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plus riches de la qualité noble qu'ils possédoient... que des biens d'une famille considérable dont ils n'avoient eu presque que l'honneur pour partage ». Ils ajoutent que pour ne pas dégénérer Jean fut obligé de chercher sa fortune dans les armes aux pays étrangers », tandis que Gilles

demeurait en Cotentin. (1)

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Par son mariage avec Françoise Le Martrier, le fils de Michel, Robert il signe d'Anneville Lefèvre enrichira sa maison. Sa femme est née du légitime mariage de Guillaume Le Martrier (2) et de Suzanne Le Rossignol (3). Son fils Michel-Hyacinthe, le père de notre curé, recueille au décès de son cousin de Doublemont, et à la veille de sa mort, la succession des deux familles dont la descendance directe vient de s'éteindre. Ainsi entre-t-il en possession de la fiefferme de Carteret achetée en 1718 au chevalier de Lorraine par son oncle maternel: Robert Le Rossignol (4), seigneur de

et les Lefebvre également dits Graffart de l'élection d'Argentan (XVIIe et XVIIIe siècles)? Faut-il voir dans cette branche les ainés de la famille. Les armes sont les mêmes; ils sont militaires ? Certains de leurs papiers sont en notre possession. Ne sontils pas venus par les d'Hérissé, famille alliée aux Graffart des élections d'Argentan et de Vire ?

(1). Généalogie, extraction et descente de noblesse, produites par Michel et Guillaume Lefebvre de Graffart, au greffe de la Chambre établie par le Roi pour la recherche des usurpations de la qualité noble. 5 janvier 1665. — Chart. de la Ricq. papiers

Lef. d'Ann. liasse I

(2) Guillaume Le Martrier (1645-1670), receveur de la Seigneurie d'Amont, à Tréauville, fils de Michel, sieur des Aulnez et de Madeleine Pezet. Représentant d'une notable famille de Tréauville dont le premier ancêtre connu, Gilles, meurt en 1617.

(3) Le Rossignol, famille originaire des environs de Coutances, probablement de Portbail. connue au XVe siècle. Noblesse de Robe illustrée par Pierre Robert Le Rossignol, sieur d'Annéville, envoyé extraordinaire vers les Princes d'Italie et Allemagne » (1706). Secrétaire de M. d'Hervilly puis Ambassadeur.

(4) Robert Le Rossignol, fils de Jean, sieur de la Valette et de Jeanne Prunier; avocat au Parlement de Paris, lieutenant général au Bailliage de Saint-Sauveur, maitre des Eaux et Forêts de Bricquebec. Après lui la fiefferme de Carteret passe à son fils Jean-Baptiste dit Monsieur de Carteret, puis à Robert-Pierre Le R... sieur de Doublemont, son cousin-germain.

Boisroger et de Carteret. Lui-même meurt en 1786; et le 3 janvier 1787 ses enfants se partagent sa succession.

Le curé de Sotteville est né à la Haye-d'Ectot le 27 octobre 1744 (1). Son père Hyacinthe, François, Robert, Michel, sieur d'Annéville et des Aulnez, décéda, nous venons de le dire, en 1786; laissant de son mariage avec Jacqueline Rotot (2) trois fils et deux filles :

I° Jean-Baptiste-François, sieur d'Anneville, Curé de SaintGeorges-de-la-Rivière, décédé à Winchester le 13 février

1802.

II° Hyacinthe-Robert-François, sieur des Aulnez, le père de Mesdames de Beaudrap et du Châtel, époux de JulieCharlotte Picot de Gouberville, (1737-1826).

III° Pierre-Bernard, sieur d'Osmont, notre curé, décédé à Tréauville le 13 janvier 1825.

(1) Voici l'acte de naissance du Curé de Sotteville que nous devons à l'obligeance de M. Paumier, Curé de Saint-Maurice et desservant de la Haye d'Ectot.

Du vingt-septième d'octobre au d. an, a été baptisé par nous prieur de la Taille, curé de la paroisse, un fils né du jour d'hier du légitime mariage de Michel-Hyacinthe le Fèvre, écuier, sieur Denneville et de demoiselle Jacqueline Rottot, ses père et mère, lequel a été nommé Pierre-Bernard par messire Pierre-François de Hennot, écuier, Seigneur du Rozel et autres lieux assisté de demoiselle Bernardine de Cabieul, présence des témoins soussignés :

P. sieur de Hennot du Rozel.
Bernardine Cabieul des Mézières.
LE GOUIX, p. c.

Bernardine-Louise-Françoise de Cabieul, marraine de PierreBernard, était veuve de Jérôme-Frédéric Bignon, chevalier, conseiller d'Etat, bibliothécaire du roi honoraire, de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, Seigneur de Vermanoir, La Meauffe, Le Rozel, Barneville, etc. Elle épousa en secondes noces Pierre-François de Hennot, Seigneur du Rozel, Barneville, Joganville, etc..., le parrain de d'Annéville.

(2) Jacqueline Rotot ou de Rotot, fille de maître Jacques Rotot de la paroisse de Saint-Maurice et de Marie Marguerye, de SaintPierre d'Artéglise, famille de cultivateurs enrichis, originaire de Saint-Maurice. Jacques, fils Pierre, était mort avant 1782.

IV Pierre-François, sieur du Dézert, mort en 1837, époux de dame Adelaïde-Nicolas Louvel de Contrières.

V Aimée-Marie-Françoise, née en 1750, et décédée à Tréau

ville le 14 juin 1824.

VI° Foy-Françoise-Jacqueline-Aimée, épouse en premières noces de Félix-Thomas Noël des Marais, et en secondes noces de Auguste-Marie Deslongchamps, morte avant PierreBernard.

Nous ignorons tout de l'enfance de Pierre-Bernard. Nous le voyons en 1761 élève de seconde ; il a pour régent M. Flambard. En 1763, il fait sa philosophie au collège du Mont à Caen, établissement fondé au XIe siècle par Robert de Thorigny, abbé du Mont-Saint-Michel. Son professeur se nomme l'Evêque (1). Puis nous le perdons de vue et nous le retrouvons en 1770, curé de Saint-Pierre de Sotteville parlant sur le jugement dernier au prône de la messe paroissiale, le dimanche 2 décembre. Mais à quelle date entra-t-il en possession de ce bénéfice; et où fit-il ses études de théologie? c'est ce que nous ignorons. Nous savons cependant qu'il succéda dans sa cure à son oncle maternel: vénérable et discrète personne Jean de Rotot, prêtre curé, décédé le 16 décembre 1769 (2).

Jusqu'à la Révolution le Curé de Sotteville habite son presbytère modestement mais décemment meublé. Son bénéfice lui rapporte << tout compte fait et sauf erreur de calcul : 2.136 livres, 12 sols 6 deniers » avoue-t-il dans la déclaration qu'il fait le 17 mars 1790 aux officiers municipaux de

(1) Voici la note qui termine son cours de moral: Hanc ego Petrus Bernardus d'Osmont le Febvre, accepi moralem A. D. l'Evêque presbitero, sacre Facultati Théologie Cadomensis baccalaureo, nec non in Collegio Montano celeberrine Universitatis Cadomensis subtilissimo ac erudissimo pphie professor anno a partu Virginis Deipare millesimo septengentesimo sexagesimo tertio.

(2) Déclaration de l'héritage de J. de Rottot, curé de Sotteville, en date du 7 juin 1770, par H. F. R. Lefebvre d'Annéville, papiers Lef. d'Anné, liasse III.

sa commmune. Sur cette somme d'Annéville doit subvenir aux charges et services tant spirituels que temporels de sa paroisse, lesquels consistent : « dans la deservie de la d. paroisse; dans l'acquit des fondations ; dans la fourniture d'un vicaire; dans l'entretien et réparation des d. bâtiments et du chœur de l'église; dans le payment des impositions; dans les frais de faisance-valoir ou exploitation etc. etc. » (1).

L'abbé d'Annéville en qualité de seul décimateur de sa paroisse est donc « tenu de fournir, payer, loger et nourir un vicaire, d'autant plus ajoute-t-il, - qu'il n'y a actuellement dans la paroisse aucun prêtre-obitier ni même aucun chantre qui puisse répondre la messe paroissiale ou autres messes hautes, et que le d. Curé est d'un faible tempérament et d'une mauvaise constitution qui l'oblige même quelquefois d'appeler à ses frais un prêtre étranger outre son vicaire. Comme seul décimateur, ne doit-il pas encore subvenir aux frais du culte, car le trésor ou fabrique de son église possède pour tout revenu 40 livres 7 sols (2).

Ce prêtre gentilhomme, égaré dans une modeste cure de la Hague celle-ci comprenait environ 300 paroissiens en 1790

si l'on en juge par ses écrits, était un homme d'ordre à l'esprit méthodique, sage et pondéré, et ces qualités, se retrouvent jusqu'en ses cahiers d'écolier. Son style est clair, précis, accusant une grande netteté dans la pensée: Son érudition est certaine Ce fut an « bûcheur ». Aussi d'Anneville, esprit cultivé, met il a protit les loisirs de son ministère pour se parfaire. Il étudie, il note, il classe, travaillant à la fois la théologie, les sciences et les lettres. Et ce petit curé de campagne isolé parmi les bouais-jan de sa lande, sait non

(1). N'est pas à cause de ces charges, que le pouillé du diocèse de Coutances, éta bli au XVIIIe siècle et recopié par l'abbé d'Annéville, donne la cure de Sotteville pour 900 livres ?

(2). Renseignements pris, dans l'état désignatif et estimatif des biens et revenus fourni à la Municipalité de Sotteville (papiers Lef. d'Ann. liasse III).

sa paroisse, d'une lieue lieues de circonférence,

seulement ce qui se passe dans et demie de large et de quatre mais encore il connaît les nouvelles de l'extérieur; il suit attentivement les manifestations et les mouvements de son temps; il sait ce que disent les chroniqueurs et les polémistes, ce que colportent les gazettes; il lit, il écoute, il se documente.

D'Annéville a été avant tout autre chose un bon prêtre et un digne homme. Jamais il ne considéra sa cure sous l'unique aspect du bénéfice temporel ainsi que le faisaient certains curés de son temps, et même de hauts dignitaires de l'Eglise. Son nom et les alliances de sa maison, lui assuraient à la ville une vie agréable et enviée, mais pasteur convaincu, il conserva le gouvernement spirituel de sa paroisse, tant il lui répugnait de se décharger de ce soin sur un prêtre mercenaire. Gardien d'un troupeau, il en prend la responsabilité devant Dieu, et le jour venu devant les hommes. Aidé de son vicaire, il instruit ses ouailles, les guidant dans le chemin du bien et de la vertu; et il s'acquitte de ce devoir avec conscience; ses sermons sont étudiés avec soin.

En 1789, d'Annéville est dans la force de l'âge : il a 40 ans. Malgré cela et devant la menace des évènements, ne pourraiton pas s'attendre à une défaillance de ce prêtre dont la santé est délicate? Il n'en est rien, et cet homme faible de constitution sera fort dans la lutte. Le curé de Sotteville a des principes, de la fierté et une certaine grandeur d'âme; il ose l'affirmer. Ce n'est ni un veule, ni un poltron; et encore moins un orgueilleux ou un fanfaron; chez lui le cœur est noble, la pensée sereine, et par ses qualités il fait la conquête de ses paroissiens et des officiers municipaux de sa commune, ainsi qu'en témoigne le procès-verbal de sa déclaration du 6 février 1791, dont voici les passages principaux.

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