Page images
PDF
EPUB

Pour l'établissement des canaux ou des rigoles destinés à procurer l'écoulement des eaux sales, dont la stagnation pourrait être nuisible aux habitants;

Mais surtout pour acquérir le bénéfice d'une fontaine, et en amener les eaux dans le village ou la ville qui en a besoin, etc., etc.. 683. Il ne faut pas perdre de vue que, comme on l'a fait voir dans le chapitre qui précède, la loi du 7 juillet 1855 veut que les expropriations forcées pour cause d'intérêt communal soient soumises aux mêmes règles que celles qui ont lieu pour utilité publique, sauf néanmoins les dispositions exceptionnelles signalées au commencement du présent chapitre;

Qu'ainsi c'est également par autorité de justice que l'expropriation doit être opérée dans l'un et l'autre cas, quand elle est forcée; mais que les diverses formalités nécessaires pour exécuter l'expropriation et en fixer le prix, ne seraient plus qu'illusoires dans les cas où il y aurait aliénation volontairement consentie par les propriétaires de fonds; et qu'alors il suffirait que la commune fut autorisée à acquérir et à s'imposer l'obligation de payer le prix de l'héritage, suivant les règles du droit commun;

Que néanmoins, et dans ce cas-là même, si l'immeuble à acquérir de la part de la commune était hypothéqué au profit de quelques créanciers, ceux-ci pourraient, aux termes de l'article 28 de la loi du 7 juillet 1835, dans le délai de quinzaine à dater de la notification qui leur aurait été faite de la convention amiable passée avec le propriétaire du fonds, déclarer qu'ils ne veulent pas se contenter de la somme convenue entre la commune et ce propriétaire, et réquérir que le prix de la vente soit réglé par un jury judiciaire;

684. Que dans les alienations dont il s'agit ici, la charge de payer le prix ne peut peser que sur la commune, puisque c'est elle seule qui achète. Cette charge ne peut peser sur le trésor public, puisque ce n'est pas l'État qui acquiert dans l'intérêt de la société en conséquence de quoi, et après qu'il a été satisfait à toutes les mesures administratives signalées ci-dessus, les difficultés qui pourraient s'élever ultérieurement sur l'exécution des travaux, comme sur les marchés des entrepreneurs, doivent être portées en justice ordinaire, et non au conseil de préfecture, qui n'est appelé à statuer que sur les contestations qui ont un intérêt public proprement dit pour objet 1.

Sur tout cela il est bon d'observer que l'estimation de ce qui est à acquérir au nom de

V. notre Traité du Domaine public, no 279.

la commune, ne doit porter que sur le montant de la perte ou de la privation à éprouver par le vendeur, puisqu'il ne lui est dù qu'une indemnité de cette perte ou privation. On doit donc éviter d'étendre l'estimation dont il s'agit jusqu'à la somme des avantages procurés à la commune par l'établissement fait pour elle : car ces avantages ne doivent être considérés que comme un don de la loi fait aux habitants qui en profitent, et qui l'ont acquis en remplissant les formalités qu'elle prescrit; mais quant à l'aliénateur, il ne peut lui être dû que l'estimation indemnitaire de la perte qu'il souffre.

683. Une question qui se présente encore à examiner ici, consiste à savoir si une commune peut exiger, dans son intérêt communal, l'expropriation d'un immeuble appartenant à un homme domicilié ailleurs, à un étranger, par exemple? Ce propriétaire ne pourrait-il pas dire que, devant, par son éloignement, rester perpétuellement étranger au bénéfice ou à l'intérêt que la commune demanderesse espère percevoir de la construction par elle projetée, il n'est pas permis de le comparer aux habitants du lieu, ni par conséquent de le forcer, comme on forcerait l'un d'eux, à souffrir l'expropriation de son immeuble?

Nous croyons que cette question doit être décidée sans égard à une pareille opposition. attendu que nous ne voyons rien dans la loi qui puisse autoriser une autre solution ; qu'il s'agit ici d'une charge réelle et territoriale à subir; et qu'en conséquence il suffit que le fonds de ce particulier soit situé dans l'enceinte du territoire de la commune demanderesse, pour qu'il doive subir, comme tous les autres, ce genre de charge réelle, dont il est indistinctement affecté comme eux; qu'enfin, il n'est pas exactement vrai de dire que le propriétaire domicilié ailleurs doive ressentir aucun avantage de l'établissement projeté par la commune, puisque les aisances et commodités qui seront acquises par cette commune y rendront les fonds d'autant plus précieux et d'une administration d'autant plus prospère; qu'en conséquence ce propriétaire d'héritages, quoique domicilié dans une autre localité, n'étant point étranger à la cause de l'intérêt communal du lieu, il faut bien qu'il en subisse la loi comme s'il était domicilié dans la commune même de l'établissement à faire.

686. Une autre question qu'on peut faire encore sur ce point, mais dans une hypothèse inverse, consiste à savoir si une commune pourrait, pour satisfaire à son utilité communale, forcer l'expropriation, et s'emparer, par ce moyen, d'un héritage ou d'un

droit foncier compris dans le territoire d'une

autre commune.

En thèse générale, et sauf les exceptions signalées ci-après, cette question doit recevoir une solution négative, attendu qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 10 juin 1793, une commune étant une société de citoyens unis par les relations locales de son territoire, il n'y a plus unité d'intérêt communal, ni par conséquent de lien qui oblige les habitants d'une commune à supporter les charges qui peuvent peser sur les personnes ou sur les biens d'une autre commune, puisqu'il n'y a plus là d'association. On ne peut donc pas, pour satisfaire à un intérêt purement communal, se transporter hors de son territoire à l'effet d'exproprier forcément un étranger qui n'est tenu d'aucun engagement envers la société locale dans l'intérêt de laquelle on voudrait lui faire subir ce sacrifice.

687. Nous disons en thèse générale, et sauf les exceptions signalées ci-après: car on doit admettre ici deux espèces d'exceptions; l'une dérivant des dispositions du droit commun, et l'autre de l'espèce particulière de la chose destinée par sa nature à l'usage de tous.

:

Supposons en premier lieu qu'une commune ou certains habitants d'une commune possèdent, soit une forêt, soit d'autres fonds enclavés sur le territoire d'une commune voisine, et qu'il soit besoin d'établir un chemin de défruitement, ou de changer l'ancien passage d'exploitation pour le rendre plus facile et moins périlleux dans ce cas, tel est l'empire du droit commun, que la loi veut que généralement et sans distinction le propriétaire dont les fonds sont enclavés ait la faculté d'exiger un passage ou chemin d'exploitation (682), suivant la nature de ses besoins, sauf toutefois une juste indemnité envers les maîtres des fonds qui seront traversés par son chemin.

Admettons, en second lieu, que la demande faite par une commune pour satisfaire à ses besoins ou à son intérêt, porte sur une chose commune par sa nature, ou dont l'usage a été, par le Créateur, départi au genre humain tout entier, comme sont les sources et les cours d'eau on devra décider encore que, pour satisfaire à son intérêt communal ou à ses besoins sur cet objet, la commune qui manque de fontaine, ou qui n'en a pas assez sur son territoire et à sa portée, doit être admise à réclamer l'adjudication du secours de cet élément, à le prendre même sur le territoire d'une autre commune, attendu que la Providence en a destiné l'usage à tous. Et nous trouvons à ce sujet

TOME 2, ÉDIT. FRANÇ.

une espèce positivement prévue dans le Code civil, qui, après avoir établi comme règle générale (641), que celui qui a une source dans son fonds peut en user à volonté, déclare néanmoins (643) qu'il ne peut en changer le cours lorsqu'il fournit aux habitants d'un village ou d'un hameau l'eau qui leur est nécessaire; mais que si ces habitants n'en ont pas encore acquis ou prescrit l'usage, ils doivent à cet égard payer au propriétaire de la source une indemnité à régler par experts: ce qui constitue une espèce particulière d'expropriation ayant pour objet soit la privation du droit de détourner le cours d'eau, soit l'imposition des servitudes de passage pour arriver à la source.

Qu'on veuille bien remarquer que le Code, statuant que celui qui a une source d'eau dans son fonds ne peut en changer le cours lorsqu'il fournit aux habitants d'une commune, village ou hameau l'eau qui leur est nécessaire, ne suppose nullement que la source soit sur le territoire du village ou du hameau qui en ont besoin. Et il serait absurde de l'entendre ainsi, soit parce que l'eau courante n'a et ne peut avoir de situation fixe dans aucun territoire, soit parce que l'eau est un élément qui, comme nécessaire à la vie de l'homme et à celle de nos animaux, est offert au genre humain sans aucune des distinctions territoriales qui peuvent affecter les immeubles ayant une situation fixe et permanente.

Concluons donc qu'une commune ou un hameau dont les habitants n'ont pas de source d'eau à leur portée, doivent avoir la faculté d'obtenir forcément l'usage d'une fontaine ou cours d'eau qui aurait sa naissance même sur le territoire d'une commune autre que la leur.

Mais si la commune de situation de la fontaine en avait elle-même besoin pour son usage, il est sans contredit qu'un droit de préférence lui serait dû à cet égard, puisque c'est à elle que la Providence en aurait offert le service en premier ordre.

CHAPITRE XXII.

DES DIVERS ATTRIBUTS ET AVANTAGES DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE, ET PRINCIPALEMENT DE LA SUPERFICIE DU SOL.

688. D'après ce que nous avons dit dans tout ce qui précède, principalement dans le chapitre 17, et dans le chapitre 19 sur le commentaire de l'article 544 du Code, nous n'avons plus rien à ajouter qui touche spécialement à la propriété mobilière; mais il n'en est pas de même en ce qui concerne la.

17

CHAPITRE XXII.

propriété immobilière, sur les avantages et les attributs de laquelle nous devons donner encore des explications très-étendues : autrement notre tâche serait loin d'être remplie comme nous voudrions le faire.

La source des matières de ce chapitre, ainsi que de celles des chapitres suivants, dérive principalement des articles 543 et 552 de notre Code civil: pourquoi nous commencerons par les rapporter ici textuellement.

« Art. 543. On peut avoir sur les biens ou « un droit de propriété, ou un simple droit « de jouissance, ou seulement des services « fonciers à prétendre. »

« Art. 552. La propriété du sol emporte « la propriété du dessus et du dessous.

« Le propriétaire peut faire au-dessus « toutes les plantations et constructions qu'il « juge à propos, sauf les exceptions établies << au titre des servitudes ou services fonciers. « Il peut faire au-dessous toutes les con«<structions et fouilles qu'il jugera à propos, «<et tirer de ces fouilles tous les produits « qu'elles peuvent fournir, sauf les modifi«cations résultant des lois et règlements re<«< latifs aux mines, et des lois et règlements « de police. »

Voilà les deux attributs constitutifs de la propriété foncière : l'un qui s'applique à la jouissance exercée sur la surface du sol; et l'autre qui se rapporte au produit des fouilles qu'on peut pratiquer dans l'intérieur du fonds.

Dans le présent chapitre nous ne nous occuperons encore que des droits et avantages qui se rapportent à la superficie ou qui s'exercent au-dessus: sauf à traiter du produit des fouilles dans les chapitres suivants. Et comme les avantages dont le propriétaire jouit au-dessus de la surface de son fonds sont de deux natures, en ce que les uns se rapportent à l'espace aérien qui domine l'héritage, tandis que les autres se rattachent physiquement à la superficie qui les produit, et sur laquelle ils sont perçus, nous diviserons ce chapitre en deux sections, pour traiter séparément, dans la première des intérêts qui se rattachent à l'espace aérien qui est au-dessus du fonds; et dans la seconde, des produits que le propriétaire de l'immeuble a le droit de percevoir sur l'héritage qui lui appartient en toute propriété, ou seule ment en superficie.

SECTION PREMIÈRE.

DES DROITS ET INTÉRêts qui, pour le pROPRIÉTAIRE FONCIER, SE RATTACHENT A L'ESPACe aérien qui

EST AU-DESSUS DU SOL.

le domaine qui s'applique à la superficie. n'est pas borné seulement au matériel du fonds il s'étend ou plutôt il s'élève plus haut, et comprend aussi la maîtrise de l'espace aérien qui est au-dessus, et dont il est la partie fondamentale. C'est là ce que nous trouvons positivement exprimé par l'article 552 du Code civil, portant que la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous : en sorte que, comme le disait déjà la loi romaine, quand il s'agit du terrain d'un autre, le tiers qui n'a aucun droit de servitude sur le sol même de son voisin, ne peut rien faire qui avance ou anticipe dans l'espace aérien qui est au-dessus : quia cœlum quod supra solum intercedit, liberum esse debet 1.

Cependant le droit de propriété ne doit s'appliquer ici qu'à l'espace aérien qui peut comporter quelque utilité réelle pour le fonds de surface: car, en étendant cet espace à une hauteur infinie, ou jusqu'aux astres, il est bien certain que, dans cette partie supérieure, il n'est la propriété d'aucune créa ture humaine.

690. Il faut encore observer que, quoique l'espace aérien qui est au-dessus du sol d'un particulier appartienne au propriétaire du fonds jusqu'à une hauteur indéfinie, néanmoins les lois ou règlements de police peuvent avec justice lui interdire la faculté d'y faire des constructions d'une élévation telle que le jeu de la lumière, la circulation de l'air, la propreté, l'état sanitaire des lieux, et la sûreté des passants, puissent en rece voir quelque atteinte, parce que l'intérêt gé néral doit toujours prévaloir sur les velleites. et même sur l'intérêt des particuliers. B c'est dans ces divers cas et autres sembla bles, qu'on doit appliquer la disposition restrictive de l'article 544 du Code, portant que la propriété est le droit de jouir et dis poser des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas ** usage prohibé par les lois ou par les règle ments.

De tout cela résultent plusieurs consé quences qu'il ne sera pas inutile de signaler ici par détail, pour une plus complète expli cation de la théorie sur cette matière.

La première, c'est que celui qui constru une maison au bord de son terrain, ne pent placer dans son mur aucun balcon en sail j sans la permission du magistrat de la com mune s'il s'agit d'une rue publique, attend qu'au moyen de cette saillie il y aurait u

L. 1 in fine princip., ff. de servil, urin præd., lib. 8, tit. 2; 1. 22, § 4, ff. quod cit 689. Suivant les règles du droit commun, clàm., lib. 43, tit. 24.

anticipation dans l'espace aérien qui est audessus du sol public.

Vainement dirait-on que les rues sont de plein droit soumises à la servitude légale de la prise de jour pour les maisons adjacentes: car autre chose est d'avoir un simple droit de jour, autre chose serait d'avoir la faculté d'anticiper sur la rue;

La deuxième, qu'en appliquant les mêmes principes à l'égard de celui qui veut construire un bâtiment au joignant d'un fonds de particulier, il ne pourrait également établir un balcon ou autre ouvrage en projection sur l'héritage voisin, quoiqu'il eût le droit d'y prendre ses jours à fer maillé et verre dormant (676), parce qu'il ne peut jamais être permis d'aggraver aucune servitude;

691. La troisième, c'est que, comme on le voit souvent dans les villes anciennes, quand on reconstruit la façade d'une maison dont l'étage, en tout ou en partie, avait été, au moyen de poutres en bois ou autrement, avancé en projection sur la rue, la police municipale peut enjoindre au propriétaire de délaisser cette ancienne anticipation commise dans l'espace aérien au-dessus du sol, sans qu'il lui soit du aucune indemnité à ce sujet, attendu l'imprescriptibilité de tout ce qui fait partie du domaine public;

692. La quatrième, que nul ne peut placer le couvert de son bâtiment de manière à le mettre en projection saillante sur le fonds de son voisin; que si la question de propriété, ou même du possessoire du terrain adjacent à la maison, était une fois jugée au profit du voisin, le maître de l'édifice ne pourrait plus prétendre qu'à un droit de servitude résultant de la projection de son couvert; mais qu'au contraire, en l'absence de tout titre et de toute possession formellement exclusive de la part du voisin sur le terrain contigu au mur de la maison, la posSession paisible du couvert saillant en dehors de ce mur pourrait, suivant les circonstances, aire présumer que le sol qui est verticalenent au-dessous de la saillie appartient au naître de l'édifice, qui serait réputé l'avoir aissé en se retirant sur lui-même lors de sa construction, ou qui l'aurait, au besoin, prescrit par la continuité de sa possession; t dans ce cas, la jouissance du couvert, ointe à quelques actes possessoires portant mmédiatement sur le sol, pourrait être sufisante sans recourir à d'autres titres;

693. La cinquième, que celui qui possède ans la même contrée deux héritages séparés ar un troisième qui ne lui appartient pas, e pourrait, pour communiquer d'un de ses Onds à l'autre, établir un pont au-dessus de

celui qui est intermédiaire et qui ne lui appartient pas, puisque agissant ainsi sans le consentement du maître de l'espace qui est traversé, il se rendrait, à l'égard de l'espace aérien, coupable d'anticipation sur son voisin.

Et c'est la raison à priori pour laquelle nul ne peut licitement établir un pont, même sur une petite rivière, sans en avoir obtenu la permission du gouvernement, qui est l'administrateur suprême du sol public de tous les cours d'eau classés au rang des rivières;

La sixième, que celui qui n'a qu'un droit de jour à fer maillé et verre dormant (676), ne pourrait adapter à cette espèce de fenêtre aucun volet extérieur s'ouvrant sur le sol de son voisin, par anticipation dans l'espace aérien qui est au-dessus de ce fonds d'autrui;

694. La septième, enfin, que le droit d'avoir une maison avec entrées et sorties sur une rue, ne donne point au propriétaire de l'édifice la faculté d'y placer des portes qui dussent s'ouvrir en dehors, et dont le roulement ou le jeu extérieur s'opèreraient en circulant sur le sol public, attendu que, de cette manière, la servitude d'entrée et de sortie se trouverait aggravée en ce qu'à chaque ouverture ou clôture de la porte, il y aurait acte d'anticipation sur le sol ou l'espace aérien d'autrui, et que d'ailleurs l'usage de la rue ne resterait plus absolument libre;

Que si, lorsqu'il s'agit simplement de volets adaptés aux croisées des maisons adjacentes aux rues publiques, on permet de les ouvrir en dehors, cet usage est toléré comme chose précaire et ne portant aucun préjudice à la jouissance de la rue, qui n'en est point embarrassée.

695. VOULANT traiter généralement des droits que le propriétaire peut exercer à la superficie de son fonds, nous sommes encore loin d'avoir rempli notre tâche à cet égard; et, pour ne rien omettre d'essentiel, nous allons parler ici du partage par couches ou tranches horizontales qui peut avoir lieu sur l'espace, ou sur les constructions faites dans l'espace qui est au-dessus de la superficie du sol.

Déjà nous avons dit plus haut que toute construction faite sur un terrain quelconque, est tout naturellement une portion accessoire du fonds qui la supporte, et dans lequel on l'a incorporée : quia omne quod inædificatur, solo cedit. D'où il résulte que celui à qui on a légué, ou donné, ou vendu une maison, a le droit de revendiquer le sol sur

L. 7, § 10, ff. de acquirend. rerum domin., lib. 41, tit. 1.

lequel elle repose, ainsi que tout le dessus et le bas de l'édifice, puisque ces diverses parties incorporées ensemble ne constituent qu'un même tout. Néanmoins il faut dire, d'après la loi romaine, que cette règle doit cesser d'avoir lieu dans le cas où le propriétaire de deux maisons contiguës ou rapprochées l'une de l'autre, aurait destiné à l'usage de l'une une ou plusieurs chambres construites à l'étage sur l'autre, et s'en serait servi de cette manière : car alors, cette espèce particulière d'appartement, ayant cessé d'avoir ou n'ayant jamais eu son unité d'usage et de possession avec la maison dans la partie supérieure de laquelle la construction en aurait été faite, serait, par la destination et la disposition du propriétaire, réellement devenu partie accessoire et intégrante de l'autre édifice au service ou au complément duquel le maître l'aurait attaché pour n'être à l'avenir qu'un seul tout: Si cui ædes legatæ sint, is omne habebit id ædificium, quod solùm earum ædium erit. PAULUS: hoc tunc demum falsum est, cùm dominus ædium binarum aliquid conclave, quod supra concamerationem alterarum ædium esset, in usum alterarum convertit atque ita usus fuerit; namque eo modo alteris ædibus id accedet, alteris decedet 1.

Ces expressions atque ita usus fuerit, sont remarquables, en ce qu'il en résulte que le simple projet de destination ne suffit pas, mais qu'il faut encore qu'en fait la destination ait été consommée par la possession, pour que le droit d'accession doive avoir lieu au profit du légataire.

696. Lors même que les deux maisons ne seraient pas physiquement ou immédiatement contigues l'une à l'autre, la chambre, ou l'appartement, ou la terrasse, qu'on aurait pris sur l'une pour l'adjoindre à l'autre au moyen d'une galerie transversale, ne ferait pas moins une partie accessoire de cette dernière, attendu que, dans cette espèce, le principe d'accession serait toujours le même 2. Du reste, que ce soit l'étage ou le rez-dechaussée que le propriétaire des deux maisons ait voulu détacher en tout ou en partie de l'un des édifices pour l'annexer à l'autre, peu importe, parce qu'il n'y aura toujours de différence que dans le fait matériel, sans y en avoir aucune dans l'application des principes du droit d'accession.

Une chose qu'il faut bien remarquer pour la vraie intelligence de ces sortes d'espèces, c'est que quand on détache un appartement ou quelques pièces d'une maison pour en faire accessoirement la réunion à une autre

'L. 31, ff. de legatis 5o, lib. 32, tit. 1.

maison, de quelque manière que cela s'opère. ce n'est pas une simple servitude qu'on impose à l'édifice qui est appauvri, mais bien une portion de la propriété corporelle qu'on lui enlève, puisque cette portion se trouve accessoirement réunie à l'autre bâtiment. pour ne plus faire avec lui qu'un seul et même tout, tandis qu'elle reste civilement séparée de celui des édifices duquel la tranche horizontale a été propriétairement démembrée.

697. Une autre observation que nous devons encore consigner ici, c'est que dans le transport de la maison appauvrie ou mutilée comme il vient d'être dit, il faut bien distinguer le cas d'aliénation à titre gratuit de celui de l'aliénation à titre onéreux.

Dans le cas du legs ou de la donation de l'édifice appauvri, le donataire ou le légataire sont nécessairement obligés de se contenter de ce qui reste, distraction faite de la portion qui en a été civilement détachée pour la réunir à l'autre maison: peu importe que lors de l'acceptation de la libéralité, ils aient été instruits ou non de ce démembrement de propriété, parce qu'ici tout est dans la seule volonté du donateur ou du testateur, qui ne leur devaient rien, et qu'il est encore plus avantageux pour eux d'obtenir un édifice de moindre valeur, que de ne rien avoir du tout.

Mais dans le cas de la vente il faut porter la prévoyance plus loin, parce qu'ici le consentement de l'acquéreur est nécessaire sur le montant du prix : il faut donc, pour que la négociation soit légitimement consommée, que l'acquéreur ait été instruit du véritable état des choses, attendu que le prix d'une maison tronquée ne peut être le même que celui d'un édifice entier; il faut donc alors donner à l'acheteur des instructions telles, qu'il ne puisse se plaindre d'avoir été induit en erreur ou surpris.

698. Cette division de maison opérée par tranches horizontales, peut avoir lieu soit par l'effet d'un partage expressément stipulé entre les différents co-propriétaires de l'édifice, soit tacitement, et par le fait d'une possession distincte et séparée qui aurait, par prescription, opéré la division du fonds; et ce dernier genre de partage nous est positivement indiqué par l'article 553 du Code, portant que toutes constructions, planta«tions et ouvrages sur un terrain ou dans l'intérieur, sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le «< contraire n'est prouvé; sans préjudice de << la propriété qu'un tiers pourrait avoir

[ocr errors]
[ocr errors]

V. à cet égard la loi 47, ff. de damno infecto.

« PreviousContinue »