Page images
PDF
EPUB

en sens contraire (1), donnant comme raison que l'on ne peut arguer de ce qui a lieu pour les tribunaux d'exception. L'article 1015 C. p. c. ne prescrit, en effet, aux arbitres de renvoyer l'incident aux tribunaux de droit commun qu'en matière de faux sans faire la moindre allusion à la vérification d'écriture, tandis que les articles 14 et 427 C. p. c. s'occupent de l'un et l'autre dès deux incidents. Ajoutons que la doctrine ne conteste pas la solution de la jurisprudence au cas où le compromis avait constitué les arbitres amiables compositeurs ou les avait affranchis de l'observation stricte des formes de la procédure.

Les arbitres peuvent, cela va sans dire, procéder à tous les actes d'instruction, alors mème qu'il en résulterait un incident de procédure, comme les enquètes, les expertises, les descentes sur lieux, les interrogatoires sur faits et articles, les prestations de serment, etc..., mais dans ce cas ils ne possèdent, aussi bien vis-à-vis des parties que vis-à-vis des tiers aucun pouvoir de coercition et ils doivent s'adresser aux tribunaux ordinaires, s'ils veulent, par exemple, forcer des témoins à déposer ou un expert à déposer son rapport. Remarquons en passant que ces cas ne sauraient rentrer dans l'article

[blocks in formation]

1015, quelque étendue qu'on lui donne, et que, pour les incidents dont ils sont juges, les arbitres ne jouissent d'aucune prorogation de délai et doivent juger le fond dans le délai fixé par le compromis ou par la loi.

Les pouvoirs des arbitres sont, d'autre part très étendus. Contentons-nous de marquer les points les plus importants ainsi que ceux qui pourraient présenter quelque difficulté.

Les arbitres ne sont pas plus que les juges ordinaires liés par les jugements interlocutoires qu'ils ont l'occasion de rendre; ils pourront, par exemple, dispenser une personne de subir l'interrogatoire sur faits et articles, l'ayant reconnu inutile, après l'avoir ordonné.

Ils peuvent, à moins que les parties ne leur eussent enjoint de rendre un seul jugement, prononcer des jugements définitifs sur quelques points et interlocutoires sur d'autres. De même, investis par le compromis du droit de juger toutes les contestations nées ou à naître dans les cas où la clause compromissoire est permise, ils resteront saisis après leur première sentence.

Ils peuvent statuer sur la question de savoir si l'une des parties a contrevenu à une clause pénale stipulée au compromis contre celle qui retarderait volontairement la sentence arbitrale, car il n'y a là qu'un intérêt civil et privé.

Une question qui ne présente plus de nos jours un grand intérêt, mais qui fut autrefois l'objet d'une importante controverse est celle de savoir si les arbitres peuvent prononcer la contrainte par corps dans les cas où les juges ordinaires peuvent l'ordonner. La doctrine et la jurisprudence se prononçaient généralement pour l'affirmative. L'application de la contrainte par corps, est aujourd'hui fort rare. Il faudrait en effet supposer un compromis ayant pour objet des dommages-intérêts nés d'un délit ou d'un crime. Rien dans ce cas ne s'opposerait à ce que les arbitres prononçassent la contrainte par corps par application de la loi du 22 juillet 1865 article 5. La sentence revêtue de l'exequatur a la mème force qu'un jugement, elle peut donc avoir les mêmes. résultats.

Les arbitres ont capacité pour prononcer sur les dépens. Les règles des articles 130 et 131 C. p. c., sont applicables sur ce point à leurs décisions. Mais peuvent-ils les liquider eux-mêmes ? Si l'affaire soumise à l'arbitrage est sommaire, ils le peuvent sans aucun doute car la liquidation doit alors être faite par le jugement qui adjuge les dépens (art. 543 C. p. c.) La liquidation des dépens dépassera au contraire leurs pouvoirs, si l'affaire est ordinaire, à moins que les parties n'aient dispensé les arbitres d'observer les formes de la loi et la taxe devra être faite par le président du tribunal qui rendra l'ordonnance

ROCHER

9

d'exequatur. Tel est, nous semble-t-il, le seul moyen de concilier le principe que les arbitres ne connaissent pas de l'exécution de leur sentence avec la nécessité de taxer les dépens auxquels ils auraient condamné l'une ou l'autre des parties sans en faire la liquidation. Remarquons enfin que le paiement des dépens avant l'ordonnance d'exequatur ne vaut pas acquiescement et n'empêcherait pas l'une des parties d'attaquer la sentence ou de s'opposer à l'ordonnance d'exequatur.

En matière civile ou commerciale, les arbitres peuvent ordonner dans les cas prévus par la loi (art. 439 C. p. c.), l'exécution provisoire de leurs sentences; mais lorsqu'ils l'ordonnent sous caution, ils n'ont pas qualité pour apprécier la valeur de la caution offerte (art. 517 à 522 C. p. c.) Ils peuvent aussi en sens inverse accorder un délai de grâce à la partie qui leur semble le mériter.

Enfin leurs pouvoirs prenant fin par l'accomplissement de leur mandat, c'est-à-dire dès qu'ils ont rendu une sentence définitive, ils ne peuvent plus dès lors procéder à aucune des mesures qu'ils auraient pu ordonner avant que leurs pouvoirs aient pris fin. Il ne peuvent connaître ni de l'excès de pouvoir reproché à une première décision qu'ils ont rendue ni de la validité de l'appel interjeté de la sentence qui a rejeté l'exception d'incompétence

élevée contre leur juridiction, bien qu'ils aient été nommés juges souverains (1).

Nous verrons enfin que les arbitres ne peuvent interpréter leur sentence, le jugement a mis fin à leur mission; il faudrait un nouveau compromis pour leur rendre le caractère qu'ils ont perdu.

[blocks in formation]

Comparution des parties. Mesures d'instruction. Mode de délibération.

En principe, aux termes de l'article 1009 C. p. c. les parties et les arbitres doivent suivre dans la procédure les délais et les formes établies pour les tribunaux ordinaires, si les parties n'en sont pas

autrement convenues.

Les parties peuvent en effet renoncer à suivre tout ou partie des formes de la procédure ordinaire, spécifier celles que les arbitres devront observer, ou même les en dispenser entièrement, exception faite naturellement pour les formalités substantielles telles que celle qui exige par exemple, que la sentence ne soit rendue qu'après que les parties ont été entendues ou se sont défendues. Elles peuvent aussi dispenser les arbitres de l'observation des règles de

1. Cass., 2 août 184, D., V. arb., n. 987.

« PreviousContinue »