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Ce sentiment l'a conduite à pourvoir, au cas d'absence de de l'empereur appelé au trône, on du prince appelé à la régence.

Les sections 1ère et 2de du titre VII y pourvoient par la prorogation du pouvoir des ministres, par la formation d'un conseil présidé par le premier en rang des grands dignitaires.

Enfin, pour ne rien omettre, la section IIIe, donne le moyen de résoudre dans un conseil privé, par la rédaction et la proposition d'un sénatus-consulte, toutes les difficultés imprévues qui peuvent amener des conjonctures extraordinaires et sur la variété desquelles la pensée n'a pu s'étendre.

Ici finit, Messieurs, ce qui touche directement à la régence, et se présente un ordre d'idées qui s'y rapporte, sans en être ab lument dépendant.

TITRE IX.

Du sacre et couronnement de l'impératrice.

Appelées désormais au gouvernement de l'empire, en cas de minorité, les impératrices se trouvent attachées à la France par une sorte d'alliance nouvelle qui se forme au moment où l'empereur leur doit un fils, le trône un héritier, la nation un objet d'amour et d'espoir.

Le titre IX du sénatus-consulte décerne dès-lors aux impératrices, si l'empereur l'autorise, le droit dêtre sacrées, couronnées et proclamées pour ainsi dire, habiles à l'exercice de la régence.

Dans cette auguste solennité viendront se confondre, Messieurs, et la puissance des souvenirs, et la grandeur des intérêts, et la force des affections, et l'étendue des espérances, et jusqu'à la possibilité des malheurs, et jusqu'à la prévoyance des

regrets.

De ce moment, la double adoption de la nation par la souveraine et de la souveraine par la nation sera consacrée par toat ce que la religion a de plus saint, le pouvoir humain de plus auguste, la providence de plus consolant.

Et, pour rendre plus féconde encore, s'il est possible, cette source de profondes réflexions et d'émotions touchantes, le dernier titre du sénatus-consulte promet à la nation de voir, comme 'à d'autres époques de la monarchie, le prince héréditaire, roi de Rome, sacré et couronné sous les auspices de son auguste père, prendre d'avance, envers lui et envers l'état, les saints engagemens qu'il est appelé à remplir, et être ainsi plus spécialement désigné à l'amour et au dévouement des Français.

J'en ai dit assez, Messieurs, dans ce court exposé, pour vous 'faire apprécier, dans toute son étendue, l'importance de ce séiratus-consulte organique, monument nouveau de la constante sollicitude de l'empereur pour la durée de ses institutions, la sécurité de ses peuples, la gloire de sa dynastie.

C'est ainsi, Messieurs, qu'il convient de répondre aux projets insensés, aux espérances anarchiques, j'ai presque dit aux vœux bomicides de nos ennemis.

Les peuples et les gouvernemens qu'ils essaient d'abuser reconnaîtront leur erreur, en voyant d'un côté les bataillons, les escadrons déjà arrivés ou prêts à marcher partout où les appellent la sûreté et la gloire de l'empire, et de l'autre côté, la prudente sagesse, armant l'avenir même contre des malheurs invraisemblables, fonder plus solidement encore un gouvernement assuré déjà par toutes les affections et défendu par tous les intérêts.

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Le projet de sénatus-consulte organique est renvoyé à une commission spéciale, et le sénat s'ajourne à Vendredi, 5 de ce mois.

Séance du Vendredi, 5 Février.

Le sénat se réunit à deux heures, sous la présidence de S. A. S. le prince archi-chancelier de l'empire.

M. le comte Pastore!, au nom de la commission spéciale, nommée dans la séance du 2 de ce mois, fait le rapport sur le projet de sénatus-consulte organique..

Rapport fait au sénat par M. le sénateur comte Pastoret, au nom d'une commission composée de MM. les sénateurs comtes Lacépède, Laplace, Garnier, Chaptal et Pastoret.

Monseigneur, Sénateurs,

Des lois fondamentales sont la première garantie d'un empire, et l'hérédité du trône est la première de ces lois. Sans elle, plus de véritable monarchie. Un ordre fixe et prévu dans la succession à la couronne et dans le gouvernement de l'état, assure seul au peuple un pouvoir toujours présent, toujours protecteur, et parmi les moyens que la législation offre pour l'obtenir, les meilleurs, sans doute sont ceux que le tems a éprouvés et dont le souvenir inspire le désir de les voir remaitre. Tel est, Messieurss, le caractère du projet de sénatusconsuite, soumis aujourd'hui à votre délibération. Peut-être, dans quelques lois précédentes, n'avait-on pas toujours profité, avec un soin égal, des leçons du tems et de l'histoire; en consacrant de nouveau les sages principes qu'elles établissent, il était nécessaire d'en modifier quelques autres, trop éloignés des maximes immémoriales du peuple français.

Le premier article donne la régence à l'impératrice-mère de l'empereur mineur, si feu l'empereur n'en a pas disposé, et elle la réunit de droit à la garde de son fils. Plus de vingt reines ont été régentes parmi nous; et cet usage est aussi ancien que notre monarchie. C'est au cinquième siècle qu'elle se forma, et dès le sixième l'histoire nous offre de jeunes rois

sous la tutelle de leurs mères. Nous en retrouvons des exemples sous la deuxième race; ils sont plus fréquens encore sous la troisième; et ce n'est pas uniquement le soin de la personne que l'on confie à la tendresse des mères; c'est aussi le gouvernement de l'état: regni curam, administrationem, tutelam, regimen habeat, sont les expressions les plus ordinaires de, nos anciennes lois. La reine Alix fut deux fois régente sous Louis. VII son époux, et sous Philippe Auguste, son fils; la reine Blanche le fut deux fois également, par les volontés successives du prince à qui elle était unie, et de celui à qui elle avait donné le jour, de Louis VIII et de Louis IX.

Je n'entrerai point ici, Messieurs, dans des détails historiques, qui ont été recueillis avec soin, et placés, naguères, sous les yeux de tous les Français. Je ne m'arrêterai pas même sur cette reine Blanche, au sujet de laquelle j'aimerais pourtant à rappeler un fait trop peu connu et bien digne de l'être; c'est que la petite-fille de son illustre fils, de St. Louis, épousa le fils du premier empereur de la maison d'Autriche, et que cette maison, par-là même, remonte à la plus célèbre de toutes les régentes dont notre histoire ait conservé le souvenir. J'éprouve, je l'avoue, Messieurs, quelque bonheur à rappeler ce fait dans une époque où les Français doivent à la petite-fille de Marie-Thérèse le gage de tant d'affections et le modèle de tant de vertus.

En assurant la régence à l'impératrice dans le cas du décès de l'empereur, le projet de sénatus-consulte ne fait donc que nous ramener à la doctrine ancienne de la monarchie. Si le trône, comme le disaient nos ancêtres, ne pouvait tomber de lance en quenouille, cela n'empêchait point que le gouvernement ne fût laissé aux mères jusqu'à ce que la lance pût être mise dans les mains de celui qui était déjà roi.

La source d'une telle doctrine était dans la nature même. Quel garant plus sûr que l'amour maternel? le premier bonheur des mères, leur plus doux devoir, c'est leur fils; qui veillera mieux à leur conserver un pouvoir fort et respecté ? une autre ambition ne peut les atteindre, et s'il était permis de joindre à des motifs tirés de la nature un motif qui appartient plus particulièrement à l'intérêt public, nous dirons que c'est précisément parce qu'elles ne peuvent arriver à la royauté, dans les pays où les lois leur en ferment l'entrée, que leur régence a tous les avantages sans offrir aucun danger. Le plus tendre des sentimens de la nature tourne alors tout entier au profit de

l'état.

Mais cette juste confiance que la mère du prince doit inspirer à tous ses sujets, subsistera-t-elle, si, oubliant les devoirs. que la maternité lui doune envers son fils et que son rang lui impose envers la nation, elle passe à de secondes nôces? Non sans doute; et si une défense aussi naturelle avait besoin d'être

justifiée, nous la retrouverions encore dans la plupart des actes semblables de notre histoire, et notamment, dans ceux de Philippe-le-Bel, en 1294, de Charles VI, en 1392 et en 1403, et dans la loi d'un prince qui porte et qui mérita le nom de Sage, de Charles V (Octobre, 1374).

Les articles 19 et 20 du sénatus-consulte, du 18 Mai, 1804, voulaient que le régent fût choisi parmi les princes Français, et et à leur défaut, parmi les grands dignitaires de l'empire. Nous trouvons une disposition semblable, mais plus développée, mieux éclaircie, dans les art. 3 et 4 du projet de sénatus-consulte. La régence appartient d'abord au premier prince du sang, aux autres après lui, dans l'ordre de l'hérédité, aux princes grands dignitaires ensuite, dans un ordre prévu et déterminé. Les princes Français assis sur un trône étranger, ne peuvent prétendre à la régence: ils ont ailleurs, trop de soins à remplir, trop de devoirs à exercer; ils ont une autre patrie, une autre famille politique; et le premier trône pour eux serait toujours celui qu'ils doivent posséder toute leur vie, qu'ils doivent transmettre à leurs enfans.

L'âge pour être habile à posséder la régence ou faire partie de son conseil, est le même que le code Napoléon fixe pour la majorité, vingt-un ans accomplis. Tous les actes néanmoins eu seront portés au nom de l'empereur. L'âge qui fait beaucoup à la capacité de gouverner, ne fait rien à la transmission et à la certitude du droit. Un roi de cinq ans, comme le furent Louis XIV et Louis XV, n'en est pas moins roi. Nous en avons eu de plus jeunes encore, et leur enfance n'a pas empêché qu'ils ne portassent la couronne, et que leur nom ne fût placé à la tête de nos lois.

Le titre dont nous venons de faire connaître les principales dispositions, dit quel sera l'ordre de la régence quand une volonté particulière de l'empereur ne l'aura pas déterminée: mais nos rois eurent toujours le droit d'en disposer, ou par un testament ou par des lettres patentes; ce droit est réservé à l'empereur par le titre suivant:

Le troisième traite du pouvoir de la régence et de sa durée. Son autorité commence au décès du monarque. Elle est exercée telle que l'empereur l'exerçait lui-même. L'impératrice peut nommer aux grandes dignités et aux grands offices de l'empire, qui seraient vacans. Elle peut, et le prince régent aussi, nommer des sénateurs, nommer et révoquer les ministres. Ces dispositions ne sont que des conséquences nécessaires du premier article du même titre, article qui confère à la régente ou au régent la plénitude de la puissance impériale.

Il ne suffit pas de déterminer comment la régence serait donnée, à la mort d'un prince qui laisse un fils mineur; il fallait prévoir le cas où on perdrait ce fils même. Meurt-il, laissant un frère héritier du trône? rien n'est changé dans les

dispositious qui précèdent; c'est toujours sur un fils de l'impératrice que réside la royauté; elle continuera d'être régente. Mais il n'en serait plus de même, si l'héridité appelait au trône un prince qui ne fût pas son fils: la régence serait alors coufiée dans l'ordre prescrit par l'article 4, qui veut qu'à défaut de princes du sang, habiles à l'exercer, elle appartienne de droit au premier des grands dignitaires en fonctions au moment du décès. Si le prince appelé au trône par l'ordre de l'hérédité, est d'une autre branche, et mineur, le régent conservera l'exercice du pouvoir jusqu'à la majorité du nouvelle empereur, comme l'avait déjà établi le sénatus-consulte du 18 Mai, 1804. Daus aucun cas, le prince, investi une fois de la régence, ne peut la perdre jusqu'à cette majorité. On prévoit aisément tout ce qui pourrait résulter d'une lutte entre deux princes, dont l'un voudrait acquérir la régence, et dont l'autre voudrait continuer à l'exercer; et on sait trop bien que toutes ces luttes des ambitions individuelles, sont ordinairement fécondes en malheurs pour les peuples.

Le conseil de régence est l'objet du titre suivant. Ces couseils se trouvent encore établis par un usage immémorial dans l'histoire de notre monarchie. Charlemagne, et après lui, Charles-le-Chauve, en nomment pour leurs enfans, et nous trouvous encore dans nos anciens capitulaires, les actes par lesquels ces conseils furent institués. Ils sont plus fréquens; nous les connaissons mieux, du moins, sous la troisième race; et toujours on y remarque également le double principe exprimé dans le projet de sénatus-consulte: que les Français, voisins du trône, y sont appelés par leur rang même, et que le souverain a le droit d'adjoindre, à ceux qu'appellent ainsi les droits du sang ou l'éminence de leurs fonctions, les citoyens que sa propre estime et le bien de l'état, lui indiquent comme dignes de concourir à l'exercice d'une si grande autorité. Philippe III, Charles V, Henri II, nomment ainsi, par des lettres-patentes, et Louis XII, par son testament, des personnes étrangères à la famille royale, mais recommandables par leurs services, leurs lumières et leurs vertus. Du reste, il ne faut pas que ces indications, faites d'avance, ou par la nature, ou par les constitutions de l'état, ou par la sollicitude du prince pour l'avenir, puissent être sans effet par une volonté particulière de la régente et du régent: aussi l'article 22 leur défend-il d'éloigner les membres du conseil des fonctions qu'ils doivent remplir.

Des règles sont ensuite posées sur les délibérations de ce conseil; elles ne sont pas les mêmes dans tous les cas; mais plus l'objet de la discussion est important, plus est grande l'influence de ceux qui doivent y concourir. Dans les affaires ordinaires, le conseil de régence n'a que voix consultative; il a voix délibérative, et la majorité seule décide, s'il est appelé à l'examen des plus grands intérêts de l'état; le mariage de l'empereur,

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