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souscriptions; mais nous sommes renfermées dans les bornes que nous prescrivait le règlement et nous ne nous sommes engagées que pour les fonds que nous avions en caisse.

Après plusieurs essais, nous avons reconnu l'impossibilité de dresser un tableau exact des mères et des enfants à secourir dans la ville de Genève, comme nous y invite l'article second de la note du règlement; mais nous savons positivement qu'il excède de beaucoup ce que nous avons pu faire jusqu'à présent.

Votre Eminence me permettra de lui faire observer que nous avons été obligées d'employer pour Genève la même somme destinée aux secours que celle qu'on donne à Paris, les objets de première nécessité y étant pour le moins aussi chers qu'ils le sont dans cette grande ville.

Je joins ici, Monseigneur, le tableau des souscripteurs et la somme des souscriptions.

J'ai l'honneur d'être, avec un profond respect, Monseigneur, de Votre Eminence la très-humble et très-obéissante servante,

ROSE MAURICE, présidente. »

Un décret impérial du 5 mai 1810 avait créé et placé sous le patronage de la nouvelle impératrice, Marie-Louise, une Société maternelle, dans laquelle chacune des 44 « bonnes villes de l'empire » devenait le siége d'un Conseil d'administration. C'est à cette société féminine officielle, que la femme du maire de Genève fait allusion en demandant à l'impératrice, par l'intermédiaire du cardinal grand-aumônier, de sanctionner le développement que ladite société avait pris dans notre ville. Une première cotisation, opérée parmi les amies de ces dames, avait rapporté 1818 francs 8 sols, et le gouvernement avait accordé 1600 francs. L'établissement genevois de maternité était sous la direction du chirurgien Jurine, qui y

donnait des cours d'accouchement pour former des sagesfemmes, dont on stimulait l'application et relevait le caractère par des médailles et des jetons d'accessit. L'autorité municipale n'était pas sans inquiétude que cette école d'obstétrique ne fît affluer à Genève des femmes enceintes appartenant à d'autres arrondissements que le sien et dont les enfants incomberaient à la commune. L'avocat Bellot, de l'administration de l'Hôpital, fut nommé tuteur des enfants trouvés et abandonnés.

Dans cette même année 1812, le département du Léman se plaignait amèrement de l'état précaire dans lequel étaient tombées ses deux principales industries, l'horlogerie et la bijouterie auxquelles était attachée l'existence de plus de 20,000 âmes. (?) » On aurait désiré que la Cour impériale et le Palais voulussent bien y avoir quelque égard dans leurs commandes. Mais on répondit de Paris qu'il y avait, dans tout ce qui concernait l'ameublement du Palais, une unité de style à laquelle on ne pouvait satisfaire que dans la capitale. Par contre, le gouvernement encourageait de tout son pouvoir la fabrication du sucre de betterave qui, déjà en 1810, avait pris une certaine extension. Une licence fut sollicitée à cet effet par MM. J.-M. Calandrini et F.-S. Audéoud. On comprend qu'il s'agissait pour la France et le continent de ne plus dépendre, pour le sucre, des Indes et par là de l'Angleterre, qui jusqu'alors avait eu le monopole de cette denrée coloniale.

Episodes de la guerre d'Espagne.

Nous avons, au chapitre III, revendiqué pour le lieutenantcolonel Jean-Pierre Galiffe l'honneur d'être de tous les Genevois au service étranger celui qui a assisté au plus grand

nombre de batailles, de siéges, d'assauts et de faits d'armes de toute sorte; nous aurions pu ajouter que c'est aussi celui qui, pendant une carrière militaire de plus de quarante ans, a été appelé à voir le plus de pays divers,-chose, du reste, presque inévitable pour un officier attaché assez longtemps au service britannique, pour avoir, surtout à pareille époque, été astreint deux fois au service des colonies anglaises. Quelques extraits des états de service très-succincts de J.-P. G., confirmés par les correspondances, les journaux, les bulletins et autres documents officiels de l'époque, montreront si ces prétentions sont fondées ou non.

Après un séjour de deux ans en Angleterre, il avait, en 1783, été rejoindre, à l'âge de 17 ans, le régiment suisse au service de France de Châteauvieux, alors cantonné en Corse. En 1785, il avait quitté cette île pour Nantes, et de là tenu successivement garnison à Nancy, à Orléans, puis derechef à Nancy (où eut lieu alors la fameuse insurrection militaire de 1790), puis à Paris, où il campa au Champ de Mars; puis, après une course en Suisse pour le recrutement du régiment, à Bitche où, à la nouvelle des massacres du 10 août (1792) et de la déchéance du roi, le régiment passa tambour battant et enseignes déployées en Allemagne, dans le dessein de rejoindre les armées des Princes ou de Condé, si les cantons le permettaient (v. t. I, p. 230). Nous avons vu que Genève, menacée par le parti révolutionnaire français, préféra rappeler les compagnies gene-voises du régiment, et que Galiffe fonctionna comme capitaine pendant l'épisode connu sous le nom de siége ou blocus de Genève par Montesquiou. La chute du gouvernement aristocratique lui ayant rendu sa liberté, il en profita pour solliciter un brevet dans le premier service actif antirévolutionnaire qui se présenterait. Il entra donc dans celui des Pays-Bas. Il y fit la désastreuse campagne de 1794-1795, d'abord comme officier volontaire, puis comme capitaine dans les hussards rouges

de Timmermann, enfin comme aide de camp des Princes d'Orange, avec lesquels il se retira en Allemagne pour les seconder dans la formation d'une nouvelle armée. Cette tentative ne promettant pas de succès prochain, ses amis réussirent à le faire entrer comme capitaine surnuméraire dans un nouveau régiment anglais et de là, avec de hautes protections qu'il ne devait qu'à son mérite, dans le régiment du Duc de York. Les inconvénients du service colonial, auquel l'un et l'autre de ces régiments étaient alors employés, étaient non-seulement sa durée (environ dix ans), l'éloignement de la mère-patrie, le climat très-pernicieux de plusieurs de ces stations anglaises d'outre-mer, mais surtout les pérégrinations incessantes auxquelles on était astreint, les officiers bien plus encore que les soldats, et souvent sans transition aucune entre les climats les plus opposés. Ce fut, par exemple, le cas de notre capitaine anglo-genevois, d'être envoyé subitement des tropiques dans les neiges du Canada, et, viceversâ, de partir de l'extrême nord de l'Amérique anglaise pour aller, sous la ligne, recueillir les débris de quelque régiment ou bataillon fondu par la fièvre jaune. Pareilles chances ne pouvaient alors être évitées ou abrégées que par l'acquisition d'une autre « commission, » ou par échange avec quelque officier d'un autre régiment, opérations très-coûteuses, absolument hors de la portée d'un militaire (et surtout d'un militaire étranger) réduit à vivre de sa paie.

Galiffe parcourut ainsi, de 1795 à 1806, avec les détachements de son régiment ou en mission temporaire, la Barbade, Sainte-Lucie, Saint-Kits, la Dominique, Montserrat, la Martinique, la Grenade, la Trinité et autres Antilles anglaises; puis Surinam, dans cette meurtrière Guyane hollandaise dont les Anglais venaient de s'emparer; puis, après ces pays brûlants, Halifax dans la Nouvelle-Ecosse et plus au nord encore l'île du prince Edouard, etc., etc. L'élément aventureux que la guerre

générale jetait jusque dans ces parages éloignés, ne pouvait dédommager un soldat de profession qui avait compté faire son chemin en pleine guerre européenne. Aussi Galiffe fut-il au comble de ses vœux, lorsque quelque temps après le retour du 60o régiment dans la mère-patrie, celui-ci fut désigné pour faire partie de l'armée anglaise d'Espagne et de Portugal sous l'immortel sir Arthur Wellesley (ensuite duc de Wellington). De l'avis des experts de tous les temps, la longue guerre conduite contre Napoléon, ses premiers généraux et leurs légions jusqu'alors invincibles, par Wellington et sa petite armée d'Anglais, restera toujours l'un des épisodes militaires les plus remarquables, par l'habileté unie à la persévérance et à une bravoure peu commune ; par la moralité de la cause et l'humanité relative des moyens; par la grandeur des résultats comparés à l'exiguïté des ressources; par les privations, les obstacles et les difficultés de tout genre, dont les moindres ne furent pas les embarras continuels suscités par les alliés (Portugais et Espagnols) qu'on était venu secourir, et les intrigues et la faiblesse de leurs étranges autorités (juntes, régences, clergé, etc.), sans parler des fréquentes inepties du gouvernement anglais lui-même. Il y eut donc quelque gloire pour l'officier anglo-genevois à participer personnellement, du premier jour jusqu'au dernier, sans autre repos que celui nécessité par ses nombreuses blessures, à cette grande œuvre, et cela de façon à s'attirer les suffrages de tous ceux qui le connurent, ainsi que l'estime et l'amitié personnelles d'un chef qui ne prodiguait pas ses faveurs.

A peine débarqué en Portugal avec sir Arthur Wellesley, au commencement d'août 1808, le capitaine J.-P. Galiffe se signala à la tête de ces compagnies d'avant-garde qui repoussèrent avec une témérité qui leur fut reprochée les premières lignes de l'ennemi (général Laborde); le surlendemain, 17 août, il fut blessé à la bataille de Roriça ou Roleia, ce qui ne l'em

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