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d'écrire à l'envi à Ptolemée beaucoup de chofes fâcheufes contre Aratus, de forte que le Roi lui envoya un courier pour fe plaindre à luimême de fon changement. Voilà comme dans les ardentes amitiez de ces Princes,qui comme de véritables amans paffionnez & jaloux, fe difputoient Aratus, & fe battoient pour l'avoir, il s'y mêloit beaucoup de malignité & d'envie.

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Aratus é'á Géné Page de vingt ans●

ral des Achéens à

Aratus ayant été élû pour la premiere fois Général des Achéens, alla ravager la Locride qui eft vis-à-vis au-delà du Golfe de Corinthe, & tout le territoire de Calydon; mais étant parti avec dix mille hommes pour aller au fecours des Beotiens, il n'arriva malheureusement qu'après la bataille qu'ils perdirent à Cheronée, où ils furent battus par les Etoliens & où Abojocritus leur Général fut tué fur la place avec mille de ses néral des Beotiens, meilleurs foldats.

Mais l'année fuivante ayant encore été élû

Voilà comme dans les ardentes amitiez de ces Princes. ] Je dois rendre compte ici d'une conjecture de M. Salvini, qui me paroît très-vraisemblable & trèsheureufe. Il y a dans le texte, ταῖς μοὺ ἦν περιμαχήτοις και διαπύρους. TOŽIVOUEVOUS PLOTE Qxi. Ce fçavant homme lit, se v apμαχήτοις καὶ διατύρω τοξευουδ'αι; a. Cela eft très-élegant; φιλίαις διαπύρω τι ξενομεν' κι ἔ @τι, mot à mot, Amicitia flagranti amore vibrata.

Il n'arriva malheureusement qu'après la bataille qu'ils perdirent à Cheronée. ] Il ne faut pas confondre cette bataille de Cheronée, avec la célébre bataille de Cheronée, où les Athéniens & les Thébains furent défaits par Philippe, & qui fut donnée la troifiéme année de l'Olymp. CX. Lxvi.ans avant la naillance d'Αratus.

Mais l'année fuivante ayant encore été élû Général.] Selon Polybe, qui a fuivi les mémoires

Abojocritus Ge

Aratus élu Géneral pour la feron de fois.

Il reprend le Châ

fur Antigonus.

Général, il fit cette fameufe entreprise de reprenteau de Corinthe dre le Château de Corinthe, entreprise qui ne tendoit pas feulement au bien des Sicyoniens & des Achéens,mais à l'avantage de toute la Grece puisqu'il travailloit à en chaffer la garnison des Macedoniens comme une véritable Tyrannie qui la tenoit toute entiere fous le joug. Comme Chares Capitaine des Athéniens, après un grand avantage, qu'il remporta un jour dans un combat contre les Lieutenans du Roi, écrivit au peuple d'Athénes qu'il avoit remporté une victoire, qu'on pouvoit appeller la fœur germaine de celle de Marathon; tout de même, fans craindre de Cette action ap- fe tromper, on peut appeller cette action d'Aramaine de celle de tus la four germaine de celle de Pelopidas le Pelopidas, & de Thébain & de Thrafybule l'Athénien, quand ils Difference avan- tuerent les Tyrans, avec cette difference que cettion d'Aratus aux te action d'Aratus ne fut pas entreprise contre des Grecs, mais contre une puiffance étrangere, ce qui la rend bien plus excellente. Car l'Ifthme de mêmes d'Aratus, & quia commencé fon Hiftoire où Aratus avoit fini, marque qu'entre le premier généralat d'Aratus, & le fecond où il furprit le château de Corinthe, il y eut huit ans entiers

pellée la fœur ger

celle de Trafybule.

tageuse de cette ac

deux autres.

Avec cette difference que cette action d'Aratus ne fut pas entreprife contre les Grecs, mais contre une Puiffance étrangere, ce qui la rend bien plus excellente. ] Ce principe eft certain; toute grande action entreprise avec fuccès

contre des ennemis étrangers a un éclat bien plus grand, & eft d'une bien plus grande utilité qu'une action entreprise contre ceux de fa nation.

Car l'Ifthme de Corinthe, qui Separe les deux mers, unit & joint le continent de la Grece avec celui du Peloponefe. ] Il fait voir en quoi confiftoient la grandeur & l'utilité de l'action d'Aratus d'avoir enlevé la citadelle de Corinthe à Antigonus, qui par son moyen étoit maître de la Grece.

Corinthe, qui fépare les deux mers, unit & joint
le continent de la Grece avec celui du Pelopone-
fe, & le Château de Corinthe, qui eft planté fur
une haute montagne, fe trouvant justement au
milieu de ces deux continens,& les féparant dans
un paffage d'ailleurs affez étroit, quand il eft
pourvû d'une bonne garnifon, rompt & empêche
tout commerce au dedans de l'Ifthme, de forte
qu'on ne peut ni paffer,ni mener des gens de guer-
re, ni faire aucun trafic, ni par terre ni par mer,&
qu'il rend maître abfolu de la Grece celui qui
en eft faifi, & qui y entretient des troupes. Auffi
rapporte-t-on que le jeune Philippe, Roi de Mace
cedoine, appelloit toûjours, non en riant, mais
très-férieufement, la ville de Corinthe les fers de
la Grece. Voilà pourquoi cette place étoit fi ja-
loufe, & excitoit l'envie de tous les voifins, fur
tout des Rois & des Princes.

Le Château de

Corinthe rendaicelui qui le tient.

tre de toute la Gre

les

Corinthe appellés fers de laGrece.

Paffion avec ladévoit d'être mai

quelle Antigonus

tre de Corinthe.

La paffion qu'Antigonus avoit de la poffeder, étoit fi violente qu'elle ne differoit en rien de la fureur des amans les plus paffionnez, il ne penfoit nuit & jour qu'aux moyens de l'enlever par furprife à ceux qui la tenoient, car il n'y avoit nulle apparence de pouvoir y réüffir par la force ouverte. Alexandre qui étoit maître de cette Citadelle, étant mort du poifon qu'on dit qu'Anti- poisonné par Antigonus lui fit donner,elle demeura entre les mains de Nicea fa femme, qui prit le gouvernement des Nicea veved 4affaires, & garda fa citadelle très-foigneufement. Citadelle de CoAntigonus lui envoya d'abord fon fils Deme

Alexandre em

gonus.

lexandre, garde la

rinthe.

Antigonus laga

trius, en la flattant de la douce esperance qu'il la lui feroit époufer, & ce n'étoit pas une chofe peu agréable & peu flatteufe pour une femme déja fur l'âge, que d'avoir pour mari un jeune Prince beau & bien fait. Il la gagna gagna donc par le moyen gner le moyen de de fon fils, dont il fe fervit comme d'un appât fon fils Demetrius. pour l'attirer dans fes piéges. Elle n'abandonna pourtant point fa citadelle, mais la garda avec grand foin. Antigonus feignit de ne s'en pas foufeftin des noces de cier, & fit à Corinthe le feftin de leurs nôces fon fils Demetrius avec beaucoup de magnificence. Ce n'étoient que fpectacles & feftins, & tous les jours il donnoit de nouvelles feftes, comme un homme que l'excès de fa joie portoit à ne penser qu'à faire bonne chere & à fe divertir.

Antigonus fait le

avec Nicea.

Amoibeus célébre

muficien.

Comment Anti

tre de la citadelle.

Un jour que le célébre muficien Amoibeus devoit chanter fur le théatre, Antigonus voulut accompagner lui-même à ce fpectacle la Reine gonus ferendit mai- Nicea, qui étoit portée dans une litiere royalement ornée, & qui toute fiére de ce grand honneur, étoit bien loin de penser au malheur dont elle étoit menacée. Quand la litière fut arrivée à un détour par où il falloit monter, il ordonna à ceux qui la conduifoient de la mener au théatre, & laissant là le muficien Amoibeus & toutes les nôces, il fe hâta de monter à la citadelle de Corinthe, en s'efforçant plus que fon âge ne permettoit. Comme il trouva la porte fern ée, il heurta avec fon bâton, & commanda qu'on lui ouvrît. Les foldats de la garnison, étonnez de fa

prefence, lui ouvrirent; de cette maniere il fe rendit maître du château, & en fut fi tranfporté de joye, qu'il ne put fe contenir, il se mit à boire & à fe réjouir au milieu des rues & de la place publique, menant avec lui des chanteufes & des joueufes d'inftrumens, & portant des chapeaux de fleurs fur la tête. Un homme de fon âge, & qui avoit éprouvé tant & de fi grands changemens de fortune, folâtroit & faifoit ainfi la débauche, comme un jeune homme, arrêtant tous les paffans, leur parlant & les embrassant, tant il eft vrai que la joye,qui vient à s'emparer tout coup du cœur de l'homme,& qui n'eft retenue par aucun difcours de la raifon, le fait fortir hors de lui-même beaucoup plus que ne font la tristeffe & la peur, & jette fon ame dans un plus grand trouble.

à

Antigonus s'étant donc rendu maître de la citadelle de Corinthe, comme nous l'avons dit, la mit entre les mains de ceux en qui il avoit le plus de confiance, & y établit pour Capitaine le Philofophe Perfée. Aratus, pendant la vie d'Alexandre, avoit bien formé le deffein de s'en emparer, & de procurer ce grand bien à sa patrie,

Avoit bien formé le deffein de s'en emparer, & de procurer ce grand bien à fa pairie.) J'ai plus fuivi ici le fens que l ́s mots. Car il m'a paru que le texte eft défectueux. Il y a dan le Grec, dzexcipua tu wargids. Il manque

manifeftement un mot, comme
Jau p Ou benda. Dans un Mf.
au lieu de red, on lit T

,nais cela ne fatisfait point,
car entreprit lection, ne dit rien
fi on n'a expliqué auparavant l'a-
ction dont on parl.

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