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engagée à maintenir la postulation du cardinal de Furstemberg, pour le pouvoir abandonner, mais que je pourrois le faire consentir à faire élire, dès à présent, le prince Clément pour son coadjuteur; et comme les tentatives que vous avez faites sur ce sujet n'ont pas réussi, je veux bien, en cas d'un second refus, que vous demandiez, comme de vous-même, aux ministres, si l'électeur ne seroit pas content qu'on pût disposer le cardinal de Furstemberg et les chanoines de son parti, à consentir que le prince Clément fût reconnu dès à présent électeur de Cologne, à condition que le cardinal de Furstemberg en soit administrateur pendant douze ou quinze ans, s'il peut vivre aussi long-temps. J'ai peine à croire que l'électeur de Bavière refuse ces ouvertures, s'il n'est pas engagé avec l'Empereur; mais comme ses ministres voudront encore joindre au titre d'électeur de Cologne quelque partie des revenus, vous pouvez leur faire entendre qu'à peine suffisent-ils pour subvenir aux charges y et qu'un administrateur ne les pourroit pas supporter, si on ne lui laissoit l'entière disposition des revenus. S'il vous paroissoit cependant, qu'en accordant audit prince Clément jusqu'au tiers de ce qui resteroit, et le surplus à l'administrateur pour subvenir aux dépenses

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de l'électorat, vous pourriez conclure un bon traité, soit d'action ou de neutralité. Enfin, servez-vous de tous ces moyens et de tous ceux que je vous ai ci-devant écrits, pour empêcher l'électeur de se déclarer pour l'Empereur. Il y a bien de l'apparence qu'encore que l'électeur ait refusé de faire marcher ses troupes, il pourra bien changer de sentiment à l'arrivée de celles de l'Empereur (1).

J'approuve cependant la réponse que vous avez faite au sieur Leydel, sur les recommandations dudit électeur; mais si toutes les pro

(1) On croit devoir placer ici l'extrait d'une lettre écrite au roi par le marquis de Villars, le 23 octobre précédent, et qui contient, sur le caractère de l'empereur Léopold et sa crédulité, des détails bien singuliers.

L'électeur me dit : « Il faut connoître l'Empereur comme je le connois, pour pouvoir croire les raisons qui l'ont empêché de faire la paix avec les Turcs; mais vous qui avez été à Vienne, cela vous surprendra moins. Il y a des moines qui ont prédit à l'Empereur que l'impératrice deviendroit grosse, qu'elle accoucheroit de deux jumeaux, et que dans le même temps l'Empire turc seroit détruit, et qu'un de ces jumeaux régneroit à Constantinople. La grossesse de l'impératrice a pàru dans le temps que nous avons pris Belgrade: l'Empereur a cru le reste de la prophétie, et n'a point voulu entendre parler de paix dans ce temps-là. Voilà, sire, ce que M. T'Electeur m'a conté, et je n'en doute point du tout ».

positions que vous avez faites et celles que je vous donne encore pouvoir de faire, ne peu vent point disposer ledit électeur à conclure avec vous un traité d'action ou de neutralité, il peut bien juger que mes troupes n'épargneront pas long-temps les terres et pays qui lui appartiennent, non plus que les biens et propriétés de ses ministres.

AU MARECHAL D'HUMIERES.

Marly, le 21 mai 1689.

J'ENVOIE mon fils le duc du Maine servir dans l'armée que vous commandez. Vous savez l'amitié que j'ai pour lui, et combien je sou❤ haite qu'il se rende digne de soutenir l'état où il est. Je lui ai ordonné de croire en tout ce que vous lui direz, étant assuré que vous le porterez à faire ce qu'il doit, et même un peu plus. Le marquis de Louvois vous a écrit mnes intentions sur la manière dont je veux qu'il soit traité. Je m'assure que vous ferez exécuter ponctuellement ce que je desire. Lais sez voir tout au duc du Maine, mais évitez autant qu'il sera possible, qu'il ne s'engage mal à propos (1) et dans de petites affaires à

(1) Il est assez connu que ceci pouvoit s'appeler la pré

pouvoir être pris. Voilà ce que je desire pour lui; et pour vous, soyez persuadé de mon amitié, de mon estime et de ma confiance, et que je pense comme vous-même sur tout ce qui pourra vous faire connoître que je veux vous faire plaisir, et vous marquer les sentimens que j'ai pour vous.

AU MARQUIS DE SEIGNELAI,

MINISTRE DE LA MARINE.

Août 1689.

Si les ennemis vouloient faire une descente en Normandie, Picardie et Boulonnois, en ce cas seul, je vous permets de faire entrer mes vaisseaux dans la Manche (1), pour les com

caution inutile. Ce prince étoit si peu pressé de s'exposer, qu'il voulut (dit-on) se confesser au moment d'un combat.

(1) Le marquis de Seignelai étoit alors à Brest, où l'on avoit armé une flotte considérable; elle fut jointe, à la fin de juillet, par celle de Toulon, aux ordres de M. de Tourville, qui prit le commandement en chef, comme plus ancien que M. de Chateaurenaud. « Les Mémoires de la Fayette donnent des détails curieux sur les désagréinens l'arrivée de M. de Seignelai à Brest donna au maréchal d'Etrées, qu'elle obligea de rester à terre. Outre l'amitié de madame de Maintenon, ce jeune ministre avoit en sa faveur la haine qu'elle portoit à Louvois. Enfin Lau

que

battre et pour empêcher leur dessein à quelque prix que ce soit.

Mandez moi souvent des nouvelles ; quoiqu'elles ne soient pas toutes importantes, elles ne laissent pas de me faire plaisir.

Si vous vous mettez en mer, envoyez-moi souvent des nouvelles par des barques qui pourront venir aux côtes voisines.

zun avoit cru de son intérêt d'enlever à ce dernier la conduite des affaires du roi Jacques n, et il en étoit venu à bout par l'entremise de la reine d'Angleterre. Ceci, avec le choix du maréchal de Luxembourg dans le même temps, prouve que le roi étoit déjà bien mécontent de Louvois ». (Lettres de madame de Sévigné, Notes. Nouvelle édition.) Enfin le détail qui suit achèvera de faire connoître le ministre auquel s'adresse cette lettre. « La famille de Colbert étoit originairement d'extraction écossaise, et le marquis étant jeune et vain, les Ecossais qui l'entouroient l'enivrérent de la gloire qu'il acquerroit, si le roi Jacques devoit son rétablissement à un des descendans de leurs compatriotes. Seignelai, plein de cette idée, envoya vingt-un brûlots et grand nombre de frégates avec la flotte, forma la résolution de monter lui-même une frégate; et après que Tourville auroit défait l'ennemi, d'aller le long des côtes d'Angleterre avec les petits vaisseaux, d'y faire soulever les mécontens, d'entrer dans les ports, et de brûler les vaisseaux par-tout où il passeroit. Les Anglais évitèrent la bataille, la conspiration manqua, et Seignelai revint sans avoir rien fait ». ( Mémoires de la Grande-Bretagne, par le chevalier Dalrymple, Liv. v.)

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