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sur l'art. 6, tit. 7, liv. 2, de l'ordonnance de 1681; Pothier, Tr. de la charte-partie, no 145; Boulay-Paty, t. 4, p. 440; Pardessus, t. 3, no 736).

faits pour réparer le navire l'Espérance doivent être mis à sa charge particulière, soit qu'on considère son échouement à la Hougue comme purement fortuit, soit même qu'on le considère comme la suite d'événements fortuits, de fortunes de mer, qui avaient rendu sa relâche sur la rade, puis dans la baie, d'une nécessité indispensable;

>> Considérant qu'il est d'usage constant d'allouer au correspondant du navire une commission sur le montant des débours faits pour l'indemniser de ses peines et soins, que celle réclamée par le sieur Lamache, et payée par la dame veuve Pouilly, n'a rien d'excessif; mais que cette commission doit être répartie au prorata des avaries respectives;

» Considérant, sur les intérêts, que cette demande ne saurait être écartée; que les prétentions des réclamateurs n'ont rien de fondé à cet égard; qu'ils l'ont eux-mêmes si bien senti qu'ils ont depuis demandé à les compenser contre les faux frais énormes que leur a nécessités le feu sieur Pouilly; mais qu'ils ne sauraient davantage réussir sous ce rapport; qu'en droit, le mandant doit tenir compte à son mandataire des avances que celui-ci a faites pour son compte; qu'en matière commerciale, toutes avances, quelles qu'elles soient, portent d'elles-mêmes et de suite intérêt; qu'il est constant et avoué par les réclamateurs eux-mêmes, que le feu sieur Pouilly a avancé tous les fonds relatifs aux frais faits au navire et à la cargaison; que s'ils voulaient se dispenser de l'acquit des intérêts, ils pouvaient faire des offres réelles, puis consigner; qu'ils ne l'ont pas fait; qu'ils ne pouvaient cependant ignorer que la loi ne leur offrait que ce seul moyen de s'affranchir du payement qu'ils refusent aujourd'hui; que d'ailleurs la demande qui leur est faite ne leur porte aucun préjudice; qu'ils ont conservé les fonds dans leurs mains ; qu'ils en ont profité, et que ce qu'on réclame d'eux n'est que l'intérêt qu'eux-mêmes ont dû ou pu en retirer; que si des faux frais considérables leur ont été nécessités par le feu sieur Pouilly, ils étaient habiles, lors des diverses instances qui ont eu lieu, à réclamer des dommages-intérêts; qu'ils n'ont formé aucune demande à cet égard; qu'ils ne le peuvent aujourd'hui, lorsque les contestations existantes entre eux ont été vidées par divers jugements et arrêts;

>> Considérant que la somme de 4,850 fr., pour frais de règlement à la Hougue, doit être entièrement rejetée du compte; que le sieur Pouilly ne pouvait ignorer les dispositions de la loi qui lui imposaient l'obligation de le faire dresser au lieu du dernier reste; que d'ailleurs les assureurs et les réclamateurs se sont toujours et constamment opposés à ce qu'il intervint ailleurs qu'au port du Havre; que, par arrêts des 31 mai et 18 août 1821, les cours royales de Rouen et de Caen l'ont ainsi décidé; qu'admettre ces frais en avaries, ce serait non-seulement les faire supporter à ceux contre les intérêts et la volonté desquels ils auraient eu lieu, ce qui ne saurait être, mais même revenir contre les décisions des deux cours souveraines, auxquelles les contestations ont été soumises, et qui ont condamné le sieur Pouilly personnellement aux dépens;

>> Considérant, sur la commission demandée par le sieur Pouilly pour avances de fonds, qu'il ne luf en est dû aucune; qu'il n'est fondé à réclamer autre chose que l'intérêt des sommes qu'il a avancées; que cet intérêt lui est alloué; qu'ainsi la somme de 1,613 fr. 38 c. doit être écartée du compte; Considérant que s'il est de jurisprudence constante, en ce tribunal, d'allouer les frais d'instance en avaries grosses, il l'est aussi de les faire supporter au prorata des avaries respectives, lorsqu'aucuns dommages ou aucunes dépenses ne donnent lieu à contribution; que cette jurisprudence est fondée sur ce principe que l'accessoire suit le sort du principal; qu'il paraîtrait contraire aux règles de la justice, et même à la jurisprudence invoquée, de les admettre, dans l'espèce actuelle, en avaries grosses; qu'il semble et plus juste et plus naturel de les faire supporter au prorata des avaries respectives; que les avaries grosses s'élèvent seulement à sa somme de 2,185 fr. 64 c., tandis que celles particulières au navire et à la cargaison sont d'une importance de 53,976 fr. 85 c.; qu'il est donc vrai de dire que les frais ont eu plus pour objet le règlement des avaries particulières que celui des avaries communes;

>> Considérant sur les frais de magasinage, que si l'intérêt de ses commettants devait faire un devoir au sieur Lamache de louer des magasins au mois pour y déposer les marchandises composant la cargaison du navire l'Espéranee, aucune loi ne lui en imposait l'obligation rigoureuse; que le sieur Pouilly invoque les usages généraux du commerce, qui autorisent à réclamer ainsi les frais du magasinage; que d'abord il est inexact de soutenir qu'on soit apte, pour les marchandises dont il s'agit, à les calculer à tant du kilogramme; qu'ils se règlent, au contraire, en ce cas, à tant du colis; que, d'un autre côté, le sieur Lamache ne pouvait, à son gré, en fixer la valeur, et qu'en les lui payant, tel qu'il l'a fait, le capifaine Soubry a excédé les bornes de son mandat; qu'en allouant pour cet objet les prix déterminés par le tarif de l'entrepôt réel de la ville du Havre, celle des places de commerce de France où le prix du magasinage est le plus élevé, la dame veuve Pouilly se trouve encore très-favorisée, et il en résulte que cet article doit être réduit à la somme de 1,215 fr. 19 c.; > Considérant que la dame veuve Pouilly n'est pas fondée dans la réclamation qu'elle forme d'une somme de 120 fr. 99 c. pour droits payés à

1101. Et d'autre part, il a été décidé, au contraire, et avec raison, ce nous semble, que lorsqu'en effectuant une relâche délibérée pour le salut commun, un navire éprouve des dommages

la douane de Saint-Waest; qu'une des obligations imposées par la loi au capitaine Soubry était d'apporter au Havre les marchandises de son chargement; que le fret entier lui en a été payé; qu'il n'a donc pu, en ne satisfaisant pas à ses engagements, occasionner un excédant de dépenses au chargeur; que cet excédant doit être supporté par celui-là qui l'a né cessité;

>> Considérant enfin, sur la somme de 5,897 fr. 98 c. réclamée pour commission du correspondant, peines et soins au sauvetage, déchargement, etc., des marchandises composant la cargaison, que cette somme est évidemment trop élevée; que l'usage presque général de toutes its places de commerce, et notamment de celle du Havre, n'est que d'allouer 1 pour 100 pour cet objet;

» Considérant, à l'égard de la compagnie d'assurances générales, que les experts nommés par le tribunal de commerce de Valogne, le 9 mars 1820, ont, par leur procès-verbal, constaté les avaries éprouvées par le navire l'Esperance, et évalué les réparations à 44,441 fr. 50 c.; que co procès-verbal a été homologué par le tribunal de Valogne, qui a autorisé le capitaine Soubry à faire faire à son navire les ouvrages mentionnés dans le procès-verbal jusqu'à concurrence de 44,441 fr. 30 c., et ordonné en outre que, dans le cas où, lors desdits travaux, il se découvrirait d'autres avaries, il les ferait constater par les mêmes experts;

>> Considérant que c'est en s'appuyant sur les dispositions de ce jugement que les assureurs prétendent laisser à la charge particulière du navire les sommes qui ont été dépensées au delà des 44,441 fr. 30 c.; Mais considérant que, par leur signification en date du 21 avril 1820, MM. les assureurs ont déclaré ne vouloir prendre droit par l'expertise qui avait été faite; qu'ils en ont eux-mêmes provoqué contradictoirement une nouvelle; qu'après de nombreux débats elle a enfin eu lieu les 5 et 6 sept. suivant; que les nouveaux experts ont confirmé, dans tout son contenu, ce qui avait été fait par les premiers; que seulement ils ont fait monter leur estimation à la somme de 47,735 fr. 50 c.; que ce nouveau procès-verbal a été soumis, le 27 oct. suivant, à l'homologation du tribunal de commerce de Cherbourg devant lequel les parties avaient été renvoyées; · Considérant que MM. de la compagnie d'assurance ne peuvent invoquer aujourd'hui les actes qu'ils repoussaient d'abord, et qu'ils sont tenus de prendre droit par les mesures qu'ils ont eux-mêmes provoquées;

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» Considérant que le capitaine Soubry ne pouvait, dans aucun cas, outre-passer la dépense fixée contradictoirement entre lui et les assureurs, les 5 et 6 sept; que s'il a réellement dépensé au delà, il doit se l'imputer à faute; qu'il a lui-même provoqué, le 27 oct., l'homologation du dernier procès-verbal; qu'il a fait signifier cette homologation les 6 nov. et 12 déc.; que, dans ses significations, il n'annonce aucunement que la somme de 47,735 fr. 50 c. n'ait pas suffi à l'acquit de ses dépenses; qu'ainsi les frais de réparations doivent d'abord étre réduits à cette der

nière somme;

» Mais, considérant qu'aux termes des conventions des parties, il devait être déduit le tiers pour l'usé, il convient de le retrancher sur les frais de réparations ainsi fixés, à l'exception toutefois des ancres sur lesquelles il ne droit être fait aucune déduction;

» Considérant que les divers motifs développés vis-à-vis de MM. les réclamateurs, tant sur les demandes formées par la dame veuve Pouilly, pour commission sur le montant des débours, intérêts des sommes avancées, frais de règlement à la Hougue, commission demandée pour avances de fonds, que sur la contestation élevée par MM. les réclamateurs, s'appliquent également aux assureurs ; qu'ainsi la commission sur le mon de faire répartir les frais de règlement au prorata des avaries respectives, tant des avaries et l'intérêt des sommes avancées doivent être remboursés mission pour avances de fonds totalement rejetés du compte, et les frais à la dame veuve Pouilly; les frais de règlement à la Hougue, la comde règlement au Havre, supportés au prorata des avaries respectives. Appel par la dame Pouilly. - Arrêt.

LA COUR;

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Attendu qu'il résulte du rapport du capitaine Soubry, que le mouillage délibéré dans la baie de la Hougue eut pour motif la crainte que le navire ne fût pas en état de supporter une nouvelle tempête, crainte légitimement fondée sur les dommages considérables que le navire avait déjà soufferts dans sa navigation antérieure; d'où résultait la échouement, ce qui fut en effet délibéré; nécessité, dans l'intérêt de tous, de recourir à un mouillage ou à un Attendu qu'en exécution de cette première mesure, le capitaine ayant jeté l'ancre sur la rade de la Hougue, le 3 mars, une nouvelle tempête s'éleva le lendemain, vers sept heures du soir, avec une telle violence, qu'il fallut de nouveau pourvoir au salut du navire et de la cargaison, même aux dangers imminents que courait l'équipage; d'où la résolution d'aller chercher le salut commun dans le port de la Hougue, résolution dictée par la crainte de perdre corps et biens, et que ce cas impérieux, justifié par un acte authentique, ne permet pas de supposer que le capitaine cherchait seulement l'occasion de remplacer ses voiles perdues; Attendu que les événements qui ont

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dans son corps et son gréement, ces dommages sont avaries simples:-« Attendu que tout dommage, pour être considéré comme avarie commune, doit être la suite immédiate de la volonté de l'homme; que la détermination prise par l'équipage de relâcher pour le salut commun, était une mesure de précaution qui pouvait s'opérer sans que le navire éprouvât le moindre dommage; que si, en entrant dans le port de relâche, le navire a touché, et, par suite, a éprouvé des avaries dans son corps et son gréement, cet événement, qui ne pouvait avoir été prévu ni délibéré par l'équipage, ne saurait être considéré que comme une simple avarie particulière aux objets qui peuvent avoir été endommagés par suite de cet accident » (trib. de com. de Marseille, 28 août 1828, aff. Buonomo).

1102. Cette dernière décision a été aussi consacrée par la cour suprême. qui n'a vu également qu'une avarie particulière au navire dans l'échouement survenu à l'entrée du port où s'effectuait, après délibération motivée, une relâche exigée par l'intérêt commun, quand cet échouement est dû à un accident de mer fortuit et non prévu par la délibération de l'équipage (Rej., 2 août 1841 (1). Conf. MM. Horson, Quest. com., t. 2, p. 144, et Frémy, Études de droit com., p. 206).

retardé jusqu'au lendemain, 5 mars, l'entrée du navire dans le port, sont un effet fortuit de la tempête contre laquelle ce capitaine a été obligé de défendre tous les intérêts; qu'enfin il y est entré, et que, par suite des mesures qu'il a sagement prises, la cargaison a éprouvé peu d'avaries; de sorte qu'au lieu de blâmer la conduite du capitaine, les réclamateurs doivent se féliciter de sa prévoyance; qu'ainsi, il est de toute justice qu'ils contribuent aux frais, pertes et dommages que toutes ces mesures ont occasionnés, ce qui est conforme aux dispositions de la loi précitée;

Considérant, sur le neuvième chef (relatif à la compagnie d'assurance), que l'estimation a dû faire la règle du capitaine, et qu'il n'a pas dû se permettre de payer 4,000 fr. au delà, sans l'ordre de ses commettants; Emendant, quant aux frais et dépenses occasionnés par l'échouement, ordonne qu'ils seront réglés et répartis comme avaries grosses et communes, selon le vœu des art. 400 et 401 c. com.; et en ce qui touche les autres chefs et ceux relatifs aux assureurs, confirme le jugement du tribunal de commerce du Havre.

Du 19 juin 1826.-C. de Rouen, 1 ch.-M. Lecomte, pr.

(1) Espèce: — (Vandalle et Bommelaer C. Lafon.) — Le 11 nov. 1836, le navire la Fortune, capitaine Petit, quitte Dunkerque avec une cargaison pour Celle. Le 13, une violente tempête se déclare. Après délibération, le capitaine et l'équipage décident qu'on gagnera le port de Calais. Près de toucher au port, par l'effet d'un grain terrible et imprévu, le navire échoue sur le Banc-du-Diable. Des réparations ont été faites au navire.Vandalle et Bommelaer, successeurs du capitaine Petit, prétendent faire contribuer au règlement des avaries Lafon, consignataire de la cargaison. Ils soutiennent que, dans l'espèce, les avaries sont des avaries communes dans le sens de l'art. 400 c. com., § 8, in fine; car la résolution de relacher à Calais a eu pour motif avoué le bien et le salut communs ; dès lors, tous les dangers prévus ou non prévus sont acceptés par les délibérants; lous les dommages qui se produisent dans l'exécution, et comme conséquence de cette résolution, sont avaries communes. Lafon répond qu'on confond deux choses distinctes. La résolution, dit-il, n'a porté que sur la relâche à Calais et nullement sur l'échouement, événement qu'un cas fortuit a seul fait réaliser. Il suit de là que les avaries sont particulières la charge exclusive du navire.

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14 sept. 1857, jugement du tribunal de commerce de Cette qui rejette les prétentions des capitaines du navire, par les motifs suivants : « Considérant que les art. 400 et 403 c. com. déterminent d'une manière non équivoque la nature et la classe des avaries; - Considérant que du rapport du capitaine Petit, il résulte que son navire éprouva, le 13 novembre, une avarie particulière dans ses voiles, et notamment dans les ferrures de son gouvernail; Attendu que ces avaries ont pu déterminer la délibération prise d'entrer dans le port de Calais, puisqu'elles semblent être, selon les termes du rapport, une des causes de la situation périlleuse où se trouvait le navire; Attendu, d'ailleurs, que mettant de côté cet incident, la délibération d'un capitaine et de son équipage, prise en pleine mer, au milieu d'une tempête, à l'effet de gagner un abri ou un port pour le salut commun, ne peut déterminer à l'avance la classe ou la nature des avaries que le navire pourra éprouver; qu'admettre un pareil principe, serait méconnaître la loi, la jurisprudence maritime, ouvrir la porte à tous les abus, et laisser aux capitaines la faculté de faire admettre en avaries grosses ou communes tous les dommages qui pourraient les frapper dans le cours de leur navigation; Altendu que la seule intention du capitaine Petit était de gagner le port de Calais pour fuir la tempête et mettre à l'abri son navire, son équipage et son chargement; qu'il n'avait pas pris la détermination de s'échouer sur le Banc-du-Diable, comme on Pa soutenu, et comme le dementent lës termed mémén du rapport de mér,

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1103. Il est sans difficulté. d'après ce qui précède, que les dommages soufferts par la cargaison par suite de l'échouement volontaire du navire, et les dépenses extraordinaires de sauvetage, mise en magasin, transport, etc., doivent entrer en avarie commune (trib. de com. de Marseille, 28 avr. 1834, aff. Razoulx); —Qu'il en est de même des pertes, dommages et dépenses qui proviennent immédiatement et directement du déchouement opéré pour le bien et le salut commun du navire et de la cargaison, quoique l'échouement antérieur ait été purement fortuit (trib. de com. de Marseille, 15 avr. 1828, aff. Guignard);—Et que, pareillement, les frais de déchouement et de remorque du navire échoué, opérés avant le débarquement de la cargaison, sont avaries communes (trib. de com. de Marseille, 26 nov. 1833, aff. Farran).

Au surplus, le capitaine d'un navire échoué, ne doit pas dépasser, dans les dépenses de réparations, le montant de l'evaluation fixée par des experts contradictoirement nommés entre les intéressés. En cas d'infraction à cette règle, il ne peut mettre cet excédant à la charge des réclamateurs et assureurs (Roueu, 19 juin 1826, aff. Pouilly, V. no 1100).

1104. Dommages quelconques soufferts volontairement pour puisqu'ils disent que le navire fut porté, par l'effet d'un grain terrible et imprevu, sur le susdit banc; Attendu que rien ne prouve que, dans la situation où se trouvait le navire la Fortune, relativement au port de Calais, il fallut nécessairement échouer sur ledit banc pour atteindre ce port, ou se perdre; d'où il résulte que l'échouement du navire ne dérive pas d'une volonté humaine, n'est point un événement prévu et recherché, mais, au contraire, un événement imprévu, un cas fortuit et de force majeure; Attendu que cet événement seul détermine la nature et la classe des avaries, selon les art. 400 et 403 c. com...»

Appel par Vandalle et Bommelaer, et le 25 déc. 1837, arrêt de la cour de Montpellier, ainsi conçu : — « Attendu que la loi, sainement interprétée, ne déclare avaries communes que celles qui sont le résultat nécessaire et la conséquence immédiate de la volonté de l'homme, constatée par une délibération de l'équipage;-Attendu que le talonnement et l'échouement du navire la Fortune sur le Banc-du- Diable ont été le résultat fortuit et non prévu d'un accident de mer, et que, dès lors, les dépenses qu'il a occasionnées ne peuvent pas être considérées comme avaries communes;-Et adoptant les motifs dénoncés dans le jugement dont est appel; - Confirme. »

Pourvoi. Pour violation des art. 400 et 403 c. com. Dans l'esprit de la loi, manifesté tant par les dispositions diverses de l'art. 403 que des art. 268, 422 et 428, tout dommage qui est la conséquence d'une mesure adoptée dans un cas de nécessité et pour le salut commun, doit être supporté à la fois par la cargaison et le navire. Peu importe que ce dommage soit l'effet d'un événement imprévu arrivé dans l'exécution de cette mesure et qu'il n'atteigne que le navire en particulier, ou bien les marchandises; ce dommage partiel et imprévu n'en a pas moins pour cause le salut commun, et cela suffit pour lui attribuer le caractère d'une avarie grosse. On répond que tout dommage particulier causé par cas fortuit et fortune de mer doit être classé parmi les avaries particulières, alors même qu'il serait survenu pendant le trajet à parcourir pour arriver à une relâche délibérée pour le salut commun; que la délibération de l'équipage n'a pour effet d'attribuer le caractère d'avaries grosses à des avaries particulières qu'autant qu'elle a prévu le dommage et qu'on s'y est volontairement exposé pour échapper à un danger plus grave (art. 400 c. com.); que, si, au lieu d'un dommage volontaire, prévu par la délibération ou étant la conséquence inévitable de cette délibération il s'agit d'un dommage accidentel, arrivé même dans le cours de l'exécution de la mesure adoptée, mais qu'oo a cherché à éviter au moment où il est survenu, c'est une avarie particulière, parce que la volonté de l'homme, loin de la causer, a cherché à s'y soustraire pour atteindre un autre but qu'elle s'était proposé; quo cette interprétation du code de commerce est conforme à son texte et à son esprit (art. 400, § 8); que ce code, sous ce rapport, a innové à l'ordonDance de 1681, et qu'ainsi l'opinion des anciens auteurs est sans influence sur la question. · Arrêt. LA COUR; Attendu qu'il ne résulte pas des faits, tels qu'ils ont été appréciés par l'arrêt attaqué, que les avaries éprouvées par le navire la Fortune, lors de son échouement, aient été la conséquence et le résultat de la délibération prise dans l'intérêt commun du navire et de la cargaison, de relâcher au port de Calais; - Que l'arrêt et le jugement du tribunal de commerce de Cette, dont il a adopté les motifs, attribuent au contraire l'échouement à un accident de mer fortuit et non prévu; - Attendu qu'en jugeant, dans ces circonstances, que les avaries causées au navire la Fortune par son échouement, ne pouvaient être rangées dans la classe des avaries grosses et communes et devaient rester à la charge des propriétaires de ce navire, la cour royale de Montpellier n'a point violé les art. 400 et 403 c. com., ni aucune autre disposition de loi; - - Par ces motifs;-Rejette, Du 2 août 1841.-G. G., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Thil, rap.-Laplagne Barrio, 1or av: gén:, ai menfisGoudard at Cadinieres, avi 66

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le salut commun. -Tous ces dommages, quoique non spécialement désignés dans l'énumération purement démonstrative de l'art. 400 c. com., sont avaries communes. Tels sont, par exemple, les dommages résultant du forcement des voiles, délibéré et opéré pour le salut commun, et dans le but de prévenir, en évitant la côte ou les écueils, de plus grands malheurs que la perte d'une partie des marchandises ou des agrès du navire (Rouen, 3 mai 1827, aff. Combole C. N...; Conf. Delvincourt, t. 2, p. 258; Dageville, t. 4, p. 25; Pardessus, no 738).

1105. Mais le dommage résultant du forcement des voiles, même délibéré et opéré pour le salut commun, ne constitue qu'une avarie particulière à la charge du navire, lorsque, d'une part, cette manœuvre a été exécutée pour arriver au port de destination, et lorsque, d'autre part, elle a paru la seule praticable, à

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(1) Espèce: - (Prémuda C. Devette.) — Le navire autrichien l'Istro était parti de Marseille avec un chargement de grains à destination de Dunkerque. Après une traversée assez heureuse, il se trouvait en rade devant ce port, attendant la marée, lorsqu'il fut surpris par un violent ouragan qui provoqua une délibération de l'équipage, dont le rapport du capitaine rend compte de la manière suivante: « Il fut résolu, malgré l'ouragan et la difficulté qu'il y avait de faire le port, de s'y réfugier, pour le salut commun du navire et de la cargaison, plutôt que risquer une relâche à Ostende ou à Flessingue, qui présentait une perte presque certaine, devant franchir les bancs; en conséquence, on força de voiles pour atteindre le port, ne voulant pas non plus risquer de mouiller, attendu que l'ouragan était à son comble: cette manœuvre réussit; mais le capitaine perdit, presque à l'entrée du port, son petit hunier, sa brigantine, l'artimon et son grand foc; toutes ces voiles furent enlevées et perdues, et les autres fortement endommagées; faisant route pour l'intérieur du port, et arrivé à la hauteur de l'écluse de chasse, un grain frappa à bord avec une telle violence, que le navire vint dans le vent et s'échoua près de la première balise, passé le radier de l'écluse, avec une grande violence, et monta haut sur le sable. >>

L'expert chargé de régler ces avaries les classa en avaries communes. Mais, sur la poursuite des chargeurs, elles furent déclarées avaries particulières au navire, par jugement du tribunal de commerce de Dunkerque, du 26 oct. 1842, ainsi conçu: «Considérant que le capitaine Prémuda s'était engagé à conduire à Dunkerque le navire l'Istro et sa cargaison, et que, quelles que pussent être les chances inhérentes aux longues traversées, il était tenu à accomplir ladite obligation; - Considérant que vainement, dans le passage susrelaté de son rapport, le capitaine déclare qu'après délibération, le pilote résolut, de concert avec l'équipage, pour le salut commun, de faire route pour le port de Dunkerque ; que cette décision n'a pu donner lieu qu'à des avaries particulières, par le double motif, 1° que, d'une part, les vents, malgré leur violence, étant favorables, il eût été contraire à la prudence que le navire mouillåt ou qu'il relâchat à Flessingue ou à Ostende, au risque de se perdre corps et biens sur les bancs; et 2° d'autre part, que le seul parti que le capitaine devait prendre, et qu'il a pris, consistait à poursuivre sa navigation, en faisant route directement pour son port de destination; qu'en agissant ainsi, le capitaine, ne déviant pas de sa route, n'a couru aucune autre espèce de dangers que ceux auxquels l'exposait le voyage qu'il s'était obligé à effectuer; Attendu que, dans ces circonstances, le navire étant à la cape, le développement ou le forcement de voiles combiné, en raison de la tempête, étant une condition indispensable pour faire le port, les pertes et dommages causés à la voilure par cette manœuvre ne peuvent avoir que le caractère d'avaries particulières, puisque l'entrée au port de destination à l'effet de laquelle ladite manœuvre a été opérée, ne constitue elle-même qu'une avarie particulière ;-Qu'il importe de remarquer que, malgré ces pertes et dommages, le navire l'Istro continua de naviguer; Qu'il appert ensuite de ladite déclaration que, parvenu à la bauteur du musoir de l'écluse de chasse, le navire fut frappé par un grain très-violent qui le fit échouer; - Considérant que ce grain et l'échouement qu'il a produit sont des cas purement fortuits et de force majeure, auxquels la volonté de l'homme est restée complétement étrangère; que par conséquent ledit échouement et les diverses avaries qui en sont résultées constituent des avaries particulières et non des avaries comConsidérant, par suite de ce qui précède, que le navire et le chargement doivent supporter les frais et dépenses qui y sont spécialement relatifs ; Le tribunal déclare avaries particulières au navire, 1o les pertes et dommages qu'il a éprouvés dans le cours de sa traversée de Marseille au port de Dunkerque; et 20 avaries particulières au chargement, les frais d'expertise et dépenses faites pour sauver les marchandises; En conséquence, déclare nul et de nul effet le règlement d'avaries en litige, en ce qui concerne spécialement les avaries du navire, mal à propos classées, par l'expert-répartiteur, en avaries communes ;Déclare le capitaine Prémuda mal fondé dans ses demandes, fins et conclusions, et l'en déboute, etc. » — Appel. — Arrêt. LA COUR; Adoptant les motifs, etc.;

munes;

Confirme, etc.

Du 11 mai 1843.-C. de Douai, 2 cb.-M. Petit, pr.

raison du danger qu'il y aurait eu à tenter de mouiller ou de relâcher dans un autre port (Douai, 11 mai 1843) (1). La double circonstance que le forcement des voiles avait eu pour but l'accomplissement du voyage auquel le navire était destiné, et non pas une simple relâche dans un port intermédiaire, et que d'ailleurs c'était là le seul parti qu'avait à prendre le capitaine menacé de périls presque inévitables, s'il cherchait à dévier de sa route, était exclusive de l'idée d'une perte que l'équipage auraj' consenti à supporter pour le salut commun.

1106. Le dommage provenant du forcement de voiles et d'un abordage ne constitue pareillement qu'une avarie simple, à à la charge du navire, lorsqu'il est la suite d'une force majeure survenue pendant l'exécution d'une manœuvre opérée pour le salut commun (Bastia, 18 juin 1844) (2).

-

(2) Espèce :- - (Puccinelli C. Rogliano.) — Le capitaine Rogliano, commandant la Bombarde... venant de Livourne à la destination de l'Islerousse, chargée de blé pour le compte de Puccinelli, fut forcé par le temps de relâcher dans la rade de Sainte-Marie au cap Corse ou se réfugièrent aussi deux autres bâtiments. La violence du vent S.-0. fit chasser ces bâtiments sur leurs ancres, et il y eut abordage qui coûta quelques dégâts à la coque de cette bombarde. Le capitaine Rogliano, après avoir filé son câble jusqu'au bout, crut prudent d'abandonner le mouillage laissant son ancre à la mer, et fit route pour l'ile d'Elbe. Dans la traversée il eut à essuyer d'autres dommages dans la mâture, et il dut faire force de voiles, dont deux furent mises en pièces, pour entrer dans le golfe de Portoferrajo. Là il dut mouiller à proximité d'un autre bâtiment. Mais chassée sur son ancre par une forte mer, la bombarde vint aborder ce navire. L'équipage de celui-ci coupa alors pour son propre salut le câble de la bombarde. Le capitaine Rogliano fit jeter un second ancre, mais chassé par la violence des vagues, il était en danger de périr corps et biens sur des rochers, lorsque, profitant d'un moment de balte, il se décida après délibération, en faisant force de voiles, à aller échouer sur une plage, ce qui lui réussit. La quille seule du bâtiment éprouva quelque dommage, les marchandises furent sauvées, et il ne perdit qu'un seul foc. Mais il dut emprunter à la grosse pour réparer le navire et pour suivre son voyage qu'il acheva heureusement. Arrivé à sa destination, il fit procéder à un règlement d'avaries et prétendit que tous les dommage soufferts indistinctement, soit dans les mouillages, soit pendant la trá versée, soit dans l'échouement, intérêt du prêt à la grosse, nourriture des matelots, devaient être réputés avaries communes. Un jugement du tribunal de commerce de l'Islerousse accueillit cette prétention et condamna Puccinelli au payement de 2,567 fr. pour sa quote part.-Appel de celui-ci. Il soutenait que tous les dommages éprouvés par le navire, y compris ceux de l'échouement, étaient le résultat de la tempête et devaient être supportés exclusivement par l'armateur et le capitaine.—Arrêt (après délib. en ch. du cons.).

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LA COUR; Attendu qu'aux termes de droit ne sont avarie commune que les dommages soufferts volontairement et les dépenses faites après délibération motivée, pour le bien et le salut commun du navire et des marchandises; Attendu que d'après le rapport du capitaine, il n'y a eu de volontaire dans tout le dommage survenu à la bombarde commandée par lui, que l'abandon du câble et de l'ancre au mouillage de Sainte-Marie, alors qu'il a cru prudent de quitter cette rade à cause de la violence du vent, et le dommage souffert par suite et à l'occasion de l'échouement fait après délibération pour sauver le navire, les marchandises et l'équipage.

Que tous les autres dommages éprouvés, soit à Sainte-Marie, soit dans la traversée, soit enfin dans le golfe de Portoferrajo, avant l'échouement, par suite des abordages et des coups de vents, ont été l'effet d'une force majeure et ne constituent par conséquent que des avaries particulières;

Attendu que, d'après les calculs auxquels la cour s'est livrée, en prenant pour base les rapports et expertises déjà faits, les dommages colontaires qui doivent être considérés comme avarie commune, y compris les droits consulaires, expertise les frais judiciaires et les intérêts de la somme empruntée à la grosse pour réparer le navire, s'élèvent à la somme de 1,547 fr. 22 c. que la cour liquide ainsi; que la valeur du blé appartenant au sieur Puccinelli, est de 11,226 fr. 87 c.; celle de la marchandise de Francini, de 877 fr.; que la moitié du navire est de 2,575 fr. a moitié du nolis de 305 fr., ce qui élève la valeur des objets qui doivent contribuer à l'avarie commune à la somme de 14,783 fr. 87 c. et donne une perte d'un dixième et demi pour cent, en raison duquel la part due par Puccinelli est de 1,175 fr.; Celle due par Francini est de 91 fr. 80 c.; Celle de l'armateur de 248 fr. 40 c., et celle du capitaine, pour moitié du prêt, de 32 fr. 02 c.; Ayant tel égard que de raison à l'appel, réforme le jugement attaqué et par nouveau jugé, condamne Puc cinelli, même par corps, à payer à l'intimé la somme de 1,175 fr. pour sa quote part de l'avarie commune, déboute les parties du surplus de leurs conclusions et compense les dépens jusqu'à ce jour.

Du 18 juin 1844.-C. de Bastia.-MM. Colonna d'Istria, pr. Giordian rap.-Sigaudy, av. gén., c. conf.-Casabianca et Benigni, av.

1107. Lorsque le capitaine, à l'approche d'un ouragan, a, soit spontanément, soit par ordre supérieur, éloigné son navire de la rade où il était stationné, on ne doit pas considérer comme avaries communes tous les dommages que le navire a éprouvés en tenant la mer à la suite du déradage, mais seulement ceux qui ont été la conséquence immédiate de manœuvres exécutées ou de sacrifices volontairement faits pour éviter au navire et à la cargaison des dommages plus considérables (trib. de com. de Marseille, 4 déc. 1830).

1108. Le dommage éprouvé dans un combat par le navire est une avarie grosse (Valin, sur l'art. 6, des Avaries; Pothier, des Avaries, no 144; Delvincourt, loc. cit.; Boulay-Paty, t. 4, p. 452). Cependant Émérigon (des Assur., ch. 12, sect. 41), et M. Pardessus (no 737) émettent une opinion contraire. Mais si le dommage souffert pour fuir l'ennemi est avarie commune, pourquoi en serait-il autrement de celui souffert pour le combattre?

1109. La relâche ne constitue pas par elle-même et directement un accident de mer; elle n'est que la conséquence des événements qui l'ont rendue nécessaire; et dès lors c'est par l'appréciation de ces événements que doit être déterminée la qualification de l'avarie de relâche (Rouen, 6 fév. 1843, aff. Imbart, V. no 1123).

1110. Lorsque le capitaine s'est écarté de sa route pour cause d'interdiction du port où il devait relâcher, ou dans le but d'éviter la peste, ou pour déposer à terre des hommes qui en étaient atteints, ou pour échapper à un danger, ou pour réparer un dommage souffert pour le salut commun, les dépenses extraordinaires de cette déviation ou prolongation de voyage, ou de séjour forcé, sont avaries communes. Il en serait de même des frais résultant de ce que le capitaine, arrivé à sa destination, a été obligé, à raison des inquiétudes inspirées à l'autorité locale par l'état de santé de l'équipage, d'aller relâcher ailleurs (M. Pardessus, no 740).

1111. Mais les dommages éprouvés, par suite de fortunes de mer, pendant la déviation ou la prolongation de voyage nécessitée par le salut commun, ne seraient qu'avaries simples, parce qu'ils n'ont point leur cause immédiate dans la mesure prise pour le salut commun (MM. Pardessus, loc. cit..; Dageville, t. 4, p. 31).

1112. Sont encore avaries communes les frais faits pour recouvrer, après le danger, le navire que ce danger avait forcé d'abandonner; les sommes payées pour se procurer une escorte lorsqu'on a eu juste sujet de craindre d'être pris; les dépenses faites pour obtenir main-levée du navire capturé avec son chargement; la nourriture et les loyers de l'équipage pendant la contestation sur la légitimité de la prise, etc. (Pardessus, n° 741.)

1113. Le propriétaire du navire peut réclamer l'intérêt des avances de fonds qu'il a faites ou des sommes qu'il a emprun

(1) Espèce (Hereck-Patrick C. Meyen.)- En l'an 8, le Neptunus, capitaine Meyen, affrété à Almarin en Espagne, et chargé de balles de soude en destination pour Hambourg, fut arrêté par un corsaire français et conduit au port de Fécamp. Là, il excipa de sa neutralité, qu'il prouvait par pièces qui la constataient; mais ses pièces contenant quelques irrégularités, on soutint qu'il était de bonne prise. Une instance s'engagea; elle dura plus d'une année; enfin la prise fut déclarée nulle. Čependant la capture et ses suites avaient occasionné, tant au navire qu'à la cargaison, des dommages considérables. En entrant dans le port de Fécamp, le navire avait touché contre la jetée; une voie d'eau s'était manifestée, par suite de laquelle une partie du chargement avait été détériorée. Après avoir obtenu la délivrance de son navire, le capitaine fit signifier à Hereck-Patrick et consorts, propriétaires du chargement, son compte d'avaries. Les réparations faites au navire et les gages et nourriture de l'équipage jusqu'au jour où le payement entier du compte aurait été effectué, y étaient portés comme avaries grosses ou communes.-Contestation de la part des propriétaires sur ces deux points. Le tribunal de Fécamp jugea que les réparations faites au navire devaient être rangées dans la classe des avaries communes, et que les gages et nourriture de l'équipage devaient être payés jusqu'à l'entière liquidation du compte

d'avarie.

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Appel des propriétaires. Ils ont soutenu que les dommages faits au navire tant par le choc sur la jetée de Fécamp, que par son long séjour dans ce port, étaient des avaries simples ou particulières que le navire

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Les dépenses résultant de toutes relâches occasionnées, soit par la perte fortuite de ces objets, soit par le besoin d'avitaillement, soit par voie d'eau à réparer; 4o La nourriture et le loyer des matelots pendant la détention, quand le navire est arrêté en voyage par ordre d'une puissance, et pendant les réparations qu'on est obligé d'y faire, si le navire est affrété au voyage; - 5o La nourriture et le loyer des matelots pendant la quarantaine, que le navire soit loué au voyage ou au mois;—Et, en général, les dépenses faites et le dommage souffert pour le navire seul ou pour les marchandises seules, depuis leur chargement et départ jusqu'à leur retour et déchargement (Conf., L. 2, § 1, D. De lege rhod.; Guidon de la mer, ch. 5, art. 20; Hanse-Teuton., tit. 8, art. 1; ordon. de Wisby, art. 12; ordon. 1681, tit. des avaries, art. 4).

1115. Il est évident, d'après le no 1 de l'art. 403, que la détérioration que les marchandises ont subie par cas fortuits et fortune de mer, par exemple, par suite d'une voie d'eau occasionnée au navire par une tempête, est une avarie simple à la charge des chargeurs ou propriétaires seuls. « C'est encore une avarie simple, dit Valin, sur l'art. 5, tit. des avaries, que le dommage arrivé aux marchandises par le vice et mauvais état du navire; mais cela n'empêche pas que l'assureur n'en doive répondre. Du reste, la question si le maître ou le propriétaire est tenu de garantir le dommage, dépend du point de savoir si le navire à son départ était en état de faire le voyage, ou s'il n'est devenu défectueux que par le mauvais temps et les coups de vent et de mer qu'il a essuyés dans la route. » (Conf., Emérigon, ch. 12, sect. 39 et 40; MM. Pardessus, t. 2, p. 168; Boulay Paty, t. 4. p. 473).

1116. Les dommages arrivés, par suite de sa capture, à un navire sous pavillon neutre, pris par un corsaire, sont avaries particulières. Ainsi, les chargeurs ne sont pas tenus des dommages occasionnés au navire capturé par un choc sur une jetée, et par le long séjour dans le port où il avait été conduit (Rouen, 6 germ. an 10) (1). Il est évident que ces pertes

seul devait supporter ; Au surplus les appelants consentaient à allouer au capitaine les gages et nourriture depuis l'instant de la prise jusqu'au jour de la délivrance, mais non au delà. Car il est certain, disaient-ils, que si les frais de détention sont dus au capitaine injustement arrêté, ils ne sont dus que pour la durée de la détention. Jugement.

LE TRIBUNAL; - Vu les art. 4 et 5 de l'ord. de 1681; - Considérant, en fait, que les dommages soufferts par le navire le Neptunus proviennent en partie du choc qu'il a éprouvé contre une des jetées du port de Fécamp, mais en beaucoup plus grande partie du dépérissement occasionna par sa longue détention en ce port; - Qu'il n'est pas méconnu que la même cause a fait éprouver aux marchandises dont il était chargé un décroissement sensible de valeur, et que la durée de cette détention a eu sa source dans une contestation portée dans plusieurs tribunaux sur la régularité des titres du capitaine;-Considérant, en droit, que, suivant les art. 4 et 5 de l'ord. de 1681, les pertes ou dommages survenus, soit au navire, soit aux marchandises, par fortune de mer, telles que tempête, prise, naufrage ou échouement, sont avaries simples qui doivent être supportées par les armateurs et chargeurs, chacun séparément; qu'ainsi les propriétaires de la cargaison ne doivent pas plus de contribution aux réparations à faire au navire le Neptunus, par suite de sa capture qui est une fortune de mer, que l'armateur n'en dont aux pertes souffertes par la marchandise, en conséquence du même événement; Considérant que les obéissances passées, sur l'appel, par les propriétaires de la cargaison, de contribuer aux gages et nourriture du capitaine et des gens de l'équi

n'ayant pas eu pour objet le salut commun, ne peuvent être considérées comme avaries grosses; le navire doit seul les supporter, comme il supporterait celles arrivées par tempête, naufrage ou échouement.

1117. L'échouement d'un navire, par suite d'un grain im. prévu qui l'a surpris au moment d'entrer dans le port de destination, est pareillement une avarie particulière au navire. Mais les dépenses faites pour sauver les marchandises doivent être supportées par celles-ci (Douai, 11 mai 1843, aff. Prémuda, V. n° 1105).

1118. La disposition du no 3 de l'art. 403, qui range parmi jes avaries particulières la perte des câbles, ancres, etc., et les dépenses résultant de toutes relâches occasionnées par la perte fortuite de ces objets, par le besoin d'avitaillement ou par vole d'eau à réparer, est la conséquence de l'obligation des proprié taires du navire de fournir, pour le transport des marchandises jusqu'au lieu de leur destination, un bâtiment en état de suppor. ter les accidents ordinaires de la navigation.

1119. Aussi a-t-il été jugé que lorsqu'il a été nécessaire, pour réparer, durant la traversée, les avaries occasionnées au navire par le mauvais temps, de décharger les marchandises les frais de déchargement, de magasinage et de rechargement. constituent, ainsi que les frais de réparation eux-mêmes, un avarie particulière au navire (Req., 2 déc. 1840) (1). Cela es: de toute justice. L'armateur qui reçoit des marchandises en car gaison répond par cela même de la solidité de son navire, el doit subir les conséquences des avaries survenues au bâtiment pendant le trajet, si elles n'ont pour cause que des accidents or

page, pendant la détention du navire, sont conformes à la jurisprudence existante en cette matière, et que le capitaine, qui pouvait charger de ses intérêts un fondé de pouvoirs, ne peut se faire un motif de l'attente du règlement du compte d'avaries, pour prolonger jusqu'à ce terme le genre de contribution dont il s'agit...;. Réformant, déclare avaries simples et particulières au navire les dommages qu'il a soufferts au port de Fécamp; ordonne qu'ils seront supportés par le navire seul; ordonne que les gages et nourriture de l'équipage n'entreront dans le compte des avaries grosses et communes au navire et à la cargaison, que pendant le temps qui s'est écoulé depuis la capture dudit navire jusqu'à la relaxation qui en a été ordonnée par jugement du conseil des prises.

Du 6 germ. an 10.-Trib. d'appel de Rouen.-M. Eude, pr. (1) Espèce: (Foucault C. Michaud.) Le navire la Minerve, assuré sur corps par Foucault et consorts, et chargé d'une grande quantité de marchandises, était parti de Bordeaux pour Lima, sous le commandement du capitaine Vandercruyce, qui en était aussi propriétaire. Dans la traversée, il éprouva des avaries qui le forcèrent d'entrer à Valparaiso. Là il fut réparé, après constatation des avaries; mais on dut décharger la cargaison, l'emmagasiner et la recharger ensuite, ce qui, indépendamment des frais de réparations, occasiona une dépense spéciale, pour laquelle le capitaine emprunta à la grosse 8,952 fr. 39 c. - De retour en France, Vandercruyce réclama d'abord aux assureurs le montant de l'avarie particulière qu'avait éprouvée le corps du navire. Quant aux 8,952 fr. 39 c. pour frais de déchargement, magasinage et rechargement des marchandises à Valparaiso, il en demanda le remboursement tant aux assureurs qu'aux chargeurs eux-mêmes. - Les assureurs soutinrent qu'il s'agissait d'une avarie particulière aux marchandises dont les chargeurs étaient seuls tenus, ou tout au moins d'une avarie grosse, au payement de laquelle ils devaient contribuer. Les chargeurs prétendirent que l'avarie était particulière au navire, et à la charge des assureurs sur corps. - 28 mars 1838, jugement qui accueille ce dernier système. Appel.

18 nov. 1839, arrêt confirmatif de la cour de Bordeaux, ainsi conçu : «Attendu, au fond, que, d'après le § 8 de l'art. 400 c. com., sont avaries communes les dommages soufferts volontairement et les dépenses faites d'après délibération motivée pour le bien et salut du navire et des marchandises; que, d'après l'art. 403, sont avaries particulières la perte des câbles, ancres, voiles, mâts, cordages, causée par la tempête et autres accidents de mer; les dépenses résultant de toutes relâches occasionées soit par la perte fortuite de ces objets, soit par besoin de ravitaillement ou par voie d'eau ; Attendu enfin que le navire la Minerve élait destiné pour Valparaiso ; Qu'il n'y est entré ni par relâche forcée ni par délibération motivée; Attendu que les dommages éprouvés par le navire et causés par le mauvais temps sont de leur nature des avaries particulières; - Attendu que, si les dépenses ont été augmentées par le déchargement et le rechargement des marchandises, elles sont la conséquence nécessaire de l'avarie particulière, et ne peuvent en changer la nature; Que le maître du bâtiment, chargé de transporter les marchandises au lieu de leur destination, doit tenir son bâtiment en état de

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dinaires qu'il est toujours possible de prévoir. Tel est en effet le véritable sens de l'art. 403, n° 3 c. com., quand il range au nombre des avaries particulières les dépenses résultant de toutes relâches occasionnées par voie d'eau à réparer. Ces derniers mots s'expliquent par le paragraphe qui les précède, et où les cas de tempête et autres accidents de mer sont regardés ausst comme avaries particulières. L'art. 404 confirme la même doctrine en déclarant que les avaries particulières sont supportées par le propriétaire de la chose qui a essuyé le dommage ou occasionné la dépense. Dans le cas dont il s'agit, la chose qui a occasionné les frais de déchargement et rechargement des marchandises, c'était le navire dont le mauvais état ne lui avait pas permis de supporter sain et sauf un gros temps, et qui par là avait rendu ces frais nécessaires afin de le réparer. On ne pouvait donc prétendre que cette dépense était grosse ou com mune, et retombait proportionnellement à la charge des proprié taires de la cargaison comme à celle du maître du bâtiment.

1120. Cependant Émérigon (t. 1, p. 625) et, après lui, M. Pardessus (no 740), décident que « si des événements de met obligent le capitaine d'entrer dans un havre ou une rivière autre que le lieu de destination, et qu'il soit nécessaire de décharger tout ou partie de la cargaison et de remettre ensuite le navire à flot, ces frais extraordinaires sont réputés avoir pour objet la conservation du navire et des marchandises, et par conséquent sont avaries communes. » Mais ces auteurs ne se sont pas spécialement occupés du cas où les dommages éprouvés par le navire proviendraient seulement d'un accident ordinaire de navigation. M. Pardessus suppose que la tempête oblige le navire

faire son voyage et de remplir ses obligations, et que, dès lors, les dépenses occasionées par l'état du bâtiment sont à sa charge. »

Pourvoi des assureurs Foucault et consorts, pour violation de l'art. 400 c. com., et fausse application de l'art. 403 du même code. - Dans l'espèce, a-t-on dit, la cause de l'avarie provenant du déchargement et rechargement des marchandises, c'est le besoin de radouber le navire et de le mettre en état de continuer le voyage. L'avarie avait donc pour cause l'intérêt commun, et par suite elle constituait une avarie commune.

L'arrêt attaqué objecte qu'il n'y a pas eu de délibération motivée. Mais cette délibération n'est pas une formalité indispensable. Pour juger qu'il s'agissait d'une avarie particulière au navire, l'arrêt attaqué s'est fondé, en outre, sur les termes de l'art. 403, no 3, qui considère comme avaries particulières les dépenses résultant de toutes relâches occasionnées par la perte fortuite des ancres, mâts, cordages, ou par voie d'eau à réparer. Mais c'est moins l'accident en lui-même qu'il faut envisager que les circonstances qui l'ont accompagné; car si ces circonstances font reconnaitre que la dépense avait pour but l'intérêt commun, ce n'est plus une avarie particulière, mais une avarie commune. - Enfin, on Soutient que l'avarie, si elle est particulière, doit être réputée particulière aux marchandises, en ce que c'était pour leur conservation qu'elles avaient été déchargées sur le port. Arrêt.

LA COUR; Attendu, en droit, qu'à défaut de conventions spéciales, les avaries survenues dans le cours d'un voyage de mer sont supportées soit par les propriétaires du navire, soit par les propriétaires des objet composant le chargement, soit par les uns et les autres conjointement, selon que ces avaries sont particulières au navire ou au chargement, où qu'elles sont communes à l'un et à l'autre; que les art. 400 et 403 c.com. déterminent, le premier quelles sont les avaries communes, le deuxième quelles sont les avaries particulières; - Que l'art. 403 range dans cette dernière classe, notamment § 3, la perte des câbles, ancres, voiles, måts, cordages, causée par tempête ou autre accident de mer, et les dé penses résultant de toutes relâches occasionnées, soit par la perte fortuite de ces objets, soit par le besoin d'avitaillement, soit par voie d'eau à réparer; Que cette disposition est la conséquence de l'obligation des propriétaires du navire, de fournir, pour le transport des marchandises jusqu'au lieu de leur destination, un navire en état de supporter les accidents ordinaires de la navigation; - Et attendu que l'arrêt attaqué constate en fait, que les dommages éprouvés par le navire la Minerve, et causés par le mauvais temps, sont de leur nature des avaries partico lières; que les dépenses de déchargement et de rechargement des marchandises sont la conséquence nécessaire de l'avarie particulière; - Que, de ces faits, l'arrêt allaqué a justement conclu que le maître du bâtiment, chargé de transporter les marchandises au lieu de leur destination, avait dû tenir son bâtiment en état de faire le voyage et de remplir ses obligations; que, par suite, il était tenu des dépenses occasionnées par l'avarie dont il s'agissait au procès; que cette décision, conforme aux règles cidessus rappelées, ne contient aucune violation de la loi ; — Rejette.

Du 2 déc. 1840.-C. C., cb. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Brière-Valigny, rap.-Hébert, av. gén., c. conf.-Ledru-Rollin, av.

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