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§ 4. Comment l'assuré doit justifier des avaries.

2223. On a vu plus haut, nos 1754 et s., de quelle manière l'assuré doit justifier du chargement des choses assurées. Quant aux accidents maritimes qu'elles ont subis et aux pertes ou avaries qui en sont résultées, il doit également en établir la preuve par la production de toutes les pièces et de tous les témoignages de nature à constater la réalité des accidents survenus, les causes qui y ont donné lieu, et l'importance des dommages éprouvés.

2224. Lorsque le bon état du navire lors du départ est attesté par des certificats de visite, les avaries qu'il a subies durant la traversée, doivent être présumées, jusqu'à preuve contraire, provenir d'accidents maritimes et non de son vice propre (Bordeaux, 7 mai 1839, aff. Fabre, V. n° 2226. V. aussi les décisions rapportées plus haut, nos 2065 et suiv.

2225. La preuve des avaries, entre l'assureur et l'assuré, n'est pas soumise à des formes précises et rigoureuses. Elle peut résulter d'actes plus ou moins irréguliers, pourvu qu'ils paraissent concluants et que leur sincérité soit à l'abri de légitimes soupçons. Ainsi, le rapport du capitaine, quoique non vérifié dans les formes voulues par l'art. 247, peut néanmoins être pris en grande considération pour établir, entre l'assureur et l'assuré, la réalité et le caractère de l'avarie éprouvée par la chose assurée : « Attendu, porte un arrêt de la cour suprême, qu'il résulte seulement des art. 246, 247 c. com. que les rapports en baisse de la marchandise au lieu du déchargement; Que la répartition ordonnée par la cour royale de Bordeaux entre les divers assureurs de diverses parties de marchandises perdues, n'a aucun rapport avec la répartition prévue par l'art. 416, lequel ne s'occupe que de la fixation de la contribution à exiger des marchandises sauvées; Rejette. Du 16 fév. 1841.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Troplong, rap.Delangle, av. gén., c. conf.-Piet, av.

(1) Espèce: (Fabre C. assureurs.) En fév. 1827, le navire le Georges partit de Bordeaux pour Calcutta. Durant le voyage, il subit des avaries. Arrivé à Pondichery, des experts, nommés par le président du tribunal, constatèrent ces avaries et les réparations à faire. Ces réparations opérées, le navire reprit sa route et éprouva de nouvelles avaries. Il parvint à Calcutta le 3 nov. 1827. Le lendemain, sur la demande du capitaine Laporte, le président du tribunal de Chandernagor permit de faire au navire les réparations nécessaires, après avoir ordonné la constata. tion préalable par experts des avaries. Le rapport des experts fut remis, sans avoir été affirmé, au capitaine, qui alla à Chandernagor le déposer au greffe. Au retour du navire à Bordeaux, l'armateur, Fabre, dressa le compte des avaries du voyage d'aller, et en réclama le montant, 16,464 fr., aux assureurs sur corps. 27 mars 1832, sentence arbitrale qui rejette cette demande, attendu, entre autres motifs, que le rapport dressé à Calcutta, n'ayant été précédé ni suivi de la formalité du serment, était sans valeur, et que, dès lors, il n'était point légalement établi que les réparations faites à Calcutta eussent été nécessitées par fortune de mer. Appel par Fabre. · On lui oppose qu'ayant, depuis la sentence, payé une prime d'assurance devenue exigible, il a par cela même acquiescé à cette sentence, et s'est rendu non recevable à l'attaquer. On ajoute que son action est, en outre, inadmissible, aux termes de l'art. 435 c. com., parce que le capitaine, à son arrivée à Pondichéry et à Calcutta, n'avait point fait, dans les vingt-quatre heures, de protestation relativement aux avaries qu'il prétendait avoir éprouvées. Arrêt. LA COUR; Attendu qu'il n'est nullement justifié que Fabre ait renoncé à interjeter appel; Attendu que le payement de la prime n'a pas été fait en exécution du jugement, et qu'il ne peut être considéré comme un acquiescement; - Attendu, quant à l'application de l'art. 435 c. com., qu'il s'agit, dans l'espèce, d'avaries sur corps, et non sur facultés; qu'au surplus le capitaine, arrivé à Pondichéry le 13 sept. 1829, a présenté sa requête au président du tribunal de Pondichery, laquelle fut appointée et suivie, le surlendemain 15, du procès-verbal qui constatait les avaries; qu'arrivé le 3 novembre devant Calcutta, le capitaine présenta sa requête le 4 du même mois au président de Chandernagor, qui ordonna a visite du navire; d'où il suit que le capitaine a fait ses diligences dans Je temps prescrit, et que, sous aucun rapport, on ne peut lui appliquer la fin de non-recevoir résultant de l'art. 455 précité;

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non vérifiés ne sont point admis à la décharge du capitaine et ne font point foi en justice, sauf le cas (qui n'est pas celui de la cause), où le capitaine naufragé s'est sauvé seul dans le lieu où il a fait son rapport. Mais que la preuve des faits contraires est réservée aux parties, et que, sous l'empire du code, comme dans l'ancienne jurisprudence, la preuve du sinistre n'a aucune forme nécessaire de rigueur; Il suffit que la perte soit constatée d'une manière capable de convaincre tout homme raisonnable, sans avoir besoin de recourir à des formalités extrinsèques qui, par les circonstances du temps, des lieux et de personnes, sont souvent impraticables » (Req., 27 mars 1828, M. Borel, pr., M. Mestadier, rap., aff. N... C. N.... Conf. Bordeaux, 11 fév. 1826, aff. Brandam, V. n° 2218).

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2226. De même, un rapport d'experts dressé en pays étranger, peut, à raison des circonstances, être tenu pour valable, quoiqu'il n'ait pas été affirmé par serment (Bordeaux, 7 mai 1839) (1). Pareillement, un rapport d'experts, quoique non affirmé, peut être admis comme pièce justificative des avaries, quand il se trouve corroboré soit par le livre de bord, soit par d'autres rapports rédigés et affirmés régulièrement (même arrêt). - De même encore, la constatation des avaries éprouvées dans des parages lointains et réparés dans un port où il n'existe pas de consul français, a pu être faite suivant les usages de ce port, constatés par un simple certificat délivré par des négociants et agents de commerce de la localité, dont les signatures ont été légalisées par l'autorité compétente (Bordeaux, 22 février 1844) (2). Enfin, l'assureur ne pourrait se soustraire au payement des avaries, par cela seul qu'il n'aurait point été fait de rapport par le capitaine au lieu de l'arrivée et que le journal de bord ne serait pas représenté, si, d'ailleurs, la cause et l'étendue des avaries étaient suffisamment constatées (Aix, 7 mai 1821, aff. Treillet, V. n° 2305).

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2227. Les assureurs assignés en règlement d'avaries n'ont Attendu, au fond, que le navire avait été visité avant son départ de Bordeaux; que deux procès-verbaux, remarquables par leur rédaction, constatent qu'il était en parfait état de navigabilité au moment de son départ; qu'il en résulte, jusqu'à preuve contraire, que les avaries qu'il a éprouvées sont le résultat de sinistres maritimes; Attendu qu'un capitaine en voyage n'a pas toujours la faculté de remplir rigoureusement les formalités de la procédure; que, dans l'espèce, la qualité des experts, qui ont pu avoir de justes motifs pour ne pas se déplacer, la distance de Calcutta à Chandernagor a pu empêcher les capitaines experts d'aller affirmer leur rapport; - Attendu, au surplus, que, pour la constatation des avaries, il faut avoir égard tout à la fois au livre de bord qui est représenté en bonne forme, signé par l'équipage, au procès-verbal dressé à Pondichery et au procès-verbal dressé à Calcutta; que le premier de ces procès-verbaux a été affirmé et est parfaitement régulier; qu'il constate que les experts ont reconnu que toutes les avaries énoncées dans les procès-verbaux du capitaine étaient réelles, conformes à la vérité, et que le navire faisait une quantité d'eau, ce qui rendait nécessaire qu'il fût visité au lieu de sa destination; que, d'après ce procès-verbal, il ne peut y avoir de doute sur les avaries majeures éprouvées par ce bâtiment, qui était envahi par l'eau ; que les procès-verbaux dressés à Calcutta ne sont que le développement de celui qui avait eu lieu à Pondichery; - Attendu, néanmoins, que les assureurs n'admettent pas les dépenses qui ont été faites à Calcutta et les comptes produits par l'assuré ; Sans s'arrêter aux fins de non-recevoir proposées par les assureurs, les déclare passibles des avaries éprouvées par le navire le Georges; - Ordonne, en conséquence, que, par les sieurs ..., que la cour nomme experts à cet effet, il sera procédé au règlement desdites avaries.

Du 7 mai 1839.-C. de Bordeaux.-M. Roullet, pr.

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(2) (Assureurs C. Durin, Chaumel et comp.)- LA COUR; Au fond; Attendu que le navire la Jeune-Hortense, assuré pour aller de Bordeaux à Pondichéry, Madras et Calcutta, éprouva, pendant le voyage d'aller, plusieurs avaries par fortune de mer; Attendu que les avaries vérifiées au cap de Bonne-Espérance et à Pondichéry étant reconnues par les assureurs, l'unique question est celle de savoir si les arbitres ont dû laisser à la charge des assurés les avaries constatées à Madras et à Coringa, et réparées dans ce dernier port, parce que la constatation n'en aurait pas été régulièrement faite ; - Attendu que la preuve des pertes maritimes n'est pas astreinte aux formes rigoureuses du droit civil; que cette preuve est subordonnée aux circonstances variables de la navigation, et que, d'après Émerigon, il suffit des seules solennités du droit des gens; Attendu que Madras et Coringa sont placés sous la domination anglaise, et qu'il n'y existe pas de consul français; que le capitaine de la Jeune-Hortense, dans l'impossibilité de vêtir les dispositions de l'art. 244 c. com., a dù se conformer aux usages des lieux; Attendu

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CHAP. 8, SECT. 8, ART. 2, § 4. pas le droit d'exiger que les pièces constatant les avaries, et, par exemple, le rapport de mer, leur soient communiquées avant que le règlement d'avaries, nécessaire pour fixer la contribution qui doit s'opérer entre les armateurs et les chargeurs, ait été arrêté cette communication nè leur est due que lorsqu'après le réglement effectué, l'action d'avaries est formée contre eux. La raison en est qu'un réglement d'avaries étant indispensable pour fixer légalement la contribution qui doit s'opérer entre les

qu'un certificat délivré, depuis le jugement arbitral dont est appel, par des négociants et agents de commerce de Madras, dont les signatures sont légalisées par l'autorité compétente, atteste que les usages ont été suivis, et que l'intervention de l'amirauté aurait inutilement été requise en pareille matière;-Attendu que les circonstances particulières relevées dans les motifs du jugement, sur le mode de constation de l'état du navire, et sur la qualité d'agent des compagnies d'assurances anglaises qui appartient à l'expert qui a procédé à Madras, ne sauraient, en l'absence de toute indice de fraude, infirmer la foi due aux expertises et aux autres documents produits, qui ne peuvent, dans leur ensemble, laisser aucun doute sur la réalité des avaries souffertes et sur les événements de mer auxquels elles doivent être attribuées; Émendant, condamne les assureurs sur corps à payer à Durin et Chaumel, sans aucune distinction entre les avaries constatées au cap de Bonne-Espérance et à Pondichery, et celles constatées à Madras et à Coringa, le compte total des réparations du navire la Jeune Hortense, s'élevant à 20,419 fr. 75 c., et ce, dans la proportion des sommes par eux assurées.

Du 22 fév. 1844.-C. de Bordeaux, 1re ch.-MM. Gerbaux, pr.

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(1) Espèce (Foussat.) Le navire l'Harmonie, parti de Chandernagor pour revenir en France, éprouva des avaries. Il fut pourvu aux réparations nécessaires, au moyen d'un emprunt à la grosse et de la vente des marchandises avariées. A son arrivée à Bordeaux, le rapport des événements qui avaient occasionné les avaries, après avoir été affirmé, fut déposé par le capitaine. Diverses assurances avaient été prises tant sur corps que sur les marchandises; en conséquence, les armateurs et les chargeurs assignèrent les assureurs en règlement d'avaries; ils concluaient à ce qu'il fût procédé par experts au classement, dans les genres d'avaries définies par la loi, des dommages soufferts, et à ce qu'il fût dressé un règlement établissant la portion contributive que chaque chargement aurait à supporter dans les avaries.-Les assureurs demandèrent qu'avant de procéder à ce règlement d'avaries, il leur fût donné communication du rapport de mer et des autres pièces constatant les avaries.

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Jugement qui rejette cette demande : << Attendu que, dans tout état de cause, un règlement d'avaries établi dans la forme ordinaire doit avoir lieu pour fixer d'une manière légale et régulière la contribution qui doit peser, soit sur les armateurs, soit sur les divers chargeurs; Attendu que les sieurs Foussat frères et compagnie sont depuis longtemps en souffrance relativement à ce règlement, qui n'a pu avoir lieu plutôt, par suite de circonstances qui leur sont étrangères; - Attendu que les communications que les assureurs réclament occasionneraient de nouveaux retards préjudiciables aux armateurs et aux divers chargeurs, qui ont intérêt à connaitre le plus tôt possible leur part contributive, et qui, dans tous les cas, ne peuvent être tenus d'attendre l'issue des contestations qui pourraient s'élever entre les armateurs et leurs propres assureurs ; Attendu, d'ailleurs, que rien ne s'opposera, lorsque le règlement sera fait et que les assureurs en auront pris connaissance, ainsi que des pièces y relatives, à ce qu'ils représentent leurs exceptions pour ce qui les concernera, soit directement aux armateurs, soit autrement, s'ils n'étaient pas d'acord avec eux; lesquelles exceptions préalablement faites ne pourraient jamais empêcher le règlement d'avaries, puisqu'il doit être fait dans l'intérêt de toutes parties et dans les formes ordinaires, sans que les experts qui seront désignés à cet effet, puissent prendre en considération les discussions que la nature des contrats d'assurance peut faire intervenir; Par ces motifs, le tribunal ordonne que, par les sieurs N..., experts désignés par les assurés, et par le sieur N..., qu'il nomme d'office pour les assureurs, il sera immédiatement procédé au règlement et à la répartition des avaries souffertes par le navire l'Harmonie. »

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Appel par les assureurs. Ils soutiennent que la demande en communication des pièces avant la nomination dee experts est conforme à l'art. 383 c. com., portant que « les actes justificatifs du chargement et de la perte sont signifiés à l'assureur, avant qu'il puisse être poursuivi pour le payement des sommes assurées; » que, pouvant trouver, dans les pièces qu'ils demandent, des moyens de défense qui les affranchiraient de tout ou partie du payement des avaries, ils ont intérêt à les connaître. Pourquoi, d'ailleurs, disent-ils, ordonner, nécessairement, et en tout état de cause, un règlement d'avaries par experts, quand, à la vue des pièces, l'assureur et l'assuré peuvent se trouver d'accord et faire un règlement amiable? - Ils ajoutent, au surplus, que le tribunal, en nommant d'office un expert pour les assureurs, sans leur accorder un délai de trois jours pour en convenir, a contrevenu à l'art. 305 c. pr. Arrêt. LA COUR; Attendu qu'il a été justement reconnu par le tribunal de commerce, qu'un règlement d'avaries était indispensable pour fixer léga

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armateurs et les chargeurs, la communication réclamée préalablement par les assureurs retarderait sans utilité cette opération préliminaire indispensable, opération qui d'ailleurs ne préjuge rien sur le droit qu'auront ensuite les assureurs quand, le règlement terminé, ils seront actionnés en payement des sommes assurées, d'exiger les communications qu'ils croiront nécessaires ef d'invoquer les exceptions qu'ils jugeront fondées (Bordeaux, 25 janv. 1831; Aix, 15 juin 1840) (1).

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lement la contribution qui doit s'opérer entre les armateurs et les chargeurs; Attendu que la communication réclamée préalablement par les assureurs retarderait sans utilité cette opération préliminaire qui est in- | dispensable; Attendu qu'il n'est nullement question, quant à présent, d'une amende en payement des sommes assurées; que, dès lors, l'art. 383 c. com. ne peut ici recevoir d'application; - Attendu que, si, d'après le règlement effectué, des demandes sont formées contre les assureurs, ils auront le droit d'y défendre et d'exiger les communications qu'ils croiront nécessaires; que rien n'est préjugé à cet égard, puisque le tribunal déclare, dans les motifs de son jugement, que, lorsque le règlement sera fait et qu'ils en auront pris connaissance, ainsi que des pièces, ils pourront présenter leurs exceptions pour ce qui les concerne, et qu'il est formellement expliqué dans le dispositif, que le tribunal réserve aux assureurs tous droits et exceptions qu'il jugeront convenable de faire valoir; Attendu, d'autre part, que les art. 304, 305 et 306 c. pr. ne règlent pas le mode de nomination des experts dans les tribunaux de commerce, et qu'il existe pour eux une disposition spéciale dans l'art. 429, auquel le jugement est conforme; Met au néant l'appel interjeté par le syndic des assureurs de la place de Bordeaux, etc.

Du 25 janv. 1831.-C. de Bordeaux, 1 ch.-M. Roullet, pr.

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2 Espèce (Dellal C. assureurs.) - En 1839, Dellal et Reggio chargent sur le navire l'Industrie, 241 balles de coton qu'ils font assurer par plusieurs assureurs de Marseille. D'après la police les, avaries doivent être payées comptant après règlement. Les cotons assurés furent avariés durant le voyage. Les assureurs n'ayant pu s'entendre avec les assurés pour régler amiablement des avaries préalablement constatées par une expertise, fussent assignés devant le tribunal de Marseille en nomination d'un expert répartiteur. Ils désignent alors pour les représenter dans l'instance, l'un d'eux auquel toutes significations, même celle du jugement définitif, devront être faites au domicile par lui élu en son bureau. Ils répondent ensuite qu'ils sont prêts à payer le dommage, après communication par les assurés, des pièces constatant les avaries, parce que sans cela ils ne peuvent en vérifier la quotité, et faire des offres réelles.

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Le 5 fév. 1840, jugement par lequel : — « Attendu que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi aux parties qui les ont consentis; Que, par une clause de la police souscrite par les assureurs au procès, ceux-ci se sont soumis à payer les avaries après le règlement; - Qu'en matière d'avaries, on ne reconnaît, dans la pratique, que deux modes de règlement celui amiable et celui judiciaire; Que, dans l'espèce, les parties n'ayant pu s'entendre pour régler amiablement les avaries constatées, force a été aux assurés de prendre la voie judiciaire; · Attenda que les prétentions, élevées par les assureurs, d'exiger que les pièces leur soient communiquées avant la nomination de l'expert répartiteur, et alors que la demande de l'assuré n'a rien de déterminé, sont contraires à ce qui s'est toujours pratiqué; qu'il suffit que cette communication accompagne l'état d'avaries que fait signifier l'assuré, et avant que les assureurs soient poursuivis en payement de l'avarie, pour que le vœu de la loi soit rempli; Attendu que les parties qui ont un intérêt commun dans une contestation ont le droit d'exiger que toutes les significations relatives à l'instruction soient faites à l'une d'elles pour toutes; - Que ce droit, que les assureurs demandent à exercer, ne leur est pas contesté par les assurés ; mais que ce serait l'étendre trop loin que de l'appliquer même au jugement définitif; Le tribunal nomme d'office un expert réparti teur, à l'effet de procéder au règlement des avaries éprouvées par les cotons chargés sur le navire l'Industrie, communication préalablement faite par Dellal et Reggio auxdits assureurs en la personne du sieur Albe, l'un d'eux pour tous, des pièces justificatives de leur état d'avaries, pour, sur le rapport qui sera fait au tribunal, par l'expert répartiteur, des contestations qui pourront s'élever entre les parties, être statué ce qu'il appartiendra; concède acte aux assureurs de la déclaration par eux faite qu'ils entendent être représentés par le sieur Payan, l'un d'eux, auquel toutes significations relatives à l'instruction seront faites au domicile par lui élu.»

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CHAP. Quelles sommes l'assuré a le droit de réclamer.

2228. Lorsque l'assurance porte sur le navire, l'assureur est tenu de rembourser le montant des dommages provenant d'accidents maritimes, ou des dépenses occasionnées par ces accidents. Mais il ne répond pas de la diminution de valeur que le bâtiment a subie par l'effet ordinaire du temps et de la navigation.

2229.Pour évaluer le dommage éprouvé par le navire par fortune de mer, il faut prendre pour base la valeur qu'il avait au lieu du départ. Aussi a-t-il été jugé que lorsqu'il s'agit de fixer, entre l'assureur et l'assuré, la somme pour laquelle la moitié du

rant, en outre, que la signification par eux ordonnée du jugement défibitif à chaque assureur en particulier ne doit s'entendre que de la signiAcation, préalable nécessaire d'une exécution forcée, et que, les intimés ayant exécuté le jugement dans le sens de cette interprétation, les appeants n'ont essuyé aucun grief; — Confirme, etc.

Du 15 juin 1840.-C. d'Aix, 1 ch.-MM. Pataille, 1 pr.-Vaisse, av. gén., c. conf.-Moutte et Perrin, av.

(1) Espèce: (Coquebert C. Mestre.) - Assurance sur corps et marchandises d'un navire expédié de Bordeaux. Avaries grosses ou communes dans la traversée d'aller. Règlement en est fait à son retour par des arbitres experts qui les répartissent au marc le franc, savoir sur les marchandises d'après leur valeur au lieu du déchargement et sur la moitié du navire et du fret, d'après le prix et l'estimation fixés par la police d'assurance. Appel de ce jugement arbitral par Coquebert, assureur, soutenant que, d'après l'art. 417 c. com., qui devait seul déterminer les bases de la contribution aux avaries, la moitié du navire et du fret y devait contribuer, non d'après le prix stipulé dans la police d'assurance, mais bien, comme les marchandises, d'après leur valeur au lieu du débarquement. - Arrêt.

LA COUR; Attendu que l'art. 401 c. com. contient la règle générale pour la contribution aux avaries communes; qu'il dispose qu'elles sont supportées par les marchandises et par la moitié du navire et du fret, au marc le franc de la valeur, sans s'expliquer comment cette valeur serait fixée; Qu'immédiatement après cette disposition, l'art. 402 statue que le prix des marchandises est établi par leur valeur au lieu du déchargement; qu'il modifie et explique l'article précédent; qu'il fait une distinction évidente, quant à la valeur contributive, entre les marchandises et la moitié du navire et du fret, et que fixant une base particulière pour les marchandises, on ne peut admettre que le législateur ait entendu que cette base servirait également pour la moitié du navire; que décider ainsi, ce ne serait pas interpréter la loi, mais ajouter à sa disposition et faire une règle générale d'une disposition spéciale; Que, si l'on entre dans les motifs qui ont déterminé le législateur, et si l'on interroge les principes de la matière, l'on voit que la raison qui a fait établir pour la contribution des marchandises, leur valeur au lieu du déchargement, n'existe pas pour le fret et pour le navire; que, pour les marchandises, c'est bien leur valeur au lieu du déchargement qui a été sauvée par les dépenses et les dommages considérés comme avaries communes; que quant au fret, au contraire, la valeur est déterminée ordinairement par la convention qui a été faite avant le chargement; et qu'à l'égard du navire, sa valeur et l'avantage que le propriétaire retire de la dépense commune, sont indépendants de sa valeur au lieu du déchargement, car ce n'est pas dans ce lieu que la valeur du bâtiment doit être réalisée; - Que, dès lors, si l'on consulte soit l'esprit, soit la lettre de la lɔi, il n'y a pas lieu d'appliquer au fret et au navire la disposition de l'art. 402; Que la valeur dont parle l'art. 401 doit être réglée par les principes généraux en matière d'assurances, lorsqu'il s'agit d'une contestation entre les assurés et les

assureurs;

Attendu que l'art. 332 porte que le contrat d'assurance doit énoncer la valeur ou l'estimation des marchandises, et que, suivant l'art. 356, il n'y a lieu à faire procéder à l'estimation que dans le cas de fraude; que, par conséquent, l'estimation conventionnelle, lorsqu'elle n'est pas contestée, devient la loi des parties et la base légitime des règlements à intervenir entre elles et qui sont la conséquence du contrat; que, par conséquent, dans l'espèce, les experts ont pu faire la répartition des avaries, conformément à la valeur estimative du navire convenue par la police d'assurance; - Attendu que l'art. 417 c. com., en supposant que les mots qui le terminent soient relatifs à la moitié du fret et du navire, de nême qu'aux marchandises serait spécial pour le jet et la contribution qui en est le résultat, et qu'il n'y a pas lieu de l'appliquer à toutes les avaries communes en général; -Attendu que, dans l'espèce de la cause, il ne s'agit ni du jet ni de coutribution pour jet; Met au néant l'appel | interjeté par Coquebert et comp. du jugement arbitral rendu par Alexandre et J.-B. Coureau, le 5 janv. 1831 et de l'ordonnance d'exequatur mise au bas le 14 du même mois; ordonne que ladite sentence arbitrale Eera exécutée selon sa forme et teneur.

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Du 20 mai 1835.-C. de Bordeaux, 1 ch.-M. Roullet, pr. (2) 1 Espèce :-(Magon-Vieuville C. Dupuy.)-Par police du 1a déc. 1814, Magon assure 3,000 fr. sur corps et dépendances du navire le

TOMF XV..I.

navire et du fret sont tenus de contribuer à des avaries communes, conformément à l'art. 401 c. com., cette contribution doit se régler, quant au navire, d'après la valeur qui lui a été attribuée par la police, et non d'après la valeur au lieu du déchargement (Bordeaux, 20 mai 1833) (1).

2230. Dans un règlement d'avaries grosses, l'assureur sur corps est tenu d'indemniser l'assuré non-seulement de la portion que doit supporter le navire, mais encore de celle pour laquelle le fret doit contribuer (Rennes, 7 mai 1823; Aix, 24 juin 1829 (2). Et en effet, le principe dominant en matière d'ava ries est qu'elles sont toujours supportées par les choses qui les

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Le 13 nov. 1822, jugement arbitral qui accueille ce dernier système dans les termes suivants : « Il s'agit de savoir si la portion pour laquelle le fret du Nestor contribue dans le règlement des avaries grosses doit être, en définitive, supportée par l'assureur sur corps, ou si elle doit rester, sans reprise, à la charge des armateurs assurés. Considérant, en principe que toute avarie doit être supportée par la chose qui l'a soufferte ou occasionnée, et que cette règle est en effet la base de toute contribution en cette matière; Considérant que, dans le commerce maritime, deux choses seulement sont susceptibles d'essuyer ou d'occasionner ce genre de dommage, savoir: 1° le navire, considéré dans son état d'armement, avec agrès, apparaux, victuailles et avances payées à l'équipage; 2 les marchandises qui en forment la cargaison; qu'aussi lo législateur n'a énoncé et envisagé que ces deux choses dans la définition qu'il a donnée de l'avarie en général (art. 397 c. com.), et qu'on ne voit nulle part qu'il y avait des avaries communes au navire, à la marchandise et au fret; - Que, dans l'application des règles de contribution qu'il établit, il importe de ne pas perdre de vue cette définition et le principe ci-dessus énoncé, et qu'on doit supposer dans le législateur l'intention de s'y conformer, c'est-à-dire d'être conséquent à lui-même; Que si les art. 304, 401 et 417 c. com. font participer le fret au rachat et aux avaries grosses, conjointement avec le navire et la marchandise, ce no peut être en envisageant le fret dans sa nature, puisqu'il ne saurait éprouver d'avaries, mais en le traitant comme accessoire et dépendance du navire; qu'en cumulant ainsi le navire et le fret, le législateur a eu soin de réduire à la moitié de leur valeur respective la part pour laquelle ils doivent contribuer; d'où il convient de conclure que, dans ce cas, la moitié contribuante du fret n'est autre chose que la valeur représentative de cette autre moitié du navire qui, présumée dépérie ou anéantie, est dispensée de la contribution; que, par suite de cette conséquence, la moitié contribuante du fret ne se présente ici que comme élément d'une évaluation toute particulière du navire, dont il est l'accessoire, évaluation qui a paru plus juste que celle dont serait susceptible le navire arrivant de voyage; qu'en effet, estimé dans cet état, sans égard au dépérissement survenu, aux victuailles consommées et aux avances et mises de bord, le navire n'aurait eu qu'une partie de la valeur d'armement qu'il doit représenter, inconvénient qui disparaît lorsque, par une action très-juste en elle-même, on admet le fret comme signe représentatif du dépérissement; Considérant que c'est bien ainsi que les commentateurs de l'ordonnance maritime de 1681 rendaient raison de l'article de cette ordonnance correspondant à l'art. 401 de notre code commercial; que tous s'accordaient à ne voir dans la contribution imposée au fret qu'un mode détourné et mieux raisonné d'asseoir la contribution du navire en concours avec la marchandise, sans porter alleinte aux principes généraux établis ci-dessus; Que, d'ailleurs, on n'aurait pu préférer à co mode l'évaluation totale donnée au navire dans une police d'assurance, d'abord parce qu'on aurait, sans raison, isolé un objet justement considéré comme accessoire inséparable du navire; ensuite parce que, le navire pouvant n'être pas assuré, cette évaluation aurait manqué dans beaucoup de cas; Qu'il est si vrai que l'ancienne ordonnance, laquelle est encore le type de la loi actuelle, n'entendait assujettir en définitive à la contribution que le navire et les marchandises, que, nonobstant la disposition de cette ordonnance analogue à notre art. 401, l'art. 3 du titre des Avaries portait que les avaries retomberaient tant sur le vaisseau que sur les marchandises, et gardait le silence sur le fret; - Considérant, en co qui concerne l'assureur sur le corps, qu'il est responsable, dans la proportion de son risque, de l'avarie éprouvée par le navire; que cette responsabilité existe indépendamment du mode d'évaluation qu'on établit pour régler la contribution du navire en concurrence avec la marchandise; Qu'en ce qui concerne l'assureur, le fret n'est point un objet à part et distinct du navire, mais simplement, comme on vient de le voir, un élément d'évaluation de ce même navire, et qu'il ne peut se plaindre de l'adjonction d'un tel élément, puisqu'en même temps une moitié du navire est affranchie de la contribution, ce qui prévient le double emploi; Considérant que toute assurance sur corps a pour base une évaluation préfixe toujours subsistante, laquelle sert de répartiteur, et n'est réductible ni par le dépérissement du navire, ni par la consommation des 9;

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ont éprouvées. Or la loi ne considère comme susceptibles d'avaries que le navire et le chargement (c. com. 397); elle n'a déclaré

vivres, ni par le payement des salaires de l'equipage; Qu'on ne saurait admettre que l'assureur sur le navire pût, en certains cas, rejeter une partie de ses obligations sur la portion du fret qui représente cette dépréciation du navire assuré; que si, dans le cas d'une avarie simple du navire, l'assureur sur corps n'était pas recevable à demander que le fret y contribuât à sa décharge, il n'y a nulle raison plausible de lui accorder plus de faveur dans l'hypothèse d'une avarie commune; qu'au contraire, les avaries grosses sont nécessairement et sans exception pour le compte des assureurs respectifs, suivant l'expression de Valin, t. 2, p. 160;

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Considérant que l'art. 401 précité statue sur des obligations personnelles aux chargeurs et au maître du navire; qu'étranger au titre des assurances, et basé sur des motifs qui sont sans rapports avec ce titre, on ne peut raisonnablement le considérer comme ayant pour effet ultérieur de déroger au principe général qui met aux risques des assureurs toutes pertes et dommages qui arrivent aux objets assurés (art. 350); Considérant que l'objection tirée de la disposition de loi qui défend de faire assurer le fret devient sans valeur dès qu'on admet les raisons ci-devant déduites; qu'en effet, le fret, considéré dans sa nature définie par l'art. 286, n'est ni susceptible d'avaries, ni par conséquent passible en soi de contribution; que hors les cas où la loi le déclare non exigible, ou en ordonne le délaissement, il doit revenir intact à l'armateur; que si, pour le règlement d'une avarie grosse, elle le met au rang des objets qui sont réputés contribuables, il est constant que ce n'est qu'en le considérant comme moyen d'apprécier plus justement le navire; qu'alors même elle n'entend pas moins faire opérer le règlement sur le navire et sur la marchandise, seuls objets originairement contribuables; que si, comme il est évident, cette opération ne peut aggraver le sort de l'assureur, il n'est pas recevable à s'en plaindre, et il doit reconnaître que ce n'est pas à lui que l'assuré devra l'avantage d'avoir conservé son fret intact;

» Considérant que, s'il est juste, en général, de faire contribuer au sacrifice subi chacun des objets qui en ont profité, outre qu'il n'existe aucun texte qui fasse au fret l'application rigoureuse de ce principe, on pense qu'il est démontré qu'il n'entre pas dans l'esprit de la loi de faire Contribuer cet objet autrement qu'à titre d'accessoire, et comme élément de l'estimation du navire; qu'elle s'est bien gardée de dire que le navire entier contribuera pour une quote-part distincte et le fret pour une autre ; que, dans le cas d'avaries simples du navire, elle n'impose non plus au fret aucun genre de contribution; que, d'ailleurs, on ne saurait prétendre qu'une avarie, à proprement parler, est un sacrifice, ni qu'il sauve le nolis; que le jet pourrait seul mériter cette qualification et obtenir cet effet; qu'enfin l'application même du principe dont il s'agit, aux obligations respectives du maître et du chargeur, ne peut avoir l'effet d'intervertir les obligations d'une tout autre nature que l'assureur sur corps a contractées vis-à-vis du maître; que s'étant assujetti à garantir à ce dernier l'intégrité de ce navire, ou à lui en payer le prix en cas d'abandon, il ne peut, quant aux avaries, exiger autre chose, si ce n'est qu'on le dégage de la contribution qui frappe sur la marchandise, en bornant la sienne à la part qui incombe au navire évalué suivant le mode prescrit par la loi; Par ces considérations, nous, arbitres, prononçant à l'unanimité, disons, en principe, que le fret ne participe aux avaries grosses que comme représentant une moitié du navire: d'où résulte, contre l'assureur du navire, l'obligation d'indemniser l'assuré de toute la portion d'avaries qui n'incombe pas à la marchandise: condamnons, en conséquence, Magon-Vieuville à tenir compte aux demandeurs de la totalité des avaries grosses incombant au navire le Nestor, dans lesquels nous déclarons comprise la portion contributive du fret. »' Appel par Magon. Le fret, a-t-il dit, est un accessoire du navire. Cela est vrai à l'égard du propriétaire du navire, c'est le fruit produit par sa chose, le résultat de sa spéculation; mais, en ce qui concerne l'assureur, il n'en est point ainsi à son égard, le fret est essentiellement distinct du navire; il n'est pas ni ne peut être compris dans l'assurance; il ne profite à l'assureur que dans le seul cas d'abandon; et la raison en est simple: c'est qu'alors celui-ci devient proprietaire du navire. Mais l'abandon n'a pas eu lieu; le fret n'a pas cessé d'appartenir aux armateurs, il a été sauvé par eux, pour leur compte personnel; ils doivent done supporter une part du sacrifice. On a objecté que le fret n'est que représentatif du dépérissement du navire pendant le voyage. Mais il importe peu. L'assureur ne répond que de la perte par cas fortuit; il n'est pas tenu du dépérissement et de la diminution de valeur résultant des objets consommés. Dès lors, si le navire ne vient en contribution que pour une moitié, par suite de la présomption légale qu'il a dépéri de moitié, pourquoi l'assureur contribuerait-il au delà de la valeur effective du navire, lorsque ce n'est pas lui, mais bien l'armateur, qui reçoit le fret? Arrêt.

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nulle part qu'il y eût des avaries communes tout à la fois au navire, aux marchandises et au fret. Quand donc elle fait contribuer aux

ainsi conçu : « Les avaries communes sont supportées par le navire et les marchandises conjointement, et sont réglées au marc le franc; » mais que la cour de cassation proposa de spécifier le mode de contribution qui, ansait-elle dans ses observations, doit être la même pour toutes les avaries communes, au nombre desquelles est le jet, en ajoutant « que cette décision était d'autant plus nécessaire, que l'article présenté ne parlait que du vaisseau, et ne devait parler que de lui, pour ne pas surcharger la rédaction; que cependant le vaisseau ne contribuait pas pour sa seule valeur, ni pour elle en entier, mais pour moitié de sa valeur, et pour moitié du fret qu'il avait gagné, proportion qui a été trouvée la plus juste ; » — Considérant que l'addition demandée par la cour de cassation fut faite dans le projet revisé, et qu'elle fait partie de l'art. 401 c. com.;

Considerant que le motif pour lequel les marchandises contribuent en entier, et le navire, ainsi que le fret, chacun pour moitié seulement, c'est parce qu'il y aurait un double emploi si l'on faisait contribuer les propriétaires du navire pour toute sa valeur et pour le fret entier, attendu que le fret leur est accordé en remplacement de ce que le vaisseau perd de sa valeur dans le voyage, et des dépenses qu'ils sont obligés de faire; qu'ainsi le fret ne venant à contribution que comme partie constitutive du navire, comme élément de son évaluation, c'est toujours le navire qui, dans l'opération prescrite par l'art. 401, supporte la contribution, comme le voulait l'art. 3 du titre des Avaries de l'ordonnance de la marine, et l'article du projet du code de commerce auquel a été substitué l'art. 401;

Considérant que l'appelant ayant assuré les corps, quilles, agrès, apparaux et toutes dépendances du navire le Nestor, et l'art. 350 mettant aux risques des assureurs toutes pertes et dommages qui arrivent aux objets assurés, par la tempête, etc., etc., la portion contributive du navire et du fret dans les avaries communes, souffertes par le bâtiment en question, doit être à la charge de l'appelant; Adoptant, au surplus, tous les autres motifs contenus dans le jugement arbitral; - Ordonne que le jugement appelé sortira son plein et entier effet, etc. Du 7 mai 1823.-C. de Rennes.

commune.

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2o Espèce (Regis C. assureurs.) - En 1827, le capitaine Regis, parti de Rio pour Marseille, éprouva des avaries considérables. A son arrivée, il assigna les consignataires de la cargaison et les assureurs sur corps, en règlement des avaries; il demandait que les assureurs sur corps fussent tenus de l'indemniser de la contribution du fret dans l'avarie Les assureurs reconnaissent que la contribution du navire est à leur charge, mais non celle du fret. - 6 nov. 1828, jugement da tribunal de commerce qui accueille leur défense en ces termes : « Attendu que l'assureur ne peut rendre indemne son assuré que des pertes et dommages éprouvés par l'objet qui forme l'aliment de l'assurance; que l'assureur sur corps n'étant pas et ne pouvant pas être assureur sur fret, puisque la loi défend formellement de faire assurer le fret que le navire gagne pendant le voyage, il ne peut être tenu que des pertes et dommages éprouvés par le navire, mais jamais de celles qui tombent sur le fret; Que tout comme l'assureur sur corps n'est pas tenu des pertes ou diminutions que le fret essuie, soit par le pillage de partie de la cargaison, soit par vidange des futailles, il ne saurait l'être davantage de la diminution qu'éprouve le fret par sa contribution aux avaries communes ;-Que l'objection tirée de ce que la demie du fret, dans la contribution aux avaries communes, remplace la demie du navire, que c'est une dépen dance du corps que les assureurs ont assuré, est évidemment mal fondée; Qu'en effet, le principe fondamental, en matière d'avaries communes, c'est que tout ce qui est sauvé par le sacrifice volontairement fait, doit y contribuer; Qu'ainsi, les marchandises, le fret et le navire étant en danger, ils doivent séparément leur contribution; - Que peu importe, à l'égard des assureurs, la quotité pour laquelle le navire et le fret contribuent aux avaries communes, puisque ce n'est pas dans la loi sur la contribution qu'il faut chercher les droits qui dérivent du contrat d'assurance, mais bien dans la sect. 2 du titre 10, intitulé: des Obligations de l'assureur et de l'assuré ; · Que, d'ailleurs, l'art. 417 faisant contribuer le navire en l'état de sa valeur, au lieu du déchargement, on ne peut soutenir que la demie du fret constitue un remplacement des pertes résultantes des fatigues éprouvées par le navire, durant le voyage, qui n'entrent pas en contribution, et qui, d'ailleurs, sont étrangères aux asQu'il y a donc lieu de rejeter la prétention du capitaine Regis, quant à ce. »> - Appel de Regis. - Arrêt. LA COUR; Attendu qu'il ne faut pas confondre les dispositions de la loi en matière d'assurance avec les dispositions de la loi en matière d'avarie; qu'en matière d'assurance, c'est l'estimation du navire faite par le contrat d'assurance qui sert de règle, dans le cas de perte; tandis qu'en matière d'avarie, il faut préciser la valeur actuelle, au lieu du déchargement, des objets passibles d'avaries; qu'ainsi on ne peut argumenter d'un cas à l'autre; Attendu que le grand principe, en matière d'avarie, est que les avaries, soit simples, soit communes, sont toujours supportées par les choses qui les ont éprouvées; qu'aux termes de l'art. 397 c. com., « toutes dépenses extraordinaires faites pour le navire et les marchatdises, conjointement ou séparément, tout dommage qui arrive au navi."

sureurs;

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CHAP. avaries communes, indépendamment des marchandises, la moltié du navire et la moitié du fret, c'est parce que cette moitié du fret est envisagée par elle comme représentant la partie du navire exempte de contribution, et comme étant un des éléments dont elle se sert pour l'évaluation du bâtiment dans un cas particulier. Il lui a paru plus juste de soumettre à la contribution la moitié du navire et du fret que la totalité du navire seul, parce que sans doute, en suivant une règle opposée, il pourrait arriver souvent que ce navire, estimé dans l'état de dépréciation où l'auraient réduit les événements du voyage, et sans égard au dépérissement survenu, aux victuailles cousommées, ne serait passible que d'une faible contribution, comparativement aux marchandises et au montant du fret acquis à l'armateur; inconvénient qui se trouve corrigé dès que le navire et le fret sont simultanément assujettis à contribuer chacun à raison de la moitié de sa valeur. Mais toujours est-il que la moitié du fret ne participe au payement des avaries grosses que comme représentant, nous le répétons, une moitié du navire: d'où il résulte

et aux marchandises, sont réputés avaries; » — Que, nulle part, le législateur n'a dit qu'il y avait des avaries communes au navire, à la marchandise et au fret; que, dès lors, la loi nouvelle n'ayant envisagé que deux choses sur lesquelles doivent tomber les avaries en général, savoir · le navire et les marchandises, il faut en conclure que le fret n'est pas passible d'avaries; que les art. 302 et 310 du susdit code de commerce ne contrarient pas cette conséquence, puisque si, dans l'un, le fret n'est pas dû, et si, dans l'autre, les futailles peuvent être abandonnées pour le fret, c'est parce que le chargeur se trouve dans des cas où ses marchandises ont totalement péri sans être transportées au lieu convenu; mais si les marchandises s'étaient seulement avariées, comme si les liquides, au lieu de couler, s'étaient détériorés, le fret alors n'en serait pas moins dû, ce qui prouve toujours de plus en plus que le fret, en lui-même, n'est passible d'aucune avarie;

Attendu qu'en cet état de choses, il est évident que si le fret est appelé à la contribution des avaries communes, ce n'est pas en l'envisageant dans sa nature, mais en le traitant comme accessoire et dépendance du navire; que cela est si vrai qu'avant l'ordonnance de la marine, le maître contribuait pour tout son navire, ou pour tout son fret, à son choix, ou au choix des chargeurs; que ce mode de répartition produisait des injustices, et que ce fut pour les faire disparaître que l'art. 7, litre du Jet, de la susdite ordonnance, posa une règle fixe et certaine; mais que l'on tenait toujours, ainsi que le dit Valin, que « le fret ne faisait que le remplacement de ce que le navire était censé avoir perdu de sa valeur pour le gagner; » que l'intention du législateur de grever le navire seul de la contribution dans l'avarie grosse, résulte, d'ailleurs, de l'art. 3, titre des Avaries, de la même ordonnance, qui voulait que les avaries grosses fussent supportées, tant par le navire que par les marchandises, et réglées sur le tout au sou la livre; que l'art. 401 du nouveau code de commerce était d'abord conçu dans le même sens; que si, sur les observations de la cour de cassation, le mot navire fut remplacé par ces autres mots : la moitié du navire et du fret, il est évident que la moitié du fret ne fut mise que pour la moitié du navire, qui ne devait plus entrer en contribution;

Attendu que l'assureur sur corps est responsable, dans la proportion de son risque, de l'avarie éprouvée par le navire; qu'étant au lieu et place du propriétaire, le fret n'est point, respectivement à lui, un objet distinct du navire; que, d'un autre côté, l'assuré doit sortir indemne jusqu'à concurrence du montant de l'assurance; et cependant, si l'assureur n'était responsable que de la portion attribuée au navire par le mode d'évaluation, l'autre portion resterait à la charge de l'assuré; qu'il pourrait même y avoir injustice; car, le fret, en ne contribuant que pour la demie, contribuerait cependant pour sa valeur totale, au lieu de la décharge, puisque l'autre demie est perdue par les salaires de l'équipage et les victuailles, pendant le voyage, tandis que le navire ne contribuerait jamais que pour la demie de la valeur qu'il aurait après la déperdition que lui aurait occasionnée le voyage, cette valeur étant fixée au lieu du reste et en l'état où se trouve le navire;

Attendu, enfin, que la police d'assurance dont il s'agit est aux dates des 10 et 24 mars 1827; qu'elle est, par conséquent, postérieure aux différentes décisions, notamment à l'arrêt de la cour, du 1er fév. 1827, qui avaient consacré le principe que, si le fret entrait en contribution, ce n'était que comme mode d'évaluation du navire; que c'est sous l'influence de ces décisions que les parties ont contracté; qu'il est même possible qu'à raison de cela la prime ait été augmentée, et que toutes ces circonstances sont des motifs de plus pour écarter les prétentions des assureurs ; Emendant, sans s'arrêter aux fins et conclusions des assureurs sur corps du navire le Levrier, tendantes à être affranchis de toute garantie, à raison de la contribution du fret à l'avarie commune, dont ils sont démis et déboutés, faisant droit aux fins et conclusions du capitaine Régis, Ordonne que la contribution du fret aux avaries communes sera comprise dans le règlement particulier d'avarie entre ledit capitaine et ses

évidemment que c'est sur l'assureur du navire que doit retomber la portion contributive du fret.

2231. La portion contributive du fret, dans les avaries communes, est à la charge de l'assureur sur corps, alors même qu'il a été stipulé dans la police qu'en cas de délaissement, l'assureur ne profiterait pas du fret. Cette stipulation ayant été faite dans le seul intérêt de l'assuré, on ne saurait la faire tourner à son préjudice. Et comme d'ailleurs elle n'était établie que pour le cas de délaissement, elle reste sans application dès que ce cas ne s'est point réalisé (Aix, 1er fév. 1827) (1).

2232. Quand, au lieu d'être indéfinie, ce qui est rare, l'assurance est limitée, l'assuré n'est pas fondé à cumuler l'action d'avaries avec l'action en délaissement; en d'autres termes, si le navire assuré a éprouvé, avant de périr, des sinistres partiels dont la réparation n'a pas été l'objet d'une nouvelle assurance, l'assureur n'est tenu, en cas de délaissement, que de la valeur du navire sur laquelle la prime a été perçue; il n'est point obligé à garantir en outre le montant des dépenses occa

assureurs, et demeurera à leur charge; au moyen de quoi, condamne lesdits assureurs, chacun d'eux, au payement des sommes le concernant, d'après la liquidation qui en sera faite par ledit règlement particulier, avec intérêts du jour de la demande et contrainte par corps; condamne les assureurs à tous les dépens, etc.

Du 24 juin 1829.-C. d'Aix.-M. de la Chèze-Murel, pr.

(1) (Speiser C. assureurs.)- LA COUR ; - Attendu que, d'après l'art. 3, tit. des Avaries, ord. de la marine 1681, la contribution aux avaries grosses avait été réglée tant sur le vaisseau que sur les marchandises; Que l'art. 7, tit. du Jet, même ordonnance, avait déterminé, quant au navire, le mode de contribution, en ce sens que la contribution devait avoir lieu sur la moitié dudit navire et du fret; Que l'art. 401 c. com. avait été d'abord conçu de la même manière que l'art. 3 ci-dessus rappelé ; Mais que la cour de cassation proposa de spécifier le mode de contribution qui, disait-elle dans ses observations, devait être le même pour toutes les avaries communes; Que ce fut sur cette observation qu'à la place du mot navire, qui se trouvait dans la rédaction primitive, on mit ces autres mots: la moitié du navire et du fret; qu'il devient, dès lors, évident que la moitié du fret ne fut ajoutée que pour suppléer la moitié du navire qui ne devait plus entrer en contribution, et pour en revenir à ce qui avait été réglé par l'art. 7, tit. du Jet, dite ord. 1681 ; — Qu'ainsi, le fret ne venant à contribution que comme une partie constitutive du navire, comme élément de son évaluation, c'est toujours le navire qui, dans l'opération prescrite par l'art. 401, supporte la contribution; qu'il ne peut donc pas y avoir violation du principe qui ne permet pas de faire assurer le fret; Que c'est d'ailleurs en ce sens que les commentateurs avaient toujours entendu l'art. 3, tit. des Avaries; qu'ils s'accordaient tous à ne voir dans la contribution imposée au fret qu'un mode détourné et mieux raisonné d'asseoir la contribution du navire en concours avec les marchandises, et qu'il est sensible, d'après tout ce qui a été dit, que c'est dans le même sens qu'il faut entendre l'art. 401, qui n'a fait que reproduire les anciens principes; - Que, dès lors, les appelants ayant assuré le corps du navire et l'art. 350 c. com., mettant au risque des assureurs toutes pertes et dommages qui arrivent aux objets assurés par tempête, naufrage, etc, la portion contributive du navire et du fret dans les avaries communes souffertes par le bâtiment doit être à la charge desdits appelants; Attendu que l'on ne peut induire le contraire de la clause insérée dans la police d'assurance par suite de laquelle les assureurs ne doivent pas profiter du fret, en cas d'abandon; Que cette clause avait été uniquement mise pour faire exception aux dispositions de l'art. 386 même code, dans le cas d'un sinistre majeur, et que, ce cas ne s'étant pas réalisé, il est impossible d'étendre une pareille clause au delà de ses limites; - Qu'il est d'ailleurs sensible qu'elle avait été stipulée dans le seul intérêt des assurés, et qu'on ne peut aujourd'hui la faire tourner contre eux;

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En ce qui touche le règlement fait à Gibraltar :-Attendu qu'il est de principe généralement reconnu que, quoique les estimations et opérations relatives au règlement d'avaries entre l'assuré et l'assureur aient lieu en l'absence de ce dernier, elles l'obligent irrévocablement à moins qu'il n'allégue une fraude ou qu'il ne prouve que l'assuré a sacrifié des droits certains et évidents; qu'il suit de là que les assureurs, dans le cas actuel, se trouvent liés, par tout ce qui concerne les bases et le résultat de la contribution, et qu'ils ne peuvent critiquer le règlement qui a été fait ; qu'ils peuvent d'autant moins le critiquer que c'était pour Gibraltar que le navire était destiné; qu'ils sont donc présumés avoir voulu assumer sur eux le résultat de la contribution qui serait faite en ce lieu, et qu'en pareille circonstance on a toujours mis sur le compte des assureurs les erreurs, même du juge, comme faisant partie des risques dont ils ont entendu se charger; Confirme le jugement dont est appel, etc.

Du 1er fév. 1827.-C. d'Aix.-M. Desèze, pr.

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