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lières. Elle l'a dit un peu à la manière d'une sonate et peutêtre en effet n'y a-t-il point deux mesures pour la musique de Beethoven, dont l'une exigerait un piano plus long et des moyens physiques plus considérables. Beethoven, si je ne m'abuse, jouait, ses concertos sur l'épinette ou le petit piano carré. M1le Dron, discrète et sûre, menait son train et ses cadences avec une sérénité toute classique, consciente de ce qu'elle avait à dire sans chercher d'effort ailleurs que dans la fidélité à la pensée du maître. Avec cela, une simplicité de geste qui témoigne déjà d'un art supérieur, parce que la parfaite entente d'une œuvre est affaire d'esprit plutôt que de muscles. Et Mile Dron nous en a fourni elle-même et tout de suite la démonstration.

En écoutant son Concerto, nous nous disions: Ça va bien, c'est délicieux, mais comment va-t-elle se tirer tout à l'heure du Choral et de la Fugue de Franck, si elle ne sort pas de pareils moyens? Eh bien, elle n'en est pas sortie et elle nous a donné une interprétation de Franck qui a dû sa grandeur à l'esprit tout seul. Il n'y a rien d'aussi relatif que le monde des sons et la puissance n'y est point affaire de quantité. Mile Dron a su développer toute l'ampleur nécessaire, sans crier trop haut, sans frapper trop fort, parce qu'elle sait mesurer sa ligne et son arabesque. Elle a même le secret de notes tenues et de sonorités prolongées qu'elle obtient plutôt dans le silence que dans le bruit, si j'ose dire.

C'est d'un bel art et le public l'a compris. Il a fait un succès à Mile Dron qui, rappelée, a bien voulu donner quelque chose qui serait un fragment du Poème des Montagnes de V. d'Indy et qui n'a rien ajouté à notre admiration.

Le Prélude de Parsifal est à coup sûr l'un de ces sommets de l'œuvre wagnérienne dont je parlais naguère; il est désirable d'en enrichir nos programmes, il est peut-être impossible qu'il en soient privés. Est-il toutefois nécessaire que le maître de Bayreuth reparaisse chaque quinzaine comme

une inéluctable fatalité? Question de mesure, disions-nous; n'est-ce point sortir de la mesure? Il ne me déplaît pas de poser la question en présence d'une œuvre indiscutable. Nous y avons tous pris plaisir, soit. Mais n'y a-t-il point comme un parti pris de nous offrir le même plaisir chaque quinzaine? Il ne faut choquer personne et même pas les « auditeurs rétrogrades et incapables de progrès » que la Société des Concerts, par son « organe officiel » du 16 janvier, traite tout de mê.ne d'un peu haut. Toutes les bonnes volontés, semble-t-il, ont droit au respect.

L'orchestre a dit le Prélude de Parsifal comme il mérite d'être dit, avec une conviction émue, et il a été écouté avec le respect que l'on doit aux grandes œuvres. Je vous dis qu'aujourd'hui tout marche à souhait.

Même l'œuvre nouvelle et difficile de V. d'Indy, qu'on devrait bien nous faire entendre à nouveau pour nous permettre de renouer le fil qui s'est cassé de temps à autre à la première audition. Il me semble que, depuis le Jour d'été à la Montagne, M. d'Indy est devenu moins compliqué, moins recherché. Faut-il donc tant de chromatisme et de timbres. divers? et quelle nécessité de chercher des « clairines »>, d'ailleurs imparfaites, sur tous les gradins de l'orchestre? Musique descriptive, dit-on. Musique, heureusement, musique et vraiment inspirée dans le I et le III, 'Aurore et le Soir, qui, un peu chargés encore, m'ont paru plus clairs. Mais de demander à la musique de décrire le monde extérieur et non pas seulement nos sentiments en présence du monde extérieur, n'est-ce point forcer le sens de la musique? Je l'ai toujours cru et la nouvelle expérience de M. d'Indy n'a point encore atteint ma conviction. Mais qu'importe, si l'œuvre est belle, que chacun prenne son point de vue pour l'entendre?

Elle a mis en valeur aujourd'hui un artiste de l'orchestre qui parle haut et de qui on parle peu, notre trompette-solo. Il a ici un rôle considérable dont il se tire avec gloire.

Trompette lointaine, dit la notice analytique, et, pendant que j'écoutais cette trompette lointaine un soir à la montagne, je songeais à un autre soir d'été à la montagne où j'ai eu l'une des plus fortes impressions musicales de ma vie et sans tant de science. Après une longue journée de fatigue et d'enchantement, notre souper pris, assis sur une pierre à la porte du refuge, nous regardions la nuit monter des vallées et les champs de neige se poudrer de cendre. Une indicible sérénité entrait en nous avec le silence. « C'est trop beau, dis-je à mon compagnon, il nous faudrait un peu de musique. >>

L'invraisemblable souhait n'était pas fait que du fond du ciel, par delà je ne sais quel pic et quel névé, un appel de cor très lent monte vers nous, s'éteint, reprend en écho et meurt. Je crois bien que j'aurais voulu mourir moi-même. Frissonnants et tendus nous attendions la voix de la montagne soumise à mon désir. Le silence, l'impassible silence des cîmes ne fut plus troublé ce soir-là et dans notre âme chantait tout de même la plus belle musique du monde en présence de la plus grande beauté terrestre.

Avons-nous rêvé? Nous étions deux à faire le même rêve. Ou n'était-ce point un écho de la même voix mystérieuse qui criait au pilote Thamaus, sur le cap ionien, cette plainte fatidique et éternelle : Le grand Pan est mort!

G. DUFOUR.

Archives Ponts-de-Céiaises

Première Série

(Suite et fin)

QUATRIÈME PARTIE

L'Administration cantonale (1795-1800)

Le 5 fructidor an III (22 août 1795) était promulguée la Constitution de l'an III, qui organisait l'administration. municipale sur des bases tout autres que celles qui avaient présidé jusqu'alors à son fonctionnement.

Aux nombreuses paroisses, qui avaient été érigées en communes, elle substitua le groupe de communes et supprima les districts et l'administration qui en découlait. Soixante-dix cantons furent institués en Maine-et-Loire 1.

Le chef-lieu de chaque canton devient le siège d'un Conseil dit

ANTON DES

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DESPONTSLIBRES

Timbre humide en cuivre

de l'Administration cantonale
du Canton des Ponts-de-Cé
(1795)

Collection A. MICHEL
au Musée d'Archéologie d'Angers

Conseil général du canton, composé d'un président élu en assemblée primaire, d'un agent et de son adjoint, pour chacune des communes du canton, et d'un commissaire nommé par le Directoire du département représentant l'administration centrale chargée d'assurer l'exécution des

lois.

Cette répartition fut faite par le Directoire du département, le 29 vendémiaire an IV.

Juridiction. Le canton des Ponts-de-Cé qui, en 1790, ne comprenait que quatre communes, se trouva formé de sept Saint-Aubin et Saint-Maurille, déjà réunies sous le nom de Ponts libres, mais cependant divisées en deux sections; Montjolly (Sainte-Gemmes-sur-Loire); Aubance (Saint-Melaine); l'Ille-Verte (Saint-Jean-de-la-Croix); Meurs ou Mûrs; et Juigné-sur-Loire 1.

ÉLECTION DES MEMBRES DE LA NOUVELLE

ADMINISTRATION

Dès le 5 brumaire an IV (27 octobre 1795) le Directoire du district avait nommé, en qualité de commissaire provisoire du district près de l'administration cantonale, un commis du département nommé Bellœuvre, réfugié de la commune de Pré-Fleuri (Saint-Germain-des-Prés) dont il

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