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celle de ma conscience, et je puis dire, avec Montaigne : Ceci est un livre de bonne foi.

Trop jeune pour avoir pu participer aux erreurs ou aux crimes de la révolution, j'ai commencé et terminé, sans reproche et sans tache, ma carrière politique. Les places, les titres, les décorations que l'Empereur daigna m'accorder, furent le prix de plusieurs actes d'un grand dévouement et de douze années d'épreuves et de sacrifices. Jamais je ne reçus de lui ni grâces ni largesses j'entrai riche à son service, j'en suis sorti

pauvre.

Lorsque Lyon lui ouvrit ses portes, j'étais libre; j'embrassai spontanément sa cause: elle me parut, comme à l'immensité des Français, celle de la liberté, de l'honneur et de la patrie. Les lois de Solon décla

raient infâmes ceux qui ne prenaient point de part dans les troubles civils. Je suivis leurs maximes. Si les malheurs du 20 Mars doivent retomber sur les coupables, ces coupables, aux yeux de la postérité, ne seront pas (je le répète) les Français qui abandonnèrent l'étendard royal, pour retourner sous les anciens drapeaux de la patrie; mais ces hommes imprudens et insensés qui, par leurs menaces, leurs injustices et leurs outrages, nous forcèrent d'opter entre l'insurrection et la servitude, entre l'honneur et l'infamie.

Pendant la durée des Cent Jours je n'ai fait de mal à personne, souvent j'ai trouvé l'occasion de faire du bien; je l'ai saisie avec joie.

Depuis le retour du

gouvernement

royal, j'ai vécu tranquille et solitaire; et, soit par oubli, soit par justice, j'ai

échappé, en 1815, aux persécutions qu'ont essuyées les partisans et les serviteurs de Napoléon.

Cette explication ou cette apologie m'a paru nécessaire : il est bon que le lecteur sache à qui il a affaire.

J'aurais désiré m'abstenir de parler, dans la première partie de cet ouvrage, du gouvernement royal: ćela ne m'a point été possible. Il m'a fallu rappeler fastidieusement une à une les erreurs et les fautes des ministres du Roi, pour rendre évidente cette vérité, qu'ils sont les seuls auteurs du 20 Mars. En disant ici et ailleurs le gouvernement, je n'entends point nommer le Roi, mais ses ministres. Dans une monarchie constitutionnelle où les ministres sont responsables, on ne peut ni ne doit les confondre avec le Roi. « C'est du Roi, a dit M. le » Garde-des-Sceaux, en proposant » aux députés de la nation le projet

» de loi sur la responsabilité ministé

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riefle, c'est du Roi qu'émane tout » acte d'équité, de protection, de » clémence, tout usage régulier du pouvoir c'est aux ministres seuls » que doit être imputé l'abus, l'injus> tice et la malversation. »

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MÉMOIRES,

ETC. ETC:

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NAPOLÉON, depuis son avénément au Consulat

et à l'Empire, avait joui constamment, et sans nuage, de la confiance, de l'amour et de l'admiration des Français. La guerre d'Espagne fut décidée; et la multitude, qui juge et ne peut juger les actions des souverains que d'après des apparences souvent trompeuses, ne vit dans cette guerre qu'une injuste agression, et dans les procédés de Napoléon qu'un odieux attentat. Des murmures se firent entendre; et pour la première fois, Napoléon, en butte aux reproches de la nation, fut accusé de sacrifier à une vaine et coupable ambition le sang et les trésors de la France.

La guerre contre la Russie vint détourner l'attention et le mécontentement public. Cette guerre, couronnée d'abord par brillans succès, se termina (l'humanité en

T. I.

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de

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