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la présenter à l'acceptation, et faire le protêt faute d'acceptation; car alors il reste dans la classe ordinaire. La seconde lettre qui lui est parvenue, est réputée première à l'égard de celui sur qui elle est tirée.

Dans le cas où la lettre de change a été acceptée, et dans le cas encore où l'on ne peut plus représenter, ni la seconde, ni la troisième, ni la quatrième de la lettre de change non acceptée, on est dispensé du protêt. On y supplée par un acte de protestation.

Voilà les deux seules circonstances où le Code de Commerce admet, et encore par induction, la dispense de la formalité du protêt.

Il nous reste à examiner de quelle manière et aux frais de qui le porteur peut se procurer la seconde, troisième et quatrième. Voyez le texte de l'article 154 rapporté à la fin du volume.)

XXIII.

Des poursuites qui doivent suivre le protét.

Nous avons vudans les notes précédentes qu'il falloit, pour conserver son recours contre les endosseurs et contre le tireur même, faire des poursuites dans quinzaine du protêt,

Quelles sont ces poursuites? Elles sont énoncées dans les articles 164 et les articles suivans.

1.o Le porteur d'une lettre de change peut poursuivre, ou individuellement, ou collectivement les endosseurs et le tireur.

Dans le premier cas, il doit 1.° notifier le protêt à son cédant; 2.° le citer en jugement dans la quinzaine du protêt. Remarquez que la loi employe dans l'art. le mot porteur, et non propriétaire, parce que le porteur est regardé comme propriétaire. Et, en effet, s'il ne l'étoit pas, il ne pourroit poursuivre le dernier endosseur en son nom, parce que, hors l'Empereur seul, personne ne peut plaider par procureur.

Dans le second cas, il doit notifier le protêt à tous les endosseurs et au tireur, dans les délais déterminés

pour chacun d'eux ; 2.° il doit les citer en justice dans la quinzaine du protêt, en observant, à partir de l'expiration de ce premier terme, les délais déterminés par la loi, pour chacun des endosseurs et pour le tireur.

Et nous répétons, parce qu'on ne sauroit trop le faire, que si le porteur laisse écouler les quinze jours sans dénoncer le protêt et sans citer, soit indivis duellement, soit collectivement, il perd son recours contre chacun des endosseurs, et même coutre le tireur, s'il avoit fait provision. ( V. la note XIX.)

Au surplus, le Repert. de Jurispr. combat avec avantage l'opinion de M. Pothier et de Savary. Le Rédacteur, (Art. Endossement) s'exprime ainsi, p. 561:

Pour que le porteur d'une lettre de change ou d'un billet protesté, soit censé recourir à temps contre les endosseurs, suffit-il qu'il leur fasse signifier le protêt dans les délais dont on vient de parler, ou faut-il aussi que, dans les mêmes délais, il les fasse citer en jugement? »

De ces deux parties, le premier est adopté par Pothier, Traité du Contrat de Change, n° 14.

» Une erreur soutenue par de grands noms ne cesse pas d'être une erreur, et l'ordonnance de 1673 prouve clairement que telle est au moins, quant aux lettres de change, l'opinion de Suvary et de Pothier. Ceux, dit-elle, tit. 5, art. 13, qui auront tiré ou endossé les lettres, seront poursuivis en garantie dans la quinzaine. L'art 14 est encore plus exprès; et enfin, farticle 32 écarte absolument tous les doutes: A faute du paiement, le porteur fera signifier ses diligences à celui qui aura signé le billet à ordre, et l'assignation en garantie sera donnée dans les délais cidessus prescrits pour les lettres de change.

» Ces dispositions sont claires et précises: mais ce n'est pas tout, elles out encore l'avantage d'être confirmées par la jurisprudence. Ecoutons Denisart, au mot Lettres de Change.» Il a été jugé par un arrêt du parlement de Bordeaux du 3 mai 1721, confirmatif d'un appointement rendu par les consuls de Bayonne, que la dénonciation du protêt ne suffit pas, mais qu'il faut assigner les tireurs et les endosseurs, dans les délais

portés par l'ordonnance, sans quoi les porteurs perdent leur garantie, et les endosseurs pourront leur opposer la fin de non-recevoir établie par l'art. 15 «.

"A plus forte raison y auroit-il lieu à la fin de nonrecevoir, si le protêt n'avoit été notifié que par une simple lettre ».

Cette question a été décidée par arrêt de la Cour de cassation, le 24 vendémiaire an 12, au rapport de La Sandale. « Vu les art. 13 et 15 du tit. 5 de l'ordonnance de 1673; considérant que le sieur Vanrobais a laissé passer le délai prescrit par l'art. 13, sans avoir poursuivi en garantie les sieurs Chardon; que l'avis donné par lettre missive du défaut de paiement, n'est pas un équivalent admis par la loi, pour suppléer aux poursuites par elle exigées... Le tribuunal rejette, etc. »

X X I V.

De la dénonciation des poursuites faites aux endosseurs.

L'opinion que M. Pothier émet ici a été vivement combattue par les auteurs du Répertoire de jurispru dence au mot Endossement, p. 562, nouvelle édition de 1807. Un porteur de lettre de change protestée a fait assigner son endosseur en garantie dans les délais prescrits par l'ordonnance; mais il a omis de lui faire signifier le protêt. Le défaut de cette signification le rendoit non-recevable.

Pothier soutient la négative. « Vice versa, dit-il, si le propriétaire de la lettre, après l'avoir fait protester, avoit assigné dans le délai de l'ordonnance, le tireur ou l'endosseur pour être condamnés à payer la lettre que celui sur qui elle est tirée a refusé de payer, quoiqu'il eût omis de leur donner en tête de l'exploit d'assignation copie de l'acte de protêt, ce propriétaire sera censé avoir satisfait à l'ordonnance; car elle n'a dit autre chose, sinon que le tireur ou les endosseurs seront poursuivis en garantie; elle ne dit point qu'on leur donnera copie du protêt; il est vrai que le protêt étant le fondement de la demande du propriétaire de la

lettre contre eux, il doit leur en donner copie; mais c'est un principe constant que le défaut d'avoir donne par l'exploit de demande, copie des pièces qui servent de fondement à la demande, n'emporte pas la nullité de la demande, et que la peine est seulement que les copies qui en seront données dans le cours de l'instance n'entreront pas en taxe, et que les réponses qui y seront faites seront aux dépens du demandeur. « (Ordonnance de 1667, tit. 2, art. 6)

» Ainsi, selon Pothier, la simple signification de protêt supplee au défaut d'assignation, et la seule assignation couvre le défaut de signification du protêt.

» Nous avons prouvé que cet auteur s'est trompé sur le premier point; ne craindrons-nous pas de dire qu'il s'est trompé sur le second? Les erreurs des hommes célèbres sont les plus dangereuses , parce qu'elles sont les plus susceptibles de progrès; ce sont par-conséquent celles qu'il importe le plus de détruire; ainsi, sans redouter le reproche d'une vanité présomptueuse, je vais rendre compte d'une espèce dans laquelle j'ai fait proscrire le sentiment de Pothier sur le point dont il s'agit ici.

» Le sieur Lagarde, commis de l'intendance de Lille, a créé un billet à l'ordre du sieur Dinet de Vareille, avocat dans la même ville, qui l'a endossé au profit de la demoiselle Vanackre, marchande; à l'échéance ce billet a été protesté, faute de paiement, le douzième jour à compter du protêt; la demoiselle Vanackre a fait assiguer le débiteur et l'endosseur au siège échevinal de Lille, pour les faire condamner solidairement à lui payer la valeur du billet, mais elle n'a signifié le protêt qu'au premier. Le sieur Dinet de Vareille a comparo sur l'assignation, et a demandé copie du protêt. Il est à remarquer que cette demande a été faite avant l'expiration des quinze jours dans lesquels le protêt devoit être dénoncé. La demoiselle Vanackre n'y a point satisfait, et la quinzaine s'est écoulée sans dénonciation du protêt. Le sieur Dinet de Vareille a soutenu alors que la demoiselle Vanackre étoit déchue de son action récursoire, faute de lui avoir dénoncé le protêt dans le terme prescrit par l'ordonnance. - De son côté, la demoiselle Vanackre, après avoir enfin donné copie du protêt,

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a prétendu qu'avant de contester au fonds, le sieur Dinet de Vareille, qui reconnoissait sa signature mise au dos du billet, devoit par provision en nantir le mon

taut.

Sentence des échevins de Lille qui l'ordonne ainsi. Appel au Parlement de la part du sieur Dinet de Vareille. Requête en évocation du principal. Consentement de la demoiselle Vanackre à cette évocation. La cause en cet état, on disoit pour la demoiselle Vanackre, que la decision de Pothier tranchoit la question

en sa faveur,

» Dinet de Vareille répondoit que l'art. 32 du titre 5 de l'ordonnance de 1673 exigeoit impérieusement deux choses, la signification des diligences faites contre le debiteur et l'assignation en garantie.

» Par arrêt rendu una voce, le 29 janvier 1784, la cour a mis l'appellation, et ce dont est appel au néant, émandant, évoquant le principal, et y faisant droit, a déclaré la demoiselle Vanackre non-recevable dans ses demandes et l'a condamnée aux dépens ».

(Voyez les moyens plus au long rapportés dans la nouvelle édition du Répertoire de jurisprudence au mot Endossement, page 562.)

X X V.

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Quel est le calendrier qui doit déterminer le jour de l'exigibilité?

Le sentiment de M. Pothier a servi de base à un arrêt célèbre, qui juge que, pour déterminer l'échéance et l'exigibilité d'une lettre de change tirée d'Amsterdam sur Paris, à deux mois de date, on doit consulter le calendrier en usage dans le lieu où la lettre de change doit être payée, et non le calendrier usité dans la ville dont la lettre est envoyée. (Voyez l'arrêt du 18 brumaire an 11 rapporté à la fin de ce volume ).

X X V I.

Du protét fait après les délais, et contenant la dẻclaration que le tireur n'a pas fourni de fonds.

La Cour de cassation s'est toujours empressée de don

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