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de trop ou avec excès, comme les Orientaux nous le reprochent ; mais tout est écrit correctement en tout et partout, et s'accorde avec la vérité 1; » ce qu'il confirme en un autre endroit «par le témoignage de l'Eglise romaine, et par celui que lui a rendu tout le concile, de ne s'être éloigné en rien du droit et immuable sentier de la vérité; et cela par écrit, après avoir lu ses écrits à Nestorius; » ou, comme porte plus expressément une autre leçon; « après avoir lu les lettres qu'il avoit écrites à Nestorius 2, » où il comprend manifestement la lettre qui contenoit les douze chapitres. Voilà comment saint Cyrille avoue que ses anathématismes peuvent avoir un mauvais sens. C'est ainsi que les meilleurs livres, et l'Ecriture elle-même en peuvent avoir.

CINQUIÈME REMARQUE.

Si les douze chapitres de saint Cyrille ont été approuvés par le concile d'Ephèse erreur de M. Dupin.

<< Ils furent lus, poursuit notre auteur, dans le concile d'Ephèse; mais ils n'y furent pas nommément approuvés, comme la seconde Lettre (de saint Cyrille) à Nestorius. » Ce nommément est une chicane. M. Dupin veut insinuer que la troisième Lettre de saint Cyrille, où les anathématismes étoient renfermés, n'a pas été expressément acceptée ni autorisée par le concile; mais qu'on en lise les Actes, on n'y verra pas plus de marque d'acceptation pour la lettre de saint Célestin, qu'on convient être authentique, que pour celle de saint Cyrille où étoient les douze chapitres. Au reste ces deux lettres sont si approuvées, qu'elles sont, comme on a vu, le fondement de la procédure du concile. Celle de saint Célestin contenoit la commission que ce Pape adressoit à saint Cyrille contre Nestorius, et celle de saint Cyrille en contenoit l'exécution. Aussi le concile les fit lire ensemble comme deux pièces connexes'; et puisque notre auteur ne veut rien voir ni rien remarquer, il faut, encore une fois, lui faire lire dans les Actes du concile qu'après qu'on eut fait la lecture de ces deux lettres, Pierre,

1 Ep. ad Donat., Conc. Eph., III part., cap. xxxvш; Coll. Lup., cap. CCIV. — 2 Apol. ad Imper., III part., cap. XIII. - 3 Act. 1.

prêtre d'Alexandrie, qui étoit comme promoteur du concile, dit « Non-seulement la Lettre de Célestin à Nestorius, mais encore celle de Cyrille et du concile d'Egypte au même Nestorius, qui étoit nommément celle où étoient les douze chapitres, lui ont été rendues par les évêques Theopemptus et Daniel (qui en étoient chargés); et puisqu'ils sont ici présens, je demande qu'ils soient interrogés. » Alors il fut ordonné « que ces deux évêques exposeroient s'ils avoient rendu ces deux lettres, et si Nestorius y avoit satisfait. Les deux évêques répondirent que les lettres avoient été rendues, et que Nestorius n'y avoit pas satisfait; » ce qui ne seroit pas si criminel, si l'une de ces deux lettres eût été regardée comme ambiguë et pleine de mauvais sens; mais c'est à quoi l'on ne songeoit pas ; de sorte que ces deux lettres, tant celle de saint Cyrille où les anathématismes étoient prononcés, que celle de saint Célestin, sont considérées comme juridiques et authentiques. On fait un crime à Nestorius de n'y avoir pas déféré; et faute de l'avoir fait, on passe outre au jugement, et l'on prononce la sentence. Elles sont donc approuvées et plus qu'approuvées, si je puis parler de la sorte, puisque le concile les autorise par toute sa procédure.

Aussi ont-elles toujours passé pour approuvées : elles sont rapportées ensemble dans le cinquième concile', comme également approuvées dans le concile d'Ephèse : le même concile cinquième condamne d'impiété et frappe d'anathème ceux qui improuvent les douze Chapitres de saint Cyrille : Facundus reconnoît aussi, non-seulement que les Chapitres de saint Cyrille ont été approuvés dans le concile d'Ephèse, mais encore qu'on l'a ainsi présupposé dans le concile de Chalcédoine.

Nous venons aussi de voir un passage de saint Cyrille luimême, dans son Apologétique à l'empereur Théodose, où il dit que tous ses écrits, qui ont été lus dans le concile d'Ephèse, y ont été approuvés ; ce qui est expressément confirmé par le concile même dans sa Relation à l'Empereur, où il est porté que « le concile a conféré les Epitres que Cyrille avoit écrites sur la foi,

1 Col. VI, VIII, Anath. XIII. 4 Act. 1.

3 2 Facund., lib. VII, p. 296. —3 Sup., Rem. 11. —

avec le Symbole de Nicée : qu'elles s'y sont en tout point trouvées conformes, et que sa doctrine ne diffère en rien de celle-là; » ce qui est dans tous les conciles et en particulier dans celui d'Ephèse la formule d'approbation la plus authentique. On voit donc que toute la doctrine de saint Cyrille, qui a paru au concile, est expressément approuvée; et il faut bien remarquer qu'il parle, non d'une Epitre, mais de plusieurs; ce qui fait dire aux juges dans le concile de Chalcédoine, que « l'Empereur recevoit deux épîtres canoniques de saint Cyrille, confirmées dans le concile d'Ephèse1. >>

Si M. Dupin, qui se vante de nous donner une histoire si exacte, n'avoit point passé tout cela, il n'auroit peut-être pas pris la liberté de prononcer comme il fait, que « les douze chapitres de saint Cyrille n'ont jamais fait partie de la foi de l'Eglise. » Je voudrois bien lui demander s'il croit qu'il lui soit permis d'en révoquer en doute quelques-uns, après cet anathématisme du concile cinquième, dont nous avons déjà parlé : « Si quelqu'un défend les écrits impies de Théodoret, qu'il a faits contre la foi et contre le premier concile d'Ephèse, et contre saint Cyrille et ses douze Chapitres ;..... et s'il ne les anathématise pas, et tous ceux qui ont écrit contre la foi et contre saint Cyrille et contre ses douze Chapitres, et qui sont demeurés jusqu'à la mort dans une telle impiété, qu'il soit anathème 3. » Voilà une décision d'un concile général, dont personne ne conteste plus l'autorité; et si l'on répond que ce concile n'a pas été assemblé sur la foi, mais sur certaines personnes, comme parle saint Grégoire, je prends droit par cette réponse. Saint Grégoire, ni les autres saints qui ont parlé de cette sorte, n'ont pas voulu dire qu'il n'y ait point de décrets sur la foi dans ce concile; car tout en est plein: ce qu'ils veulent dire, c'est qu'on n'y a point traité, comme dans les quatre précédens, de questions spéciales concernant la foi, mais seulement des matières déjà résolues. Ainsi l'approbation des Cha-pitres de saint Cyrille étoit un point décidé ; et un jeune docteur nous viendra dire que ces chapitres n'appartiennent pas à la foi de l'Eglise!

1 Act. I, in fin. - 2 P. 781. - 3 Colla. VIII, cap. XIII.

Aussi le prétexte qu'il en prend est pitoyable. Il est vrai, comme il le remarque, qu'on n'en parla point dans l'accord ; mais si l'on veut conclure de là que la troisième Lettre de saint Cyrille, qui est celle où sont renfermés les douze Chapitres, ne fait point partie de la foi, on en pourra dire autant de la seconde, que M. Dupin veut bien regarder comme nommément approuvée, puisqu'on ne parla non plus de l'une que de l'autre dans l'accord on en pourra dire autant de la Lettre de saint Célestin, dont on ne fit non plus nulle mention; ce qui seroit trop abuser de la modération de saint Cyrille, et de la condescendance de l'Eglise.

Il faut donc dire au contraire, avec toute la théologie, que pour le bien de la paix, sans obliger les Orientaux à toutes les expressions que le concile avoit approuvées, l'Eglise se contenta de termes équivalens dont on convint, ce qui ne dérogeoit pas à l'autorité de ses actes, non plus qu'aux expositions qu'on avoit jugées nécessaires contre les écrits de Nestorius.,

Au fond les deux lettres de saint Cyrille sont visiblement d'un même esprit et d'un même sens. Tout y dépend d'un seul principe, qui est que la personne du Verbe Dieu est la même que celle de Jésus-Christ homme; ce qui étant une fois posé, tous les anathématismes ont une suite manifeste; et tout ce qu'on trouve de plus dans la troisième Lettre de saint Cyrille, dont on veut contester l'autorité, c'est une application plus particulière et plus précise de la doctrine de la seconde, aux propositions de Nestorius. Ainsi qui approuve l'une, approuve l'autre. Si les propositions de saint Cyrille ont eu besoin de tant d'éclaircissemens, et ont causé tant de disputes, ce n'étoit pas une raison à M. Dupin pour dire qu'on ne les a pas approuvées dans le concile d'Ephèse, et qu'il n'en étoit pas question1. Car il a vu qu'il étoit si bien question de la lettre où elles étoient, qu'on en fit un des fondemens de la condamnation de Nestorius. Pour les disputes qu'elles ont causées, il en faut uniquement imputer la faute aux préventions des partisans de Nestorius, qui irrités contre saint Cyrille de ce qu'il avoit condamné leur ami, le vouloient condamner lui1 P. 771, 774.

même, et à quelque prix que ce fùt, trouver dans ses douze articles l'arianisme et toutes les hérésies, encore qu'elles y fussent formellement rejetées.

SIXIÈME REMARQUE.

Un des anathématismes de saint Cyrille faussement rapporté.

Au reste il est véritable que si les chapitres de saint Cyrille étoient tels que M. Dupin les a rapportés, ils auroient besoin nonseulement d'éclaircissement, mais encore de rétractation. En voici un, comme il le rapporte : « Le neuvième est contre celui qui dit que Jésus-Christ a fait des miracles par la vertu du Saint-Esprit, et non pas par la sienne propre 1. » Si saint Cyrille avoit nié que Jésus-Christ fit des miracles par la vertu du Saint-Esprit, il auroit démenti Jésus-Christ lui-même, qui déclare sans difficulté qu'il chasse les démons par le Saint-Esprit. C'eût donc été à ce coup qu'il eût bien fallu se dédire. Mais il n'y a que M. Dupin qui le fasse si mal parler; car ce Père, en reconnoissant que JésusChrist faisoit des miracles par le Saint-Esprit, a déclaré seulement que cet Esprit, par lequel il les faisoit, ne lui étoit pas étranger, mais lui étoit propre aussi bien qu'au Père3, ce qui ne peut souffrir de contestation.

Notre auteur répondra sans doute qu'il ne l'entend pas autrement; et c'est de quoi on l'accuse, de ne pas savoir démêler les choses, et de ne pas considérer ce qu'il écrit.

SEPTIEME REMARQUE.

Sur l'expression de saint Cyrille: Unam naturam incarnatam.

Je ne veux point disputer avec notre auteur sur le sens de cette expression: Una natura incarnata ; je lui dirai seulement qu'il n'a pas dù dire « que saint Cyrille et les Egyptiens s'en servoient ordinairement, et la préféroient aux autres. » C'est une petite manière d'attaquer saint Cyrille, en lui imputant qu'il a préféré à toutes les expressions celle qui, comme il ajoute, « fut depuis 1 P. 699.2 Matth., XII, 28. - 3 Anath. 1x. - P. 779.

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