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qui déterminèrent Napoléon à se séparer à Laon de son armée; je les indique. Le général Gourgaud, dans sa relation, n'avait pu donner l'explication de la marche du corps du comte d'Erlon à la bataille de Ligny, de la conduite du maréchal Ney le 16, de l'inaction de Napoléon le 17, etc. J'éclaircis (je crois) tous ces points. Je montre aussi que ce ne fut point (comme l'avancent encore et le général Gourgaud et d'autres écrivains, pour relever le courage et le moral de l'armée Française que son chef lui fit annoncer l'arrivée du maréchal Grouchy. Napoléon (et ce fait est certain) fut abusé lui-même par une vive fusillade engagée entre les Prussiens et les Saxons; et c'est à tort qu'on lui impute d'avoir trompé sciemment ses soldats, dans un moment où les lois de la guerre et de l'humanité lui prescrivaient de son

ger plutôt à la retraite qu'à prolonger la bataille.

J'avais d'abord refusé l'entrée de ces Mémoires aux pièces officielles déjà connues. J'ai cru devoir les y admettre: cet ouvrage, qui embrasse tous les événemens du règne des Cent Jours, serait incomplet, s'il fallait que le lecteur recourût aux écrits du tems pour relire ou consulter l'Acte du Congrès de Vienne qui plaça l'Empereur Napoléon hors de la loi des nations, l'Acte Additionnel qui lui fit perdre sa popularité, et les discours éloquens et les déclarations vigoureuses par lesquels Napoléon, ses ministres, et ses conseillers cherchèrent à expliquer, à justifier le 20 Mars. J'ai pensé, d'ailleurs, qu'il ne serait peut-être point sans intérêt de rendre le lecteur témoin des com-. bats livrés, à cette grande époque,

par la légitimité des nations à la légitimité des souverains.

Les couleurs sous lesquelles je représente Napoléon, la justice que je rends à la pureté de ses intentions, ne plairont pas à tout le monde. Beaucoup de personnes qui auraient cru aveuglément le mal que j'aurais pu dire de l'ancien souverain de la France, n'ajouteront peut-être que peu de foi à mes éloges; elles auraient tort si les louanges prodiguées à la puissance sont suspectes, celles données au malheur doivent être vraies ce serait un sacrilége d'en douter

Je ne me dissimule pas davantage que les hommes qui, par respect pour les principes, persistent à ne voir, dans la révolution du 20 Mars, qu'une odieuse conspiration, m'aceuseront d'avoir embelli les faits et

défiguré à dessein la vérité; peu m'importe j'ai peint cette révolution, telle que je l'ai sentie, telle que je l'ai vue. Que d'autres se complaisent à flétrir l'honneur national, à représenter leur patrie comme un composé de poltrons ou de rebelles: moi je crois qu'il est du devoir d'un bon Français de prouver à l'Europe, que le Roi ne fut point coupable d'abandonner la France; que l'insurrection du 20 Mars ne fut pas l'ouvrage de quelques factieux qu'on aurait pu réprimer, mais un grand acte national contre lequel seraient venus se briser les efforts des volontés particulières; que les royalistes ne furent point des lâches, et les autres Français des traîtres; enfin, que le retour de l'île d'Elbe fut la terrible conséquence des fautes des ministres et des ultrà qui appelèrent sur la France l'homme du destin, comme

le fer provocateur appelle la foudre.

Ce sentiment me portait naturellement à terminer ces Mémoires par l'examen philosophique des Cent Jours et la réfutation des reproches journellement adressés aux hommes du 20 Mars. Des considérations fa¬ ciles à pénétrer m'ont retenu. J'ai dû me borner à mettre les pièces du procès sous les yeux du grand jury public et à lui laisser le soin de prononcer. Je sais que la question a été décidée dans les champs de Waterloo, mais une victoire n'est pas un jugement.

Quelle que soit l'opinion que le lecteur impartial portera de cet ouvrage, je puis protester d'avance que je ne me suis laissé influencer par aucune cousidération particulière, par aucun sentiment de haine, d'affection ou de reconnaissance. Je n'ai écouté d'autre impulsion que

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