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DEUXIÈME PARTIE.

(SUITE.)

CHAPITRE XVIII.

CHEMINS VICINAUX DE GRANDE COMMUNICATION.

432. S'il est nécessaire dans l'intérêt général d'ouvrir de grandes lignes de communication qui traversent dans toutes les directions le territoire de la France, il n'est pas moins important de tenir constamment en bon état d'entretien, les lignes plus modestes mais non moins utiles de la viabilité vicinale. Personne n'ignore que les chemins vicinaux, dont l'existence a partout précédé la création des grandes routes, sont presque les seules voies de communication des habitants de la campagne; et cependant, depuis un temps immémorial, en France, le mauvais état des chemins vicinaux, des chemins de traverse est devenu proverbial.

A quelles causes attribuer ce fâcheux résultat?

Ce n'est point assurément au silence de notre législation sur cette matière comme sur tant d'autres objets de l'administration publique, les lois ne manquent pas depuis 1789, tous les gouvernements qui se sont succédé ont adopté les dispositions législatives qu'ils estimaient les plus propres à obtenir l'amélioration de ces chemins.

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433. L'assemblée constituante déclara, par le décret du 22 novembre-1er décembre 1790, $1er,

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art. 2, que les chemins publics qui ne sont pas susceptibles d'une propriété privée, sont considérés comme des dépendances du domaine public.

Bientôt après, voulant améliorer l'état de ces chemins, elle décida, par le décret du 28 septembre-6 octobre 1791, titre 1er, section 6, art. 2, que les chemins reconnus par le directoire du district pour être nécessaires à la communication des paroisses, seraient rendus praticables et entretenus par les communautés sur le territoire desquelles ils sont établis, et qu'il pourrait y avoir, à cet effet, une imposition au marc la livre de la contribution foncière.

L'art. 3 porte : « Sur la réclamation d'une des communautés, ou sur celle des particuliers, le directoire du département, après avoir pris l'avis du district, ordonnera l'amélioration d'un mauvais chemin, afin que la communication ne soit interrompue dans aucune saison, et il en déterminera la largeur. >>

De plus l'art. 40, titre 2, du même décret prononçait une amende de 3 à 24 livres contre les cultivateurs ou tous autres qui auraient dégradé ou détérioré, de quelque manière que ce soit, les chemins publics, ou usurpé sur leur largeur.

Malgré ces articles, les chemins vicinaux n'en restèrent pas moins impraticables dans presque toutes les parties de la France.

La disposition du décret du 16 frimaire an 11 (article 1er) qui, tout en centralisant entre les mains du ministre de l'intérieur les travaux de construction ou d'entretien des grands chemins, ponts et levées, laissait les chemins vicinaux à la charge des

administrés, sauf dans les cas où ils deviendraient nécessaires au service public, n'était pas de nature à modifier ce fâcheux état.

D'un autre côté, le défaut de surveillance des administrations municipales, de district et de département avait amené des résultats non moins funestes.

Profitant des temps de troubles et de discordes civiles, un grand nombre de propriétaires ruraux, dans leur intérêt personnel et au très-grand dommage de l'intérêt public, avaient ouvert de nouveaux chemins, en usurpant sur les propriétés riveraines.

Pour réprimer cet abus qui menaçait de prendre de funestes accroissements, le directoire exécutif prit, le 23 messidor an v, un arrêté ainsi conçu :

« Art. 1er. Dans chaque département, l'administration centrale fera dresser un état général des chemins vicinaux de son arrondissement, de quelque espèce qu'ils puissent être.

« Art. 2. D'après cet état, elle constatera l'utilité de chacun des chemins dont il sera composé.

« Art. 3. Elle désignera ceux qui, à raison de leur utilité, doivent être conservés, et prononcera la pression de ceux reconnus inutiles.

sup

« Art. 4. L'emplacement de ces derniers sera rendu à l'agriculture. >>

En exécution de cet arrêté, les administrations centrales procédèrent à la reconnaissance des anciens chemins.

Comme, pour l'exécution de cette mesure, on avait remarqué des lacunes dans l'arrêté du 23 messidor an v, la loi du 9 ventôse an XIII vint confirmer le droit de l'administration, en le précisant mieux.

L'art. 6 de cette loi porte:

<< L'administration publique fera rechercher et reconnaître les anciennes limites des chemins vicinaux, et fixera, d'après cette reconnaissance, leur largeur, suivant les localités, sans pouvoir cependant, lorsqu'il sera nécessaire de l'augmenter, la porter au delà de six mètres, ni faire aucun changement aux chemins vicinaux qui excèdent actuellement cette dimension. »

Ces lois remédiaient bien à un abus, en restreignant le nombre des chemins vicinaux dans la proportion des besoins des localités, mais elles n'amélioraient point l'état des chemins reconnus nécessaires.

Il ne suffisait pas que l'arrêté du 4 thermidor an x eût, par son art. 6, mis ces chemins à la charge des communes en invitant les conseils municipaux à émettre leur vœu sur le mode qu'ils jugeraient le plus convenable pour parvenir à leur réparation, et à proposer à cet effet l'organisation qui leur paraîtrait devoir être préférée pour la prestation en nature; il aurait fallu, pour arriver à un résultat utile, remettre entre les mains de l'administration supérieure l'exécution des mesures proposées.

Sous l'empire, les nécessités de la guerre, et plus tard les malheurs des deux invasions de 1814 et 1815, ne permirent pas de s'occuper de l'amélioration de la viabilité vicinale.

La restauration trouva donc ces chemins à peu près dans le même état où ils étaient avant 1789.

Pendant les premières années de son établissement, les énormes contributions de guerre à payer aux étrangers par suite des traités de 1815, empêchè

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