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écarté, car le bénéfice de cette disposition est exclusivement réservé aux acquisitions déclarées d'utilité publique dans les formes légales.

Cette argumentation échappe à toute critique.

VII. L'art. 58 de la loi du 3 mai 1841, en vertu duquel la commune réclamait l'immunité d'impôt, est ainsi conçu :

« Les plans, procès-verbaux, certificats, significations, jugements, contrats, quittances et autres actes faits en vertu de la présente loi, seront visés pour timbre et enregistrés gratis lorsqu'il y aura lieu à la formalité de l'enregistrement... Les droits perçus sur les acquisitions amiables, faites antérieurement aux arrêtés du préfet, seront restitués lorsque, dans le délai de deux ans, à partir de la perception, il sera justifié que les immeubles acquis sont compris dans ces arrêtés. La restitution de ces droits ne pourra s'appliquer qu'à la portion des immeubles qui aura été reconnue nécessaire à l'exécution des travaux. »

La première partie de cette disposition ne prononce pas l'exemption d'impôt en faveur de tous les actes faits pour cause d'utilité publique ; elle exige, en outre, que ces actes soient faits en vertu de la loi sur l'expropriation.

VIII. Pour qu'un acte de cession amiable soit réputé fait en vertu de la loi du 3 mai 1841, il faut que le propriétaire, en consentant librement et spontanément l'abandon de son immeuble, ne fasse qu'aller au devant d'une nécessité inévitable; il faut, en d'autres termes, que les formalités nécessaires pour permettre sa dépossession forcée aient été remplies, c'est-à-dire que l'autorité compétente ait constaté l'application indispensable de l'immeuble à l'œuvre d'utilité publique projetée. En exemptant de tous droits de timbre et d'enregistrement les actes de cessions amiables faits en vertu des dispositions sur l'expropriation, et en disposant que les droits perçus sur les acquisitions amiables antérieures aux arrêtés de cessibilité seront restitués à la condition qu'il soit justifié dans les deux ans que les immeubles acquis ont été compris dans ces arrêtés, le législateur a voulu exonérer d'impôt les actes que l'expropriation a rendus ou qu'elle devait rendre nécessaires. La loi présume, avec juste raison, que les acquisitions amiables, lorsqu'elles ont pour objet des immeubles compris dans des actes déclaratifs d'utilité publique, n'ont lieu que pour éviter, grâce à l'accord des intéressés, les formalités de procédure. C'est pourquoi elle admet ces contrats au régime de faveur établi par la loi du 3 mai 1841 pour les actes faits en vertu de la loi sur l'expropriation.

Cette doctrine se dégage avec une netteté parfaite de la jurisprudence : << Attendu, porte un arrêt de la Chambre des requêtes du 7 mars 1883, que cet article (l'art. 58) se réfère virtuellement aux dispositions précédentes traçant le mode légal de constater la nécessité de la cession d'un immeuble...; que l'acquisition par adjudication devant un tribunal d'immeubles dont aucun document légal ne justifie l'application nécessaire à des travaux d'utilité publique ne peut être considérée comme faite en vertu de la loi sur l'expropriation » (S. 84.1.197; D. P. 84.1.59; Comp. Cass., 23 août 1841, S. 41.1.773; D.P. 41.1.350; 19 juin 1844 (3 arrêts), S. 4t. 1.492, 493 et 496; D. P. 44.1.261 et 262; 13 nov. 1848, S. 49.1.60; D. P. 49.1.264; 13 juillet 1849, D. P. 49.1.265; 30 janv. 1854, S. 54.1.207; D. P. 54.1.75; 31 mars 1856, S. 56.1.752; D. P. 56.1.190).

IX. Il est de toute évidence qu'une déclaration d'utilité publique émanée d'une autorité incompétente ne saurait être envisagée comme un document légal susceptible d'autoriser l'expropriation. Les auteurs sont, en effet, unanimes à reconnaître que le tribunal chargé de procéder à cette mesure doit vérifier non seulement si la déclaration d'utilité publique a été rendue, mais encore si cette déclaration émane du pouvoir compétent, et qu'ik

peut, à défaut d'un acte régulier, refuser de consacrer la dépossession du propriétaire. « Le tribunal, dit Dalloz (J. G., Vo Expropriation, no 258), peut-il refuser l'expropriation si, les travaux ayant été autorisés par un simple décret du pouvoir exécutif, il estime qu'ils auraient dù l'être par une loi? Nous pensons qu'il le peut. En effet, il a pour mission de vérifier si toutes les formalités prescrites par la loi ont été remplies. Or si, dans le cas où une loi était nécessaire pour autoriser les travaux, il est intervenu un simple décret, il est certain que la loi n'a point été observée, que les formalités qu'elle prescrivait n'ont point été remplies. Le tribunal peut donc, ce semble, reconnaître cet inaccomplissement et refuser, pour ce motif, de prononcer l'expropriation »> «Le tribunal, enseigne lui-même M. Aucoc (Conférences sur le droit administratif, t. 2, no 804), doit vérifier si la déclaration d'utilité publique a été faite par l'autorité compétente; cela implique pour lui le droit de rechercher si la déclaration devait être faite par une loi, par un décret ou même par un acte d'une autorité inférieure, ainsi que le permet, dans certains cas, la législation sur les chemins vicinaux. »

La jurisprudence de la Cour n'est pas moins formelle : « Attendu, porte un arrêt du 2 janvier 1844, qu'aux termes des art. 2 et 14 de la loi du 3 mai 1841, un jugement ne peut prononcer une expropriation pour cause d'utilité publique qu'après vérification par le tribunal des formalités prescrites par la loi; attendu qu'au nombre des vérifications que le tribunal ne peut se dispenser de faire, se trouve celle de savoir si l'utilité publique a été légalement déclarée » (Dalloz, J.G., Vo Expropriation, no 258, en note; Comp. 7 janv. 1845, S. 45.1.16; D. P. 45.1.84; 22 janv. 1845, S. 45.1.190; D. P. 45.1.84; 5 août 1872, S. 72.1.340; D.P. 72.5.230).

La déclaration d'utilité publique prononcée par une autorité incompétente ne constitue donc pas l'un de ces actes qui, selon l'expression de la Cour, constatent la nécessité de la cession, c'est-à-dire rendent inévitable la dépossession du propriétaire. Par une conséquence nécessaire, on ne saurait s'en prévaloir pour réclamer la gratuité d'impôt.

X. C'est à juste titre, dès lors, que le tribunal a admis, en principe, que l'immunité ne pouvait être appliquée qu'aux actes d'acquisition passés en vertu d'un acte déclaratif d'utilité publique rendu par l'autorité compétente. Son argumentation n'est pas, du reste, moins justifiée lorsqu'il soutient que cet acte déclaratif fait défaut dans l'espèce.

XI. En matière de chemins vicinaux, l'utilité publique est déclarée, en principe 1o par une délibération du Conseil général, s'il s'agit d'un chemin vicinal de grande communication (L. 10 août 1871, art. 44); 2o par une délibération de la Commission départementale, prise sur l'avis du conseil municipal, s'il s'agit de l'ouverture ou du redressement d'un chemin vicinal ordinaire. Le Conseil général et la Commission départementale exercent alors les pouvoirs conférés au préfet par les art. 15 et 16 de la loi du 21 mai 1836. Les décisions prises par ces assemblées et portant reconnaissance et fixation de la largeur du chemin, attribuent définitivement à ce chemin le sol compris dans les limites qu'ils déterminent, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une expropriation préalable, et le droit des propriétaires intéressés se résout en une simple indemnité (Cass., 27 nov. 1843, S. 44.1.16; 10 fév. 1848, S. 48.1.589; 28 fév. 1877, S. 78.1,453, D. P. 77.1.455; 27 nov. 1880, S. 81.1.383).

La compétence du Conseil général et de la Commission départementale est toutefois limitée au cas où les immeubles à acquérir consistent en terrains nus. L'art. 2 de la loi du 8 juin 1864 dispose que si l'occupation de terrains bâtis est jugée nécessaire, il doit être procédé à l'expropriation, conformément aux dispositions de la loi du 3 mai 1841 combinées avec les

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cinq derniers paragraphes de l'art. 16 de la loi du 21 mai 1836, c'est-à-dire que l'utilité publique doit être déclarée en la forme ordinaire, ainsi que cela a lieu pour les autres travaux communaux ou départementaux (Arrêts du Conseil d'Etat des 31 mars 1882, S. 84.3.20, Lebon, p. 303; 25 nov. 1887, S. 89.3.51, Lebon, p. 541; 2 déc. 1887, S. 89.3.52, Lebon, p. 756).

XII. Ces dispositions sont claires et précises. Les délibérations du Conseil général et de la Commission départementale n'emportent expropriation que pour les terrains nus et compris dans les limites du chemin, tels qu'elles sont déterminées par l'arrêté de classement. Si les communes ou les départements veulent acquérir des immeubles bâtis, ou non compris dans l'assiette de la voie, ils doivent, à défaut de cessions amiables par les propriétaires intéressés, faire déclarer l'utilité publique par un décret en la forme ordinaire. Toute décision qui aurait autorisé, en dehors de ces règles, l'occupation de propriétés privées serait entachée d'excès de pouvoir (Arrêt du Conseil d'Etat du 4 mars 1892, Lebon, p. 244), et les redevables ne sauraient l'invoquer pour se soustraire au payement des droits. XIII. Dans l'espèce, les immeubles en bordure acquis par la commune de consistaient en Castelsarrasin c'est là un point qui n'est pas contesté terrains batis ou clos de murs. Ils n'ont pas été compris c'est là un fait - dans l'assiette du chemin. La décision de la Commisnon moins certain sion départementale n'a donc pu avoir pour résultat d'exproprier les propriétaires de ces immeubles. Cette assemblée l'a elle-même reconnu, car elle a exprimé que si les terrains nécessaires à la construction du tracé (tracé comprenant les bordures) ne pouvaient être acquis de gré à gré, la prise de possession n'aurait lieu qu'à la charge par la commune d'en faire prononcer l'expropriation en se conformant à la loi du 3 mai 1841. C'est avec raison, par conséquent, que le tribunal a refusé de considérer ce document comme équivalant à une déclaration d'utilité publique régulière.

Annoter T. A., - I, Vis Acte administratif, no 20, et Procédure, n° 163; II, Vis Chemins ruraux et vicinaux, no 15,et Expropriation,

nos 8, 81 et 86.

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Art. 2229.

I. Congrégation. - Association religieuse. - Caractères. Absence de lien religieux et de règle spirituelle. Non-exigibilité de l'impôt sur le revenu indépendamment de toute distribution.

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II. Titres négociables. Timbre. Société civile. Improductivité. indirecte. Acquisition d'immeubles.

Abonnement.

Distribution

I. N'a pas le caractère d'association religieuse la société civile formée entre ecclésiastiques et laïques, entre lesquels n'existe ni lien religieux, ni règle spirituelle, en vue de l'exploitation d'un orphelinat et d'un pensionnat, alors surtout que le juge du fait a reconnu que cette association a une existence propre, n'est pas le préte-nom d'une.congrégation non autorisée et que la clause de répartition des bénéfices inscrite dans les statuts est sérieuse. L'impôt de 4 0/0 sur le revenu n'est pas exigible, en conséquence, de cette société en l'absence de toute distribution de bénéfices (Résolu par le jugement et par l'arrêt).

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II. L'art. 24 de la loi du 5 juin 1850 qui dispense du timbre d'abonnement sur leurs actions les sociétés qui n'ont, dans les deux dernières années, payé ni dividendes ni intérêts n'est pas applicable en cas de distribution indirecte aux actionnaires et notamment lorsque des benéfices ont été réalisés et affectés à l'augmentation du capital par voie d'acquisitions (Résolu en ce sens par l'arrêt, en sens contraire par le jugement).

Neufchâtel, 26 juillet 1893

et Cass. civ., 22 nov. 1899.

(Enregist. c. Société de l'orphelinat de Mesnières.)

MM. Maillet, rapp.; Desjardins, av. gén. ; Mes Montard-Martin et Sabatier, av.

Faits. En 1869, quatre prêtres, MM. Frigot, Dubloc, Paris et Marquézy, se sont réunis pour constituer une société civile et particulière dont les statuts sont consignés dans un acte reçu par M• Gatine, notaire à Paris, les 2 et 9 décembre de cette année.

L'art. 1er est ainsi conçu: « La société présentement établie a pour objet :

1o Le maintien et la direction d'un orphelinat existant actuellement au château de Mesnières-en-Bray, où il a été institué pour l'éducation religieuse, intellectuelle et matérielle de jeunes orphelins;

«< 2o Le maintien et la direction d'un pensionnat pour des jeunes gens de famille établi audit château;

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30 L'exploitation agricole des terres, prés et bois dépendant dudit château de Mesnières ou affermés ;

4° Et l'exploitation industrielle des usines et ateliers dépendant du même château.

«La direction du pensionnat, l'exploitation agricole et l'exploitation industrielle ayant pour but au moyen des produits à en retirer de soutenir l'œuvre des orphelins (en partie gratuite), alimenter le personnel et entretenir en même temps que ce personnel les objets mobiliers et les immeubles. »>

Aux termes de l'art. 2, la durée a été fixée à trente années et trente jours, commençant le 2 décembre 1869 et finissant le 31 décembre 1899.

Enfin, il a été stipulé :

« 1° Qu'en cas de décès de l'un des membres, la succession du défunt n'aura droit à aucune part de l'actif social ni des bénéfices et les droits de l'associé décédé accroîtront au fonds commun de la société maintenue » (art. 4);

« 2o Que les sociétaires auront le droit de s'adjoindre de nouveaux

associés pourvu que l'entrée de ces nouveaux membres soit résolue à l'unanimité » (art. 6).

Conformément à cette faculté, les membres de la Société se sont adjoint successivement différents associés tant religieux que laïques, ainsi qu'il résulte de délibérations régulières, et l'entreprise a fonctionné dans les conditions prévues par les statuts de 1869 jusqu'au 27 octobre 1882, date à laquelle elle a subi des modifications qui ont fait l'objet d'un nouvel acte passé devant Me Gatine. Dans son préambule, cet acte constate que le personnel de la Société se trouvait alors ainsi composé :

MM. Dubloc, prêtre; Marquézy, prêtre, membres fondateurs. - Yvelin, prêtre; Meillorat, prêtre; Bertsch, prêtre ; Roussel, laïque ; Besserat, laïque ; Bernard, prêtre; Lancel, prêtre; Libermann, prêtre; membres nommés depuis la fondation.

Après avoir exposé la situation financière de leur société, les parties ont arrêté les conventions suivantes :

« ART. 1er. — Il est formé, entre les comparants et ceux qui adhéreront aux présents statuts, une société civile et particulière qui a pour but :

«< 1° L'exploitation des biens appartenant actuellement à la société et de ceux qui lui appartiendront par la suite;

« 2o L'achat, l'aliénation ou la location de tous les meubles et immeubles;

3o Enfin, l'instruction primaire, agricole et professionnelle et aussi l'instruction secondaire . . .

<< ART. 2. La durée de la présente société est fixée à 55 années, à compter de ce jour.

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«ART. 5. Le fonds social est fixé à la somme de 370,000 francs..., divisé en 370 actions de 1,000 francs chacune. Il est attribué savoir :

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«<< ART. 6.

Toutes les actions seront au porteur; elles seront extraites de registres à souche, numérotées et signées de deux administrateurs. Chaque actionnaire aura la faculté de déposer ses ac

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