Page images
PDF
EPUB

DÉCRET

réglementant l'immigration à la Guadeloupe.

(30 juin 1890.)

Sur le rapport du ministre du commerce, de l'industrie et des colonies;

1

Vu les décrets des 13 février et 27 mars 1852, concernant l'immigration et le régime du travail des colonies; Vu le sénatus-consulte du 3 mai 1854, qui règle la constitution des colonies de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Réunion;

Vu la convention conclue, le 1er juillet 1861, entre la France et la Grande-Bretagne, pour régler l'immigration des travailleurs indiens dans les colonies françaises;

Vu le sénatus-consulte du 4 juillet 1866, portant modification du sénatus-consulte du 3 mai 1854;

Vu le décret du 11 août 1866, déterminant le mode d'approbation des délibérations prises par les conseils généraux de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Réunion;

Vu les délibérations du conseil général de la Guadeloupe du 27 décembre 1881 et des 2 et 3 juillet 1885; Le Conseil d'État entendu :

CHAPITRE Ier

DU SERVICE DE L'IMMIGRATION ET DE SON ORGANISATION

ART. 1o.- Le service de l'immigration, à la Guadeloupe, est placé dans les attributions du directeur de l'intérieur.

ART. 2. Le personnel de ce service se compose: 1o D'un protecteur des immigrants, chef du service et inspecteur dans l'arrondissement où il réside;

2o D'un inspecteur, chef de l'autre arrondissement;

3o D'un personnel auxiliaire de syndics et d'agents, dont le nombre et les traitements sont fixés par le gouverneur à raison des besoins du service et d'après l'importance des allocations budgétaires; ce personnel auxiliaire n'a pas droit à pension.

ART. 3. Le protecteur, chef de service, l'inspecteur chef d'arrondissement et les syndics ont, en ce qui concerne l'immigration, la qualité d'officier de police judiciaire. Ils sont, à ce titre, soumis à la surveillance du procureur général sans préjudice de leurs devoirs de subordination envers leurs supérieurs administratifs.

Leurs procès-verbaux font foi jusqu'à preuve contraire. ART. 4. La résidence et les divers rapports des agents de l'immigration avec leurs supérieurs administratifs seront déterminés par arrêtés du gouverneur rendus en conseil privé.

ART. 5. Dans les communes autres que les chefslieux de circonscription syndicale, les secrétaires des mairies peuvent être appelés à exercer certaines des fonctions du syndic; ils reçoivent, pour ce service supplémentaire, des vacations d'après un tarif fixé par le budget.

CHAPITRE II

DE L'INTRODUCTION DES IMMIGRANTS

ART. 6. Sont qualifiés d'immigrants, les travailleurs africains ou asiatiques introduits dans la colonie dans les conditions prévues par le décret du 27 mars 1852. Tous autres travailleurs, quels que soient leur pays d'origine et

leur nationalité, sont soumis aux principes du droit commun qui régissent le louage des services en France, notamment à l'article 1142 du code civil.

Sont considérés comme immigrants, jusqu'à leur majorité, d'après leur statut personnel, tous les enfants nés dans la colonie de parents immigrants ou introduits avec

eux.

ART. 7. Tout particulier ou toute compagnie qui veut introduire des immigrants à la Guadeloupe, sans le concours des fonds de la colonie, doit en obtenir l'autorisation du Gouvernement.

ART. 8.-Les opérations d'introduction des immigrants peuvent être faites à la charge de la caisse de l'immigration et avec le concours des fonds de la colonie. Elles sont faites dans la mesure des demandes d'immigrants inscrites au bureau central du service de l'immigration. ART. 9. Les demandes ne peuvent excéder la proportion d'un engagé par hectare de terre en culture, déduction faite des engagés introduits au compte de la colonie et qui seraient actuellement à la disposition de l'engagiste. Les demandes qui excéderaient cette limite seraient réduites à la proportion d'un engagé par hectare, en vertu d'un arrêté du gouverneur, pris sur la proposition du directeur de l'intérieur.

ART. 10. La répartition de chaque convoi d'immigrants introduits avec le concours des fonds de la colonie est faite entre les industriels, propriétaires ou habitants, proportionnellement à leurs demandes inscrites et dans les conditions prescrites au chapitre ш du présent règle

ment.

ART. 11. Les demandes d'immigrants à introduire avec le concours des fonds de la colonie doivent être adressées au directeur de l'intérieur. Elles portent obligation

pour le souscripteur de prendre, à son tour d'inscription et au jour marqué par l'administration, les immigrants qui lui sont échus, sous peine de rembourser à la colonie, au taux de un franc (1′) par jour, les frais d'entretien au dépôt desdits immigrants jusqu'au jour de leur placement, sans préjudice de tous autres dommages-intérêts pour le cas où ce placement ne pourrait avoir lieu.

Chaque catégorie d'immigrants forme l'objet d'une demande spéciale. Les demandes précisent l'exploitation agricole ou industrielle à laquelle les immigrants doivent être affectés, ou l'emploi auquel ils sont destinés. S'il s'agit d'une habitation, elles indiquent la propriété à laquelle les immigrants doivent être attachés et font connaître son étendue en terre, en culture.

Ces déclarations sont visées et certifiées par le maire de la commune où se trouve située la propriété. Les demandes donnent aussi la qualification du demandeur : propriétaire, administrateur ou fermier d'habitation, colon partiaire, chef d'exploitation ou d'industrie.

ART. 12. Peuvent être exclus temporairement, et même d'une manière définitive, des listes d'inscription, par décision du gouverneur en conseil privé:

1° L'engagiste qui, tenu de pourvoir au rapatriement des immigrants engagés à son service, ne s'est pas acquitté de cette obligation;

2o Celui qui a laissé à la charge de l'assistance publique des immigrants mis à sa disposion, nonobstant toutes stipulations faites à cet égard entre l'engagiste et l'engagé ;

3° Celui qui se trouve dans un des cas qui donnent lieu au retrait des immigrants, conformément à l'article 127 du présent décret, que cette mesure soit appliquée ou non ;

4° Celui qui a été condamné pour contraventions aux dispositions de l'article 158 du présent décret.

ART. 13. Les cessions d'inscription ou les échanges de tour sont formellement interdits; néanmoins, des transferts peuvent être faits aussitôt après l'attribution des immigrants, sous la double condition de l'autorisation de l'administration et du payement des droits spécifiés à l'article 3 du décret du 13 février 1852.

ART. 14. L'engagiste inscrit est tenu de recevoir le contingent qui lui a été attribué. L'engagiste qui s'y serait refusé serait déchu du droit d'inscription l'année suivante, sans préjudice de tous dommages-intérêts encourus, comme il est dit en l'article 11. En ce cas, le contingent auquel cet engagiste avait droit rentre dans la distribution générale.

ART. 15. Tout engagiste en retard de satisfaire aux obligations mentionnées aux articles 11 et 14 en ce qui concerne la réparation du préjudice causé à la caisse de l'immigration par son retard de recevoir les immigrants qui lui sont échus est, dans les quinze jours de la notification à lui faite d'avoir à réparer ce préjudice et jusqu'à ce qu'il ait satisfait auxdites obligations, exclu de toute répartition.

ART. 16. La prime d'introduction à rembourser à la colonie pour l'attribution de chaque immigrant introduit avec le concours de la caisse locale est toujours payable comptant. Elle est fixée au taux prévu par le budget de la caisse d'immigration. Elle ne comprend pas les droits fixes et proportionnels déterminés à l'article 3 du décret du 13 février 1852.

ART. 17. Au moment de la répartition d'un convoi, les malades continuent à être classés dans les lots, et l'engagiste acquitte immédiatement, pour l'ensemble de chaque lot, les sommes dues à la caisse de l'immigration. Ces sommes sont restituées pour ceux desdits immigrants

« PreviousContinue »