainsi, et que leurs seules dispositions abrogées étaient celles qui sont incompatibles avec des dispositions législatives postérieures. Le deuxième alinéa de l'art. 26 du décret du 6 avril 1809 prononçait la peine de la confiscation contre les mêmes Français pour le cas où la guerre n'aurait pas éclaté entre la France et la puissance chez laquelle ils avaient pris du service militaire. L'art. 19 et le premier paragraphe de l'art. 26 ajoutaient la même pénalité à la condamnation à mort. Mais comme depuis la charte de 1814 la confiscation est abolie, cette peine ne reçoit plus d'application, et les biens du condamué passent à ses héritiers. - Si la guerre n'a pas éclaté entre la France et la puissance où ils servent, la seconde disposition de l'art. 26 prononce la peine de la mort civile. Nous avons vu également aux no 522 et suiv., que, malgré l'excessive sévérité de cette peine, elle devra être appliquée par suite de la non-abrogation du décret de 1809. M. Legat (p. 67) est aussi du même avis. C'est dans notre chapitre

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de la mort civile que nous ferons connaître les effets qui y sont attachés. Du reste, on ne distingue pas si le Français pris les armes à la main était ou n'était pas militaire (Crim. rej., 28 mai 1824, aff. Vernet, V. Organ. milit.).

586. Quelle est la juridiction compétente pour prononcer la peine de la mort civile dans le cas prévu par les art. 24, 26, 28 et 29 du décret de 1809? - Il n'est pas douteux que la juridiction criminelle peut seule prononcer, puisqu'il s'agit de condamner à une peine, et que les tribunaux civils ne peuvent que, dans des cas fort rares et particulièrement spécifiés, infliger des peines aux individus. Telle est aussi l'opinion de M. Coin-Delisle, sur l'art. 21 c. civ., nos 7 et 8.- Sont-ce les tribunaux criminels ordinaires ou les conseils de guerre qui, dans ce cas, sout compétents? V. Organ. milit.

587. Le même auteur fait très-bien remarquer aussi (noo 9, 10 et 11) que toute peine ne pouvant produire ses effets que du jour où elle est prononcée, il en résulte que les droits acquis ou conférés antérieurement par les Français qui n'ont pas obéi à l'ordre de rappel l'ont été valablement. En conséquence, le testament d'un Français qui aurait encouru la mort civile dans l'un des cas ci-dessus, mais qui serait mort naturellement avant qu'elle fût prononcée, devrait être exécuté même sur les biens de France. - Si, au contraire, le condamné a survécu à sa condamnation devenue définitive, il est, aux termes de l'art. 25 c. civ., réputé mort sans testament, et ses biens passent à ses héritiers naturels. V. infrà notre chapitre de la mort civile.

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588. Aux termes de l'art. 1 d'une ordonnance du 16 déc. 1814, les militaires français de tous grades qui avaient pris du service militaire à l'étranger, sans autorisation spéciale du nouveau gouvernement étaient tenus de rentrer en France avant le 15 avril 1815, et de justifier de leur retour dans certaines formes prescrites par l'art. 2; faute de quoi ils perdaient leur qualité de Français, conformément au code civil, sans préjudice, néanmoins, des peines prononcées par le code pénal, s'ils portaient les armes contre la France. - Pour justifier de leur retour, ils devaient, d'après cet art. 2, se présenter devant les procureurs royaux de première instance du lieu de leur domicile, et y requérir acte de leur présence, lequel acte devait être transcrit au greffe. L'art. 1 d'une ordonnance du 20 déc. 1815 a renouvelé les dispositions de la précédente. L'art. 2 voulait que les militaires rentrés en France postérieurement au 15 avril 1815 pussent se pourvoir pour se faire relever de la déchéance par eux encourue, et, à cet effet, il leur était accordé un délai de deux mois, qui expirait le 1er mars 1816. - D'après l'art. 3, le ministre de la guerre pouvait proposer au roi de relever, par exception, de la déchéance encourue, et même d'admettre dans | l'armée, avec les grades dont ils étaient susceptibles, ceux de ces officiers qui se seraient rendus dignes de cette faveur par leur conduite et leurs services. Aux termes de l'art. 1 d'une ordonnance du 6 mars 1816, le délai ci-dessus a été prorogé jusqu'au 1er mars 1817.

589. Une ordonnance du 10 avril 1823 a rappelé les dispositions des décrets de 1809 et de 1811 contre les Français qui auraient pris du service militaire à l'étranger. Aux termes de l'art. 1, tout Français qui, ayant obtenu précédemment une autorisation spéciale pour entrer au service de sa majesté catholique, aurait été incorporé dans des corps militaires destinés à agir en Espagne, contre les troupes françaises ou leurs alliés, était rappelé et devait rentrer immédiatement sur le territoire français. L'art. 2 prescrivait le même devoir à ceux qui, sans autorisation, auraient pris du service dans les mêmes corps. — Les art. 3 et 4 rappelaient les dispositions pénales des décrets de 1809 et de 1811. - Cette ordonnance a reçu son application contre plusieurs Français qui avaient servi dans les armées espagnoles contre les troupes françaises, pendant la guerre de 1823. ART. 6. Séparation de territoire.

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590. De même que les habitants d'un pays réuni à la France, par la conquête ou par une cession diplomatique, deviennent Français en conservant leur domicile dans le pays cédé, de même, et par voie de conséquence, les habitants d'une portion quelconque du territoire français, alors qu'elle est passée sous la domination d'un souverain étranger, deviennent étrangers à la France et

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DROIT CIVIL.-TIT. 3, CHAP. 1, SECT. 2, ART. 6.

perdent nécessairement la qualité de Français en conservant leur
domicile dans la portion de territoire distraite du sol français.
Nos lois ne s'occupent pas, il est vrai, et ne pouvaient guère
s'occuper de ce mode de naturalisation à l'étranger; mais il est
consacré en principe par toutes les nations modernes et dans le
droit des gens, universellement adopté. Ajoutons, avec M. Gui-
chard, n° 316, qu'il résulte de la nature même des choses.·
V. n° 122.

591. Mais quels sont les cas dans lesquels la séparation d'une portion de territoire fait perdre la qualité de Français aux habitants du pays séparé?-M. Coin-Delisle, sur l'art. 8, no 9, distingue si la portion de territoire aujourd'hui séparée a été réunie précédemment à la France par la conquête, la restitution du pays à son ancien souverain efface la qualité de Français, et il cite, - Au contraire, si le en exemple, les individus originaires des pays qui ont été séparés de la France par le traité du 30 mai 1814. territoire distrait a été précédemment réuni à la France en vertu d'un traité, cet auteur estime que les habitants de ce pays conservent la qualité de Français, nonobstant la séparation. Il regarde comme rentrant dans cette hypothèse, les naturels des portions de territoire détachés de la France par le traité du 20 nov. 1815. Mais cette distinction est inadmissible, car, dans le droit des gens, la conquête consommée produit les mêmes résultats que la cession par voie diplomatique; et, en raison, elle doit produire des résultats même plus graves, car on comprend jusqu'à un certain point que l'incorporation d'un territoire à un autre soit le fruit de la victoire, tandis qu'il est difficile d'admettre qu'un gouvernement puisse faire abandon d'une partie du territoire qu'il régit, comme on le ferait d'une propriété privée. Elle est, du reste, implicitement repoussée par le législateur français, ainsi qu'il résulte de la loi des 14-17 oct. 1814 V. n° 104). En effet, aux termes de l'art. 1 de cette loi, les habitants des pays réunis (la loi ne distingue pas entre les pays réunis par les traités et ceux qui l'avaient été par la conquête) qui, depuis la réunion, avaient fixé leur domicile en France, et qui y avaient déjà résidé sans interruption depuis dix années et depuis l'âge de vingt et un ans, ont été dispensés de l'obligation généralement imposée aux étrangers par la constitution du 22 frim. an 8, de faire dix ans d'avance, leur déclaration de se fixer en France; pour qu'ils pussent continuer à jouir des droits civils et politiques, il suffisait qu'ils déclarassent, dans les trois mois à partir de la publication de la présente loi, qu'ils persistaient dans la volonté de se fixer en France, et obtinssent des lettres de naturalité. L'art. 2 de la même loi disposait que ceux qui n'avaient pas encore les dix années de résidence réelle dans l'intérieur de la France, au moment de sa publication pourraient acquérir les mêmes droits de citoyens français, le jour où les dix ans de résidence seraient révolus, à charge par eux de faire, dans le même délai, la déciaration susdite.-V. nos 114, 122 et suiv.

592. Quel est, par rapport aux enfants de l'habitant d'une portion de territoire séparée de la France, l'effet de la séparation?

Le territoire séparé devient étranger, et avec lui, tous les
habitants qui ne profitent pas du bénéfice ouvert par la loi du
Considérant que Jean-
- LA COUR;
Considérant
(1) (Lavigne C. min. pub.)
Charles Lavigne, appelé à faire partie du jury, est né d'un père Belge en
1790, et alors que la Belgique était réunie à la France;
que, par l'effet de la séparation des territoire en 1814, Lavigne père est
redevenu étranger, sauf la faculté qui lui était réservée par la loi du
pas immédiatement
14 oct. 1814, de rester Français, en se conformant aux formalités qu'elle
a prescrites; Considérant que Lavigne père ne s'est
conformé aux dispositions de cette loi; Qu'en cet état, Jean-Charles
Lavigne fils, qui, pendant sa minorité, avait suivi la condition de son
père, a atteint sa majorité; qu'il n'a point obtenu ni même demandé, soit
des lettres de déclaration de naturalité, soit des lettres de naturalisation;
que si, postérieurement et en 1820, Lavigne père a obtenu des lettres de
naturalisation, elles n'ont pu avoir pour effet de changer l'état de Lavigne
fiis, qui, antérieurement, était parvenu à sa majorité; que, dans cette po-
sition, Jean-Charles Lavigne fils ne peut être considéré comme citoyen
français; Ordonne que son nom sera rayé de la liste du jury de la pré-
sente session, et qu'extrait du présent, en ce qui le concerne, sera trans-
mis M. le préfet de la Seine.

Attendu que,
Du 2 fév. 1835.-C. d'assises de la Seine.-M. Moreau, pr.
LA COUR;
(2) (Savoie C. le préfet de l'Isère.)
d'après les dispositions de la loi du 14 oct. 1814, les étrangers dont le

14 oct. 1814.- La question ne peut souffrir de difficulté à l'égard des enfants majeurs au moment où leur père a satisfait à cette loi, car ils ne peuvent imputer qu'à eux-mêmes de n'avoir pas repris la qualité de Français, puisqu'ils avaient la capacité d'agir et de remplir eux-mêmes les formalités imposées par la loi précitée. Jugé ainsi, qu'il suffit qu'un enfanɩ né d'un père devenu Français par suite de la réunion de son pays à la France ait acquis sa majorité depuis la séparation ultérieure des deux pays, et avant que son père ait obtenu des lettres de naturalisation, pour qu'il ne puisse être considéré comme Français, alors qu'il n'a pas obtenu lui-même des lettres de naturalisation (C. d'ass. de la Seine, 2 fév. 1835) (1).

593. Mais que décider en ce qui concerne les enfants mineurs? M. Coin-Delisle, art. 9 et 10, no 17, n'hésite pas à reconnaître que si le père a satisfait à la loi de 1814, il a conservé ou plutôt repris la qualité de Français, pour ses enfants comme pour lui-même. Il ne voit même là aucune difficulté; la qualité de l'enfant dérivant, dit-il, de celle du père, la qualité de celui-ci changeant, celle du fils doit subir le même changeCette théorie ne nous paraît pas admissible: elle conment. sidère comme étant à la disposition d'un tiers, d'un particulier, un droit qui est tout entier dans le domaine de la loi; nous la repoussons surtout, parce qu'elle atteindrait souvent un but contraire à celui qu'elle se propose, et qui est de favoriser les enfants. Quand la nationalité est une fois acquise par la naissance, la loi prend soin de spécifier les modes d'après lesquels elle subit une mutation, elle trace des règles pour acquérir la qualité de Français, ou pour la perdre. Or, parmi ces règles, nous ne voyons figurer nulle part la volonté du chef de famille; c'est toujours la volonté de celui dont la nationalité est en question qui est prise en considération.— Ainsi l'art. 9 a soin de nous dire que l'individu né en France d'un étranger peut réclamer la qualité de Français; l'art. 17 prévoit plusieurs cas où, par son fait, un Français perd sa nationalité; il en est de même Mais dans aucune de ces dispositions, nous des art. 19 et 21. ne voyons que l'acquisition ou la perte de la qualité de Français puisse être le fait d'un autre que de celui qui devient Français ou Toutes exigent, au contraire, un fait émané qui perd ce titre. de cet individu. C'est donc ajouter à la loi, c'est en méconnaître l'esprit que de laisser à la volonté d'un tiers la nationalité d'une Que si le père n'a pas satisfait aux conditions impersonne. posées par la loi de 1814, ses enfants mineurs perdent à plus forte raison la qualité de Français.

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594. Conformément à cette doctrine il a été décidé que le fils d'un étranger devenu Français par la réunion de sa province à la France, a perdu, comme son père, la qualité de Français par la séparation ultérieure des deux pays, si le père, ni luimême, n'ont pas usé du bénéfice de la loi du 14 oct. 1814, e cela, bien que ce fils mineur soit né en France (Grenoble, 18 fév. 1831 (2); Douai, 16 nov. 1829, aff. Marlier C. préfet du Contrà, Douai, 28 mars 1831) (3), encore bien qu'il n'ait pa Nord; Douai, 17 janv. 1848, aff. Vanderest, D. P. 48. 2. 164.cessé de résider en France avec son père (Req., 16 juill. 1854

pays a été momentanément réuni à la France et qui y ont fixé leur rési
dence, ne pouvaient avoir et obtenir la qualité de Français qu'en accom
plissant certaines conditions indépendantes de la réunion à la France o
Attendu que le père de Joseph Savoie n'
de la résidence en France;
accompli aucune de ces conditions; que, par suite, il est resté étranger
la France, et que son fils mineur suit la condition de son père, et n
pourrait devenir Français qu'en faisant, après sa majorité, la déclaratio
- Par ces motifs, déclare que Joseph Savo
exigée par l'art. 9 c. civ.;
est étranger; qu'il ne peut concourir au recrutement de l'armée français
et qu'il sera rayé des listes faites pour la levée de 1831, néanmoins san
dépens.

Du 18 fév. 1831.-C. de Grenoble, ch. réun.-M. Fournier, pr. (3) (Le préfet du Nord C. Delecourt.) LA COUR; Attendu que procès n'a d'autre objet que de constater l'état de Pierre-Joseph Delccou pour savoir s'il doit ou non satisfaire à la loi de recrutement; - Attend qualité de Français avant la réunion de son pays à la France, et s'il qu'il est inutile de rechercher si Gervais Delecourt avait ou non acquis perdue depuis que cette réunion a cessé, en n'accomplissant point les co ditions qui lui étaient imposées; - Qu'en effet il suffit qu'il ait été Fra çais, comme dans le fait il l'était à l'époque de la naissance dudit Pierr Joseph Delecourt, pour que cette circonstance ait imprimé à ce dernier

Cass., 1er août 1836) (1).- Et peu importe qu'après le décès du père, cet enfant, encore mineur, soit tombé sous la puissance de

qualité de Français; - Attendu que ledit Delecourt fils, né sur le territoire actuel de la France, et n'ayant jamais cessé de l'habiter, n'a dû remplir aucune formalité pour conserver sa qualité de Français; Qu'il n'a fait aucun des actes qui, aux termes des lois, auraient pu l'en priver, et qu'il n'a pu la perdre par le fait ou par la faute de son père; - D'où il suit qu'il serait évidemment en droit de réclamer les avantages que confère cette qualité, de même qu'il doit supporter les charges qui en dérivent. Emendant, déclare Delecourt Français, met Delecourt père hors de

cause, etc.

Du 28 mars 1831.-C. de Douai.-M. Forest, pr.

(1) 1 Espèce: (Préfet de Seine-et-Marne C. Pirard.) - Cette solution a été rendue sur le pourvoi formé par le préfet de Seine-et-Marne, contre un arrêt de la cour de Paris, qui déclarait le sieur Pirard fils étranger, et que nous avons déjà rapporté. Rec. pér. 1834. 2. 157. Le pourvoi était fondé sur la violation des art. 9, 10 et 11 c. civ., et la fausse application de la loi du 14 oct. 1814.

M. le conseiller Lasagni, rapporteur, a d'abord analysé et ensuite examiné les moyens du demandeur dans les termes suivants : « C'est le principe même de l'arrêt qu'on attaque Est-il vrai que le fils suit la condition du père dans sa nationalité, tellement que la nationalité de ce dernier changeant par l'effet même de sa volonté, depuis la naissance du fils, la nationalité de celui-ci subisse le même changement? D'abord, les conséquences étranges de l'affirmative adoptée par l'arrêt sautent aux yeux : on crée au milieu de la nation française une nationalité mixte, flottante, arbitraire. S'agit-il de compétence, de mariage, de minorité, de puissance conjugale ou paternelle, de succession, d'éligibilité; bref, de toute protection à tirer de la législation civile et politique française? on ne manquera pas de se qualifier Français; viennent les charges, le recrutement, la garde nationale, etc., on invoquera l'extranéité. Cette mobilité se perpétuera d'âge en âge, de génération en génération, à partir de la loi du 14 oct. 1814.

>> Peut-il y avoir des lois, peut-il y avoir une jurisprudence, qui autorise un pareil état de choses? L'ancienne jurisprudence française aurait nécessairement déclaré le sieur Pirard Français, c'est ce qui est attesté et jugé par un arrêt de la cour du 8 therm. an 11 (V. no 383), et, sous le droit nouveau, bien plus libéral que l'ancien envers l'étranger; puisqu'il abolit même le droit d'aubaine, on ne réputera par Français celui qui est né en France, et d'un père Français àl'époque de sa naissance! C'est assurément l'art. 9 c. civ. que l'arrêt a appliqué à la cause; mais il a fait une application très-fausse de cet article, et a manifestement violé l'art. 10. Si tout enfant né d'un Français en pays étranger est Français, à fortiori est Français l'enfant né d'un Français en France: et cette même circonstance d'être né d'un père Français rend tout à fait inapplicable à Pirard fils, la disposition de l'art. 9. La loi rétroagirait odieusement, si Pirard fils étant devenu Français dès l'époque de sa naissance, demeurait dépouillé de cette qualité par une circonstance postérieure quelconque.

» Si Pirard père était mort avant la loi de 1814, ou s'il lui avait plu d'abdiquer la qualité de Français avant cette époque, aurait-on osé dire que son fils avait perdu cette qualité avec lui? La volonté, le fait personnel au père, changerait-il l'état social du fils? Une question pareille, quoique dans des faits inverses, a été jugée par arrêt de la cour royale de Grenoble (V. Rec. pér., 1829. 2. 73). La femme seule est forcée de suivre la condition du mari (art. 19 c. civ.), et inclusio unius est exclusio alterius. De plus, Pirard fils est aussi dans les termes de l'art. 2 de la constitution de l'an 8, qui admet aux titres et aux droits de citoyen, tout homme né et résidant en France, qui, âgé de vingt et un ans, s'est fait inscrire, etc. Nous finirons par remarquer que 1o par cala même que l'on ne peut rien changer à l'état de l'enfant après sa naissance, les auteurs ne sont pas d'accord sur la question de savoir si un enfant naturel né en France d'une mère étrangère, devient étranger par la reconnaissance pos térieurement faite par un étranger; mais tous s'attachent, quoiqu'en venant à des conclusions opposées au droit de l'enfant au moment de sa naissance; 2° la Belgique, après sa séparation d'avec la France, n'a pas changé de législation; par conséquent Pirard père, d'après l'art. 17 c. civ., ayant toujours demeuré en France sans esprit de retour, a perdu la qualité de Belge, et l'arrêt a violé cet article, comme loi de la Belgique, en décidant qu'il est redevenu Belge. Quant à la prétendue violation de l'art. 17 c. civ., regardé comme loi belge, lors même qu'elle existerait, serait-il du devoir, de l'institution de la cour de cassation de France de la vérifier? Deviendrait-on Français parce que l'on n'est pas Belge? Quant aux lois françaises : « Nul, porte l'art. 2 de la loi du 21 mars 1832, ne sera admis à servir dans les troupes françaises, s'il n'est Français: tout individu né en France de parents étrangers, sera soumis aux obligations imposées par la présente loi, et immédiatement après qu'il aura été admis à jouir du bénéfice de l'art. 9 c. civ. » En fait : Pirard est né en 1812 dans un ancien département de France, de parents alors Français. Conclura-t-on donc en droit, qu'il est Français, et qu'il n'est aucunement passible de la disposition de l'art. 9 c. civ. applicable TOME XVIII.

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sa mère, Française de naissance et redevenue Française en vertu de l'art. 19 c. civ., l'enfant suivant la condition de son

même après la loi du 21 mars 1832, aux seuls individus nés en France, de parents étrangers? Non..., répond l'arrêt attaqué, attendu que Pirard fils, quoique né en France, a suivi la condition de son père, lequel, né en Belgique en 1776 et redevenu belge en 1814, faute d'avoir rempli les conditions de la loi du 14 oct. 1814, est étranger.

>> Vous pressentez certainement déjà, messieurs, que dans cette question délicate, l'on peut dire contre le système de l'arrêt, que, s'il est vrai que le fils légitime suit la condition de son père cum legitimo nuptiæ facta sint patrem liberi sequuntur (L. 9, ff. De stat hom); s'il est vrai qu'ils ne peuvent revendiquer une nationalité différente, que lorsque leur père lé➡ gitime ne peut leur en donner aucune (L. 22 cod. De decur et filiis cor; L. 196, ff.; L. 6, § 1, ff., ad municip.), il est vrai aussi qu'à côté de ces principes incontestables, il en est un également certain, savoir que si le fils, par un titre à lui spécial et personnel, a complétement et définitivement acquis une nationalité, un état de cité, cette nationalité, cet état de cité, comme un autre rang, une autre dignité, une autre qualité personnelle quelconque, devient sa propriété, dont il ne peut plus être dépouillé sans sa volonté par un fait ou par un non-fait quelconque postérieur de son père (L. 9, fl., De his qui sui vel alieni jur. sunt), l'on peut dire que la naissance hors celle purement accidentelle et de transit (art. 10 c. civ.), est le titre spécial et personnel par excellence, qui acquiert complétement et définitivement à l'enfant, la nationalité dans le lieu où elle arrive, lors même que son père y serait étranger; les lois romaines proclamèrent que la nationalité de la naissance était la nationalité de la nature; qu'elle était ineffaçable neque recusando quis patriam ex quâ oriundus est, neque mentiendo de eâ quam non habet, veritatem mutare potest (L. 6, ff., ad mari). L'arrêt du 8 therm. an 11 rend hommage aux mêmes principes. Les lois françaises qui ont suivi la révolution ont été presque aussi libérales (V. la loi du 30 avril-2 mai 1790; les art, 1 et 2, tit. 2, de la constitution du 3 sept. 1791; l'art. 4 de la constitution du 24 juin 1793; les art. 8, 9 et 10, tit. 2, de la constitution républicaine du 5 fruct. an 3). — Arrivons enfin au code civil.

Dans la discussion de l'art. 9, le premier consul dit : Que si les individus nés en France d'un père étranger, n'étaient pas considérés de plein droit comme Français, alors on ne pourrait soumettre à la conscription et aux autres charges publiques les fils de ces étrangers, qui se sont établis en grand nombre en France où ils sont venus comme prisonniers, ou par suite des événements de la guerre : Le premier consul pensa qu'on ne devait envisager la question que sous le rapport de l'intérêt de la France : suivant lui, si les individus nés en France, d'un père étranger, n'ont pas de biens, ils ont du moins l'esprit français, les habitudes françaises, ils ont l'attachement que chacun a naturellement pour le pays qui l'a vu naitre; enfin ils portent les charges publiques. Son avis prévalut.-L'article portait: Tout individu né en France est Français; et si, d'après les observations du tribunat qui tendaient à la suppression de l'article, on arrangea l'art. 9 tel qu'il est, cet article parlant taxativement de l'individu né en France d'un étranger, ne peut être appliqué au sieur Pirard fils, né en France de parents français au moment de sa naissance. L'on peut dire que la séparation de 1814 n'a pu, pas plus que le fait ou le non-fait postérieur du père, nuire au droit de nationalité complétement et définitivement acquis à l'enfant, d'abord, parce que si les événements postérieurs renversent les affaires et les droits encore pendants, ces événements, quoique généraux, politiques, militaires, ne peuvent rien sur ce qui est déjà complétement et parfaitement consommé; quæ semel utiliter constituta sunt, durant; etiamsi in eum casum inciderint à quo incipere non poterant. -Ensuite, parce que le père du défendeur, s'étant fixe sur le territoire français ancien, dans le département de Seine-et-Marne, c'est à tort qu'on prétend qu'il y a eu séparation d'avec la France. L'on peut dire que ce que n'a pu faire ni le fait ou non-fait postérieur du père, ni l'événement postérieur, général, politique, militaire, n'aurait pu non plus se faire par la loi, sans une odieuse rétroactivité; mais que loin de là, si, d'après l'art. 3 de la loi du 14 oct. 1814, ce sont seulement les individus nés et encore domiciliés dans les départements qui, après avoir fait partie de la France en ont été séparés par les derniers traités, qui doivent faire la déclaration et remplir les conditions prescrites par la loi, l'on doit conclure que cette charge n'est pas imposée aux individus nés et domiciliés dans des départements qui ont été et qui sont, comme dans l'espèce, toujours français, d'après le principe unius inclusio est alterius exclusio. - L'on peut dire enfin que, sur celle difficile et importante question, la cour regulatrice ne s'est pas encore prononcée, et qu'elle n'est pas même fixée par les cours royales; car la cour de Douai, par son arrêt du 16 nov. 1829, après avoir jugé, dans le sens de l'arrêt attaqué, a ensuite, en jugeant le contraire, consacré le système du demandeur, par arrêt du 28 mars 1831.

-

Mais on peut certainement aussi dire en faveur de l'arrêt attaqué que rien n'est plus naturel qu'un lien quelconque se dissolve de la même manière qu'il a été formé, nihil tam naturale est, quam eo genere quidquid dissolvere, quo colligatum est (L. 53, fl., De reg. jur.) — Un événement général, politique, la force des armes, en réunissant plusieurs royaumes

24

186

père et non pas celle de sa mère (Douai, 17 janv. 1848, aff. Vanderest, D. P. 48. 2. 164).

DROIT CIVIL. TIT. 3, CHAP. 1, SECT. 2, ART. 6.
a été détaché de la France durant sa minorité, c'est-à-dire à une
époque où il suivait la condition de son père, et s'il n'a pas ac-
compli depuis sa majorité les formalités tracées par l'art. 9 c. civ.
(Req., 9 juill. 1844) (1). — On objectait, dans l'espèce, en fa-
veur de Pintéressé, que son père et lui étaient en possession

595. De même il a été décidé qu'un individu né en pays réuni à la France et durant cette réunion d'un père qui n'a pas acquis la qualité de Français, est étranger, si le pays où il est né

à la France, lui a réuni et les choses et les hommes; les familles ont suivi, ainsi que de droit, la condition de leurs chefs: un événement général, politique, la force des armes, en séparant ces mêmes royaumes d'avec la France, en a séparé les choses et les hommes; les familles ont suivi, ainsi que de droit, et comme dans la réunion, la condition de leurs chefs, sinon par droit de post limini qui n'a jamais lieu après que les dominations ont été légalement et définitivement fixées par des traités, du moins par la nature même des choses qui ont dû reprendre par la séparation d'avec la France, la même assiette qu'elles avaient avant la réunion; c'est aussi à assurer cette assiette que les traités politiques ont été dirigés. - L'on peut dire que cela a dû notamment avoir lieu à l'égard des rapports des familles et des enfants vis-à-vis de leurs pères; autrement on aurait pu, dans une seule famille, en former deux et même plusieurs, en ruinant par là, de fond en comble, cette association primitive de la nature, dont les vicissitudes sont communes entre tous les membres, et dépendent presque toujours de la condition du même chef. L'on peut dire que, d'après ce principe, tombe de lui-même le prétendu titre spécial et personnel de la nationalité du fils : ce n'est pas indépendamment de son père et par le seul fait de sa naissance, que l'enfant était devenu Français; c'est au contraire comme fils d'un citoyen de la Belgique réunie à la le France que cet enfant avait acquis la nationalité française; et c'est comme et nullement par fils d'un citoyen de la Belgique séparée d'avec la France qu'il perd cette Dationalité; et c'est aussi par cet événement général, prétendu fait ou non-fait de son père, que cet enfant est dépouillé de la L'on peut dire que, sous plusieurs rapports égalemême nationalité. ment puissants, toute idée d'effet rétroactif demeure écartée : 1° parce - que point d'effet rétroactif là où le droit n'est pas irrévocablement acquis, mais demeure toujours inhérent aux grands événements politiques qui, laissant pour ainsi dire leur sort définitif en suspens, donnent lieu à l'ap2° Parce que point d'effet rétroactif plication de principes contraires; - 3° Point d'effet rétroactif là où il là où il n'y a pas de préjudice, et dans l'espèce, c'est l'enfant lui-même qui repousse la nationalité française; s'agit d'état des personnes, de nationalité,que la loi politique fixe d'après des ils vues générales, comme dans les réunions des pays ou conquis ou perdus; 4° Parce que point d'effet retroactif là où l'option ayant été laissée, comme dans l'espèce, à ceux qui se trouvaient séparés de la France, pouvaient être ou ne pas être Français, selon qu'ils le croyaient utile ou L'on peut dire que, si la naissance a donné toujours et auprès de toutes les nations quelques droits pour acquérir la nationalité, elle n'a jamais été, et notamment en France, seule suffiQue toutes les lois, et antérieures et postérieures l'obtenir; sante pour Que l'art. 9 c. civ., si profondément à la révolution, le prouvent; Que l'art. 3 de la loi du 14 oct. 1814, loin discuté le prouve encore de dire le contraire, ne fait que subvenir aux individus qui auraient voulu devenir Français, quoique nés et domiciliés encore, non pas dans l'ancienne France, mais dans les départements qui n'avaient fait que temporairement partie de la France. L'on peut dire que la circonstance d'être né et de demeurer encore dans l'ancienne France, est tout à fait indifféune fois que ni le père ni l'enfant, et enfant marente dans la cause L'on peut dire enfin jeur, n'ont rempli les conditions exigées par la loi, pour que les individus étrangers à la France pussent devenir Français.. que la cour de Douai, par son dernier arrêt du 28 mars 1831, a rétracté le premier du 16 nov. 1829, et que l'arrêt attaqué de la cour de Paris a été précédé de deux autres arrêts conformes, l'un de la cour de Lyon du 2 août 1827, l'autre, du 18 fév. 1831, de la cour de Grenoble. Arrêt.

non utile à leurs intérêts.

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Attendu, en droit, qu'en général au civil, comme en
LA COUR;
politique : nihil tam naturale est, quam eo genere quidque dissolvere quo
colligatum est (L. 35, ff., De reg. jur.); qu'ainsi, comme par la rénnion
de la Belgique à la France, à la suite d'événements militaires, les Belges
sont devenus Français, de même par la séparation de la Belgique d'avec
la France, à la suite d'événements militaires contraires, les Belges, devenus
temporairement Français, sont redevenus Belges; ayant ainsi dù perdre, et
ayant ainsi effectivement perdu, la nationalité Française de la même ma-
nière qu'ils l'avaient acquise ;-Attendu que, comme lors de la réunion,
de même lors de la séparation, les enfants ont dû suivre, et ils ont effec-
Qu'il est in-
tivement suivi la condition de leurs pères : Cùm legitimæ nuptiæ facto
sint, patrem liberi sequuntur (L. 19, ff., De stat. hom.); ·
différent que la naissance de ces derniers ait eu lieu avant ou pendant la
réunion; qu'elle ait eu lieu dans un ancien ou dans un nouveau département
de France, puisque, si tout ce qui a été complétement et définitivement
consommé, pendant la réunion, ne peut plus être détruit d'après le prin-
cipe, quæ semel utiliter constituta sunt, durant; etiamsi in eum inciderint
à quo incipere non poterant (L. 85, fl, De reg. jur.); au contraire, tout
ce qui, comme l'état des personnes et la nationalité, a un trait successif,
́et continue à s'exercer dans le temps à venir, demeure toujours sous

·

soumis à la condition temporaire et résoluble de la cause qui l'a produit;
d'après le principe etiam ea quæ recte constiterunt, resolvi putant, cum in
l'empire des événements et des lois futures, et, est surtout entièrement
eum casum reciderunt à quo non potuissent consistere (L. 98, ff. De V. O.);
Attendu que c'est précisément pour tempérer la rigueur de ces prin-
cipes, et pour les subordonner équitablement au concours extraordinaire
des circonstances politiques, que la loi du 14 oct. 1814, par ses art. 1, 2
et 3, a accordé à tous ceux qui appartenaient aux départements réunis à la
France, et ensuite séparés d'elle, et à leurs enfants, la faculté d'obtenir
selon la différence de leur position respective, ou des lettres de déclara-
tion de naturalité, ou des lettres de naturalisation, et de conserver, ou
d'acquérir par là les droits de citoyen français; mais en faisant toujours
tions par elle, pour chaque cas, expressément déterminées;
dépendre ce bienfait de l'accomplissement scrupuleux de toutes les condi-

Et, attendu que, s'il est constant et reconnu, en fait, d'une part,
que Jean-Joseph Pirard père est né en Belgique, le 12 juin 1776; qu'il
s'est établi, en 1800, dans le département de Seine-et-Marne ; qu'il y a
épousé une Française, et qu'en 1812, Charles-Joseph Pirard est né de ce
en fait, de l'autre, que ni Jean-Jo-
mariage, il est constant et reconnu
seph Pirard père, ni Charles-Joseph Pirard fils, déjà majeur, n'ont rem-
pli, ni cherché à remplir aucune des conditions exigées par la loi, pour
obtenir des lettres ou des déclarations de naturalité ou de naturalisation,
et pour conserver, ou pour acquérir par là des droits de citoyens français;
Que, dans ces circonstances, en décidant que Jean-Joseph Pirard pere
était étranger, et que Charles-Joseph Pirard fils avait suivi la condition de
son père, l'arrêt attaqué a fait une juste application des lois de la matière ;
- Rejette, etc.

Du 16 juill. 1834.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr,-Lasagni, rap.-Nicod, av. gén., c. conf.-Letendre de Tourville, av.

Vu le décret du 17 mars 1809
- (Hubert.)-LA COUR ;
2o Espèce:-
et la loi du 14 oct. 1814;- Attendu que la condition de Gilles Hubert,
mineur, dépendait de celle de son père ;-Attendu que les étrangers qui,
nés dans les pays réunis à la France depuis 1791, n'avaient acquis la
de cette loi
qualité de Français que par cette réunion, ont perdu cette qualité par la
séparation de ces pays opérée en 1814, lorsqu'ils n'ont pas rempli les
conditions imposées par la loi du 14 oct. 1814; que l'art.
exigeait leur déclaration, dans le délai de trois mois de sa publication
qu'ils persistaient dans la volonté de se fixer en France, et des lettres de
déclaration de naturalité, pour jouir des droits de citoyen français;
Attendu que le fait de la résidence d'un étranger en France ne peut rem-
placer la déclaration exigée par la loi, parce que sa volonté d'être Fran-
çais, nonobstant la séparation du lieu où il est né et du territoire fran-
Attendu, d'autre part
çais, doit être exprimée dans la forme légale, et qu'elle ne résulte pas
nécessairement du seul fait de la résidence;

que le concours de l'autorité française est indispensable pour attribuer a
un étranger la qualité et les droits de citoyen français; que ce concours
ne peut exister que par les lettres de déclaration de naturalité accordées
par le roi, en exécution du décret du 17 mars 1809;-Attendu, en fait
qu'il est reconnu par le jugement attaqué que Hubert père n'a pas fait l
déclaration exigée par l'art. 1 de la loi du 14 oct. 1814, et n'a pas ob
Casse
tenu les lettres de déclaration de naturalité; que, dans cet état, ce juge
ment, en déclarant que Gilles Hubert jouissait de la qualité de Français
a violé le décret du 17 mars 1809 et la loi du 14 oct. 1814;
annule, dans le seul intérêt de la loi, le jugement rendu par le tribuna
civil de Montmédy, le 9 oct. 1831.

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(1) (Deplaz-Depland C. préf. de l'Eure.) — LA COUR; qu'il résulte des pièces du procès et de l'arrêt attaqué, que le père du do mandeur en cassation, né en Savoie en 1759, s'est marié en France po térieurement à l'époque où ce pays en a fait partie; que lui-même de mandeur est né en France, le 5 flor. an 6 (14 mai 1798); que, pa Attendu qu'étant alors mineur conséquent, au mois de mai 1814, époque où la Savoie a été rendue à so ancien souverain, il était mineur; Attendu que ce dernier qui pouva suivait la condition de son père; continuer d'être Français en remplissant les conditions qui lui étaient in posées par la loi du 14 oct. 1814, n'a point exécuté cette loi; qu'il résulte qu'il n'a transmis à cet égard aucun droit à son fils; - Attend d'un autre côté que celui-ci qui aurait pu devenir Français, en se confo mant dans l'année de sa majorité, aux dispositions de l'art. 9 c. civ. pas non plus rempli les obligations qui lui étaient imposées par cet a ticle; Attendu qu'il a reconnu lui-même, en 1845, qu'il n'était p Français, puisqu'il a demandé alors sa naturalisation sans pouvoir l'o tenir; Attendu qu'en décidant que dans ces circonstances le ste Depraz-Depland ne pouvait pas être maintenu sur la liste de électeurs

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,

DROIT CIVIL. depuis un très-grand nombre d'années, de l'exercice des droits politiques en France. On pouvait répondre à cela, que l'erreur commune peut bien consacrer les actes faits sous l'empire de cette erreur, sans consacrer la capacité de les exercer à l'avenir. Mais, ce qui paraît avoir été déterminant pour la cour, c'est que cet électeur avait reconnu lui-même le vice de sa position, en faisant récemment, bien que sans succès, auprès du gouvernement, les diligences nécessaires pour étre naturalisé. Cette circonstance a pu paraître affaiblir les titres que pouvait lui donner la possession qu'll invoquait et que la jurisprudence a parfois prise en considération (V. Req., 30 mai 1834, aff. maire de Corte, n° 80).

596. Doit-on admettre la même solution, dans le cas où le père de l'enfant mineur serait décédé avant la séparation du pays réuni? - Il a été jugé, dans le sens de la négative, que l'individu né en France d'une Française et d'un père originaire d'un pays réuni à la France, a, durant l'époque de cette réunion, acquis irrévocablement la qualité de Français, par suite de l'événement du décès du père arrivé avant la séparation du pays réuni, et par conséquent pendant que ce dernier lui-même était dans le plein exercice de ses droits de Français et de citoyen; et que, bien que la séparation du pays réuni soit arrivée au temps où l'enfant était encore mineur, cette séparation ne pouvant agir par effet de rétroactivité contre la nationalité nouvelle du père, le fils mineur, pour conserver cette nationalité, n'a aucune condition à remplir, à l'époque de sa majorité (Cass., 13 janv. 1845, aff. Marchal, D. P. 45. 1. 88). Cette décision nous semble mal rendue, car elle repose sur cette erreur de principe si bien démontrée dans le rapport de M. Lasagni, aff. Pirard, no 594), que la nationalité de l'enfant mineur suit celle du père et change avec la qualité du père.

597. Nous n'avons pas besoin de dire que si un étranger s'était fait naturaliser Français, et que si, postérieurement à sa naturalisation son pays originaire avait été réuni à la France, la rupture de cette réunion n'aurait aucune influence sur sa qualité, car il la tient d'une cause étrangère à la réunion et doit, en conséquence, rester en dehors des vicissitudes que la politique peut amener au sujet de cette réunion. C'est par application de cette doctrine qu'il a été décidé, avec toute raison : 1o que le Belge devenu Français antérieurement à la réunion de son pays à la France, par un fait à lui personnel, n'a point perdu cette qualité, par la rupture de cette réunion (Douai, 19 mai 1835, aff. préf. du Nord, V. no 73) ; — 2o Que le Français d'origine, qui a fixé sa résidence dans un pays réuni à la France, et a continué d'y demeurer depuis la séparation du pays, n'a pas perdu sa qualité de Français s'il n'a pas valablement manifesté une intention contraire (Grenoble, 23 juill. 1838, aff. Bouffier, V. Succession).

598. Il a été décidé, dans le même sens, 1° que l'enfant mineur d'un père qui avait acquis la qualité de Français, enfant qui l'avait lui-même acquise, n'est pas soumis à la déclaration prescrite par l'art. 9 c. civ., pour conserver la qualité de Français, quand la portion de territoire qu'ils habitaient vient à être démembrée de la France (Douai, 28 mars 1831, aff. préf. du Nord, V. no 594; Colmar, 26 déc. 1829, aff. Perrénod, V. n° 90);—Que l'individu né d'un père français dans une colonie qui depuis a cessé de faire partie des possessions françaises, est, malgré la séparation, demeuré français, encore qu'il n'ait rempli aucune formalité sur ce point, et se soit seulement établi en France (Paris, 4 fév. 1840) (1).

sixième collége, du département de l'Eure, l'arrêt attaqué, loin de violer les constitutions de 1791 et 1793, et les anciens principes du droit français, qui n'étaient pas applicables, s'est au contraire exactement conformé aux principes de la matière, et a justement appliqué l'art. 3 de la loi du 14 oct. 1814, et l'art. 9 c. civ.;- Rejette.

Du 9 jaill. 1844.-Ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Gaujal, rap.-Delangle, av. gen., c. conf.-Dupont, av.

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(1) Espèce: - (Tasson C. Latour.) Tasson, tailleur, a fait incarCérer préventivement et avant tout jugement Latour de Saint-Ygest, pour le montant d'un mémoire de fournitures. Cette arrestation provisoire, opérée en vertu d'ordonnance du président du tribunal, était motivée sur la qualité d'étranger donnée à de Saint-Ygest. Mais celui-ci soutenant qu'il était Français, s'est pourvu par assignation au principal devant le tribunal, qui a statué en ces termes :- « Attendu que Latour de SaintYgest est né d'un père français à l'Ile-de-France, à l'époque où cette ile

TIT. 3, CHAP. 2,

187

599. Nous avons établi, dans l'art. 4 qui précède, que le changement de nationalité que le mari français viendrait à subir ne ferait pas perdre à sa femme sa qualité de Française, l'art. 19 ne prévoyant que le cas où c'est au moment même de son mariage qu'elle s'unit à un époux d'une nationalité différente de la sienne. Mais ceci n'empêche pas de décider qu'au cas de séparation de territoire, la femme perd la qualité de Française, si elle n'obéit pas aux prescriptions de la loi de 1814. -Le motif est le même que celui que nous avons donné à l'égard des enfants de l'habitant de la portion de territoire séparée, à savoir, qu'au cas de démembrement, les personnes et les choses du territoire démembré changent de nationalité. Conformément à notre solution, il a été jugé que la femme Française d'origine dont le mari était Français à l'époque de son mariage, par suite de la réunion de son pays à la France, mais qui est devenu étranger par la séparation ultérieure des deux pays, suit la condition de son mari et doit être réputée étrangère; qu'en conséquence, les tribunaux français sont incompétents pour statuer sur la demande en séparation de corps formée par cette femme contre son mari, et que peu importe que les deux époux soient domiciliés en France: « Attendu, porte l'arrêt (qui a adopté les motifs des premiers juges), que d'après les dispositions de l'art. 19 c. civ. la femme française qui épouse un étranger doit suivre la condition de son mari; attendu que ces dispositions, reproduites aussi dans l'art. 12 c. civ., doivent avoir pour effet non-seulement d'imposer à la femme la nationalité que son mari pouvait avoir à l'époque de son mariage, mais encore d'entraîner pour la femme l'obligation de subir et d'accepter pour elle les changements que les circonstances politiques peuvent amener dans la nationalité de son mari » (Paris, 1 ch., 24 août 1844, M. Séguier, 1er pr., aff. Lusardi). Nous ferons seulement remarquer que le motif tiré de ce que la femme suit la condition de son mari n'est pas applicable dans l'espèce, et que la raison réelle pour laquelle la femme dont il s'agit devient étrangère, tient à ce que les choses et les personnes qui composaient le territoire démembré deviennent étrangères.-V. nos 122 et suiv.

-

600. La loi du 14 oct. 1814 ne s'appliquait qu'à ceux des habitants du territoire séparé, qui, au moment de sa publication, étaient établis sur le territoire actuel de la France. Quant à ceux qui, lors de cette publication, étaient encore domiciliés dans les départements séparés, le roi se réservait de leur accorder la permission de s'établir en France et d'y jouir des droits civils; mais ils ne pouvaient exercer les droits de citoyens français qu'après avoir fait la déclaration prescrite, après avoir rempli les conditions imposées par la loi du 22 frim. an 8 et avoir obtenu des lettres de déclaration de naturalité. Le roi se réservait néanmoins le droit d'accorder lesdites lettres avant les dix ans de résidence révolus. On sait que la loi du 3 déc. 1849 a abrogé celle du 14 oct. 1814. - V. no 112.

CHAP. 2. · De la privation des droits civils par suite de condamnations judiciaires.

601. La privation des droits civils, résultant d'un jugement, est plus ou moins étendue. Quand un individu a été atteint par l'une des trois peines afflictives et perpétuelles que prononce notre loi pénale, la peine de mort, celle des travaux forcés à perpétuité ou celle de la déportation, il est privé de la presque totalité des droits civils et réputé en état de mort civile. La privation partielle des droits civils est prononcée, dans certains faisait partie des possessions françaises; Que les lois et les traités n'ont prescrit aucune condition ni aucune formalité pour conserver ou perdre la qualité de Français; que les dispositions invoquées ne s'appliquent qu'aux biens; qu'il résulte des faits et documents de la cause que la famille Latour de Saint-Ygest est venue s'établir en France, et qu'on n'articule aucun fait pouvant indiquer l'intention de renoncer à la qualité de Français; Qu'il s'agit d'une assignation à jour fixe, au principal, et non d'un référé sur l'exécution de l'ordonnance d'arrestation provisoire du président; qu'ainsi les parties ne se trouvent dans aucun des cas d'exécution provisoire; Que les circonstances de la cause ont pu donner lieu à l'arrestation, et que, d'ailleurs, Latour de Saint-Ygest est débiteur; Déclare nul l'écrou; - Ordonne que Latour de Saint-Ygest sera mis en liberté. » - Appel. Arrêt. LA COUR; — Adoptant les motifs des premiers juges, confirme. Du 4 fév. 1840.-C. de Paris.-M. Séguier, 1er pr.

-

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