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appelé au trône, il vous donnera son assistance, pour défendre les Etats dont il a remis le gouvernement dans vos mains. Je le prierai de rendre heureux le dessein que vous formez pour sa gloire.

Il ne me reste qu'à vous assurer de ma tendresse, de mon amitié et du plaisir que j'ai de voir que tous les jours vous vous en rendez digne.

AU MÊME.

Versailles, le 6 février 1702.

J'AI reçu vos deux lettres du 7 et du 24 janvier. Quoique j'aie parlé à Louville de plusieurs détails dont il vous rendra compte, je ne puis m'en rapporter uniquement à lui, pour vous assurer de la joie que j'ai du parfait rétablissement de votre santé, et de la conclusion des Etats de Catalogne. Il étoit nécessaire de les terminer avant que de songer à passer en Italie. Vous laisserez présentement l'Espagne tranquille. J'espère que Dieu bénira vos desseins, et vous fera trouver dans le cœur de vos sujets en Italie, le même amour et le même empressement que les Catalans témoignent présentement à V. M. Il est inutile de vous dire combien je le souhaite, et vous devez

croire qu'indépendamment de mon intérêt, je regarderois votre satisfaction et vos prospérités comme les miennes propres, par l'unique motif de tendresse que j'ai pour vous. Je reçois encore votre lettre du 29. Je n'ai qu'à louer les dispositions que vous faites pour la défense de vos Etats. Songez aux Indes. Je m'en rapporte à ce que Marcin vous en dira de ma part.

AU MÊME.

Versailles, le 26 février 1702.

Vous souhaitez avec trop d'empressement de passer en Italie, pour me laisser douter de la joie que mon consentement à ce voyage vous a donnée. Le projet, le desir que vous avez conservé de l'exécuter, et la justice de votre cause me font espérer que le succès en sera heureux. Vous n'oubliez rien pour la sûreté et pour le bon gouvernement de vos Etats je le vois par les dispositions que vous faites, et par les ordres que vous avez donnés.

Les représentations que vous avez reçues lors de votre passage, doivent être regardées comme un effet du zèle que les sujets de V. M. ont pour elle. Mais elles ne contiennent aucune raison qui n'ait été bien examinée avant

la résolution que vous avez prise. J'espère que votre dernière indisposition étant présentement finie, vous jouirez désormais d'une parfaite santé. On m'a épargné l'inquiétude que cette maladie m'auroit causée, en m'apprenant en même temps votre guérison. Je suis également sensible à tout ce qui vous regarde, et ma tendresse particulière pour vous se fait connoître en toutes occasions.

AU MÊME.

Marli, le 3 mars 1702.

J'AI considéré votre seule satisfaction, lorsque j'ai approuvé le dessein que vous avez de conduire avec vous la reine à Naples; mais mon amitié pour vous ne me permet pas de vous taire les inconvéniens que je prévois à lui faire entreprendre ce voyage. Si je vous aimois moins, ma complaisance n'auroit point de bornes, je supprimerois les conseils de père, lorsqu'ils seroient contraires à ce que vous desirez. La tendresse que vous avez pour la reine, vous fait desirer de ne vous point séparer d'elle; mais vous devez, par la même raison, considérer à quelles incommodités vous l'exposez, en lui faisant entreprendre un

trajet de mer aussi considérable, que celui qu'il faut faire pour passer à Naples. Si son amitié pour vous lui ferme les yeux sur les suites fâcheuses qu'elle en doit craindre, vous êtes obligé d'y faire encore plus d'attention, et d'assurer votre commun bonheur, en songeant à la conservation de sa santé. Vous savez combien elle a souffert des fatigues de la mer, seulement depuis Nice jusqu'à Toulon; vous pouvez juger de celles d'un voyage infiniment plus long, où la commodité de descendre tous les jours à terre, est absolument interdite. Au lieu de la satisfaction que vous vous proposez l'un et l'autre à faire ensemble ce voyage, vous vous préparez des sujets continuels de tourment et d'inquiétude. Je les borne sur mer à la mauvaise santé de la reine, et j'espère que vous n'essuierez aucun péril; mais après votre arrivée à Naples, vous regretterez bien des fois d'avoir pris la résolution de l'y conduire. Si les esprits sont encore agités, que ne craindrez-vous pas pour elle? et pourrezvous la laisser en cette ville, pour aller vous mettre à la tête des armées en Lombardie ? Demeurerez-vous à Naples, uniquement pour la reine, quand vous passez en Italie pour la défense de vos Etats? Si tout est tranquille à Naples, il ne vous convient pas d'y faire un

long séjour; la reine aura fait un voyage trèspénible pour demeurer seulement peu de jours avec vous; vous la laisserez ensuite exposée à tous les périls que vous craindrez pour elle pendant tout le cours de la campagne, ou du soulèvement des peuples, ou des entreprises des Anglais et des Hollandais dans la Méditerranée. Que V. M. fasse réflexion sur la juste inquiétude qu'elle auroit, si leur flotte venoit à bombarder Naples, si la reine étoit obligée d'en sortir que® n'auriez-vous pas à craindre pour elle, de l'émotion des peuples dans une pareille conjoncture? Considérez l'embarras où vous serez, après la campagne finie, pour retourner avec elle en Espagne. Il est impossible de juger certainement du temps que vous serez obligé de demeurer en Italie. Vous ne quitterez apparemment l'armée, que lorsque la saison sera contraire à toute navigation, principalement à celle des galères. Il vous seroit également difficile de passer à Naples, pour aller chercher la reine, et de la faire venir à Milan, pour retourner ensemble en Espagne. Le seul parti que vous auriez à prendre, seroit de la renvoyer en Espagne, dans le temps que vous partiriez de Naples; ainsi vous l'auriez obligée à un voyage aussi fatigant qu'inutile, pour demeurer seulement

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