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la cale; qu'aucune faute n'étant établie ni même alléguée contre eux, ils ne sauraient être personnellement tenus de la valeur des marchandises perdues; attendu que les marchandises chargées sur le pont, même du consentement des chargeurs et sacrifiées pour le salut commun, sont exclues en principe de toute contribution aux avaries communes, aux termes du § 2 de l'article 141 du Code de commerce; que leur admission est possible seulement dans les voyages au petit cabotage; qu'il faut donc examiner dans l'espèce, pour savoir s'il peut être fait droit à la demande de Finot jeune à fin d'avaries communes, si le voyage de Pasages à Bordeaux, au cours duquel le Pontaillac a jeté à la mer une partie de sa pontée, est un voyage au petit cabotage; attendu que la loi des 30 et 31 janvier 1893 sur la marine marchande, spéciale à la prime, à la navigation et à la construction, a établi les nouvelles divisions de longs cours, de cabotage international, mais qu'elle a laissé substituer entières les anciennes divisions de grand et de petit cabotage, puisque les parties sont d'accord pour reconnaître que certains voyages de ports français à ports étrangers, quoique de cabotage international, sont restés de petit cabotage, qu'il ne serait donc pas exact de dire que le petit cabotage réside uniquement dans le cabotage français ; attendu que l'on ne pourrait davantage dire que le petit cabotage est la navigation qui se fait dans la même mer, même entre ports français et ports étrangers, puisque de Bordeaux à Anvers, par exemple, on va de l'Océan dans la Manche et dans la mer du Nord, tout en restant au petit cabotage, et que dans la Méditerranée, au delà de certaines limites, on est en grand cabotage sans avoir changé de mer; attendu que les limites du petit cabotage ont été fixées successivement par l'article du règlement du 23 janvier 1727, l'ordonnance du 18 octobre 1740, l'arrêté du 14 ventôse an XI, les ordonnances des 12 février 1815 et 27 novembre 1827, la loi des 14 et 20 juin 1854; attendu qu'il résulte des dispositions éparses dans ces divers textes que le petit cabotage est ainsi arrêté :

Tous voyages entre ports français, même entre l'Océan et la Méditerranée, tous voyages de Bayonne à Saint-Jean-de-Lutz à Pasages, Saint-Sébastien et la Corogne, tous voyages des ports français de l'Océan jusques et y compris l'Escaut, tous voyages entre les ports de Bretagne, Normandie, Picardie et Fiandre, et les ports d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande, tous voyages dans une certaine zone en Méditerrannée » ; attendu

que si peu en harmonie que soient ces textes avec l'etat actuel de notre concurrence maritime, ils font la loi de toutes parties et le tribunal ne peut puiser hors d'eux sa raison de décider; attendu dès lors que par application du § 2 de l'article 421 du Code de commerce, les marchandises chargées sur le pont du Fontaillac ne peuvent étre réglées en avaries communes; Par ces motifs,

Le tribunal joint les instances, et statuant par un seul et même jugement, dit Finot jeune non recevable, en tout cas mal fondé dans sa demande contre Hinard et Langevin, et le capitaine Panou, demandeur en garantie, J.-B. Hirigoyen, demandeur en sous-garantie non recevables, en tout cas mal fondés dans leurs conclusions respectives et les en déboute; fait masse de tous les dépens, tant de la demande principale que des demandes en garantie et en sous-garantie, et les met à la charge de Finot jeune; condamine, en outre, celui-ci aux frais de minute, enregistrement, expédition et signification du présent jugement. >>

Sur appel, la première chambre de la Cour d'appel de Bordeaux a confirmé en ces termes :

ARRÊT

Attendu que les limites du petit cabotage sont déterminées par l'ordonnance du 18 octobre 1740,que des règlements postérieurs n'ont pas été modifiés en ce qui concerne les voyages de Bordeaux aux ports de la côte d'Espagne sur l'Océan; qu'après avoir, par une règle générale, et sous l'article 2, classé en grand cabotage les voyages en Espague, Portugal et autres terres en deçà du détroit de Gibraltar, sous l'article 3, lordonnance crée diverses exceptions, notamment en faveur « des navires expédiés dans les ports de Guienne, depuis Bayonne. jusqu'à Dunkerque » et « des navires expédiés des ports de Bayonne et de Saint-Jean-de-Lutz et à ceux de Saint-Sébastien de Pasages et de la Corogne » ; qu'enfin l'article 4 spécifie que tous les autres voyages non compris dans les articles 1 et 2 sont réputés au petit cabotage; qu'en présence de textes ainsi expliqués, les tribunaux n'ont pas le pouvoir, sous prétexte d'interprétation, d'étendre les limites du petit cabotage et de créer, par assimilation ou par analogie, des exceptions nouvelles à la règle générale de l'article 2; qu'on comprend d'ailleurs qu'en raison de l'antiquité et de la fréquence des rapports cominerciaux entre Bayonne et Pasages la faveur du

petit cabotage ait été accordée à la navigation, entre ces deux ports, par dérogation à l'article 2 qui, d'une manière générale, attribue au grand cabotage la navigation de France en Espagne et en Portugal; qu'ainsi, les premiers juges ont fait une application des textes précités en décidant que le voyage de Bordeaux à Pasages rentrait dans cette catégorie;

Par ces motifs,

La Cour déboute l'appelant de son appel; confirme, en conséquence, le jugement attaqué, en ordonne l'exécution, et condamne l'appelant à l'amende et aux dépens. »

Du 23 mars 1896. Prés. M. Delcurrou, 1er présid.; av. gén. M. Haffner; plaid. : Mes Brazier et Chartrou.

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OBSERVATION. I. Sur l'étendue et les limites respectives du grand et du petit cabotage, voir: Cass., 25 juillet 1892, ce Rec., VIII, p. 20, et la note; Conseil de préfecture de la Seine-Inférieure, ibid., XI, p. 621, et la note; D. Rep. vo Droit maritime, no 74, et Organisation maritime, nos 568 et 569; Supp., ibid., nos 577 et s., et 182; Desjardins: Droit commercial, no 361, et la note; Labori et Schaffhauser, vo Droit maritime, no 175.

II. — Voir Cass., 12 mai 1845, S., 45, 1, 648; Bordeaux, 21 novembre, 1827, S., 28, 271, et 2 février 1846, D. P., 46, 2, 167; Labori et Schaffhauser, vo Droit maritime, no 832; Coulon et Houard, t. II, p. 166 et s.; Lyon-Caen et Renault, t. II, p. 242; de Valr ger, t. V, p. 236.

COUR D'APPEL DE NIMES

Pêche maritime. Baboués. Pêche au « salabre ». Décret du 10 mai 1862. Interdiction.

La « baboué » étant un animal qui vit dans la mer, sa capture constitue un acte de pêche maritime.

Dès lors, quand un décret pris en vertu de l'article 7 du décret du 10 mai 1862 prohibe toule pêche dans un cantonnement, la capture de la baboué y constiue un délit susceptible de poursuites correctionnelles.

MINISTÈRE PUBLIC C. X...

• LA COUR,

ARRÊT

Attendu qu'il résulte du procès-verbal du 26 juin 1895 que ledit jour le nommé X... a été trouvé, pêchant au moyen de filets appelés salabres, des vers dits baboués en dedans des limites du cantonnement délimité par le décret du 15 septembre 1894; attendu que les baboués sont des animaux qui vivent dans la mer et que par suite leur capture constitue un acte de pêche maritime; que le décret susvisé prohibe dans le cantonnement qu'il délimite toute espèce de pêche par quelque moyen que ce soit; attendu au surplus que l'usage fait par X... des filets appelés salabres était de nature à compromettre plus particulièrement soit la reproduction des espèces, soit la conservation du frai et du fretin, que le décret susvisé de 1894 pris en vertu du décret du 10 mars 1867, article 7, a eu pour but de sauvegarder;

Par ces motifs,

Vidant le renvoi ordonné par la Cour de cassation du 7 février 1896, réforme le jugement rendu par le tribunal correctionnel de Marseille le 31 juillet 1895: Déclare X... coupable du délit de pêche maritime prévu et puni par les articles 1 du décret du 15 septembre 1894, 7 du décret du 10 mai 1862, 7 de la loi du 9 janvier 1852; condamne ledit X... à une amende de 25 francs ;

Dit toutefois qu'il sera sursis à l'exécution de la peine et que si, pendant cinq ans à dater du présent arrêt, il n'est encouru par X... aucune condamnation de l'espèce mentionnée par l'article 1er de la loi du 26 mars 1891, la présente condamnation sera considérée comme non avenue, mais que, dans le cas contraire, la première peine sera exécutée sans qu'elle puisse se confondre avec la seconde ; condamne en outre X... aux dépens de première instance et d'appel; fixe la durée de la contrainte par corps au minimum. »

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OBSERVATION.-Sur des poursuites exercées contre le nommé X... le tribunal correctionnel de Marseille avait renvoyé le prévenu des fins de la plainte par jugement du 31 juillet 1895 confirmé par la Cour d'Aix le 14 novembre suivant. Le ministère public s'étant pourvu contre cet arrêt, la Cour de cassation

(chambre criminelle) a cassé la décision de la Cour d'Aix à la date du 7 février 1896. C'est sur renvoi que la Cour de Nîmes a statué. Dans son arrêt la Cour suprême s'appuie sur ce que « les baboués vivent dans la mer et que les engins utilisés pour les prendre sont des instruments de pêche, raclant le sol de la mer de façon à y détruire le frai et le fretin qu'a voulu sauvegarder, en vue de la reproduction de l'espèce, le décret du 15 septembre 1894 pris en vertu de l'article 7 de celui du 10 mai 1862. »

COUR D'APPEL D'AIX

Avaries. Jet à la mer. Avaries particulières à l'origine. Transformation en avarie commune.

Navire « Irini ».

I. Doivent être classés en avaries communes, les jets volontaires lorsqu'ils ont eu pour résultat d'alléger le navire, même lorsque la voie d'eau qui les a rendus nécessaires, constitue une avarie particulière.

II. Il en serait autrement si cette voie d'eau provenait d'un vice propre du navire ou d'une faute de l'armement.

A la date du 31 mars 1896, le Tribunal de commerce de Toulon (Var) a rendu le jugement suivant :

JUGEMENT

« Attendu que le capitaine Brewer, porteur des connaissements, conteste le règlement d'avaries communes fait par l'expert Rat et demande acte de ce qu'il déclare se réserver d'exercer l'action que lui confère l'article 297 du Code de commerce; attendu qu'il résulte du rapport de l'expert Rat, enregistré et déposé aux formes de droit, que les avaries communes du brick grec Irini, capitaine Lighnos, se sont élevées à la somme de 7,680 fr. 48 et que la cargaison du navire doit contribuer pour 5,985 fr. ; attendu qu'il résulte des débats, des conclusions des parties et des explications données par elles, la conviction pour le tribunal que l'expert Rat a sainement et consciencieusement rempli sa mission, que la répartition établie par son rapport a été faite équitablement et d'après les règles du droit et doit être homologuée pure

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