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sous le règne de votre prédécesseur. J'ordonne à Blécourt de vous en parler fortement. Vous me ferez plaisir de l'écouter avec attention, et de lui rendre une réponse décisive. Car il ne suffit pas que vous disiez que vos ministres agissent sans vos ordres : j'ai trop bonne opinion de vous pour admettre une pareille excuse. Elle ne vous seroit pas honorable, comme elle ne seroit pas conforme aux sentimens d'estime et d'amitié que je conserverai toujours pour vous.

AU MÊME.

5 mai 1710.

Je suis persuadé que vous n'aurez pas fait -une telle démarche, (que celle de l'emprisonnement du duc de Medina-Celi,) sans en avoir bien pesé toutes les conséquences, et sans considérer que si la fermeté est nécessaire dans les temps difficiles, elle ne convient qu'autant qu'elle appuie la justice et la raison. Je crois donc qu'il est de votre intérêt, d'instruire vos sujets des correspondances criminelles, que je suppose que le duc de Medina-Celi entretenoit contre votre service, pourvu toutefois que ses liaisons avec les ennemis de V. M.

n'enveloppent pas des gens qu'elle jugera peutde ménager.

être à propos

AU DUC DE NOAILLES.

4 août 1710.

MON COUSIN, la descente que les ennemis avoient faite à Cette, auroit pu avoir des suites fâcheuses, si vous n'aviez pas marché avec autant de diligence que vous avez fait, pour vous opposer à l'établissement qu'ils vouloient prendre sur la côte de Languedoc. Dans le moment que la nouvelle m'en fut mandée par le duc de Roquelaure, je vous envoyai mes ordres pour faire un détachement de l'armée que vous commandez; mais ce secours auroit été trop lent, si vous n'aviez pas pris de vousmême, le parti de faire ce qui vous a paru être le plus important et le plus nécessaire pour mon service. Votre zèle et votre bonne volonté vous ont fait vaincre des difficultés qui auroient paru insurmontables à beaucoup d'autres. Jamais marche de troupes n'a été faite avec plus d'activité et de vigilance, et il n'est presque pascroyable, que vous ayez pu arriver du camp où vous étiez au-delà de Perpignan, en moins de trois jours; sur-tout conduisant avec l'in

fanterie, douze pièces de canon. C'est cette diligence qui a surpris les ennemis, dans le temps qu'ils ne pouvoient pas s'y attendre, et qui les a déterminés à se rembarquer avec précipitation et désordre, lorsqu'ils ont vu arriver les premières troupes, qui malgré la fatigue de leur marche, les ont attaqués avec beaucoup de vigueur. Le duc de Roquelaure avoit donné de parfaitement bons ordres, pour éviter que cette descente ne causât quelques troubles et mouvemens au-dedans de la province; mais il n'auroit pas été en état, sans vous, de s'opposer aux établissemens que les ennemis prenoient sur la côte et de les en chasser: vous ne pouviez rien faire de plus utile pour mon service, ni qui me fût plus agréable. Comme j'ai donné mes ordres pour faire aller en Languedoc, trois bataillons de la marine et des galères, le duc de Roquelaure en aura suffisamment pour rassurer la côte, et rien ne vous empêchera de retourner en Roussillon, avec les mêmes troupes que vous avez amenées, pour tâcher de prendre quelque avantage sur mes ennemis dans le Lampourdan, ou du moins faire subsister mes troupes aux dépens de leur pays, pendant que les leurs sont occupées du côté de l'Aragon. Tous les mouvemens que vous ferez seront

CUV. DE LOUIS XIV. TOME VI.

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avantageux au roi d'Espagne, et j'ai assez de preuves de votre capacité et de votre zèle, pour ne pas douter que vous ne profitiez de tout ce que la conjoncture vous permettra de faire pour le bien de mon service; et la présente n'étant pour autre fin, etc.

A PHILIPPE V.

A Marli, le 16 septembre 1710.

Le duc de Noailles, que j'envoie à Madrid, vous informera des ordres que je lui ai donnés (1). Vous connoissez son zèle pour vos intérêts, et je sais que vous l'aimez autant que vous avez de confiance en lui. Votre majesté me fera plaisir de croire ce qu'il lui dira, et d'être persuadée des assurances qu'il lui renouvellera de la tendre et parfaite amitié que j'ai pour elle.

A LA REINE D'ESPAGNE.

Décembre 1710.

Je m'intéresse trop tendrement au rétablis

(1) Il s'agissoit de déterminer Philippe à faire des cessions, sans lesquelles Louis xiv jugeoit ne pouvoir obtenir des alliés une paix dont il avoit le plus grand besoin.

sement de votre santé, pour ne pas approu ver tout ce qui peut y contribuer. Je souhaiterois que la saison fût plus favorable pour user des eaux de Bagnères; mais si l'on vous conseille de vous en servir, je vous prie moimême de ne pas perdre un moment à tenter ce remède. Le repos d'esprit doit y donner une vertu nouvelle, et vous le devez avoir, sachant que vos affaires sont en aussi bon état que vous le pouvez desirer. C'est le seul sujet d'inquiétude qui doit naturellement vous agiter. Mais puisqu'il est nécessaire de rassurer d'autres que votre majesté, je lui promets qu'elle ne sera pas moins maîtresse dans mon royaume qu'elle l'est en Espagne, qu'il dépendra d'elle d'en sortir avec le prince des Asturies, comme il dépend d'elle d'y rester tant qu'elle voudra.

Je ne vous laisserois peut-être pas une liberté si absolue, si des temps plus tranquilles permettoient que vous vinssiez ici; mais il faut attendre la paix pour concerter les moyens de nous voir, et je vous assure que je n'aurois trouvé en ma vie de moment plus heureux, que celui où je pourrois vous dire moi-même, que mon amitié pour vous est aussi tendre et aussi parfaite que vous le méritez.

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