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s'il veut acquérir la réputation d'un prince sage et prudent, et profiter des occasions que la fortune lui peut donner de s'agrandir, qui est la plus digne et la plus agréable occupation des souverains (1).

LE MARQUIS DE VILLARS AU ROI.

Munich, le 21 janvier 1688. 7

SIRE, j'ai eu l'honneur de mander à V. M. que l'Electeur se plaignoit un peu de Sa Sainteté, des discours qu'elle avoit tenus sur son sujet, et qui lui avoient été inspirés par les émissaires de l'Empereur, et entr'autres par un père Hipolyte, soi-disant saint, qui a dit beaucoup de sottises de l'Electeur, lesquelles ont pensé porter ce prince à lui faire donner des coups

de bâton.

(1) La cour de Vienne avoit envoyé près de lui des courtisans prodigues, fastueux et livrés aux plaisirs, des femmes aimables et intrigantes, à la tête desquelles étoit celle même du ministre autrichien. En même temps, les agens de l'Empereur excitoient l'Electrice à faire éclater ses chagrins contre son mari; et on alla jusqu'à faire faire au prince, par le Pape, des remontrances contre les mêmes. excès qu'on étoit charmé de lui voir commettre.

LE ROI AU MARQUIS DE VILLARS.

i... Versailles, le 25 janvier 1688.

MONSIEUR LE MARQUIS DE VILLARS, continuez à vous servir de tous les moyens que vous avez pour ménager l'esprit de ce prince (1), et l'empêcher de prendre de plus grands engagemens avec la cour de Vienne.

A M. DE BARILLON,
AMBASSADEUR EN ANGLETERRE (2).

30 septembre 1688.

t

MONSIEUR BARILLON, votre lettre du 23 de ce mois m'informe des précautions que le roi

(1) L'électeur de Bavière.

(2) Le roi avoit chargé le comte d'Avaux, son ambassadeur près les Etats-Généraux, de leur demander quel étoit l'objet de leurs grands préparatifs de guerre, et de déclarer qu'en cas qu'ils fussent dirigés contre l'Angleterre, le roi regarderoit comme entrepris contre lui-même, tout ce qu'ils feroient contre le roi de la Grande-Bretagne. Jacques 11, mal conseillé, constamment trahi par ses ministres, porté d'ailleurs par son caractère aux ménagemens et à la dissimulation, avoit cru très-politique de désavouer le mémoire de M. d'Avaux ; il rappela même et fit arrêter

d'Angleterre prend, pour se garantir d'une des cente du prince d'Orange en Angleterre ; et je suis bien aise d'apprendre qu'il ne néglige rien pour faire repentir ce prince d'une si injuste entreprise; mais je suis d'autant plus surpris de toutes les démarches que ledit roi fait à Londres et à la Haye, pour faire voir qu'il n'a aucune part à la déclaration que le sieur d'Avaux a faite par mes ordres aux Etats-Généraux. Il ne doit pas douter que, si quelque chose est capable de détourner le prince d'Orange de passer en Angleterre, c'est l'intérêt que je témoigne prendre à tout ce qui regarde ledit roi; et qu'encore qu'il n'y ait pas de traité signé entre moi et lui, néanmoins les liaisons de convenance en ont formé, depuis son avènement à la couronne, une plus étroite que si elle avoit été stipulée par un traité solennel;

à son retour, son envoyé Skelton, qui avoit pris sur lui d'appuyer la démarche de l'ambassadeur français. Il avoit craint que la supposition d'une alliance entre lui et le roi de France, ne déterminât le prince d'Orange à l'attaquer et les Anglais à se soulever, avant qu'il fût prêt à exécuter tout ce qu'il méditoit alors, pour établir tout ensemble et le catholicisme et le despotisme en Angleterre. Il paroît d'ailleurs qu'il espéra et qu'il eût desiré consommer › ces grandes entreprises, sans le concours de Louis xiv, contre lequel il se fût ligué avec toute l'Europe, s'il eût réussi. «

et d'ailleurs quelque moyen que j'aie de repousser, par mes seules forces, tous mes ennemis, je serai toujours bien aise que les princes qui auront quelque affection pour moi, déclarent la guerre à mes ennemis sans que je les en recherche; enfin, de quelque côté qu'on examine la déclaration que le roi d'Angleterre a faite sur ce sujet aux Etats-Généraux, on y reconnoîtra toujours une foiblesse capable d'encourager le prince d'Orange dans ses pernicieux desseins.

J'approuve aussi la manière dont vous avez parlé au roi d'Angleterre et au comte Sunderland, touchant le rappel du sieur Skelton. Cet envoyé méritoit plutôt une récompense, qu'une disgrace aussi éclatante que celle d'un si prompt retour en Angleterre, pour y aller rendre compte de ses actions.

AU MARQUIS DE VILLARS (1).
A Versailles, le 16 décembre 1688.

MONSIEUR LE MARQUIS DE VILLARS, j'ai reçu

(1) Le roi qui, au commencement de cette année, ne demandoit à l'électeur de Bavière que sa neutralité, venoit de renvoyer Villars à Munich, pour engager cette cour à se déclarer contre l'Empereur. C'étoit par lui qu'on vou

vos lettres des 28 novembre et 1er de ce mois, avec la déclaration qui vous a été donnée de la part de l'électeur de Bavière, en réponse de ce que vous lui avez proposé de ma part. La cour où vous êtes auroit bien pu s'épargner la peine de dresser cet écrit; et il semble qu'elle ait plutôt voulu par-là vous donner votre congé, que d'entrer dans aucune négociation

avec vous.

Il est néanmoins de mon service que vous y demeuriez, jusqu'à ce que l'électeur se soit déclaré ouvertement contre ma couronne; et si vous voyez qu'il n'y a que la considération de la prétention du prince Clément son frère, sur l'électorat de Cologne, qui l'empêche d'embrasser mes intérêts, ou au moins de demeurer neutre, vous pourrez lui faire entendre, que si vous étiez d'accord avec tous ses ministres de tous les autres articles du traité, vous pourriez donner des ouvertures sur l'intérêt du prince Clément, dont ledit électeur seroit satisfait; et si vous êtes pressé pour vous expliquer, vous direz que ma réputation est trop

loit opérer, en faveur des Turcs, une diversion qu'on leur avoit promise. Il faut se rappeler que la guerre avoit été commencée par la France contre les princes ligués à Augsbourg.

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