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manent à tous les prévaricateurs. Les monitions préalables sont réservées pour les censures comminatoires, sententiæ ferendæ, comme parle l'École.

» Mais, dans l'espèce, le juge doit prononcer une sentence déclaratoire après avoir entendu l'accusé, l'Église ne condamnant personne saus l'entendre.

>> En acceptant les détails et les faits avancés par le Constitutionnel, il faut les traduire ainsi en français :

Pie IX a écrit à Victor-Emmanuel une lettre pour l'avertir que ses actes tombent sous le coup des peines portées par les décrets du concile de Trente et des souverainspontifes, et lui demander connaissance des raisons pouvant atténuer ou justifier sa conduite. La réponse royale n'ayant point paru acceptable, le juge a prononcé la sentence déclaratoire qui constate, à l'extérieur, que le roi est réellement atteint par les foudres de l'Église. Mais avant cette ⚫ sentence (le second monitoire du Constitutionnel), il était déjà personnellement frappé. Maintenant, nul ne peut en ignorer.

» Seulement, le saint-père, pour ne pas inquiéter les consciences des sujets catholiques, permet de regarder le souverain comme un excommunié toléré et non dénoncé. Leurs rapports avec le maître ne les exposeront point à encourir l'excommunication mineure.

» Pie VII avait fait les mêmes réserves miséricordieuses dans sa Bulle du 10 juin 1809, pour un cas analogue. Mais cette indulgence du pape n'est qu'en faveur des fidèles; le coupable est toujours obligé de se conduire comme excommunié, la censure ayant tous ses effets par rapport à lui. >> J.-M. DuFour. »

Le Monde, qui engage le Constitutionnel à étudier le droit canonique, devrait bien l'étudier lui-même. Il apprendrait 1. qu'aucune sentence d'excommunication ne peut être prononcée dans la cause dont il s'agit; 2° que le concile de Trente n'a parlé que des biens ecclésiastiques, c'est-à

dire des biens consacrés à Dieu et destinés à l'entretien de l'Église, du clergé et des pauvres, par les donateurs; et non du domaine royal du pape ; 3° enfin qu'il ne peut soutenir plusieurs points de sa théorie sans blesser le droit civil ecclésiastique de France, auquel il doit être soumis en sa qualité de catholique français.

Nous engageons donc le Monde à faire un peu moins de pédantisme et à acquérir un peu plus de science ecclésiastique.

L'Ami de la Religion a tendu un piége au Monde. Il a cité une page de M. Parisis, évêque d'Arras, comme une œuvre de son crû, et M. Dulac s'est escrimé contre l'illustre Mentor du Monde, M. Parisis, en croyant s'escrimer contre M. l'abbé Sisson. Comme on le voit, nos ultramontains s'amusent. M. Dulac se tire comme il peut du mauvais pas où on l'a mis; il emploie surtout pour cela des citations de M. Parisis, qui ne prouvent qu'une chose : c'est que M. l'évêque d'Arras possède plusieurs doctrines, dont il fait alternativement usage, selon les circonstances.

-M. Dupin aîné a prononcé au Sénat un excellent discours sur la papauté. Nous regrettons de n'avoir pas le droit de le reproduire. Nous le signalons done seulement à nos lecteurs. Ils y retrouveront la plupart des idées que nous avons émises nous-mêmes en diverses circonstances. Nous sommes flattés d'être d'accord avec un jurisconsulte canoniste aussi savant et aussi distingué que M. Dupin.

GUÉLON.

PARIS. — IMPRIMERIE DE DUBUISSON ET Ce, RUE COQ-HÉRON, 5.

CATHOLIQUE

REVUE

DES SCIENCES ECCLESIASTIQUES ET DES FAITS RELIGIEUX

Omnia instaurare in Christo. Eph., I, 10.

SENTIMENT DE L'ANCIENNE ÉGLISE DE FRANCE

SUR LES PRÉROGATIVES DU PAPE PROUVÉ PAR L'ÉCRITURE
ET LA TRADITION.

(Voir les numéros des 1er et 16 mars, 1er et 16 avril.)

Examen de la doctrine de saint Augustin.

En examinant la doctrine de saint. Cyprien, de saint Jean Chrysostome et surtout de saint Jérôme, j'ai eu beaucoup de triage à faire pour éclaircir les endroits dont les ultramontains abusent; mais, en examinant celle de saint Augustin, je n'aurai qu'à transcrire ses textes et à les traduire sans presque entrer dans aucune discussion; parce qu'à l'exception de deux ou trois, où il y a obscurité, tout y est clair et sans ambiguité. S'il emploie quelques termes dont on pourrait abuser, comme celui de premier, de primauté ou de principauté, qu'il attribue à saint Pierre, toutes les fois qu'il en parle, il ne manque pas de l'expliquer ou en l'opposant à quelqu'autre qui en détermine le sens, ou en

donnant ailleurs une définition claire de ces termes, comme nous l'allons voir. Je commencerai par exposer les principes que les ultramontains prétendent établir sur l'autorité de ce Père:

1° Saint Augustin, disent-ils, ne parle jamais de saint Pierre sans l'appeler, comme nous venons de le dire, le premier ou le prince des apôtres.

2o En parlant de sa primauté, il l'appelle une grâce excellente; et comment serait-elle une grâce excellente, si elle n'était qu'une primauté de rang ou de temps ou de qualités personnelles ?

3. Il applique et permet d'appliquer à la personne même ́de saint Pierre les paroles de Jésus-Christ : « Je bâtirai mon Église sur cette pierre. >>

4° Il reconnaît que saint Pierre a été le premier êvêque de Rome.

5o Il dit enfin, en parlant de l'Église de Rome, que la principauté de la chaire apostolique y a toujours été en vigueur. Telles sont les expressions de ce Père dans plusieurs textes; mais pour que les ultramontains en tirent avantage, il ne leur suffit pas de prouver qu'il a employé des expressions équivoques, il faut encore qu'ils prouvent qu'il les a employées dans le sens qu'il leur plaît de leur donner. Ainsi, ils ont à prouver 1° que saint Augustin entend par la primauté qu'il donne à saint Pierre, une primauté d'honneur et de juridiction qui est celle qu'ils admettent; 2° que ce Père n'a pu ni dû regarder comme une grâce singulière et éminente dans saint Pierre d'avoir été appelé à part et le premier à la plus grande dignité qui puisse être au monde, je veux dire l'apostolat; 3° qu'en appliquant et en permettant d'appliquer à la personne même de saint Pierre les paroles de Jésus-Christ : « Je bâtirai mon Église sur cette pierre,» il donne cette explication pour l'unique ou la meilleure, ou qu'en l'appliquant à saint Pierre il ne l'applique qu'à lui seul; 4o qu'il a cru et enseigné que, quand saint Pierre parlait seul à Jésus-Christ, il ne parlait qu'en

son nom; que, quand Jésus-Christ répondait, il ne répondait qu'à lui seul; que, quand Jésus-Christ lui promettait les clefs du royaume des cieux, ou lui ordonnait de paître ses brebis, il ne faisait pas la même promesse ou ne donnait pas le même ordre à tous et à chacun des apôtres; 5° enfin, qu'il a cru et enseigné que tous les apôtres n'étaient pas égaux, et que saint Pierre les gouvernait avec autorité, comme étant leur supérieur, et que c'est là la principauté de la chaire apostolique qui a toujours été en vigueur dans l'Église romaine.

Voilà ce qu'ont à prouver les ultramontains; mais je les défie hardiment de citer aucun texte de ce Père, qui favorise clairement et sans équivoque aucuns de leurs principes, si ce n'est l'épiscopat de saint Pierre à Rome, que nous examinerons ailleurs. Je vais au contraire leur prouver, par un grand nombre de textes clairs et précis, que la doctrine de ce Père leur est opposée dans tous les articles, Venons au détail.

1° En parlant de saint Pierre, saint Augustin l'appelle toujours le premier ou le prince des apôtres; mais il établit, dans le sermon 316, De diversis, que saint Pierre était le premier des apôtres, comme saint Étienne était le premier des diacres. Est-ce là reconnaître une primauté juridictionnelle dans saint Pierre? Cette primauté, comme on le voit, est une primauté de rang ou de qualités personnelles qui a été reconnue par Origène et par saint Jérôme : le premier, en disant que saint Pierre était premier comme Judas était le dernier entre les apôtres; et, le second, en disant que saint Pierre, sur qui l'Église a été bâtie, était prince des apôtres comme Aristote et Platon étaient princes des philosophes. Ailleurs, il reconnaît, avec saint Jean Chrysostome, dans saint Pierre une primauté de temps. « Le courageux et l'humble, dit-il, en faisant le parallèle de ce saint apôtre et de saint Paul (serm. 10 sur saint Pierre et saint Paul), le premier et le dernier, c'est-à-dire Pierre et Paul, ont été compagnons par la qualité de leurs mérites, égaux dans

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