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dressant au curé : « M.. le curé, dit-il, vous entendez: je vous ordonne de renvoyer impitoyablement toute élève de cette pension qui vous paraîtrait suspecte d'hérésie. » Et M. le curé de répondre à chaque interpellation : « Qui, monseigneur..>>>

On est stupéfait d'une telle usurpation de pouvoir! Aussi nos lecteurs partageront sans doute notre satisfaction en apprenant que la femme de ce courageux défenseur de la foi a déposé une plainte au conseil d'État, à l'effet d'obtenir l'autorisation de poursuivre M. Pavy, évêque d'Alger, et M. Lemauff, curé de la paroisse, pour abus de pouvoir dans leurs fonctions sacerdotales. C'est l'application du précepte apostolique : « Accusez devant tous, les prêtres prévaricateurs..»

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M. l'évêque de Montauban publie une lettre au Monde pour prouver que la cour de Rome condamne la liberté de conscience, la liberté de la presse, la tolérance. Il a parfaitement raison. Mais la cour de Rome a condamné de si bonnes choses, que ses jugements ne peuvent vraiment être considérés comme sans appel. La cour de Rome peut être fort puissante; mais l'Évangile et le bon sens sont des tribunaux dont elle relève, et qui la condamnent.

GUÉLON.

PARIS. ➡ IMPRIMERIE DE DUBUISSON ET CO, RUE COQ-HÉRON, 5.

CATHOLIQUE

REVUE

DES SCIENCES ECCLESIASTIQUES ET DES FAITS RELIGIEUX.

Omnia instaurare in Christo. Eph., I, 10.

SENTIMENT DE L'ANCIENNE ÉGLISE DE FRANCE

SUR LES PRÉROGATIVES DU PAPE, PROUVÉ PAR L'ÉCRITURE
ET LA TRADITION.

(Voir les nos des 1er et 16 mars, 1er et 16 avril, 1er et 16 mai,
1er et 16 juin, 1er et 16 juillet, 1er et 16 août.)

Seconde preuve tirée du onzième chapitre de l'Épître aux Romains, où l'apôtre annonce la réprobation des Gentils, et spécialement des Romains.

L'Église de Rome subsistera toujours, dit-on; elle aura toujours la foi de saint Pierre dans son évêque et dans ses ministres : toutes les Églises du monde seront toujours une seule et même Église par leur union avec elle. Plaise à Dieu que cela soit! Mais était-ce là votre espérance et votre pensée, illustre apôtre des Gentils, qui instruisîtes et formâtes le premier cette Église, en lui donnant saint Lin pour premier › évêque, lorsque, lui écrivant, vous lui disiez, après avoir relevé sa foi avec tant d'éloge : « Ne vous élevez point contre les branches naturelles; que, si vous pensez vous élever au-dessus d'elles, sachez que ce n'est pas vous qui soutenez la racine, mais que c'est la racine qui vous soutient.... Il est vrai, les branches naturelles ont été rompues, à cause de

leur incrédulité; et, pour vous, demeurez ferme dans votre oj! Ne vous élevez pas, mais craignez; car, si Dieu n'a point épargné les branches naturelles, prenez garde qu'il ne vous épargne pas non plus. En effet, si vous avez été coupé de l'olivier sauvage, qui était votre tige naturelle, pour être enté, contre l'ordre naturel sur l'olivier franc, à combien plus forte raison les branches naturelles seront-elles entées sur l'olivier franc, leur propre tronc (v. 18-24) ! »

1° On voit, par ce texte de l'apôtre, qu'il exhorte les Romains à ne pas s'élever de ce qu'ils ont reçu une foi ferme à la place des Juifs, mais à craindre de devenir infidèles comme

eux.

2° Il les menace d'être retranchés de l'olivier franc, s'il imitent l'orgueil des Juifs.

3o Ce qu'il vient d'affirmer sous condition, il l'affirme tout de suite absolument en prouvant par Isaïe qu'ils seront rappelés à la foi et entés de nouveau sur leur tige naturelle, en ajoutant, au verset 32, que Dieu en usera ainsi, parce qu'il veut exercer sa miséricorde envers tous.

4° Puisqu'il est donc certain que les Juifs se convertiront, et que le temps de leur conversion est attaché à l'incrédulité des Romains ou des Gentils, il est certain, en conséquence, que les Romains tomberont dans l'incrédulité.

D'ailleurs, quand même cette menace de saint Paul ne serait que conditionnelle, la preuve n'en perdrait rien de sa force; car, dans cette hypothèse, comment saint Paul auraitil pu exhorter l'Église romaine à craindre un retranchement? Peut-on menacer d'un retranchement une Église que l'on sait avoir une promesse absolue d'indéfectibilité? L'apôtre ne la regardait donc pas comme indéfectible, puisqu'il supposait qu'elle pût devenir infidèle.

Troisième preuve tirée du silence des Pères

Si l'Église de Rome était indéfectible, que n'auraient pas dit de cette Église un Cyprien, un Chrysostôme, un Basile, un Ambroise, un Augustin, dans les panégyriques qu'ils faisaient, chaque année, à la fête de saint Pierre et de saint

Paul? Ne se seraient-ils pas empressés, dans les disputes el les contestations qui, dans leurs Églises, s'élevaient sur la foi, de recourir à cette source de lumière, à ce soleil indéfectible de toute l'Église? Cependant nous voyons qu'aucun des Pères n'a fait mention de ce privilége; et, bien loin qu'ils aient eu recours à Rome dans leurs contestations, ils ont, au contraire, quelquefois défendu d'y recourir. Donc tout ce qu'on débite de Rome à ce sujet n'est qu'une chimère.

Quatrième preuve tirée de l'usage et de la nécessité des conciles.

L'Église de Rome ne peut jamais tomber dans aucune erreur, s'il est vrai qu'elle soit indéfectible; donc elle a été et sera toujours infaillible dans la foi. S'il s'élève des disputes dans l'Église, il n'y a qu'à la consulter; et, comme elle ne peut errer, elle discernera le vrai du faux; la dispute sera finie aussitôt que Rome aura parlé. Or, si ceci est un article de foi, l'Église a dû le croire dans tous les temps; et si elle a dû le croire, que telle ait été et que ce soit encore sa croyance, pourquoi assembler à tant de frais, de peines, de fatigues, de dangers, des conciles généraux, nationaux, et même provinciaux, qu'on sait ne pas être infaillibles dans leurs décisions? Puis donc que l'Église a jugé de tout temps que la tenue fréquente des conciles était non-seulement utile, mais même nécessaire, il en résulte qu'elle a cru qu'il n'y avait sur la terre aucune Église qui fût infaillible dans ses décisions, ni, par conséquent, indéfectible dans sa foi.

Cinquième preuve tirée des formulaires contre Jansenius.

M. Nicole dit que l'évêque de Rome ne tombera jamais dans une erreur qui entraîne son Eglise ou le saint-siége, parce que cette Eglise est le centre de l'unité.

Ils n'ont érigé en dogme aucune erreur, dit-on. Mais quoi! n'ont-ils pas défini leurs faux principes dans plusieurs conciles qu'ils appellent généraux? N'ont-ils pas fait décider, dans le quatrième concile de Latran, qu'un prince souverain hérétique était par cela même indigne de la couronne

et déchu de tous droits à ses Etats; qu'il appartenait à l'Eglise, c'est-à-dire au pape, de lui donner un successeur; Cependant presque tous les théologiens ne rougissent pas d'employer l'autorité de ces conciles pour prouver que la primauté divine de juridiction est un dogme de foi décidé par l'Eglise universelle. Mais quand même l'Eglise de Rome n'aurait érigé en dogme aucune erreur, n'a-t-elle pas con+ damné les cinq propositions fabriquées en haine de la grâce efficace, sans jamais vouloir expliquer dans quel sens elle les condamnait (ces propositions étant susceptibles d'un bon et d'un mauvais sens), frappant d'excommunication tous ceux qui ne condamneraient pas ces cinq propositions, et qui ne jureraient pas sur Dieu que ces cinq propositions sont dans Jansénius, et qu'elles sont condamnées dans le sens de l'auteur?

Inutilement a-t-on réclamé l'équité naturelle en disant qu'il n'était pas juste de condamner sans distinction des propositions susceptibles d'un bon et d'un mauvais sens, comme il ne serait pas juste de condamner tous les prisonniers indifféremment, parce que la plupart méritent la mort. Or, ces cinq propositions étant équivoques, en renferment nécessairement cinq bonnes et cinq mauvaises; par conséquent, les condamner sans distinction, c'est condamner le vrai et le faux tout à la fois. Mais combien l'injustice estelle plus criante, s'il est évident et notoire que Jansénius n'a enseigné que la grâce efficace, et que ses adversaires sont convaincus d'être pélagiens? Or, Rome en a la preuve dans ses archives. La condamnation de la doctrine des jésuites portée dans les congrégations de auxiliis sera présentée au jour du jugement aux yeux des papes qui ont condamné les cinq propositions fabriquées par les ennemis de la grâce. D'ailleurs qui a jamais vu les cinq propositions dans Jansénius, sinon ceux qui ont mérité de voir l'édition faite par les ésuites, dans laquelle ils les ont insérées? Et qui est-ce qui peut voir dans l'esprit et dans la volonté de ce même prélat l'intention que l'on fait jurer qu'il a eue?

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