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aient à enregistrer, et du contenu en icelles faire jouir et user pleinement, paisiblement, et à toujours ladite dame........ de Kerouel, duchesse de Portsmouth, et après elle le fils naturel que ledit roi de la Grande-Bretagne nommera, et les descendans mâles en droite ligne dudit fils naturel, cessant et faisant cesser tous troubles et empêchemens à ce contraires.

Car tel est notre plaisir; et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous avons fait mettre notre sceau à cesdites présentes, sauf en autre chose notre droit et l'autrui en toutes. Donné à Saint-Germain-en-Laye, au mois de décembre, l'an de grace 1673, et de notre règne le trente-unième.

N° 9'.

EXTRAIT de la lettre de M. de Ruvigni au Roi, du 27 février 1676 (1).

SIRE, j'ai fait savoir à M. de Pomponne par la lettre que je lui ai envoyée le 17 de ce mois, que le roi d'Angleterre ayant assemblé M. le duc d'Iorck, le duc de Lauderdal, et le grand-trésorier, pour conférer avec eux sur l'écrit qui est connu de Votre Majesté, ce dernier ministre demanda à son maître du temps pour

(1) Après avoir fait la paix avec les Hollandais, Charles avoit prorogé le parlement jusqu'en novembre 1674; mais la France vouloit éviter encore cette convocation. Moyennant cinq cent mille écus, Charles s'engagea à le proroger de nouveau jusqu'en avril 1675, ou, au cas qu'il le rassemblât, de le dissoudre s'il lui refusoit des subsides. Dans ce dernier cas, la France devoit lui donner cent mille livres sterling. Charles prit le premier parti; la France fut tranquille pour un an. Ce marché provisoire devint en 1676 un traité formel. Les deux princes se promettant de n'entrer dans aucune alliance l'un contre l'autre, Charles s'obligea de proroger ou dissoudre son parlement s'il essayoit de le forcer à se déclarer contre Louis. Une pension, dont on ignore le montant, fut réglée pour cet effet. Cet arrangement ne fut connu que du duc d'Iorck et de deux des ministres anglais. On voit ici la singulière forme dans laquelle il fut conclu; et aussi le misérable état où étoit réduit ce prince anglais, pour avoir séparé son intérêt de l'intérêt national, et s'être mis dans la dépendance d'un gouvernement étranger.

l'examiner avant que d'en donner son avis. Les affaires ou d'autres raisons l'ont empêché de le faire pendant dix jours. Enfin, le grand-trésorier a été voir le duc de Lauderdal, à qui il a représenté le péril qu'il y auroit pour leurs têtes, s'ils étoient seuls à délibérer sur le traité, et à le signer.

De quoi le roi d'Angleterre étant averti, il les a fait venir dans son cabinet avec M. le duc d'Iorck, où ayant été proposé d'admettre dans ce conseil le grandchancelier et tous les autres ministres, ce prince leur a dit, qu'il ne desiroit rien au monde plus passionnément qu'une bonne alliance avec Votre Majesté ; qu'étant médiateur, la conjoncture du temps ne lui permettoit pas qu'on eût la moindre connoissance qu'il eût conclu et signé un traité avec la France; que la chose ne pourroit pas manquer d'être publique si elle étoit portée dans son conseil, et s'il falloit se servir de son grand sceau; que pour la tenir bien secrète, il ne desiroit pas que ses autres ministres en eussent aucune connoissance; que pour cet effet il ne vouloit pas nommer des commissaires ni faire expédier des pouvoirs ; qu'il avoit résolu de signer le traité de sa main, et d'y apposer son cachet en ma présence, aussi-tôt qu'il seroit convenu des articles avec moi, qu'il ne doutoit pas que Votre Majesté n'en fît de même; et que si elle l'assuroit par un billet écrit de sa main, qu'elle a signé ce traité, et qu'elle y a mis son cachet, il le recevroit avec plus de confiance que si un de ses ministres en avoit été témoin ; qu'eux Irois n'avoient qu'à examiner en sa présence le projet que j'avois mis depuis vingt jours entre ses mains, et de Jui en dire leurs pensées.

Voici, Sire, le résultat de ce conseil, que le duc de

Lauderdal vint me dire chez moi par ordre du Roi son maître.

Le roi d'Angleterre m'a dit, que ne pouvant pas confier une affaire de cette importance à ses secrétaires d'Etat, il avoit résolu, pour le plus grand secret, de copier lui-même le projet que je lui avois donné, et de le signer en ma présence, ce qu'il fit hier matin; après quoi il alluma lui-même une bougie, et apposa son cachet à côté de son seing, en me disant que ce n'étoit que le cachet de son chiffre, parce que depuis peu il avoit perdu celui de ses armes, qui étoient gravées sur un diamant du roi Jacques, son grand-père, que le feu roi étant sur l'échafaud donna à l'évêque de Londres, pour le remettre entre ses mains; il fit ensuite appeler le duc de Lauderdal, qui est le seul en qui il a pris dans cette occasion une confiance entière, pour lui dire qu'étant pressé d'aller à Windsor, il le chargeoit de mon écrit, qu'il avoit copié mot à mot, et qu'il lui ordonnoit de me le voir signer, et de m'engager par écrit, en vertu du pouvoir qu'il a plu à Votre Majesté de m'envoyer, que dans vingt jours, ou plutôt si faire se peut, je lui remettrois entre les mains un pareil traité, signé de la main de Votre Majesté, et cacheté du sceau de son secret, lui enjoignant expressément qu'il eût soin de lui rendre mon écrit à son retour de Windsor. Je dépêche, Sire, mon secrétaire pour plus de précaution, pour porter à Votre Majesté le traité que le roi d'Angleterre a écrit, signé et cacheté devant moi, et pour m'apporter, si Votre Majesté le trouve à propos, celui qu'elle aura signé, et auquel elle aura fait mettre le sceau de son secret, avec

le billet de sa main, dont j'ai fait mention ci-dessus.

Sire, Votre Majesté voit bien par tout ce qui s'est passé dans cette affaire, que le roi d'Angleterre est comme abandonné de ses ministres même les plus confidens; que le grand-trésorier qui a beaucoup plus de peur du parlement que de son maître, et qui est trèscontraire aux intérêts de la France, prétendant par-là de s'acquérir la faveur du peuple, a formé toutes les difficultés que j'ai mandées, à dessein d'empêcher la conclusion de ce traité, ou du moins d'en retarder l'accomplissement. Le duc de Lauderdal a soutenu le Roi son maître, ayant sans comparaison plus de respect et de zèle que ses collègues. M. le duc d'Iorck, qui est tout entier dans les intérêts de Votre Majesté, ne s'est presque pas mêlé dans ces difficultés, parce qu'il a vu que le Roi son frère étoit assez ferme pour n'avoir pas besoin de ses avis.

Par toutes ces circonstances, Sire, Votre Majesté jugera mieux de l'état de l'Angleterre que par toutes les choses que j'ai représentées dans mes lettres; et l'on aura bien de la peine à s'imaginer qu'un roi soit tellement abandonné de ses sujets, que même parmi ses ministres, il n'en trouve pas un en qui it puisse prendre une entière confiance. Cet exemple, Sire, fera bien voir à Votre Majesté que toute l'Angleterre est contraire au bien de ses intérêts, et qu'il n'y a que le roi de la Grande-Bretagne seul, et M. le duc d'Iorck, qui les embrassent avec affection; et par-là, Sire, Votre Majesté connoîtra que ce traité est nécessaire pour la sûreté de votre service, puis qu'il vous assure que l'Angleterre ne sera pas contre vous. Il est vrai, Sire, que vous n'en tirerez pas tous les secours que l'on pourroit se promettre d'une bonne

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