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nisme et de soi-disant libéralisme religieux ? Cet abbé a parlé avec éloge d'un ouvrage de l'ex-jésuite, aujourd'hui abbé Passaglia, sur le pouvoir temporel de la papauté, composé à la demande de Pie IX. Il paraît que ce livre n'a pas plu au cardinal Antonelli, à cause de certaines tendances libérates à la manière du libéralisme de l'Ami de la Religion. On peut croire en conséquence qu'il y avait quelque chose de passablement vague dans les conclusions de M. l'abbé Passaglia. Mais comme le mot d'ordre est donné, et qu'il faut transformer en question de foi le temporel du pape, on ne peut souffrir à Rome qu'on y porte la plus légère atteinte même indirecte. Nous croyons donc que M. l'abbé Passaglia, au lieu de perdre son temps à composer un livre qui ne pouvait satisfaire personne, eût mieux fait de vérifier les textes qu'il a accumulés dans son indigeste compilation sur le nouveau dogme; il eût ainsi acquis la preuve qu'ils sont tous tronqués, falsifiés, pris en un sens erroné. Il les eût donc biffés, ce qui aurait réduit son livre à l'état fort intéressant d'une collection de feuilles de papier immaculé. Il eût rendu, par ce travail, un vrai service à sa réputation et aux personnes qu'il a trompées ou fait tromper par tous les écrivassiers auxquels il a fourni de l'érudition polyglotte en faveur du nouveau dogme.

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Le Monde annonce que M. Chantrel, son principal rédacteur, va publier une Histoire des papes pour répondre à toutes les attaques dont la papauté a été l'objet. Très bien ; la méthode est bonne. Seulement nous engageons M. Chantrel à ne rien oublier. Autrement il pourrait provoquer une contre-partie. Or, nous craignons bien que M. Chantrel, s'il est exact, prouve exactement le contraire de ce qu'il a en vue. Attendons. Quand nous aurons son livre, nous en dirons notre avis.

-M. Dulac nous apprend que la coterie ultramontaine est bien décidément divisée en deux partis : la vieille et la nouvelle école. La vieille école est celle de feu l'Univers. Coupée

c'est le parti de

en deux et séparée de sa tête, elle se débat de son mieux dans le Monde en attendant sa mort qui ne peut être éloignée. La nouvelle école affecte des airs libéraux; elle grimace à tout propos le mot de liberté MM. Dupanloup et Montalembert. Dans la dernière lutte sur le pouvoir temporel du pape, la vieille école a fait preuve d'une platitude et d'une stérilité dignes d'une queue privée de sa tête. La nouvelle école, au contraire, a fait un fracas digne d'écoliers émancipés. Mais au milieu de ce fracas, elle a laissé échapper quelques mots qui autorisent les sottes récriminations de ce sot esprit moderne qui ne sait ce qu'il dit. Sur ce, M. Dulac, ex-clerc minoré, ex-bénédictin, et en conséquence, semi-clerc, semi-moine et semi-laïque, s'adresse ainsi à la nouvelle école, avec l'autorité que lui donne cette triple auréole, sans compter celle du talent que nous mentionnons pour mémoire :

« Nous ne parlerons pas des sentiments de vénération et d'amour pour la papauté qui sont dans le cœur de tous les catholiques; la nouvelle école les partage et les exprime avec éloquence; s'il lui arrive de faire entendre des paroles qui peuvent les blesser, c'est sans le savoir et sans le vouloir; mais nous demanderons s'il y a quelque justice à appeler Rome d'un nom qui donne d'elle des idées si fausses, si contraires à la réalité, d'un nom dont les partis ennemis de l'Eglise peuvent se faire une arme, et que la foule peut ramasser comme une injure ?

» Déjà cette invention d'une école, que semble inspirer le génie de la confusion et de l'équivoque, commence à porter ses fruits. De braves gens viennent nous demander si réellement cet affreux ancien régime, qu'ils croyaient définitivement aboli, subsiste encore à Rome, et s'il est vrai que les ultramontains ont entrepris de le rétablir en France? Hier, le moyen âge; aujourd'hui, l'ancien régime! Toujours la même intelligence et, chez les meneurs, la même bonne foi! >> Dulac.) Voyez-vous ces oraves gens qui von. en procession au

n° 13 de la rue de Grenelle pour savoir si la cour de Rome veut rétablir en France l'ancien régime? Comme M. Dulac doit plaider éloquemment contre cette pieuse école d'étourdis qui ne savent pas ce qu'ils veulent, qui semblent inspirés par le génie de la confusion et de l'équivoque! Il nous semble que le génie de l'équivoque c'est l'esprit de la Compagnie des Jésuites. Ne serait-ce pas ce génie qui inspirerait la veille aussi bien que la nouvelle école ultramontaine?

-Le Monde, par l'organe de M. Dulac, résume,ainsi une brochure de M. Doney, évêque de Montauban :

« Dans l'écrit que Mgr l'évêque de Montauban a tout récemment publié sous ce titre : De la conspiration contre l'Eglise et les Etats monarchiques, la question romaine est traitée à un point de vue tout nouveau. Allant au fond des choses, le savant prélat démontre que la cause première des attaques dirigées aujourd'hui contre le pouvoir temporel de la papauté est la révolte des esprits contre les principes qui, jusqu'à nos jours, ont régi les sociétés chrétiennes; et que la fin dernière, le but suprême de cette guerre, est l'abolition complète de toutes les lois et institutions sociales dont ces principes sont la seule raison d'être, et la création d'un ordre nouveau fondé sur les principes contraires, c'est-à-dire d'un ordre ou les sociétés humaines seraient entièrement soustraites dans leur pouvoir, leurs lois et leurs institutions, à l'action du pouvoir, des lois, des institutions de cette société divine qui s'appelle l'Eglise catholique, et où la religion perdrait tout coractère social, pour n'être plus qu'une affaire particulière abandonnée aux caprices de chaque individu. On voit que Mgr Doney est d'accord sur un point avec l'école catholique libérale; il admet comme elle que le malheur du gouvernement papal, la cause vraie de tout ce qui se fait aujourd'hui contre lui, est d'être un gouvernement fondé sur les anciens principes, ou plutôt d'être le seul gouvernement qui ait le courage de les proclamer et de les maintenir; mais bien loin d'en conclure avec elle que ces prin

cipes sont surannés, faux par conséquent, et que Rome doit Les rejeter, il prouve que ces principes sont vrais, par consé quent éternels; que Rome, que tout chrétien, que tout être raisonnable doit leur rester fidèle. »

M. Dulac ne s'est pas aperçu qu'il se contredisait luimême en parlant ainsi. Il reproche, d'un côté, à la nouvelle école ultramontaine d'accuser la cour de Rome de se montrer favorable à l'ancien régime, et il félicite, de l'autre, M. l'évêque de Montauban de mettre la vérité dans les principes qui ont dirigé cet état de choses dans la vieille société. Il devrait dire plus nettement : Les institutions sociales d'autrefois et les principes qui les ont inspirées ont nos sympathies, comme ils ont celles de la cour de Rome: donc nous sommes pour l'ancien régime avec la cour de Rome; la nouvelle école, par son libéralisme plus ou moins sincère, se sépare de Rome et tombe par conséquent dans le schisme et dans l'hérésie. Ce serait là, du moins, un raisonnement très clair et très logique. Si l'ancien régime est catholique, comme l'affirme M. Doney, le régime actuel est hérétique : ceci est évident. Tout ultramontain, après la bulle de Grégoire XVI contre le lamennaisianisme et la dernière bulle de Pie IX, est obligé d'admettre cette conséquence. Nous sommes étonnés que M. Dulac perde son temps à reprocher à la nouvelle école de décrier indirectement la cour de Rome, lorsqu'il pourrait si bien lui dire : Ce que vous reprochez à Rome est la vérité catholique; donc, selon Sa Grandeur de Montauban, vous êtes des hérétiques. Ce serait plutôt fait.

GULLON.

PARIS. —— IMPRIMERIE DE DUBUISSON ET C. RUE C Q-HÉRON, S.

CATHOLIQUE

REVUE

DES SCIENCES ECCLESIASTIQUES ET DES FAITS RELIGIEUX

Omnia instaurare in Christo. Eph., I, 10.

DE L'EXCOMMUNICATION.

On parle beaucoup aujourd'hui d'une certaine excommunication prononcée par Pie IX. L'ultramontanisme s'apprêtait à en tirer bon parti, lorsque le gouvernement a rappelé, par le Moniteur, cette disposition des Articles Organiques du Concordat de 1801 :

« Aucune Bulle, Bref, Rescrit, Décret, Mandat, Provision, Signature servant de Provision, ni autres expéditions de la cour de Rome, même ne concernant que les particuliers, ne pourront être reçues, publiées, imprimées, ni autrement mises à exécution sans l'autorisation du gouvernement. » (Tit. I, art. 1er.)

Cette disposition des Articles Organiques est conforme à l'ancien Droit civil ecclésiastique de l'Eglise de France; nos ultramontains n'en contestent pas moins la légitimité, et Ami de la Religion, par l'organe de M. l'abbé Sisson, crut pouvoir, à propos de la note du Moniteur, attaquer les Articles Organiques, et soutenir cette thèse, qui est devenue commune dans l'enseignement ecclésiastique: que ces articles, n'ayant pas été agréés par le pape, n'ont pas force de loi en France. Il pouvait d'autant moins plaider cette mau

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