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valoir sur les motifs qui servent de base aux arrêts ci-dessus de la cour suprême, des 28 nov. 1821 et 5 janv. 1841. La décision de la cour de Rouen que nous venons de rapporter a été l'objet d'un pourvoi par suite duquel elle a été annulée. La cour de cassation, persévérant dans sa jurisprudence, a jugé que l'inobservation des formalités prescrites par l'art. 234 n'empêche pas l'emprunt à la grosse fait par le capitaine d'être obligatoire pour le propriétaire du navire; et cela quand même l'emprunt a été contracté en pays étranger, par un capitaine également étranger, envers un prêteur français, qui réclame en France le remboursement du prêt (Cass., 9 juill. 1845, aff. Delessert, M. Thil, rap., D. P. 45, 1, 313).

444. L'obtention de l'autorisation d'emprunter ne dispense pas le capitaine de justifier à l'armateur de l'emploi des sommes empruntées.

445. Cette autorisation n'aurait pas non plus pour effet d'excuser le prêteur de mauvaise foi, qui, de connivence avec le capitaine, aurait fourni à celui-ci les sommes dont ils devaient faire ensuite tous deux un emploi abusif. Le prêteur ne serait pas fondé à se prévaloir contre l'armateur de l'observation des formalités prescrites par l'art. 234. Mais ce serait à l'armateur à prouver la collusion entre le prêteur et le capitaine (Conf. Dely incourt, t, 2, p. 211; Boulay-Paty, t. 2, p. 70).

446. Mais le prêteur de bonne foi qui a fourni ses den ers pour les nécessités dûment constatées du navire, n'est pas tenu de surveiller l'emploi de ces deniers; il n'aurait pas moins action contre le propriétaire et privilége sur le navire, bien que le capitaine, de la fidélité duquel il n'est pas responsable, n'aurait point employé les deniers prêtés à leur destination (Conf. RoulayPaly, eod.; M. Dageville, t. 2, p. 215).

447. Le capitaine peut-il emprunter autrement que par contrat à la grosse ? Cette question a été diversement résolue, sous l'empire de l'ordonnance de 1681, par Valin et par Émérigon.

signa devant le tribunal de commerce pour s'entendre condamner à remettre audit Meinel les objets dont il s'agit. En même temps, semblable assignation était délivrée à Delessert, préteur à la grosse, pour voir déclarer le jugement à intervenir commun avec lui. 10 avril 1841, jugement qui déclare nul et inopposable à Meinel l'acte de grosse du 8 février, en ce qui concerne les objets par lui réclamés, et condamne le capitaine par corps et biens, et par privilége sur le navire, à livrer, dans les vingt-quatre heures de la signification, seulement contre le payement du fret et accessoires, les marchandises énoncées au connaissement dont Meinel est porteur. Le motif de ce jugement est que le capitaine avait commis dans son emprunt une double infractton à la loi de son pays, en ce que : 1o il n'avait pas pris les ordres des propriétaires du chargement, et parce que 2' il ne justifiait pas d'un acte signé des principaux de l'équipage constatant la nécessité de réparer des avaries.

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Appel par M. Delessert. — Devant la cour, on a d'abord agité la question de savoir laquelle des deux législations, française ou portugaise. était applicable à la cause, et l'on a soutenu, au fond, dans l'intérêt de Pappe ant, que l'inobservation des formalités prescrites pour justifier de la nécessité de l'emprunt à la grosse, ne pouvait être opposée aux préteurs de bonne foi. - Arrêt.

LA COUR; En ce qui concerne la législation qui doit régir la cause : -Attendu que la question capitale du procès est de savoir si le capitaine du navire el Luzitano avait qualité pour contracter, dans le port de Portsmouth, un emprunt à la grosse affectant les marchandises chargées à son bord; - Qu'il s'agit done d'apprécier la capacité de ce capitaine; que les propriétaires du navire et des marchandises étant Portugais, et le capitaine étant aussi de la même nation, la capacité de celui-ci pour contracter l'emprunt dont il s'agit ne peut être régie que par les lois de la nation à laquelle il appartient.

En ce qui touche le fond du procès :- Vu l'art. 34, 2o part., liv. unique, tit. 4 c. com. portugais, ainsi conçu: « Si, pendant le cours du voyage, il y a nécessité de réparations ou d'achats de victuailles, et si les circonstances ou la distance du domicile des propriétaires du navire ou du chargement ne permettent point de demander leurs ordres, le capitaine, après en avoir constaté la nécessité par un acte signé des principaux de l'équipage, pourra, en se faisant autoriser par le consul, ou à défaut par l'autorité locale, faire les réparations ou l'achat des victuailles nécessaires; et, s'il n'a pas de fonds, il pourra tirer des lettres de change sur la caisse ou les propriétaires du navire, ou, avec la même autorisation, prendre à la grosse sur corps et quille, et même sur la cargaison, si besoin est, ou bien encore, s'il ne peut réaliser l'emprunt en totalité ou en partie, il aura la faculté de vendre, aux enchères publiques, marchandises jusqu'à concurrence de la somme nécessaire; »

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Le premier de ces auteurs soutenait que la loi ne déterminait point le mode suivant lequel l'emprunt devait être fait, et qu'elle aurait pu d'autant moins astreindre le capitaine à emprunter à la grosse, qu'il est généralement fort difficile et fort onéreux d'emprunter de cette manière en pays étranger (Valin, sur l'art. 19, liv. 2, tit. 1, de l'ord.). Émérigon était d'un avis contraire. « L'ordonnance, dit-il, a réduit le pouvoir du capitaine en cours de voyage, ou à prendre des deniers sur le corps, ou à mettre des apparaux en gage, ou à vendre des marchandises de son chargement pour les nécessités du navire. S'il tire des lettres de change sur ses armateurs, cet engagement, quoique conçu en nom qualifié, lui devient personnel, attendu qu'il a excédé son mandat légal. Il ne doit contracter aucune obligation qui ne soit inhérente au navire même et qui ne dépende du succès de l'expédition maritime : c'est à quoi se borne l'autorité que sa qualité de maître lui défère » (Contr. à la grosse, ch. 4, sect. 11, § 5).— Lors de la rédaction du code, le tribunal de commerce de Nantes a demandé que la loi s'expliquât formellement sur le point de savoir si l'armateur répond des emprunts faits par le capitaine pour les besoins du navire par lettres de change; mais cette réclamation est restée sans effet. La plupart des auteurs modernes, notamment Delvincourt (t. 2, p. 211), Locré (t. 3, p. 113) et Boulay-Paty (t. 2, p. 71) décident que l'art. 234 c. com. accorde au capitaine la plus grande latitude sur la manière d'emprunter; et qu'en lui permettant d'engager même le corps et la quille du navire, il l'autorise nécessairement à prendre des engagements moins rigoureux, qui peuvent être, dans beaucoup de cas, le seul moyen offert au capitaine pour sauver le bâtiment et continuer le voyage. Cette décision nous paraît fondée : il est de toute justice, que lorsqu'un prêt simple ou par lettre de change a été occasionné par les besoins du navire légalement constatés, le propriétaire ou armateur, si ce navire arrive à bon port, ne puisse le conserver sans acquitter la dette; mais si le

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Attendu, en fait, que le capitaine n'a pas observé les formalités sans lesquelles la loi ne lui permet pas de prendre à la grosse sur la cargaison; qu'en effet cette loi n'autorise cet emprunt que si les circonstances ou la distance du domicile des propriétaires du chargement ne permettent point de demander leurs ordres; - Que, dans l'espèce, la distance de Portsmouth au Havre n'est pas telle qu'il ne fût pas facile au capitaine de prendre les ordres des réclamateurs de la marchandise, domiciliés au Havre; Qu'il devait d'autant plus se soumettre à cette condition, que c'est au Havre même qu'il a trouvé un prêteur à la grosse; que, d'ailleurs, nulle autre circonstance ne mettait obstacle à l'accomplissement de cette première formalité; Que le capitaine n'a pas non plus fait constater par les principaux de l'équipage la nécessité de réparer son navire, puisque le rapport de mer dont il se prévaut peut bien établir l'existence des avaries, mais ne suffit pas pour constater la nécessité de les réparer; Qu'enfin le capitaine n'a pas davantage satisfait à la prescription de la loi qui exigeait qu'il obtint l'autorisation du consul pour faire ledit emprunt; Qu'en effet on ne peut considérer la lettre du vice-consul de la nation portugaise à Portsmouth comme contenant une autorisation valable, puisque cette lettre ne contient aucune indication de la somme qui pourra être empruntée, ce qui, dans l'espèce, était d'autant plus nécessaire que l'emprunt était exorbitant relativement à la valeur du navire; que cette lettre ne renferme pas non plus l'autorisation spéciale et formelle d'engager le chargement; Que, cependant, une telle autorisation devait d'autant plus être observée que, d'après la loi portugaise, la cargaison ne peut être frappée d'un emprunt à la grosse qu'en cas de nécessite absolue; Attendu que le capitaine n'ayant reçu aucun mandat de la part des propriétaires de la marchandise, expéditeurs ou réclamateurs, ne pouvait affecter la cargaison au droit réel que crée un contrat à la grosse qu'en observant strictement toutes les conditions qui lui étaient imposées par la loi; car ce n'est que sous la condition de cet accomplissement que la loi consent à donner au capitaine, dans les circonstances qu'elle détermine, un pouvoir qu'il ne tient pas des propriétaires de la marchandise; Attendu que tout prêteur à la grosse doit connaître la qualité de celui avec lequel il contracte; qu'il doit donc s'imputer les conséquences d'un prêt fait à un capitaine qui, par cela seul qu'il n'a pas rempli les conditions sans lesquelles la loi lui dénie le pouvoir d'emprunter à la grosse, doit être considéré en réalité comme ayant agi sans mandat, ou en dehors des limites du mandat que la loi lui confère; Qu'en de telles circonstances, le prêt à la grosse ne peut avoir d'effet que contre le capitaine et ne peut en avoir aucun contre les propriétaires de la marchandise, qui ne sauraient ainsi être engagés contre leur volonté et contre celle de la loi; Confirme.

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Du 21 août 1841.-C. de Rouen, 2 ch.-MM. Gesbert, pr.-Chassan, av. gen., c. contr.- Deschamps et Sénard. av.

bâtiment a péri depuis l'emprunt, le propriétaire est recevable à se libérer envers le prêteur, aux termes de l'art. 216 c. com., par l'abandon du navire et du fret.

Il a été jugé en ce sens qu'un emprunt contracté par le capitaine d'un navire en pays étranger dans la forme de lettres de change causées valeur pour les besoins du navire, même sans l'observation d'aucune formalité préalable, est obligatoire pour res propriétaires du bâtiment : « Considérant... qu'il suit clairement de l'art. 234 que le capitaine a pu emprunter pour les besoins de son navire, comme le porte la lettre de change dont il s'agit, n'y ayant lieu de prendre en considération que les formalités prescrites pour constater la nécessité de l'emprunt n'ont pas été observées, ni l'autorisation du consul belge ou du juge local obtenue, ces mesures n'étant prescrites que pour couvrir le capitaine vis-à-vis de ses armateurs, mais ne pouvant jamais être exigées des tiers qui ignorent nos lois et à l'égard desquels doit prévaloir la règle locus regit actum; Que si une autre interprétation pouvait être admise, il s'ensuivrait nécessairement impossibilité pour le capitaine de se procurer à l'étranger les ressources dont il aurait néanmoins le plus pressant besoin, et ainsi la ruine de la navigation marchande; Que cette interprétation découle encore de l'art. 236 c. com., qui rend le capitaine personnellement responsable vis-à-vis de l'armement des emprunts contractés sans nécessité, ce qui entraîne nécessairement l'idée que l'armement lui-même est responsable dans ce cas vis-à-vis des tiers-prêteurs. » (Gand, 1r ch., 6 avril 1838, aff. Plamont C. d'Hossche).

Il va de soi que lorsque l'emprunt est fait par lettre de change, le capitaine doit s'empresser de donner avis au propriétaire de l'effet qu'il a tiré sur lui, afin que ce dernier puisse en faire assurer la valeur, s'il le juge à propos, et prendre ses mesures pour en effectuer le payement.

448. Lors de la discussion de la loi du 14 juin 1841, M. Gaillard de Kerbertin a proposé un amendement portant que « les emprunts ordinaires contractés par le capitaine, dans les cas et avec les formalités ci-dessus, ne seraient exigibles contre le propriétaire, à moins de mandat spécial de sa part, qu'après le voyage et sauf le bénéfice du 2° paragraphe de l'art. 216. » A l'appui de cet amendement, M. de Kerbertin a dit en substance: Je pense que l'art. 254 c. com. ne permet au capitaine que d'emprunter à la grosse ou de vendre ou engager les marchandises, mais qu'il ne l'autorise nullement à contracter un emprunt pur et simple. Cependant l'opinion contraire est presque généralement admise par les auteurs et par les tribunaux. Il résulte de là des conséquences graves pour l'armateur. En effet, lorsque le capitaine a contracté des emprunts, comme ils sont à court terme, des traites sont tirées sur l'armateur. Si toutes ces traites arrivaient ensemble, l'armateur serait libre d'opter entre le payement ou l'abandon, suivant que les traites absorberaient ou non la valeur du navire et du fret; mais il n'en est pas ainsi : les traites

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(1) (Assureurs C. Heurtault.) — LA COUR; - Sur la première question, celle de savoir si le capitaine Drinot a pu souscrire un contrat de grosse, le 30 août 1828, lorsque le navire la Théodosie, déclaré innavigable et vendu dès le 15 du même mois, n'existait plus:- Attendu que le capitaine n'est pas seulement le préposé du propriétaire du navire; qu'il est de plus le représentant des propriétaires de la cargaison, et qu'il doit faire tout ce qui est nécessaire pour la conserver et la faire arriver au port de destination; -Que, si l'innavigabilité et la vente du navire mettent un terme aux fonctions du capitaine, relativement à la direction du bâtiment qui lui est confiée, il lui reste d'autres fonctions à remplir pour tout ce qui est la suite de l'innavigabilité par rapport soit au navire lui-même, soit au chargement; Que le capitaine est tenu, lorsque le navire est déclaré innavigable et vendu, de louer un autre bâtiment; de faire transborder les marchandises pour les faire parvenir au lieu déterminé par la chartepartie, de payer les loyers de l'équipage et les frais occasionnés dans le lieu du sinistre, même ceux nécessaires pour le rapatriement des geus de l'équipage; - Que, suivant Émérigon, il est certain que le naufrage même ne délie le capitaine ni envers les chargeurs ni envers les armateurs; que, loin de le dispenser du soin de la chose naufragée, il rend cette obligation encore plus étroite; qu'ainsi, puisque le naufrage ne rompt pas ce contrat vis-à-vis des armateurs qui profitent du fret des effets sauvés, il en résulte qu'ils répondent des délits et des fautes commises par leur préposé dans les opérations concernant le sauvetage, qui sont une dépendance Inséparable de sa qualité de capitaine; qu'il suit de ces principes que, a besoin d'argent pour subvenir au sauvetage du navire, il peut emprunter s'i!

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sont présentées successivement; une première, une deuxième,' sont payées; arrive une troisième; elle n'absorbe pas encore tout à fait la valeur du navire; l'armateur se trouve dans un grand embarras : s'il était sûr que d'autres traites ne fussent pas présentées plus tard ou qu'il n'y eût pas d'emprunt à la grosse, il ne ferait pas l'abandon; mais il ignore ce qui arrivera; et pen. dant qu'il est placé dans cette perplexité, on l'assigne devant les tribunaux de commerce; il est condamné à payer la traite; et à la fin du voyage, il se trouve non-seulement que la valeur du navire et du fret est absorbée, mais encore que l'armateur aura déboursé bien au delà. Pour écarter ce danger, je voudrais ou que les emprunts purs et simples fussent expressément interdits, ou, s'ils sont autorisés, que le remboursement ne fût exigible qu'à la fin du voyage et sous le bénéfice de l'art. 216. Cet amendement n'a pas été appuyé; et c'est, ce nous semble, avec raison. Sans doute il y a quelque inconvénient à forcer l'armateur d'opter entre le payement des traites et l'abandon de bâtiment avant que le résultat général du voyage ne lui soit parfaitement connu; mais il y aurait un inconvénient plus grand encore à ajourner l'exercice des droits du prêteur jusqu'après l'époque incertaine où l'armateur aura reçu des nouvelles de son navire et liquidé son entreprise; les nécessités commerciales n'admettent pas de telles incertitudes et de tels retards; et nous pensons en conséquence, avec M. Duvergier, Collect. des lois, ve de 1841, p. 324, que l'armateur est tenu de faire son option entre le délaissement du navire et le payement de la traite souscrite par le capitaine, dès que celle-ci lui est présentée après l'échéance du terme qui y est fixé.

Il est sans difficulté que si le capitaine, poursuivi en payement des lettres de change par lui tirées, a occasionné des frais frustratoires en n'appelant pas en cause ses mandants et en ne les reillement responsables de ces frais : « Considérant que les frais indiquant pas au demandeur, les propriétaires du navire sontpadont il s'agit sont la conséquence de la conduite tenue par le sieur d'Hossche, en signant l'effet de change en question, et en laissant intervenir un jugement contre lui sans appeler ses mandants en cause ou sans les faire nominativement connaître au porteur de la lettre; qu'il était ainsi de toute justice qu'en déclarant commun contre les propriétaires du navire le jugement rendu contre leur capitaine, on les rendit également passibles des frais, résultat nécessaire de la conduite des mandataires dont ils sont responsables. » (Gand, 1re ch., 6 avril 1838, aff. Plamont C. d'Hossche).

chandises du chargement, aussi bien que sur le corps du navire; 449. Le capitaine peut emprunter à la grosse sur les marcar dès que la loi l'autorise expressément, en cas de nécessité du radoub ou d'achat de victuailles, à mettre ces marchandises en gage ou à les vendre, elle lui permet par cela même de les affecter à un prêt à la grosse (Rouen, 29 déc. 1831 (1); Rennes, 18 déc. 1832, aff. Illiac, V. no 1368).

et affecter au prêt les effets sauvés, et qu'en cas de prise du navire, il peut le racheter et tirer lettre sur ses armateurs; - Que l'armateur ne peut donc pas opposer qu'aux termes de l'art. 234 c. com., ce n'est que pendant le voyage était rompu, dès que le navire, déclaré innavigable et vendu, cours du voyage que le capitaine peut emprunter à la grosse, et que le n'était plus la propriété de l'armateur;

Sur le défaut de délibération de l'équipage: - Attendu que l'armateur ne peut pas davantage opposer que l'emprunt a été fait sans délibération dit pas que la nécessité de l'empruntsera reconnue par l'équipage ; — Que de l'équipage sur la nécessité de cet emprunt ;- Attendu que l'art. 234 ne cet article porte seulement que, «si, pendant le cours du voyage, il y a nécessité de radoub, ou d'achat de victuailles, le capitaine, après l'avoir constaté par un procès-verbal, signé des principaux de l'équipage, pourra, jusqu'à concurrence de la somme que les besoins constatés exigent; » en se faisant autoriser ehez l'étranger par le consul français, emprunter Que cet article n'exige qu'une chose, c'est que la nécessité du radoub, des achats, des besoins, soit constatée par un procès-verbal signé des principaux de l'équipage; - Mais que, quant à l'autorisation d'emprunter, lorsque, comme dans l'espéce, elle a été donnée à Saint-Thomas par le consul ou l'agent français, lorsque l'emprunt a été contracté régulièrement, avec pul'armateur ne peut se soustraire aux conséquences de cet emprunt régublicité, d'après les formes ordinaires, sans fraude, à un taux modéré, lièrement fait;

chargement: En ce qui concerne l'emprunt à la grosse fait sur les marchandises du -Attendu que l'armateur oppose encore que, d'après le

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450. Toutefois, il a été jugé, au contraire, mais à tort, ce

même art. 234, le capitaine peut bien emprunter sur les corps et quille du vaisseau, mettre en gage ou vendre des marchandises; mais que l'emprunt permis sur corps et quille du navire n'est pas autorisé sur les marchandises; que ce n'est pas le cas d'appliquer la maxime: Qui peut le plus peut le moins, parce qu'un capitaine se décide plus difficilement à mettre en gage ou à vendre les marchandises de son chargement, qu'à emprunter sur partie de sa cargaison; Attendu que cette objection n'est basée que sur les mols mettre en gage, et qu'elle disparaît à la simple lecture: 1o de Part. 515, d'après lequel « les emprunts à la grosse peuvent être affectés sur le chargement; » 2° de l'art. 320, portant: «Le chargement est également affecté au capital et intérêts de l'argent donné à la grosse sur le chargement; » 3° de l'art. 324, qui déclare que « le prêteur a la grosse sur marchandises chargées dans un navire désigné au contrat, ne supporte pas la perte des marchandises, même par fortune de mer, si elles ont été chargées sur un autre navire; » — Qu'il résulte donc de la combinaison de tous ces articles que le législateur a considéré comme synonymes ces mols, mis en gage, affectation de marchandises, emprunt sur le chargement; Relativement aux loyers de l'équipage: - Attendu que l'armateur invoque les art. 258 et 259 c. com., qui ont reproduit les art. 8 et 9 du tit. 4 du liv. 3 de l'ordonnance de 1681, et desquels il induit qu'à raison de l'innavigabilité et de la vente du navire, les loyers de l'équipage n'étaient pas dus, et qu'un emprunt ne pouvait être fait pour les payer ::-Attendu que Valin et Emerigon étaient d'une opinion différente sur la question de savoir si, en cas de prise, bris ou naufrage, le droit des matelots, tant pour le voyage d'aller que pour le voyage de retour, était borné au fret des marchandises sauvées du sinistre qui avait fait périr le navire et aux débris de ce navire; Attendu que, sans examiner le point de savoir si l'on peut assimiler le cas d'innavigabilité à celui de prise, bris ou naufrage, on do it considérer, d'après l'opinion unanime des auteurs qui ont écrit sur le nouveau code de commerce, deux voyages distincts et séparés dans le voyage d'aller et celui de retour, lorsqu'il n'existe pas de stipulation contra ire; -Que l'équipage du navire la Theodosie était créancier de ses gages du voyage d'aller de Saint-Malo à la Martinique, et que c'est en majeure partie pour le payement de ces gages, auxquels il faut ajouter les frais de rapport, expertise et autres, au lieu de la relâche, que l'emprunt a été effectué;- Qu'ainsi, lorsque le navire a fait heureusement sa première traversée, et qu'il ne périt que dans le voyage de retour, les loyers sont dus à l'équipage, pour le voyage d'aller, parce qu'ils sont acquis;- Que cette distinction entre le voyage d'aller et celui de retour résulte de l'art. 265, d'après lequel, «si le matelot est engagé au voyage, la moitié des loyers est due, s'il meurt en allant; » — Qu'elle résulte également de l'art. 299, portant que, s'il arrive interdiction de commerce (ce qui s'applique à toute rupture forcée du voyage) avec le pays pour lequel le navire est en route, et qu'il soit obligé de revenir avec son chargement, il n'est dû au capitaine que le fret d'aller, quoique le navire ait été affrété pour l'aller et le retour; »> Qu'ainsi, et dans tous les cas, le législateur a considéré comme deux voyages celui d'aller et celui de retour; que, dès lors, l'emprunt a été légalement fait pour payer à l'équipage du navire la Théodosie ses gages du voyage de Saint-Malo à la Martinique ;

En ce qui concerne les frais de l'équipage pour son retour en France: - Attendu que l'armateur oppose que l'emprunt ne pouvait être effectué pour les frais de rapatriement ou de retour des gens de l'équipage; que ces frais étaient à la charge du gouvernement, aux termes d'une circulaire du 21 sept. 1821; Attendu que cette circulaire n'a pu rapporter les dispositions du dernier paragraphe de l'art. 270 c. com., qui dispose formellement que, « dans aucun cas, le capitaine ne peut congédier un matelot dans les pays étrangers; » d'où suit la conséquence que, s'il le congédie, il doit lui fournir les moyens de revenir en France; - Que c'est là une obligation naturelle contractée par le capitaine, qui représente l'armateur, obligation d'ailleurs imposée par la loi ; — Que le gouvernement a bien pu, dans l'intérêt du commerce maritime et dans l'intérêt de la marine française, pour conserver des hommes précieux à l'État, s'obliger à acquitter, sur les fonds du ministère de la marine, les frais de leur retour en France, et à indemniser les armateurs de ces frais; Mais que, si cette indemnité ne leur est point accordée, si le consul français en pays étranger n'a point les fonds nécessaires pour la payer, si au contraire il autorise le capitaine à emprunter à la grosse pour fournir aux frais de rapatriement, ces frais ne peuvent retomber sur les chargeurs dont les marchandises ont été affectées à leur insu et sans leur consentement;-Que ces dépenses sont à la charge de l'armateur, sauf à lui à se pourvoir auprès du gouvernement pour obtenir l'indemnité des avances par lui faites;-Que, d'ailleurs, il ne s'agit pas, dans l'espèce, d'une contestation entre l'armateur et les gens de l'équipage, mais d'un débat entre l'armateur et les prêteurs à la grosse, au privilége desquels les marchandises des chargeurs ont été affectées; Qu'il suffit aux prêteurs que le prêt ait été fait de bonne foi, et à un taux non élevé, pour payer les gages, pour assurer le retour de l'équipage en France, pour acquitter la delle des armateurs; Qu'ainsi, l'armateur du navire la Théodosie ne peut, pour sé soustrairé à l'exécution d'une obligation qui lui est personnelle,

nous semble, que le capitaine ne peut emprunter à la grosse

et lui est imposée par le code de toutes les nations, invoquer la circulaire du 21 sept. 1821;

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Sur la question de savoir si l'armateur dont le capitaine a engagé les marchandises du chargement pour les besoins du navire, peut, par l'abandon, se libérer envers les chargeurs :-Attendu qu'en thèse générale, le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par son mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné (c. civ., art. 1998); Qu'il est en outre responsable des fautes, délits et quasi-délits de ce mandataire dans les fonctions auxquelles il l'a employé (même code, art. 1384);-Qu'ainsi, le code civil a distingué entre les faits et les fautes du mandataire; - Que le mandataire représente le mandant, agit à son lieu et place, l'oblige valablement, et ne forme avec ce dernier qu'une seule et même personne; qu'ainsi, et sous ce rapport, l'obligation du mandalaire, dans les limites de son mandat, est une obligation directe et personnelle, qui lie le mandant, lequel a donné ou est supposé avoir donné ses pouvoirs pour faire ce qu'il eût fait lui-même ;-Que, si le législateur s'était borné là, le mandant n'eût été responsable que des faits de son préposé; Mais que la lui, par l'art. 1384, a étendu plus loin ses dispositions; qu'elle a prévu les fautes, les délits et quasi-délits du mandataire, et que, dans ce cas, outre l'obligation directe et personnelle contre le mandant, elle a assujetti ce dernier à une responsabilité civile, afin que tous les tiers ne fussent pas préjudiciés par un homme préposé par le mandant; Que ces principes, consacrés par le code civil, se retrouvent dans le code de commerce, dont les art. 216 et 298 ne sont que la reproduction; Que l'art. 298 impose aux armateurs ou propriétaires du navire l'obligation personnelle et directe d'indemniser les chargeurs de la perte que leur a fait éprouver l'affectation ou la vente de leurs marchandises pour les besoins du navire; que cette obligation résulte du mandat que le capitaine a exécuté par suite du pouvoir implicite à lui donné par les armateurs; Que cette disposition, commune aux obligations ordinaires, se trouve modifiée, quant à la responsabilité civile, par l'art. 216 c. com. ; - Que, par l'art. 1384 c. civ., la responsabilité est illimitée; qu'elle est au contraire restreinte par l'art. 216 c. com., qui en cas de faute, délit ou quasi délit de la part du capitaine, rend le bien propriétaire du navire civilement responsable de ses faits pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition, mais qui affranchit les armateurs de cetter esponsabilité en abandonnant le navire et le fret; - Qu'ainsi, ce n'est que dans le cas de responsabilité civile que l'abandon du navire et du fret met les armateurs à l'abri de toutes poursuites; Qu'admettre un système contraire, ce serait confondre deux choses essentiellement distinctes, que les codes civil et de commerce dans des titres et des articles séparés ont pris soin de signaler, l'obligation personnelle et la responsabilité civile; - Que l'obligation personnelle du mandant s'étend à tout ce qui fait l'objet du mandat; - Que la responsabilité civile commence lorsque le mandataire, par sa faute, sa négligence ou son impéritie, n'a point fait ce que son mandat exprès ou tacite lui prescrivait; —Que lo capitaine réunit dans sa personne un double caractère ; Qu'il est d'abord le préposé et le mandataire de l'armateur pour faire, dans l'intérêt général, tout ce qui ce dernier ferait lui-même, s'il n'était pas remplacé par un homme le plus souvent de son choix;- Que le capitaine est en outre le dépositaire et le surveillant des marchandises des chargeurs, de la conservation desquelles il doit particulièrement s'occuper ;-Qu'en sa qualité de préposé de 1 armateur, le capitaine l'oblige ainsi et de la manière que tout mandataire oblige son mandant; qu'ainsi, et lorsque le capitaine n'agit que dans les limites de son mandal, l'armateur est tenu de ses faits et doit payer les sommes que le capitaine, en cette qualité, s'est obligé de rembourser, sans que son mandant puisse s'en affranchir en abandonnant le navire et le fret;-Qu'il n'en est pas de même si le capitaine, dépositaire et gardien des marchandises, en perd quelques-unes, en laisse avarier d'autres, ou commet d'autres fautes; que, dans ces bypothèses, il en répond personnellement; - Mais que, comme c'est par l'armateur qu'il a été choisi, et que c'est par suite de ce choix que les chargeurs ont confié leurs marchandises au capitaine, avec affectation du navire aux réparations civiles qui pourraient leur être dues, l'armateur devient civilement responsable des faits et des fautes du capitaine; responsabilité non illimitée telle qu'elle est prononcée par l'art. 1384 c. civ., mais restreinte dans l'intérêt du commerce maritime par l'art. 216 c. com., qui, dans ce cas seulement, permet à l'armateur de se dégager de cette obligation en abandonnant son navire et le fret; - Qu'en adoptant le système contraire, il produirait cette conséquence, que les armateurs, soit que le capitaine ait agi dans les limites de son mandat, soit qu'il ait commis des fautes ou un délit, se trouveraient dans la même position, et s'affranchiraient dans les deux cas de toute resposabilité, par l'abandon du navire et du fret.

Attendu que, lorsqu'un capitaine a vendu les marchandises d'un chargeur pour les besoins du navire, le prix de ces marchandises est dû par les armateurs dans l'intérêt desquels le capitaine par eux préposé a fait la vente;-Que les chargeurs pour lesquels cette vente n'a point été opérée, ne doivent pas perdre le prix de leurs marchandises et être obligés de de contenter du délaissement du navire, délaissement qui. lorsque,

sur le changement qu'afin de se procurer les fonds nécessaires pour subvenir à la conservation et aux besoins spéciaux de ce même changement; et qu'en conséquence, lorsqu'il a emprunté pour subvenir à la fois aux besoins du navire et à ceux du chargement, cet emprunt n'est obligatoire pour les chargeurs, vis-à-vis du prêteur, que jusqu'à concurrence de la portion des

comme dans l'espèce, le navire est perdu, devient illusoire;- Qu'il serait souverainement injuste que le chargeur vit disparaître le prix de ses marchandises, vendues sans son consentement et dans le seul intérêt de l'armateur; Que, si la prétention des armateurs était admise, ils pourraient, à leur gré, mettre à contribution les chargeurs en ne donnant point au capitaine les lettres de crédit ou les fonds nécessaires pour les besoins du navire et de l'équipage pendant la traversée, en le forçant ainsi de vendre ou d'affecter par des prêts à la grosse les marchandises, afin de se procurer des ressources nécessaires, et en offrant ensuite aux chargeurs ou les débris d'un navire naufragé ou peut être d'un navire englouti sous les flots;-Que la loi n'a pas voulu, n'a pas pu vouloir d'aussi étranges conséquences; - Que, lorsque le capitaine n'a fait que ce qui était autorisé, que ce que l'armateur aurait fait lui-même à la place du capitaine, l'armateur dans ce cas est tenu de payer ce que le capitaine a emprunté, sans pouvoir s'affranchir de l'obligation contractée dans son intérêt par son préposé, en abandonnant un navire qui n'existe plus ou qui est sans valeur;

Qu'ainsi, lorsque le capitaine n'ayant pas l'argent nécessaire pour acquitter les dépenses à la charge des armateurs, vend ou affecte les marchandises des chargeurs pour payer les dépenses, les armateurs doivent rembourser le prix de ces marchandises qui ont suppléé au défaut d'argent remis au capitaine pour les besoins du navire et de l'équipage; et dès lors, n'étant pas seulement responsables, mais débiteurs directs et personnels, ils ne peuvent se libérer par l'aban fon; Que si, au contraire, le capitaine excède les bornes de son mandat, s'il contracte quelque engagement non autorisé par la loi, ou s' commet quelque faute, l'armateur, dont il est le préposé, en est civilement responsable, et c'est pour raison de cette responsabilité qu'il a été dérogé par l'art. 216 c. com. aux dispositions illimitées de l'art. 1384. civ.;- Que l'art. 234 c. com., après avoir accordé au capitaine le droit exorbitant de vendre ou de mettre en gage des marchandises jusqu'à concurrence de la somme que les besoins du service exigent, ajoute que propriétaire ou le capitaine qui les emprunte, tiendra compte des mar bandises vendues ;-Que la loi ne dit pas, dans l'art. 234, que le proprié aire du navire ne tiendra compte que subsidiairement et comme civilement responsable des faits du capitaine, mais que le propriétaire tiendra compte comme étant le représentant du propriétaire débiteur; que la loi déclare donc formellement que l'armateur n'est pas seulement civilement responsable des faits du capitaine, mais qu'il est personnellement et directement débiteur envers les chargeurs; Qu'on ne per prétendre que le propriétaire du navire n'est débiteur qu'avec la faculté à lui réservée par l'art. 216 d'abandon ner le navire et le fret, attendu que cette faculté n'est point exprimée dans l'art. 234; qu'elle est, au contraire, formellement écartée par l'art. 298, qui est le complément de l'art. 234;-Qu'en effet, le dernier alinéa de l'art. 298 dispose que, « si le navire se perd, le capitaine tiendra compte des marchandises sur le pied qu'il les aura vendues, en retenant également le fret porté aux connaissements; - Qu'il faut donc de ces expressions, si le navire se perd, tirer cette conséquence naturelle que la perte du navire ne dispense pas de payer aux chargeurs le prix des marchandises vendues par le capitaine; Que l'armateur ne peut s'affranchir de cette obligation par l'abandon, puisque la loi veut que le chargeur soit payé, même dans le cas de perte du navire;- Que c'est ainsi que l'orateur du gouvernement expliquait l'art. 298, lorsqu'il disait « que le capitaine et les propriétaires du navire, qui étaient chargés de pourvoir à ses besoins, avaient contracté une dette individuelle en appliquant les marchandises à l'accomplissement de leur devoir personnel; Qu'ainsi, d'après le texte précis et formel de l'art. 298, l'armateur ne peut se dispenser de payer les marchandises, quoique le navire ait péri; Que, dès lors, il serait absurde que l'armat ur fût admis à dire aux chargeurs, en vertu de l'art. 216, qu'il leur abandonne, pour les payer, un navire qui n'existe plus, puisque, d'après l'art. 298, il doit les indemniser nonobstant la perte du navire;

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Attendu que l'armateur oppose en vain que l'art. 216, qui fait cesser sa responsabilité par l'abandon du navire et du fret, s'applique à tous les faits du capitaine, que lo mot faite est un terme générique qui comprend les faits, quels qu'ils soient, tout aussi bie que les fautes, délits ou quasi-délits, erreur que les premiers juges ont accueillie;-Attendu que, pour déterminer le sens du mot faits, il faut examiner son rapport avec l'objet pour lequel il est employé;-Que l'art. 216 c com. est une exception à l'art. 1384 c. civ., en ce sens que la responsabilité de l'art. 1384 est indéfinie, tandis qu'elle est restreinte par l'art. 216, dans l'intérêt du commerce maritime; — Que comme, suivant l'art. 1384, on est civi-, lement responsable du fait de ses préposés, de même aussi, d'après l'art. 216, l'armateur est responsable civilement des faits du capitaine; mais responsabilité civile qui n'a lieu que pour les fautes civiles et quasi-delits,

sommes empruntées qui a été appliquée audit chargement (Rennes, 25 juill. 1831) (1).

451. Le capitaine peut emprunter à la grosse, même après que le navire, déclaré innavigable, a été vendu, car l'innavigabilité et la vente du bâtiment n'empêchent pas que le capitaine ne soit dans l'obligation de veiller à la conservation et au transport

et qui ne peut faire disparaître l'engagement direct et personnel contracté au nom de l'armateur par le capitaine qui le représente ; Qu'il suit de là que les premiers juges ont fait une fausse application de l'art. 216, et qu'ils ont violé les art. 234 et 298 c. com.;

Faisant droit su l'appel, met l'appellation et ce dont est appel au néant, au chef où les premiers juges ont décidé que l'armateur pouvait se libérer par l'abat don du navire et du fret des obligations contractées par le capitaine Dri aot dans les limites de son mandat; réformant, condamne Heurtault, ar corps et biens, à payer aux assureurs particuliers de Paris, aux mains de Béranger, leur secrétaire, la somme de 5,250 fr. 88 c., avec les inté êts à partir du 22 oct. 1828, jour du payement de la lettre de grosse, et

--

Du 29 déc. 1831 -C. de Rouen.

(1) Espèce: (velustelle, etc. C. Bugault.)-Le sloop le Jeune-Louis était allé prendre à Dunkerque un chargement pour Saint-Malo. Forcé, pour cause d'avaries, de relâcher à Cherbourg, le capitaine Thoreux s'y fit autoriser par justice à emprunter à la grosse 2,140 fr. pour les besoins du navire et du chargement. Il s'obligea personnellement à l'exécution du contrat de grosse.- Avant que le navire reprit la mer, le capitaine Thereux fut remplacé par Bugault, qui, sur la demande du prêteur à la grosse, déclara au pied d. l'acte en avoir pris connaissance et s'engager solidairement à en res plir les conditions. A l'arrivée du navire à SaintMalo, le capitaine Sugault laissa les chargeurs ressaisir leurs marchandises. Un jugen ent ordonna la vente du bâtiment, et l'on procéda à un règlement d'avarie. Le porteur du billet de grosse forma, contre l'armateur, les charge rs et les capitaines Thoreux et Bugault, une action dans laquelle inter inrent les assureurs. 18 août 1850, jugement qui accueille les conclusions formées par le demandeur contre l'armateur et contre le capitaine 1 horeux; rejette celles formées contre le capitaine Bugault, sur le motif que celui-ci ne s'est point obligé personnellement, mais en nom qualifié seulement. A l'éga 'd des chargeurs, le jugement décide que l'emprunt n'était obligatoire pour eux que jusqu'à concurrence de la portion pour laquelle ils étaient com ris dans le réglement d'avaries, et il condamne les assureurs à indemnise les chargeurs de ladite contribution. Arrêt. - Appel du porteur de l'acte de gre ise. LA COUR; Considérant, en drit, que l'art. 234 c. com., en autorisant le capitaine pendant le cours du voyage, à emprunter à la grosse sur le corps et quille de son navire, pour nécessite de radoub et l'achat de victuailles, à mettre en gage ou à vendre des marchandises jusqu'à concurrence de la somme que les besoi is constatés exigeaient, a fixé les li mites des droits que la loi accorde a capitaine pour subvenir aux nécessités de la navigation sans compro nettre les intérêts des propriétaires du chargement, puisque le même art. 234 dispose immédiatement que les armateurs, ou le capitaine qui les représente, fait tenir compte aux chargeurs des marchandises vendues, d'après le cours des marchandises de même nature et qualité, dans le lieu de la décharge du navire à l'époque de son arrivée;--Considerant, en droit, d'un autre côté, que le capitaine est tenu, par une suite naturelle des obligations de la charte-partie, et par l'absence des propriétaires, de pourvoir à la conservation du chargement, dans l'intérêt des chargeurs; d'où il suit qu'il est pour ainsi dire leur mandataire forcé; mais qu'il résulte seulement de ce derier point de vue que les droits du capitaine doivent se borner à faire, dans l'intérêt des chargeurs, les emprunts soit à la grosse ou autrement, qui seraient juges indispensables pour la seule conservation et les besoins speciaux du chargement, mais ne sauraient s'étendre jusqu'à affecter indistinctement la totalité du chargement à des emprunts à la grosse, principalement pour les besoins du navire;

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Considérant qu'il suit de ces principes, appliqués aux faits de la cause, que le capitaine Thoreux n'a pu, sans excéder les pouvoirs que la loi lui donnait, s'écarter des limites tracées par elle, pour subvenit aux besoins de son navire, et y substituer un mode d'emprunt plus onéreux pour les chargeurs, et qui, dans toute hypothèse, n'a pu les obliger qu'autant qu'il a eu lieu dans l'intérêt du chargement; - Consi dérant, en droit, qu'on peut, non-seulement se rendre caution du débiteur principal, mais encore de celui qui l'a cautionné; - Considérant, en fait, que le capitaine Bugault déclare, au pied de l'acte de grosse dont est cas, qu'il a pris connaissance du contrat à la grosse ci-dessus, el qu'il s'engage solidairement à en remplir toutes les condition; - Considérant, en droit, que cet engagement solidaire constitue contre le sieur Bugault une obligation personne a laquelle il s'est volontairement soumis; Donne défaut contre le sieur Bugault...;- Le condamne, par voie sa lidaire, à payer à l'appelant la totalité de l'acte de grosse dont il s'agit, sauf son recours; A l'égard des autres parties, ordonne que le jugement dont est appel sortira son plein et entier effet, etc. » Du 25 juill 1831.-C. de Rennes, 1re ch.-M. Denis Duporzon, pr.

do la cargaison, et de payer les loyers de l'équipage, ainsi que les frais occasionnés par le sinistre (Rouen, 29 déc. 1831, aff. Heurtault, V. no 449).

grosse contracté par le capitaine, est justiciable du même tribunal que ce dernier, et peut, dès lors, comme celui-ci, être assigné devant le juge du lieu où le prêt devait être remboursé (Req., 14 mai 1833) (1).

456. Le capitaine peut mettre en gage ou vendre des mar

458. Pour la validité d'un emprunt à la grosse contracté par le capitaine, il n'est pas exigé que la nécessité de l'emprunt ait été reconnue par délibération de l'équipage; il suffit que la né-chandises, soit qu'elles appartiennent à l'armateur, soit qu'elles cessité du radoub ou des achats de victuailles ait été constatée par un procès-verbal signé des principaux de l'équipage (Rouen, 29 déc. 1831, aff. Heurtault, V. no 449).

453. La circonstance que le propriétaire du navire aurait formellement interdit au capitaine d'emprunter à la grosse, n'empêcherait point que le prêteur qui aurait ignoré cette prohibition, n'eût action contre le propriétaire, si d'ailleurs les formalités requises par l'art. 234 avaient été remplies (arg. de la loi 1, §5, I., De exercit. act. (Delvincourt, loc. cit.; Boulay-Paty, t. 2, p. 74). V. plus haut, nos 363 et suiv., 473.

454. Alors même que le prêt aurait été effectué dans un lieu où l'emploi ne pouvait en être fait, il suffit que cet emploi pût être fait dans un autre lieu, et que les formalités prescrites aient té observées, pour que le prêteur de bonne foi ait action contre Le propriétaire (Boulay-Paty, t. 2, p. 74). De même, celui qui a prêté au capitaine plus qu'il n'était nécessaire pour les besoins du navire, a néanmoins action contre les propriétaires, même pour cet excédant, pourvu que l'excédant dont il s'agit ne fasse pas, par sa quotité, présumer une collusion (mérig., Contr. à la grosse, chap. 4, sect. 8, § 2; Boulay, loc. cit.).

455. L'armateur assigné en remboursement d'un prêt à la

(1) Espèce: - (Chicallat C. Levavasseur.) Le 11 nov. 1830, le Lavire la Providence, capitaine Bacon, part de Cette avec un chargement de vins pour le Havre et Rouen. Le 8 décembre, il est forcé de relacher à Alméric pour réparer une voie d'eau, réparation qui fut faite au moyen d'un emprunt de 9,000 réaux. Forcé de relâcher ensuite à Malaga, le capitaine s'y fait autoriser par le consul de France à emprunter les sommes nécessaires pour mettre le navire en état de continuer sa route.

Ces sommes étant très-considérables, l'armateur Chicallat invita par plusieurs lettres son capitaine à faire déclarer le navire en état d'innavigabilité relative. Celui-ci, toutefois, ayant trouvé à emprunter, fit réparer le navire et arriva au Havre le 15 juill. 1831. Levavasseur, commettant de la maison Reins, de Malaga; qui avait fait, par son ordre et pour son compte, le prêt à la grosse, assigne Bacon devant le tribunal du Havre. 19 nov. 1831, jugement qui condamne ce dernier au payement de 42,461 fr. 51 c., montant du prêt et intérêts maritimes, ensemble aux intérêts de terre courus depuis l'arrivée du navire au Havre. -21 novembre, saisie du navire, dont Chicallat fait l'abandon aussitôt qu'il est instruit des poursuites (c. com. 216).

Nonobstant cet abandon, Levavasseur assigne Chicallat devant le tribunal de commerce du Havre, pour entendre prononcer contre lui la commune exécution du jugement du 19 novembre. Déclinatoire de Chicallat, et, le 14 avril 1852, jugement qui l'accueille :-« Attendu qu'il est de regle que le défendeur soit, en matière personnelle, assigné devant le juge de son domicile; - Attendu que, si le législateur a cru devoir, en matière commerciale, apposer quelques modifications à ce principe général, il faut, pour être admis à les invoquer, se trouver dans l'un des cas expressément prévus par la loi; - Attendu que la lettre de grosse, souscrite par Bacon cadet, capitaine du navire la Providence, était payable au Havre; Attendu que Levavasseur, qui en était porteur lors de l'échéance, a assigné en payement Bacon cadet devant ce tribunal, et qu'il a obtenu condamnation; Attendu que, si, comme l'articule Levavasseur, cette condamnation prononcée contre le capitaine de la Providence, était censée l'être contre l'armateur lui-même, l'action actuelle n'aurait évidemment d'autre but que de faire décider par ce tribunal comment devrait s'exécuter son jugement du 19 nov. dernier ; Attendu qu'aux termes de l'art. 442 c. pr., les tribunaux de commerce ne connaissent pas de l'exécution de leurs jugements; - Attendu, enfin, que si le sieur Levavasseur, qui a déjà obtenu condamnation pour le payement de la lettre de grosse, contre celui qui l'a souscrite, base sur l'art. 216 c. com. sa demande actuelle, il s'agit alors uniquement de l'exercice d'une action en responsabilité, et, conséquemment, d'une action principale dont l'art. 59 c. pr. n'attribue la connaissance qu'au juge du domicile du défendeur.>>

Appel de Levavasseur, et, le 26 juill. 1832, arrêt infirmatif de la cour de Rouen qui condamne Chicallat à payer, par corps, à Levavasseur, le montant de sa demande : «Attendu que, d'après l'art. 420 c. pr., le demandeur peut assigner le défen leur devant le tribunal dans l'arrondissement duquel le payement doit être fait;-Attendu que la lettre de grosse souscrite paz e capitaine Bacon était stipulee payable au Havre, et que, des lors, le sieur Levavasseur a pu assigner le sieur Chicallat devant le triLuna de commerce du Havre, pour le faire condamner au payment de

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appartiennent à d'autres chargeurs, la loi ne distingue pas. Le tribunal de commerce de Marseille demandait que cela fût exprimé; mais la généralité des termes de la loi suffit pour écarter toute incertitude. Toutefois, le capitaine, obligé de vendre des marchandises, doit vendre celles de l'armateur, s'il peut le faire facilement, de préférence à celles des affréteurs (Conf. Pothier, Charte-partie, n°33).

457. A la différence de l'ordonnance de 1681, la loi nouvelle n'a pas autorisé le capitaine à mettre des apparaux en gage pour emprunter, dans la crainte qu'il n'abusât de cette faculté et ne compromît le salut du navire (Locré, t. 3, p. 115).

458. Dans le projet, on avait ajouté à la disposition finale de l'art. 234 que les propriétaires sont débiteurs des sommes empruntées. Le tribunal de commerce de Marseille fit observer que les sommes prêtées durant le cours du voyage ne doivent avoir d'autre garantie que la valeur du navire, des marchandises appartenant aux propriétaires, et du fret acquis, et que, dès lors, il convenait de retrancher une disposition d'après laquelle le prêteur pourrait se croire en droit d'exercer ses poursuites sur les autres biens des propriétaires. - La disposition a été en conséquence supprimée.

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cette lettre de grosse; Attendu que le sieur Levavasseur, qui avait deux débiteurs, le capitaine souscripteur de la lettre de grosse, et le sieur Chicallat, que représentait le capitaine, a pu les assigner devant le même tribunal pour les faire condamner tous deux au payement de la somme réclamée, ce qui écarte le moyen tiré de l'art. 442 c. pr., aux termes duquel les tribunaux de commerce ne peuvent connaître l'exécution de leurs jugements; que le but de l'action du sieur Lavavasseur a été d'obtenir, ainsi qu'il en avait le droit, condamnation, tout a la fois, et contre le capitaine et contre l'armateur, qui n'avait pas été ion Îlement condamné par le premier jugement, et que ce aron ne pouvait lui être refusé, en déclarant son action incompétemment portee devant le tribunal de commerce du Havre; Au fond Attendu que le fond de la contestation est en état de recevoir jugement, et vu l'art. 473 c. pr.; Attendu que le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par son mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné (c. civ. 1998); que ce n'est que dans le cas d'une responsabilité civile que l'abandon du navire et du fret met l'armateur à l'abri de toutes poursuites (c. com. 216); qu'il résulte de l'art. 234 c. com., qui se rapporte à l'art. 1998 c. civ., que l'armateur n'est pas civilement responsable, mais débiteur direct et personnel; - Attendu encore que le sieur Chicallat a connu tous les événements qui ont eu lieu à Alméric ainsi qu'a Malaga, et qu'il a fait lui-même les démarches nécessaires pour se procurer un prêt à la grosse; que le capitaine Bacon n'a point excédé les limites de son mandat; Attendu enfin, que le sieur Chicallat ne peut conserver dans. ses mains la valeur du navire qu'il a touchée des assureurs, et s'affranchir du payement de la lettre de grosse.»

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Pourvoi de Chicallat. 1° Violation des art. 59 et 442 c. pr., et fausse application de l'art. 420 du même code, en ce que la cour de Rouen a décidé que le tribunal de commerce du Havre était compétent; -2° Violation de l'art. 216 c. com. et fausse application de l'art. 1998 c. civ., en ce que l'arrêt a jugé que l'art. 216 ne reçoit son application que dans le cas de faute du capitaine, et non en cas d'emprunts à la grosse fait par ce dernier dans le cours du voyage. Arrêt.

LA COUR; Vu les art. 1998, 2092 c. civ. 216, 234 et 298 c. com.; --Attendu que le capitaine d'un navire, empruntant dans les cas prévus par l'art. 234 c. com., et avec les formes exigées tant par cet article que par l'art. 311, agit dans les termes de son mandat et oblige directement et personnellement les propriétaires; qu'aucune disposition du code de commerce n'a dérogé à l'art. 2092 c. civ., et que l'art. 216 c. com., se référant à l'art. 1384 c. civ., s'applique seulement aux faits du capitaine dont la responsabilité pèse sur le propriétaire du navire, ce qui n'est pas l'espèce de la cause; - Attendu que, dans l'espèce, il s'agit d'un emprunt fait dans l'un des cas et dans les termes de l'art. 234 c. com.; que, dès lors, le sieur Chicallat était tenu de payer comme le capitaine lui-même, et soumis à la même juridiction, le capitaine pouvant, pour ses emprunts, souscrire des effets de commerce negociables, ainsi que cela résulte de l'art. 313 c. com.; d'où il résulte que, sous le rapport de la compétence comme sous le rapport du fond, loin de violer les lois relatives à la matière, la cour royale de Rouen en a fait une juste application; Rejette, etc.

Du 14 mai 1835.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Mestadier, rap.

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