Page images
PDF
EPUB

Art. 117.

trois bassins du même poids. Quelques combinaisons que l'on puisse imaginer, tenons pour certain qu'il y aura lieu à déclarer le partage d'opinions, toutes les fois que le résultat de la délibération ne donnera pas aux voix les plus faibles en nombre un choix à faire entre les plus fortes. « Au reste, comme disait le tribunat dans ses observations sur l'art. 117 du Code, il faut se confier à la prudence des juges qui seront excités par le zèle de leurs fonctions à trouver le moyen de s'entendre. "}

Les règles du droit romain, sur cette matière, ne ressemblaient point aux nôtres. Dans l'hypothèse de trois juges, dont l'un aurait condamné à quinze écus, le second à dix, et le troisième à cinq, la sentence s'arrêtait à la plus faible somme, parce que le moins étant dans le plus, les voix étaient réputées unanimes pour les cinq écus: Quia in hanc summam omnes consenserunt (1).

Quand le nombre des voix était égal des deux côtés, le défendeur gagnait son procès, à moins qu'il ne fût question de dot, de testament, de liberté. Alors on ne considérait plus les qualités des parties; c'était le parti de la liberté, du testament, ou de la dot, qui l'emportait (2).

Chez nous, c'est dans les affaires criminelles seulement que le partage d'opinions équivaut à un acquittement: In pœnalibus, humanitatis ratione (a).

Le premier devoir d'un juge est écrit dans ces mots : Si judicas cognosce; ce qui s'entend, non d'une simple notion qu'il peut avoir de l'affaire par des circonstances qui lui sont personnelles, mais d'une connaissance judiciaire acquise dans les formes que prescrit la loi. En ce qui concerne la juridiction contentieuse, il est obligé de décider secundum

(1) Si ex tribus arbitris, unus quindecim, alius decem, tertius quinque condemnent, cui sententiæ stetur? Et Julianus scribit quinque debere præstari, quia in hanc summam omnes consenserunt. L. 27, § 5, ff. de receptis, etc.

(2) Inter pares numero judices, si dissonæ sententiæ proferantur, in liberalibus quidem causis pro libertate statutum obtinet; IN ALIIS AUTEM CAU

116.

allegata et probata. Il doit ne rien savoir Art. des faits de la cause que par ce qu'il apprend à l'audience, et ne pas se donner pour témoin à lui-même.

Un jugement sera donc nul si parmi les magistrats qui prennent part à la délibération et à la prononciation, il en est qui n'avaient pas assisté à toutes les audiences de la cause (3).

Inférer de là que les mêmes juges qui assistaient à l'audience, dans une enquête, une expertise ou toute autre vérification ont été ordonnées, doivent nécessairement se retrouver sur le siége, pour entendre les discussions qui suivent l'interlocutoire, et pour rendre le jugement dernier, ce serait outrer l'application du principe, ce serait souvent exiger l'impossible. Les conclusions que reprennent les avoués, les plaidoiries qui rappellent tous les errements antérieurs, forment une instruction distincte de ce qui avait été dit ou écrit d'abord, pour fixer les questions du procès; et des juges nouveaux peuvent, en définitive, venir statuer sur ces questions, sans qu'on puisse leur reprocher de ne pas les connaître légalement.

Les alliances qui s'étaient formées entre les gens de robe, les survivances anticipées qui faisaient siéger le fils à côté du père, avaient, presque partout, fait des tribunaux le patrimoine de quelques maisons; l'opinion d'une famille y jugeait les procès. Dès l'année 1750, les états assemblés avaient remontré, dans leurs doléances, les dangers de cette parentéle, et le chancelier de l'Hôpital avait cru y avoir mis bon ordre par l'ordonnance d'Orléans. «Ne seront reçus, disait l'article 52, en un même parlement, chambre des comptes, ou autres cours souveraines, ni en un même siége, le père et le fils, deux frères, l'oncle

SIS, PRO REO. L. 58, ff. de re judicatâ. Voyez aussi L. 7), ff. de jure dotium, 85 ff. de regulis juris, et 10 ff. de inofficioso testamento.

(a) En cas de dissentiment, la minorité des juges ne peut ni protester ni refuser de signer la minute des jugements. (Dalloz, t. 22, p. 25.) (3) Loi du 20 avril 1810, art. 7.

Art. 116.

et le neveu; et avons, dès à présent, déclaré nulles toutes lettres de dispense qui seraient obtenues au contraire, pour quelque cause et occasion que ce soit. »

L'article 85 de l'ordonnance de Moulins témoigne assez que la précédente avait été fort mal observée.

Les états de Blois firent à ce sujet de nouvelles remontrances, et l'édit de 1579 « pour obvier aux récusations, et pourvoir aux plaintes qu'on faisait ordinairement des grandes alliances qui étaient entre les offi'ciers de la justice, » prescrivit de garder inviolablement l'article 52 de l'ordonnance d'Orléans.

Louis XIV étendit ces dispositions aux alliés du second degré, c'est-à-dire au beaupère et au gendre, et aux deux beaux-frères, à peine de nullité des provisions et des réceptions qui seraient faites, et de la perte des offices. Il fit plus, il défendit aux titulaires reçus et servant dans les cours et siéges, de contracter alliance au premier degré, et, en cas de contravention, l'office du dernier reçu devra être déclaré vacant au profit de TÉtat (1).

La volonté de Louis XIV ne fut pas plus religieusement respectée que celle des rois ses prédécesseurs. L'ambitieuse ténacité des familles parlementaires protégea la résistance et les prétentions des siéges inférieurs. Il fallut céder et accorder des dispenses. On publia, pour tout remède, un édit portant que les avis des juges, parents ou alliés aux degrés de père et de fils, d'oncle et 'de neveu, de frère, de beau-père, gendre et beau-frère, ne seraient comptés que pour un, lorsqu'ils seraient uniformes (2). De là des difficultés sans nombre pour l'expédition des affaires, des renvois et des évocations qui jetaient les plaideurs dans des juridictions lointaines. Commodius erat illis causam perdere, quàm aliquid per talia dispendia conquirere. Les choses étaient dans cet état, à l'époque

(1) Édit du mois d'août 1669.

(2) Cet édit du mois de janvier 1681 fut interprété par une déclaration du 30 septembre 1728, laquelle décide que le terme de beaux-frères comprend les maris des deux sœurs, et que celui de beau-père doit

116.

de l'organisation judiciaire de 1790. Une loi Art. du 11 septembre de la mème année fit revivre les anciennes ordonnances; l'incompatibilité des parents et alliés fut étendue jusqu'au degré de cousin issu de germain inclusivement. Elle fut restreinte aux cousins germains par la constitution de l'an III. Plus de dispenses, et par conséquent plus de confusion de voix. Si deux parents ou alliés au degré prohibé se trouvaient élus, l'élection du dernier était comme non avenue. Toutefois, dans le cas d'une alliance contractée par un juge avec un autre juge du mème tribunal, après leur élection, on faisait porter l'exclusion sur celui qui avait contracté l'alliance, comme ayant été seul et la cause et l'objet (3).

Dans ce temps-là, les juges étaient choisis par les assemblées électorales. Mais en l'an VIII, ils durent être nommés par le chef du gouvernement, et la loi du 27 ventôse resta muette sur les incompatibilités résultant de la parenté. Le Code de procédure n'en parla pas davantage. Les uns prétendirent que c'était un oubli, et les autres que c'était une abrogation.

Le conseil d'État ayant été consulté en 1807, il estima, non-seulement que ce silence équivalait à une confirmation des anciennes traditions de la monarchie, mais encore qu'il fallait y sous-entendre un surcroît de prérogatives en faveur de la couronne.

Voici son avis, qui fut approuvé le 15 avril.

<< Considérant que la loi du 27 ventose an VIII, qui a donné à Sa Majesté la nomination des membres des tribunaux, n'a rappelé aucune des dispositions des lois précédentes sur l'incompatibilité dont il s'agit : d'où il suit qu'elle n'a point limité les pouvoirs de Sa Majesté; qu'elle a laissé à sa sagesse le soin d'appeler les plus capables, sans égard, s'il en était besoin, à leurs parentés, et qu'elle a supposé qu'en tout cas sa nomination emporterait dispense de plein droit.

s'entendre également, et du juge dont un autre du même siége a épousé la fille, et de celui qui a épousé la mère d'un de ses collègues.

(3) Décret du 29 septembre 1793.

Art. 116.

(Ici le conseil considère assez longuement que la loi du 11 septembre 1790 a subi des restrictions par la constitution de l'an III; que ces lois ne peuvent convenir au nouvel ordre de choses; qu'il n'y en a plus d'autre que celle du 27 ventose an vIII, laquelle est muette sur les incompatibilités.)

« Considérant que Sa Majesté peut, sans diminuer la prérogative qu'elle tient de cette loi (du 27 ventose an VIII), en régler l'usage de manière à prévenir les inconvénients ou les suspicions qui peuvent résulter des parentés ou alliances entre les membres d'un même tribunal, et cependant passer sur ces inconvénients, lorsque la nature des circonstances et la qualité des sujets l'exigeront; qu'elle userait en cela du droit des rois qui étaient en possession d'accorder des dispenses de parenté;

«Est d'avis que Sa Majesté pourrait prescrire au grand juge ministre de la justice de ne lui présenter aucun candidat pour les places de juge, de suppléant, pour celles du ministère public, celles de greffier, de commis greffier, dans les cours ou tribunaux de justice civile ou criminelle, qu'il ne se soit assuré, par des certificats des présidents des cours ou tribunaux dans lesquels il s'agira de nommer, ou par toute autre voie qui paraîtra convenable, si les candidats sont ou non parents ou alliés des membres exerçant déjà dans lesdites cours ou tribunaux, jusgu'au degré de cousin germain inclusivement. Ainsi, le choix de Sa Majesté sera éclairé sur ce fait ou elle s'abstiendrait de nommer le candidat qui aurait un parent dans le tribunal, ou, si elle le nommait, ce serait par des considérations qui emporteraient implicitement une dispense donnée en connaissance de

cause.

« Le conseil pense au surplus que, dans le cas où des parents ou alliés au degré de cousin germain inclusivement, opinent dans la même cause, l'ancienne règle, que leurs voix ne comptent que pour une, s'ils sont du même avis, doit être observée. »

La loi du 20 avril 1810 est survenue; son article 63 porte que les parents et alliés, jusqu'au degré d'oncle et de neveu inclusive

116.

ment, ne pourront simultanément être mem- Art. bres d'un même tribunal, ou d'une même cour, soit comme juges, soit comme officiers du ministère public, ou comme greffiers, sans avoir obtenu une dispense; qu'il n'en sera accordé aucune pour les tribunaux composés de moins de huit juges.

Une sorte de fatalité semble s'être attachée à cette matière d'incompatibilité. La loi du 20 avril 1810 ne contient pas un seul mot sur la computation des voix parentes ou alliées, qui auraient reçu la faveur d'une dispense.

On s'est donc repris à dire que c'était une dérogation à l'avis du conseil d'État, et à cette disposition offensante qui supposait que deux juges, parce qu'ils sont parents, ne peuvent avoir la même liberté de conscience, et le même amour de la justice. Mais la cour de cassation a décidé : « Que la loi de 1810 n'avait pu recréer le recours aux dispenses, à raison d'incompatibilité au degré prohibé, qu'avec le remède de la confusion des voix conformes, lequel atténue ainsi les inconvénients qui résulteraient autrement de l'influence du concours de proches parents, dans le jugement des causes dont ils seraient juges ensemble (1). » Cette difficulté n'a plus été élevée.

Il serait permis, peut-être, de regretter ces prohibitions franches et absolues de nos vieilles ordonnances, que la loi du 11 septembre 1790 avait fait revivre, et qui ne voulaient pas que des parents ou des alliés fussent membres d'un même tribunal. Il y a, dans l'administration de la justice, des susceptibilités qu'il faut à la fois comprendre et ménager. Il n'est pas impossible qu'une séduction tout innocente s'exerce entre des parents, pour faire triompher un avis; que les sentiments les plus purs et les plus honorables, des habitudes de respect et de confiance, fassent à l'opinion d'un père ou d'un oncle l'hommage involontaire de l'opinion d'un fils ou d'un neveu. Ce n'est pas une bonne loi que celle qui donne et qui entretient des préventions contre les juges.

(1) Journal des audiences de la cour de cassation, t. 21, 1re part., p. 299.

Art. 116.

Confondre les voix des parents dans une seule, lorsqu'elles sont semblables, c'est un remède qui peut aigrir le mal, décomposer les tribunaux, entraver le service, produire des résultats bizarres, et mêler de nouveaux doutes aux questions du procès.

Par exemple, je plaide dans une cour royale, devant neuf conseillers. J'ai cinq voix pour moi; je devrais avoir gagné mon procès. Non. Deux de messieurs qui ont voté en ma faveur sont parents au degré prohibé; leurs voix n'en font qu'une; il y a partage. J'aurais gagné s'ils eussent été un peu moins proches.

Autre résultat : l'audience est formée du nombre des juges indispensablement exige pour la validité d'un jugement; je plaide en toute sécurité, et j'obtiens gain de cause. Mais deux des juges étant alliés au degré prohibé, leurs voix pouvaient être réduites à une seule; et, sans qu'il soit besoin de rechercher s'il y a eu, ou non, conformité entre les opinions qu'ils ont émises, le jugement est nul, parce que la composition du tribunal était incertaine.

Il est facile de prouver la possibilité du fait, et la réalité du droit.

L'appel d'un jugement correctionnel avait été porté devant le tribunal de Montbrison. Il fallait cinq juges, aux termes de l'art. 40 de la loi du 20 avril 1810. Parmi les cinq juges qui montèrent sur le siége, deux étaient alliés. Il y eut pourvoi; le jugement d'appel fut cassé par les motifs qui suivent :

<«< Attendu que le nombre des juges exigé par la loi, pour la validité des jugements, doit toujours être certain, apparent et indépendant des chances et du secret des délibérations;

[ocr errors][merged small][merged small]

116.

partie civile, et souvent à la vindicte publique; Art. « Que néanmoins un partage pourrait souvent avoir lieu dans un tribunal qui ne serait · constitué que de cinq juges, dont deux, par la parenté et la conformité de leurs opinions, ne seraient comptés que pour un;

[ocr errors]

Qu'un tribunal doit toujours étre composé de manière qu'il n'y ait point d'incertitude sur la régularité de sa composition, et que, par des événements indépendants des parties, cette composition ne puisse pas devenir illégale ;

«< Qu'il s'ensuit qu'un tribunal correctionnel qui, en prononçant sur appel, n'est constitué que de cinq juges, dont deux sont parents au degré prohibé, est insuffisamment et illégalement composé, et que, par ce seul vice, quoiqu'il y ait eu dispense de parenté, et quelles que puissent avoir été les chances de la délibération, son jugement est essentiellement et radicalement nul (1). »

Personne ne doutera que cet arrêt ne soit bien applicable aux affaires civiles; ses termes sont assez clairs et assez généraux. La loi comprend toutes les matières, dans l'article dont la violation a été signalée : « Les juges ne pourront rendre aucun jugement, s'ils ne sont au nombre de trois; sur l'appel, en matière correctionnelle, ils seront au nombre de cinq (2). »

Mais, dira-t-on, les parentés, les alliances entre les juges ne sont pas des mystères, et les plaideurs doivent s'imputer à faute de n'avoir pas pris les précautions convenables pour assurer la régularité du jugement. Ma réponse est toute prête : Deux juges parents au degré prohibé avaient été, durant plusieurs années, membres d'un même tribunal, dans le ressort de la cour de Bourges; les jugements rendus avec leur concours simultané, comme s'ils eussent été étrangers l'un à l'autre, ne furent validés qu'en considération de l'erreur dans laquelle le public avait été induit à cet égard, suivant la fameuse loi romaine Barbarius Philippus: hoc enim humanius erat(1).

(3) L. 3, ff. de officio prætorum.-Voyez le Journal des avoués, t. 15, p. 53.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

Art.

116.

Enfin ces faveurs de dispenses, ces confusions de voix, soulèvent quelquefois des .questions fort graves sur les divers accidents des affinités, et font éclore de nouveaux procès dans les procès. Une de ces questions imprévues embarrassa fort certain parlement, en l'année 1744; elle fut soumise à M. le chancelier d'Aguesseau, qui ne voulut pas la résoudre avant d'avoir consulté les autres compagnies du royaume.

Voici l'espèce Jacques, Henri et André sont tous trois conseillers dans la mème cour. André est fils de Henri et beau-frère de Jacques dont il a épousé la sœur, en sorte qu'il est comme le terme moyen où s'opèrent deux confusions de sa voix, l'une avec celle de son père, l'autre avec celle de son beau-frère.

Ces trois voix, lorsqu'elles sont uniformes, ne doivent-elles être comptées que pour une, attendu que la voix de Jacques se confondant avec celle d'André, qui de son côté se confond aussi avec celle de Henri, il ne peut en résulter qu'un seul suffrage? Les deux voix extrêmes se réunissant dans le même terme, c'est-àdire, dans la voix d'André, y a-t-il lieu d'appliquer cet axiome: Quæ sunt eadem uni tertio, eadem sunt inter se?

Ou bien, ne doit on pas dire que les voix de Jacques et de Henri n'ont rien d'incompatible entre elles, et doivent compter pour deux? Il est vrai que la voix de Jacques se confond avec celle d'André, son beau-frère, et que celle d'André se confond aussi avec la voix de Henri, son père; mais les deux voix de Jacques et de Henri ne doivent-elles pas demeurer distinctes? Si elles se confondent avec celle d'André, c'est chacune séparément, l'une par la qualité de beau-frère, l'autre par la qualité de père; autrement la même voix se confondrait deux fois celle de Jacques avec celle d'André, puis avec celle de Henri; ce qui arriverait de mème à l'égard de ce dernier, dont la voix se confondrait d'abord avec celle de son fils, puis avec celle du beaufrère de son fils.

:

(1) Voyez les œuvres de d'Aguesseau, édit. in-8°, t. 12, p. 97 et 98.

(2) Esp. des lois, liv. 29, chap. 16.

Il paraît que la solution fut donnée en ce sens Il est plus conforme au bon ordre de perdre une voix, que d'en perdre plusieurs. Si, dans la question proposée, les trois voix n'en faisaient qu'une, il en résulterait qu'un plus grand nombre de juges formerait un moindre nombre de voix; cette confusion pourrait même s'étendre sur beaucoup de magistrats, par le moyen d'un seul qui serait leur parent, quoiqu'ils ne le fussent pas entre eux. Ainsi le sort d'une partie dépendrait d'un seul juge; car, en supposant qu'elle eût pour elle la pluralité des suffrages, elle perdrait néanmoins son procès, si une voix nouvelle venait se joindre aux voix dominantes, opérer une confusion, et les absorber (1).

En s'opposant à ce que des parents ou alliés, jusqu'à tel degré, puissent être simultanément juges dans un même tribunal, la loi s'explique d'elle-même; tout le monde comprend la moralité de ses motifs. Mais l'exception qui vient fausser la règle, en autorisant les dispenses, ne présente que de vaines idées de privilége, de faveur, ou de caprice.

« Lorsque, dans une loi, les exceptions, limitations, ou modifications, ne sont pas nécessaires, dit Montesquieu, il vaut mieux n'en point mettre (2). » Lorsqu'elles y sont, et qu'elles nuisent, il faudrait se håter de les faire disparaître (a).

Au moyen âge, le plaideur qui redoutait l'issue du jugement, requérait que chacun des hommes appelés pour le faire, fût tenu de dire son avis à haute voix. Quand le premier avait prononcé, si le second s'ensuivait en opinant de mème, c'était le moment de le provoquer, et de dire que le jugement auquel l'ensuivant s'accordait, était mauvais et déloyal. Alors les gages de bataille étaient

reçus.

Ainsi faisait-on à l'égard des témoins. Celui contre lequel ils venaient déposer, leur mettait sus qu'ils étaient faux et parjures, et l'on combattait (5).

(a) Voyez, sur ces questions, Dalloz, t. 21, p. 437 et suiv. — Carré, Org., t. 1, p. 180 et suiv. (3) Voyez l'Introd., chap. 15, p. 128 et suiv.

Art.

116.

« PreviousContinue »