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Tribunat, contraria le désir qu'il avait d'être seul : il termina sa visite au second salon, sans vouloir même aller jusqu'à la salle des séances, et il remporta les préventions défavorables qu'il avait contre le Palais-Royal, et que rien dans la suite n'a pu détruire.

Cependant plusieurs projets furent présentés à Napoléon pour tirer parti de cet édifice et lui donner une destination quelconque. « Un de ces projets, dit M. Fontaine, consistait à y établir définitivement la bourse et le tribunal de commerce qui avaient été expulsés des Petits - Pères lorsque cette église fut rendue au culte catholique. On les avait transportés provisoirement au Palais-Royal, où ils occupaient le vestibule à colonnes de l'aile du milieu du rez-de-chaussée, sous la salle du Tribunat. Selon le projet dont nous parlons, la grande salle aurait occupé tout le premier de l'aile sur le jardin, avec deux grands escaliers à ses extrémités. Le rez-de-chaussée aurait été distribué en portiques à jour et en boutiques de marchands. Les bureaux, le tribunal et ses dépendances auraient rempli le reste du Palais-Royal. Mais ce projet ne reçut aucune exécution. On voulut ensuite en faire le chef-lieu de l'état-major de la place de Paris, pour y loger le gouverneur de la ville, puis encore en faire le palais des beaux-arts avec les

écoles de peinture, de sculpture et d'architec ture: rien de tout cela ne s'exécuta. Enfin, on imagina d'y reporter une autre fois, mais isolément et au milieu de la grande cour, le théâtre de l'Opéra, avec des salons et des appartements qui auraient servi à donner des fêtes publiques, mais ce projet fut repoussé comme les autres.

« Ce ne fut que lorsque, parvenu au sommet de sa puissance, Napoléon s'aperçut qu'il manquait de palais pour les rois qui venaient rendre hommage à sa gloire, qu'on lui proposa et qu'il parut agréer l'idée de comprendre le PalaisRoyal dans le plan général de la réunion des palais du Louvre et des Tuileries, et de faire en sorte que par des arcs, des galeries et des colonnades, ces trois grands édifices réunis présentassent le plus vaste ensemble et la plus magnifique résidence de souverain qui eût été connue jusqu'alors. Néanmoins, il ne fut pas donné plus de suite à ce projet qu'aux précédents, et le Palais-Royal, qui n'avait été amélioré en rien par le séjour du Tribunat, resta tellement décrédité, après tant de dégradations, que dans les dernières années de l'empire on alla jusqu'à proposer de le mettre en vente pour en faire un objet de spéculation. » Mais cet édifice était destiné à reprendre bientôt son ancienne splendeur.

En 1814, un auguste exilé revient dans sa patrie; il se présente seul et sans se faire connaître au Palais-Royal. Le suisse, qui portait encore la livrée impériale, ne voulait point le laisser entrer; il insiste, il passe, il s'incline, il baise avec respect les marches du grand escalier..... C'était l'héritier des ducs d'Orléans qui rentrait dans le palais de ses pères.

CHAPITRE X.

Le Palais-Royal sous Louis-Philippe, duc d'Orléans.

1814-1830.

AVANT de continuer l'histoire du Palais-Royal et d'arriver à l'époque de sa plus grande illustration, nous avons voulu, pour rehausser l'intérêt de notre ouvrage, raconter les antécédents d'une vie dont les longues vicissitudes devaient se terminer par une couronne; mais notre position particulière nous imposant une réserve qui sera appréciée par nos lecteurs, nous ne faisons que reproduire une notice imprimée en 1824, et nous nous bornerons à y ajouter quelques notes qu'une auguste bienveillance nous a permis de recueillir.

«<Louis-Philippe, duc d'Orléans, porta d'abord

le titre de duc de Valois; il prit celui de duc de Chartres à l'époque où son père devint duc d'Orléans.

Dès l'âge de cinq ans, il fut remis aux soins. de M. le chevalier de Bonnard 1. En 1782, la direction de son éducation fut confiée à madame la comtesse de Genlis. Au respect de la religion, à l'amour de la vertu, à la culture des lettres et des arts, madame de Genlis crut devoir joindre pour son élève une gymnastique bien entendue, pensant avec raison que ce qui fortifie corps dans la jeunesse fortifie aussi les facultés de l'âme 2.

le

En 1787, le duc et la duchesse d'Orléans ayant fait un voyage à Spa, madame de Genlis y conduisit leurs enfants; en revenant, le duc de Chartres, qui était dans sa quatorzième an

Le chevalier de Bonnard, né à Semur en Auxois, sousgouverneur des princes de la maison d'Orléans, avait servi honorablement dans l'artillerie, et n'était pas moins distingué par les grâces de son esprit et l'aménité de son

caractère.

* Se servir seul, travailler à la terre, courir, nager, coucher sur un lit de bois recouvert d'une simple natte de sparterie; braver le soleil, la pluie, le froid, la fatigue, tel était le régime auquel le prince était assujetti à Saint-Leu, comme à Saint-Cloud. Madame de Genlis semblait avoir pressenti les épreuves que la Providence réservait à son auguste élève.

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