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deux autres travaux primés en second dans le même concours et qui sont l'œuvre, l'un de M. le major de carabiniers Deutsch, à Richtersweil, l'autre de M. Eugène Schnider-Simon, à Zurich. Nous supprimerons peut-être quelques considérations d'intérêt secondaire qui peuvent être retranchées sans nuire à l'intelligence du raisonnement de l'auteur de chacun d'eux.

Voici la question posée par la Société fédérale des officiers de carabiniers :

«L'existence des bataillons de carabiniers dans notre armée de » milices est-elle encore justifiée, et peuvent et doivent-ils, comme >> bataillons d'élite dans la division, être employés de préférence à » de certains buts?

» Par quels moyens pourrait-on en faire de véritables bataillons » d'infanterie d'élite, soit, comment faut-il en organiser le recrute>> ment et l'instruction pour parer à l'incontestable et constante dé>>chéance des bataillons de carabiniers. >>

TRAVAIL DE M. LE MAJOR DEUTSCH.

A. Partie générale.

Deux opinions sont en présence sur la question des carabiniers, les uns voulant les supprimer tout à fait, et les autres demandant plutôt qu'ils reçoivent une instruction plus développée.

Les raisons sur lesquelles on s'appuie pour réclamer la suppression de cette arme spéciale étant suffisamment connues, nous nous abstiendrons de les indiquer.

Le but de ce travail est plutôt de plaider en faveur du maintien des corps de carabiniers et de contribuer à résoudre cette question d'une manière qui tourne au bien du pays, et réponde au vœu d'un grand nombre de patriotes dévoués.

Personne ne contestera que le tir soit en Suisse un exercice réellement national et un élément de la vie populaire. Non seulement les miliciens, mais aussi un grand nombre d'hommes exemptés du service militaire sont exercés au maniement des armes à feu et se déclarent prêts, en cas de danger, à voler à la défense de la patrie et à marcher l'arme au bras à la rencontre de l'ennemi.

Nous aimons à croire que la déclaration qui figure en tête des statuts de nos sociétés volontaires de tir ne restera pas une simple phrase et un simple sujet de discours patriotiques dans nos fêtes de tir, mais que pour les citoyens suisses non militaires, cette déclaration est sérieuse, et qu'au jour du danger on pourra compter sur

eux.

Ces tireurs sont, en vue de la défense de la patrie, une force non utilisée, à l'organisation de laquelle on ne pourra pas songer aussi longtemps que pour la landwehr, qui elle-même n'est encore organisée que sur le papier, il y aura autant à faire. Si nous faisons main

tenant mention de cette force, c'est que nous aurons plus tard à y revenir.

Tout l'effort de notre système militaire tend à l'amélioration de l'infanterie, en vue de laquelle on aurait, il y a longtemps déjà, prolongé le temps de service si l'accroissement de dépenses qui en résulterait n'y opposait un obstacle insurmontable.

Or, dans une armée de milices telle qu'est la nôtre, il y a deux catégories de soldats ceux pour lesquels le service militaire est un fardeau moral, physique ou économique, et ceux qui, malgré les sacrifices matériels qu'il entraîne, s'acquittent de ce service avec plaisir et seraient même disposés à faire davantage.

Dans un Etat républicain, il faut laisser beaucoup à l'initiative et à la bonne volonté des citoyens, quitte au gouvernement à avoir l'œil sur les manifestations de cette bonne volonté pour les encourager et les aider s'il en est besoin.

C'est ainsi que nous voudrions voir l'arme des carabiniers, puisqu'on lui conteste un rôle tactique spécial dans l'armée régulière, se transformer en un corps qui serait le développement et l'expression de l'esprit de résistance qui caractérise le peuple suisse, et nous croyons fermement qu'en cas de danger une tâche importante incomberait, à côté de l'armée, à un corps de carabiniers bien exercé employant de son chef la tactique de la petite guerre.

La landwehr, masse lourde et insuffisamment exercée, ne pourrait guère, dans le commencement, être utilisée à autre chose qu'à compléter les bataillons d'élite et serait difficilement à même d'entrer en ligne en grandes unités tactiques. Il est sans doute désirable qu'elle puisse arriver là et l'on ne doit pas perdre ce but de vue. Mais pour pouvoir employer l'élite entière en toute liberté d'action, il faut avoir des troupes auxiliaires et exercées, afin de n'être pas obligé de rompre, pour la formation des divers détachements nécessaires, ses unités tactiques et de pouvoir la diriger entière et dans toute sa force là où l'action décisive doit avoir lieu.

Ce rôle de troupes auxiliaires, on le destine sans doute à la landwehr. Nous, nous voudrions le réserver à l'ensemble des carabiniers de la Suisse et leur assigner la tâche de faire, avec toutes ses conséquences, la guerre de partisans, toutefois sans cesser d'appartenir à l'armée régulière.

Ce corps ne devrait pas être un « landsturm », mais des bataillons de carabiniers bien exercés devraient en former les cadres et le noyau, et le corps se compléterait par l'admission des citoyens dispensés ou affranchis du service, desquels un grand nombre sont habiles au tir; ainsi incorporés avec des camarades bien formés au service auquel le corps serait destiné, ces volontaires ne tarderaient pas à être eux-mêmes au fait de ce service.

Ainsi donc, si notre neutralité était menacée ou violée par l'un

des Etats voisins, nous la défendrions non seulement avec notre élite et notre réserve, mais nous ferions aussi la petite guerre avec un corps organisé; nous disons avec un corps organisé ayant pleine conscience du but à atteindre et non avec des bandes sans discipline. C'est de cette manière que nous pourrions le mieux utiliser les forces défensives que l'on a négligées jusqu'ici. Ce sont les citoyens, et non les forteresses et les pièces de position qui constituent notre principale force.

Quelles tâches ou quelles missions pourraient être remplies par ce corps auxiliaire, nos officiers supérieurs le savent déjà. En détachements, comme points d'appui, sur les flancs ou sur les derrières de l'armée, sur les carrefours des routes, sur les positions de ralliement, pour la protection de l'artillerie et des parcs, ne pourrait-il pas rendre de précieux services? Il pourrait encore débarrasser l'armée opérant en campagne de tout ce qui entraverait ses mouvements et tout particulièrement constituer un singulier obstacle sur le chemin des corps de cavalerie que l'ennemi ne manquerait pas de lancer en avant pour harceler notre armée. Voilà des facteurs qu'il ne faut pas négliger, mais dont on doit, au contraire, tenir bon compte.

Il ne faut d'ailleurs pas oublier que dans l'esprit du peuple, l'armée suisse doit nécessairement avoir des carabiniers, et qu'il n'y a, sans eux, pas de bonne défense possible; que, de plus, tout citoyen non militaire croit fermement, et l'entend bien ainsi, qu'au moment du danger, tous ces tireurs et toutes ces armes extra-officiels seront mis de réquisition et appelés à rafraîchir, par de vaillants exploits, la redoutable réputation des carabiniers suisses; c'est pourquoi nous nous estimons justifié à prétendre que la dissolution du corps des carabiniers serait une faute, qui certainement exercerait la plus fâcheuse influence sur notre force défensive.

Ainsi donc, l'existence des carabiniers est et demeure justifiée. Après avoir démontré que cette arme aura une grande importance en temps de guerre, nous voulons chercher à montrer de quelle manière, sans mettre trop à réquisition les finances de l'Etat, mais en comptant sur l'esprit de sacrifice des citoyens, on pourrait créer un corps d'élite qui serait un ornement de notre organisation militaire et auquel tout citoyen serait fier d'appartenir.

Nous n'avons pas à imiter nos voisins et à chercher chez eux l'indication de ce qui nous convient. Ayons plutôt confiance en nousmêmes et organisons notre armée d'après notre génie et notre caractère national.

B. Réorganisation.

Recrutement et instruction.

Proposition. Les bataillons de carabiniers ne seront plus recrutés

dans les écoles de recrues, mais dans l'ensemble des bataillons d'infanterie, entre les hommes ayant fait six ans de service et trois cours de répétition.

L'idée fondamentale de cette proposition, c'est non seulement la création d'un corps spécial d'élite à côté des bataillons d'élite, les uns et les autres devant d'ailleurs recevoir la meilleure instruction possible, mais de donner au chef de la division, dans le cadre de celle-ci, un corps auxiliaire intelligent pour faire, avec la cavalerie, le service d'éclaireurs.

Mais pour que ce corps fût vraiment une élite, il devrait être formé d'abord de bons tireurs et ensuite d'hommes solides et présentant certaines garanties morales, parce que ce n'est pas avec des bandes folâtres de guérillas de théâtre que l'on fait la petite guerre avec succès.

Nos bataillons de carabiniers, tels qu'ils sont maintenant organisés, recrutés et instruits, ne sont pas propres aux diverses fonctions indiquées ci-dessus.

Si, à cette heure, ils montrent encore un peu plus d'aplomb et de vivacité dans la manoeuvre que maint bataillon de fusiliers, cela vient de ce qu'il leur reste un certain nombre d'officiers et de soldats plus anciens dans le service, qui ont conservé l'esprit de corps. Quand, dans quelques années, cet esprit aura disparu tout à fait, les carabiniers ne se distingueront plus que par les résultats un peu meilleurs de leur tir, et encore cet unique avantage qu'ils auront sur les fusiliers, ils sont appelés à le perdre par le fait que le nouveau fusil d'infanterie n'est pas inférieur à la carabine, que le mode de recrutement des bataillons de carabiniers y introduit des éléments qui n'ont ni le désir ni les moyens de s'exercer au tir en dehors du service, et enfin que, dans les bataillons de fusiliers, au contraire, le nouveau fusil perfectionné a encouragé le goût des exercices de tir, si bien que l'on a déjà constaté une diminution sensible de la différence qu'il y avait entre les résultats du tir des carabiniers et ceux du tir des fusiliers.

Ainsi donc, tels qu'ils sont et encore plus tels qu'ils sont menacés de devenir, les bataillons ne carabiniers n'ont plus de raison d'être, et cependant on sent que ce qu'il y a de meilleur à faire, ce n'est pas de les supprimer, mais de les transformer totalement ; c'est à quoi tend la proposition que nous avons énoncée ci-dessus. Recrutement. Les règles à établir pour le recrutement seraient les'suivantes :

I. Chaque homme qui se présente pour faire partie du corps des carabiniers doit le faire volontairement; il doit être porteur d'une liste de Société et d'un livret de tir constatant qu'il est membre d'une Société de tir et qu'il tire d'une façon satisfaisante, mettant, par exemple, un minimum de coups en cible équivalant au 80 %, et cela à toutes les distances.

II. Il doit être bien prévenu qu'il aura encore au moins 3 cours de répétition à faire, et qu'aussi longtemps qu'il appartiendra à l'arme, même dans la landwehr, il devra tirer chaque année, dans la Société dont il fait partie, au moins ses 80 à 100 coups.

III. Il ne faut admettre que des hommes intelligents, et il doit être établi, pour chacun d'eux, par constatation médicale, qu'ils sont encore en état de supporter de longues marches. Il sera fait abstraction de la taille, le choix basé sur cet élément-là n'étant bon que pour les troupes de parade dans les monarchies, et ne donnant guère que de l'embarras dans les armées de milices.

Il faut accorder la préférence aux candidats préparés par leur profession civile à devenir de bons carabiniers, par exemple les chasseurs, les forestiers, les guides de montagne, les laboureurs, les bons gymnastes, qui tous ont en général l'œil perçant; les lunettes ne doivent pas être tolérées. En suivant ces règles, on recruterait de véritables carabiniers, bien en état de remplir les prestations exigées d'eux et joyeusement disposés à le faire. Après six ans de service, un jeune homme sait mieux que lors de son recrutement ce qu'il est en état de supporter et de faire.

Ce corps comptant, comme les carabiniers d'autrefois, les meilleurs carabiniers de la Suisse, il servirait à donner de l'émulation aux autres, et l'ancien esprit de corps se ranimerait, ensorte que tous ces hommes mettraient de la bonne volonté à entretenir ce qu'ils ont appris et même à apprendre davantage.

(A suivre.)

Le rassemblement de la IVe division.

(Suite.)

Pour le corps du Sud il dut être grandement surpris de la décision de son adversaire. Le commandant du corps du Nord comprenant la difficulté de la tâche qui lui était imposée, tâche qui consistait à passer un fleuve en vue de l'ennemi, avait pris toutes les mesures commandées par les circonstances. Avant tout il avait ordonné d'attaquer le bataillon ennemi d'arrière-garde resté sur la rive droite et qui menaçait son flanc; l'artillerie avait reçu pour direction de protéger le passage par un feu nourri dès la position de Honau.

On a regretté de part et d'autre le manque complet de cavalerie et par conséquent de service d'éclaireurs sérieux et complet.

Après la cessation du combat près de Ballwyl, les différents corps se rendirent par le plus court chemin dans leurs cantonnements

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