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ou autre partie intéressée, soit même dans le cas où l'on aurait chassé en temps prohibé, sur la seule poursuite du procureur de la commune.» (Art. 8.)

Les procureurs des communes étant supprimés, les poursuites d'office appartiennent aux procureurs du roi (art. 22, C. inst. c.). En tout temps, le propriétaire ou autre partie intéressée a une action en réparation du délit de chasse.

L'action publique n'appartient qu'au ministère public; mais elle a besoin d'être provoquée dans certaines circonstances.

L'art. 8 de la loi de 1790 determine ces circonstances. Il ne faut cependant pas prendre cet article dans un sens aussi absolu que ses termes sembleraient l'indiquer, il ne faut pas croire que la poursuite d'office ne peut être intentée par le procureur du roi que lorsque le délit a été commis en temps prohibé. Même dans les temps où la chasse est ouverte, il est un cas où le ministère public peut agir d'office, c'est celui où la permission même du propriétaire ne saurait effacer le délit.

En effet, la loi présume que le fait de chasse sur le terrain d'autrui en temps permis a été précédé de la permission du propriétaire, du moins le silence du propriétaire atteste qu'il ne se regarde pas comme lésé dans ses droits. Mais lorsque le fait de chasse du propriétaire lui-même sur ses fonds est un délit, et que ce fait ne porte pas seule ment atteinte à un intérêt privé, mais encore à un intérêt public, cette présomption de permission, ou la tolérance à l'égard du fait de chasse commis par autrui, ne saurait effacer le délit; car on ne peut accorder plus de droit que l'on n'en possède soi-même. Or, lorsque la chasse est ouverte, le propriétaire n'a pas indistinctement le droit de chasse sur tous ses fonds, ce droit n'est ouvert pour lui que sur ses terres dépouillées de récoltes 1. Le § 2 de l'art. 1er de la loi de 1790 lui interdit formellement la chasse sur ses fonds chargés de récoltes; s'il se permettait ce fait, il commettrait donc un délit qui tomberait sous l'action du ministère public, à plus forte raison l'action d'office serait-elle ouverte contre l'individu étranger qui serait trouvé chassant sur de pareils fonds.

Les lois de police sur la chasse ont pour objet principal la conservation des fruits en quelque état qu'ils soient, en croissance ou

IV. J. de B., 1858, p. 552.

2 Cass., 16 nov. 1857; S., 58, 365.

3 V. Code de la Chasse. Il a été jugé, au contraire, que la signature des procès-verbaux par le garde rapporteur ne suffit pas pour la validité de ces actes. En prescrivant que ces procès

en maturité; et cette conservation n'importe pas seulement à celui qui est propriétaire des fruits, mais encore à la société entière 2. « A cet effet, le conseil général de chaque commune est autorisé à établir un ou plusieurs gardes messiers, beaugars ou gardeschampêtres, qui seront reçus et assermentés par la municipalité, sans préjudice de la garde des bois et forêts, qui se fera comme par le passé, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné (art. 9). »

«Lesdits rapports seront ou dressés par écrit, ou faits de vive voix au greffe de la municipalité, où il en sera tenu registre. Dans l'un et l'autre cas, ils seront affirmés entre les mains d'un officier municipal dans les vingt-quatre heures du délit qui en sera l'objet, et ils feront foi de leur contenu jusqu'à la preuve contraire, qui pourra être admise sans inscription de faux (art. 10). »

Suivant M. Henrion de Pensey, de la Police rurale, le rapport fait de vive voix par un garde, et écrit par un fonctionnaire public ayant caractère, est valable, quoique non signé du garde. Les lois qui ont institué les gardes-champêtres n'exigent pas qu'ils sachent écrire et signer 3.

Il pourra être suppléé auxdits rapports par la déposition de deux témoins (art. 11).

Il a été dérogé à cet article en ce qui concerne la nécessité de suppléer aux rapports par la déposition de deux témoins. C'était, en effet, une maxime dans l'ancienne jurisprudence, encore en vigueur en 1790, qu'un seul témoin ne pouvait suffire pour compléter une preuve, parce que la dénégation du défendeur équivalait à l'affirmation du témoin. Mais dans notre jurisprudence actuelle, le nombre des témoins n'est pas fixé, le juge peut prononcer sur la déclaration d'un seul; sa conviction ne se forme pas toujours sur le nombre des témoins, mais sur leur moralité, et le plus souvent sur les circonstances de la cause. Aussi la cour de cassation, par arrêt du 7 février 1855, a-t-elle cassé un jugement qui avait renvoyé un prévenu de délit de chasse, par le motif qu'on n'avait suppléé au rapport du garde que par la déposition d'un seul témoin, tandis que l'article 11 de la loi de 1790 en exigeait deux. La cour s'est fondée sur les art. 154 et 159 du Code d'inst. crim., qui, en effet, ne fixent nullement le nombre des témoins 4.

verbaux soient dressés par écrit, la loi du 30 avril 1790, art. 10, exige, à peine de nullité, qu'ils soient écrits en entier de la main du garde verbalisant. Br., 3 mai 1834; J. de Br., 1834, 201. 4 Jurisprudence constante en Belgique. Br., 23 janv. 1840, J. de Br., 1840, p. 503.

Les gardes-champêtres ne sont pas les seuls agents publics qui aient le droit de rédiger des procès-verbaux contre les chasseurs; ont encore les mêmes droits: 1o les gardes-forestiers dans l'étendue des bois nationaux ou communaux confiés à leur garde 1. Leurs procès-verbaux, même pour fait de chasse, sont crus jusqu'à inscription de faux 2; 2o les commissaires de police, les maires et leurs adjoints 3; 3° les gendarmes : le procès-verbal dressé par un seul gendarme pour constater un délit de chasse fait preuve suffisante 4; 4o les gardes particuliers sur les fonds soumis à leur garde.

Les procès-verbaux des commissaires de police, maires et adjoints, des gendarmes et des gardes particuliers, ne font foi que jusqu'à preuve contraire seulement (arg. de l'art. 154, C. d'inst.).

Toute action pour délit de chasse sera prescrite par le laps d'un mois, à compter du jour où le délit aura été commis (art. 12). La nature d'un délit se détermine aussi par son objet, surtout lorsqu'il peut se commettre dans un lieu quelconque; l'action de chasser ne doit toujours constituer qu'un délit de chasse, quelle que soit la superficie du sol où elle ait lieu. En effet, le fait de chasse dans un bois soumis au régime forestier n'a pas d'autre objet que de se procurer du gibier; il ne saurait être rangé dans la classe des délits forestiers; car ces délits ont pour but spécial de porter atteinte au bois ou au sol forestier. Cette différence d'objets ne permet pas de confondre ensemble de pareils délits, aussi diffèrent-ils sous le rapport des peines; pourquoi les assimilerait-on sous le rapport de la prescription de l'action? surtout lorsque, pour trouver cette similitude, on est obligé de déroger à la loi commune. Cependant assez longtemps la jurisprudence regardait l'art. 12 de la loi de 1790 comme inapplicable aux délits de chasse commis dans une forêt nationale, et les déclarait prescriptibles seulement par trois mois, conformément aux délits forestiers; tandis qu'elle les déclarait prescriptibles par un mois, lorsqu'ils étaient commis dans les bois communaux, toujours assimilés, quant à leur administration, aux bois nationaux.

Mais la cour de cassation est revenue aux vrais principes dans trois arrêts des 50, 31 mai et 30 août 1822, par lesquels elle a

1 Art. 3 de l'arrêté du 28 vend. an V; art. 16, C. inst. crim.

2 Cass.. 26 janv. 1816; D., 4, 52; S., 16, 1, 274. 3 Art. 11, C. inst. crim.

4 Ord. du 27 octobre 1820; cass., 30 nov. 1829. 5 V. dans ce sens, Maugin, Traité de l'action

décidé que la disposition de l'art. 12 de la loi du 30 avril 1790 était générale, qu'elle s'appliquait à tous les délits de chasse commis tant sur les propriétés de l'État que sur les propriétés des particuliers, et que les forêts réservées aux plaisirs du roi étaient seules exceptées par l'art. 16 de ladite loi 5. La prescription de l'art. 12 peut être interrompue suivant les principes généraux, et notamment par des actes de poursuites et d'instruction faits dans le délai, et même par une citation en justice donnée devant un juge incompétent (art. 2246, Code civ.). Il faut distinguer les actes d'instruction de la citation, les premiers doivent se succéder dans l'intervalle d'un mois jusqu'à la citation pour interrompre la prescription (cass., 11 novembre 1825), tandis que la citation une fois donnée, l'instance ou la poursuite est liée, et la péremption seule peut l'éteindre.

« Dans le silence de la loi sur le temps requis pour la péremption des poursuites auxquelles donnent lieu des délits soumis à des prescriptions particulières, il faut se reporter nécessairement aux dispositions gé nérales du Code d'inst. crim. Or, aux termes des art. 637 et 638 de ce Code, la péremption des poursuites en matières correctionnelles ne peut être acquise que lorsque les poursuites ont été interrompues pendant trois années 6. »

Telle est la loi du 30 avril 1790 sur le droit de chasse; nous avons vu à qui appartenait ce droit, comment et en quel temps on pouvait l'exercer, de quelle manière les délits étaient constatés, punis et prescrits; aussi forme-t-elle le droit commun en cette matière. Cependant son exercice (mais son exer cice seulement, car le droit n'a pas été enlevé à ceux qui le possédaient) a été soumis à une mesure préalable, le chasseur doit se munir d'un port d'armes de chasse. En effet, cette mesure fut prescrite par un décret du 11 juil. let 1810, mais ce décret ne prononçant pas de peines, celui du 4 mai 1812 fut rendu pour sanctionner cette prohibition. Ainsi :

« Art. 1er. Quiconque sera trouvé chassant et ne justifiant point d'un permis de port d'armes de chasse, délivré conformément à notre décret du 11 juillet 1810, sera traduit devant le tribunal de police correctionnelle, et puni d'une amende qui ne pourra être moindre de 30 fr. ni excéder 60 francs. »

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Ainsi, même en temps permis, le propriétaire ne peut chasser sur son terrain sans permis de port d'armes de chasse 1.

Cependant le port d'armes n'est un délit que lorsqu'il est joint à un fait de chasse, il ne peut être fait de poursuite contre celui qui a un fusil pour sa défense et celle de ses propriétés, pourvu qu'il n'en fasse pas d'autre usage 2. Les gens qui ont été condamnés aux travaux forcés, au bannissement ou à la réclusion ou à une peine correctionnelle, prononçant déchéance du droit de port d'armes, ou les gens non domiciliés, vagabonds et sans aveu, doivent seuls être examinés et poursuivis par les gendarmes et tous officiers de police, lorsqu'ils sont porteurs d'armes, à l'effet d'être désarmés et même traduits devant les tribunaux, pour être condamnés, suivant les cas, aux peines portées par les lois et règlements 3.

En cas de récidive, l'amende sera de 61 fr. au moins et de 200 fr. au plus; le tribunal pourra en outre prononcer un emprisonnement de six jours à un mois (art. 2).» Il n'y a récidive que lorsque les deux délits ont été commis dáns la même année 4.

«Dans tous les cas, il y aura lieu à la confiscation des armes; et, si elles n'ont pas été saisies, le délinquant sera condamné à Jes rapporter au greffe, ou à en payer leur valeur, suivant la fixation qui en sera faite par le jugement, sans que cette fixation puisse être au-dessous de 50 fr. (art. 3). »

La confiscation prononcée par cet article dérive directement du défaut de port d'armes, lors même qu'il n'y aurait pas délit de chasse, par exemple, pour fait de chasse sur ses terres en temps permis. On pourrait induire de ces mots, si elles n'ont pas été saisies, que les gardes ou tout autre officier de police judiciaire aurait le droit de saisir les armes entre les mains des chasseurs; cependant, nous avons vu que la loi du 30 avril (art. 5) leur faisait une expresse défense de désarmer les chasseurs; aussi le conseil d'État, postérieurement au décret de 1812, a-t-il autorisé des poursuites criminelles contre un garde qui avait outre-passé cette défense. Cette saisie ne peut être faite légalement que contre les repris de justice et gens vagabonds; c'est dans ce sens que l'on doit entendre les termes de cet article.

Seront, au surplus, exécutées les dispositions de la loi des 28-30 avril 1790, concernant la chasse (art. 4). » Des termes de cet

1Cass.. 7 mai 1823. Br., cass., 25 mars 1819; J. de B., 1819, 1, 191.

Art. 8 de la circulaire du 6 mai 1806. Er., 16 fév. 1816, J. de B., 1816, 1, 182.

article et de l'ensemble du décret, il résulte évidemment qu'on n'a eu pour but que de mettre une entrave à l'exercice du droit de chasse sans porter atteinte au droit lui-même. Aussi celui qui ne pourrait être condamné pour délit de chasse peut-il être condamné aux amendes prononcées par le décret de 1812, s'il n'était pas muni d'un port d'armes, car le défaut de port d'armes de chasse constitue un délit à part.

Lorsqu'il y a délit de chasse, le défaut de permis ne se confond-il pas avec lui de manière à ne faire qu'un seul et même délit, et une seule amende ne doit-elle pas être prononcée? Nous avons vu, en effet, que le port d'armes n'est un délit que lorsqu'il est joint à un fait de chasse; pris chacun à part, le port d'armes est toujours licite, sauf quelques exceptions contre certains individus. tandis que le fait de chasse peut être licite ou illicite; lorsqu'il est licite, sa corrélation avec le port d'armes fait déclarer le port d'armes illicite, s'il n'y a pas un permis spécial.

Mais, lorsque le fait de chasse est illicite, alors se présente la question ci-dessus posée. Dans la réalité, il n'y a toujours qu'un seul fait, le fait de chasse, car on ne peut chasser sans armes, et c'est ce seul fait qui crée la criminalité; s'il est puni par la loi de 1790, pourra-t-on encore le punir dans le fait de port d'armes? ne serait-ce pas punir deux fois le même délit?

En effet, suivant l'art. 1er de la loi de 1790, il est prohibé en tout temps et de quelque manière que ce soit, c'est-à-dire avec quelle arme que ce soit, de chasser sur la propriété d'autrui. Cet article contient deux prohibitions: 1o celle de chasser; 2o celle de porter une arme quelconque à cet effet sur la propriété d'autrui; et cependant une seule amende est prononcée, par la raison que ces deux circonstances sont indivisibles pour constituer le fait de chasse, car il faut être muni d'une arme quelconque pour pouvoir abattre ou prendre le gibier. Ce qui nous importe de remarquer, c'est que cette amende unique porte aussi bien sur le fait de port d'armes que sur le fait de chasse, et que ces deux faits réunis ne constituent qu'un seul délit, le délit de chasse; si on prononçait encore une amende pour défaut de port d'armes, une pareille décision encourrait le reproche de bis in idem 5. Cette dernière amende ne devrait être prononcée que lors

3 Code pén., art. 28 et 42; avis du conseil d'État du 17 mai 1821.

4 Art. 3, loi du 30 avril 1790.

5 V. Bull. de cass. de Brux., 1841, 3o ou 4e cah.

que le chasseur n'est pas poursuivi pour délit de chasse. En tout temps le ministère public peut poursuivre d'office le chasseur qui n'est pas muni d'un permis de port d'armes de chasse, mais il ne devrait être prononcé d'amende spéciale pour défaut de permis de port d'armes de chasse que lorsque cette amende ne concourt pas avec celle attachée au délit de chasse. Par exemple, en tout temps le propriétaire peut chasser sur ses fonds clos ou dans ses bois, et, dans les temps permis, sur ses autres fonds; les étrangers eux-mêmes peuvent alors chasser avec sa permission. Dans tous ces cas, il n'y a pas de délit de chasse, et alors seulement l'amende pour défaut de permis de port d'armes de chasse devrait être prononcée.

Cependant la cour de cassation, par arrêt du 15 octobre 1813, décide que le port d'armes sans permission, et le délit de chasse, quand ils concourent ensemble, doivent être punis chacun d'une peine distincte particulière 1.

Le défaut de permis de port d'armes n'étant punissable que lorsqu'il est uni à un fait de chasse, si ce dernier fait est censé n'avoir pas existé, s'il est éteint par la prescription, le défaut de permis de port d'armes ne peut plus être puni; puisque le fait constitutif de sa criminalité est censé n'avoir pas existé, et qu'en ce cas-là il ne peut y avoir de corrélation ou d'union entre eux la prescription du fait de chasse emporte donc celle du défaut de permis de port d'armes 2.

La question si controversée en France de la constitutionnalité du décret de 1812, a perdu son importance en Belgique; ce décret a acquis force de loi par l'arrêté du prince souverain des Pays-Bas, du 14 août 1814, qui l'a maintenu.

Ce décret, loin d'avoir été abrogé par l'article 9 de la constitution belge, a été implicitement maintenu par la loi sur les voies et moyens, dans laquelle se trouve comprise la rétribution de 50 fr. pour permis de port d'armes de chasse (Br., 1er mars 1852; J. de Br., 1832, 1re, p. 109; J. du 19 s., 1832, p. 140.)

Cet arrêté du 14 août, cité plus haut, maintient l'exécution des lois sur les passeports et port d'armes, pour autant qu'il n'y serait pas dérogé par les dispositions ultérieures qu'il renferme. Il traite de leur forme, prix et comptabilité, etc.

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$ 4.

DE LA DÉCOUVerte des minES ET DES TRÉSORS.

588. Nous n'avons rien à dire ici sur la découverte des mines, sinon que celui qui est l'inventeur d'une mine, et qui n'en obtient pas lui-même la concession de la part du gouvernement, doit obtenir une indemnité de la part du concessionnaire qui lui est préféré, quoiqu'il ne soit pas l'inventeur: ainsi le veut l'art. 16 de la loi du 21 avril 1810.

Mais en ce qui touche aux trésors, nous ne devons pas être aussi brefs.

389. Sous l'ancien ordre de choses, dans plusieurs provinces coutumières, la propriété du trésor appartenait pour un tiers au seigneur haut justicier dans la juridiction duquel il avait été découvert, pour un autre tiers à l'inventeur, et pour le troisième au propriétaire du fonds où il avait été trouvé.

Cette prérogative de l'ancienne féodalité a été abolie comme toutes autres, et les règles sur la découverte des trésors sont consignées dans l'article 716 du Code Napoléon, conçu en ces termes :

390. « La propriété d'un trésor appartient << à celui qui le trouve dans son propre fonds. « Si le trésor est trouvé dans le fonds d'au<< trui, il appartient pour moitié à celui qui « l'a découvert, et pour l'autre moitié au « propriétaire du fonds.

«Le trésor est toute chose cachée ou en«fouie sur laquelle personne ne peut justi« fier de sa propriété, et qui est découverte « par le pur effet du hasard. »

Pour rendre plus sensible l'intelligence de cet article, nous en commenterons les expressions les plus remarquables, et nous verrons ensuite l'application qu'on doit en faire aux diverses questions qui peuvent se présenter sur cette matière.

591. La propriété du trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds. La loi veut donc que le droit du trésor soit comme un apanage de la propriété foncière: et de là il résulte que le fermier ou l'usufruitier du fonds n'ont, comme tels, aucun droit à prétendre sur le trésor qui y est découvert, parce qu'il n'a rien de commun avec les fruits du sol dont ils jouissent 2.

592. Le trésor trouvé DANS le fonds d'au

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trui. Ces expressions, dans son propre fonds, dans le fonds d'autrui, nous donnent clairement à entendre qu'on ne doit considérer comme trésor que les choses découvertes dans l'intérieur, et non celles qui seraient simplement trouvées à la surface du fonds. 595. Appartient pour moitié à celui qui l'a découvert1. Ainsi, quiconque, travaillant sur le fonds d'autrui avec l'agrément du maître, y découvre un trésor par l'effet du hasard, a personnellement le droit d'en conserver la moitié. Qu'il soit ouvrier, journalier, domestique, ou agent employé de la part du propriétaire, peu importe, puisque la loi ne distingue rien à cet égard : Quòd si fortè, vel arando, vel aliàs terram alienam colendo, vel quocunque casu, non studio perscrutandi, in alienis locis thesaurum invenerit, id quod repertum fuerit, dimidiâ retentâ cum locorum domino partiatur, ita enim ut quisque suis fruatur, et non inhiet alienis 2.

Et pour l'autre moitié au propriétaire du fonds. Il résulte de là que le domaine du fonds n'emporte pas le domaine du trésor: car, si la propriété du trésor faisait partie de celle du fonds, elle resterait tout entière dans les mains du maître de l'héritage, et l'inventeur étranger n'en aurait pas la moitié, puisqu'il n'a aucun droit sur le sol dans lequel il est découvert 3.

594. Il en résulte encore que la possession du fonds n'emporte pas non plus celle du trésor non encore découvert, parce qu'il ne suffit pas de posséder un héritage pour être possesseur de tout ce qui y est renfermé; qu'on ne peut avoir la volonté de posséder une chose dont on ignore jusqu'à l'existence; et que le fait de la découverte du trésor est nécessairement le premier acte de possession, puisque la moitié dévolue à l'inventeur ne lui est acquise que comme premier occupant: Cæterùm quod BRUTUS et MANILIUS putant, eum qui fundum longâ possessione cepit, etiam thesaurum cepisse, quamvis nesciat in fundo esse, non est verum. Is enim qui nescit, non possidet thesaurum, quamvis fundum possideat 4.

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fiter, puisqu'il est propriétaire à temps de l'immeuble. Rolland de Villargues, vo Trésor, no 18. Contrà, Duranton, t. 4, no 514. - Le superficiaire n'a pas droit au trésor qui est trouvé dans l'intérieur du sol. Proudhon, Usuf., no 3731.

'Que doit-on entendre par ce mot l'a découvert dont se sert l'art. 716? Rendre la chose visible en fouillant ou en abattant. Il n'est pas nécessaire qu'on s'en soit saisi le premier. Delvincourt, t. 3, p. 115. Le trésor découvert par l'enfant mineur n'est pas soumis à l'usufruit légal. Rolland de Villargues, loc. cit., no 20. - Proudhon, usuf., no 150, soutient l'opinion contraire.

395. Le trésor est toute chose. Ainsi, que ce soit de l'argent ou d'autres effets précieux qu'on trouve dans un fonds, peu importe: dans l'un comme dans l'autre cas la découverte est également un trésor.

596. Cachée ou enfouie. Ces deux termes ont cela de commun, qu'ils se rapportent également à quelque chose qui a été placé par la main de l'homme : d'où il résulte que le trésor n'est jamais une partie naturelle du fonds; il n'en est pas même une partie civilement accessoire, parce qu'il n'y a été placé ni pour le service, ni pour l'exploitation de ce fonds en sorte qu'il n'est acquis en tout ou en partie au maître de l'héritage, qu'à l'occasion de sa propriété.

597. Mais ces expressions, cachée ou enfouie, sont bien différentes, en ce que le mot enfouie, pris dans son sens naturel, s'applique spécialement à une chose renfermée dans la terre tandis que le terme caché s'entend aussi d'objets serrés en un lieu quelconque où ils ne puissent être aperçus. Néanmoins, comme la loi suppose toujours que le trésor qu'on découvre est caché dans un fonds, on ne doit donner la qualité de trésor qu'aux choses mobilières qu'on trouve renfermées ou dans la terre, ou dans quelque construction, comme dans un vieux mur, et non pas à celles qui auraient été serrées dans un endroit simplement propre à les soustraire aux regards, parce qu'elles ne seraient ni cachées ni enfouies dans le fonds.

598. Sur laquelle personne ne peut justifier de sa propriété 5

Telle est donc la nature du trésor, que l'inventeur et le maître du fonds en sont réputés propriétaires jusqu'à ce qu'un autre ait établi le contraire; tandis que, dans les cas plus ordinaires, où il s'agit de choses oubliées, perdues ou égarées, celui qui les trouve n'en est point réputé propriétaire par cela seul qu'il s'en saisit.

Dans l'ancienne jurisprudence on définissait le trésor vetus quædam pecuniæ depositio cujus non extat memoria, ut jam dominum non habeat 6. En conséquence on ne

L. unic., in fin., cod. de thesauris, lib. 10, tit. 15.

3 La part du trésor attribuée au mari ou à la femme jure inventionis, appartient à la communauté. Chavot, t. 2, no 364; Duranton, t. 4, no512. 4 L. 3, § 5, ff. de adquirend, poss., lib. 41, tit. 2.

5 Nous n'entendons par trésor qu'une chose dont on n'a aucun indice à qui anciennement elle ait appartenu. Pothier, Propriété, no 66; Favard, vo Trésor; Br., 5 avril 1823, J. de B., 1823, 2. 51; Dalloz, t. 23, p. 191.

6 L. 51, ff. de acquir. rerum dom., lib. 41, tit. 1.

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