1683. armez dans leurs châteaux; & on vit de femblables attroupemens dans les lieux de St. Julien de la Brouffe, de Montreal, de la Voulte & du Haut-Villar. Cette prise d'armes obligea les Re- formez à fe mettre auffi en état de repouffer la violence; mais ils refolurent par une commune deliberation de fe tenir feulement fur la defensive. Les Catholiques firent le premier acte d'hosti Et en é. La même chose à peu près arriva dans le Dauphiné. Vireville Cependant lors qu'on aprit à Paris ces commencemens de de diver- troubles, cette nouvelle donna l'alarme aux Reformez. Le fen- fes per- timent de leur foibleffe leur fit craindre que parce qu'il étoit aifé qui con- de les oppprimer, on ne les punît de l'entreprise des autres, qui étoient plus difficiles à domter, à caufe de leur efprit guerrier, de leur grand nombre & de leurs montagnes. Chacun parut empreffé à desavouër ce projet, & s'employa de foi-même à en prevenir les fuites. Les particuliers de qui les avis étoient de quelque confideration, écrivirent à leurs amis, & leur temoigne 1683. rent en termes très-forts qu'ils condamnoient ces mouvemens. Les Deputez des Provinces qui de quelque avis qu'ils cuffent été en partant de chez eux, s'étoient laiffé infpirer les fentimens de foumiffion & de patience, qui avoient toûjours été ceux des Eglifes voisines de la Cour, écrivirent dans les mêmes termes. Le Deputé General fit la même chofe; & remontra par les let- tres qu'il écrivit aux Consistoires, que la defobeïffance de ces Provinces donnoit au Roi un pretexte legitime de châtier feve- rement ceux qui y tomboient; qu'une infinité de perfonnes in- nocentes fouffriroient avec les coupables; qu'on feroit demolir tous les Temples vingt ou trente lieuës à la ronde des lieux en- gagez dans cette action; qu'il falloit tâcher d'éviter ce mal, en Hechiffant le Roi de bonne heure par la foumiflion & la repen- tance. Il ajoûtoit des exhortations de travailler à retenir dans leur devoir ceux qui n'avoient point encore pris de part à ces agi- tations; & il donnoit des efperances de toucher le Roi de pitié, fi on supportoit toutes les épreuves de ce temps fâcheux avec On ne douta point que cette lettre, datée du vingt-huitié- Effet de me de Juillet, quoi qu'elle exprimât les fentimens du Deputé General, ne lui eût été dictée; & qu'il n'eût autant fuivi en l'écrivant les ordres de la Cour, que fes propres inclinations. Mais cela n'empêcha pas qu'elle ne deconcertât abfolument les Directeurs, qui fe virent abandonnez presque de tous ceux qui avoient quelque chofe à menager. Cependant quoi qu'ils vif- fent leurs mefures rompues, par cette oppofition prefque ge- nerale, & que les Eglifes qui avoient defapprouvé la nouvelle direction, fiffent valoir d'une maniere un peu infultante la con- formité de leurs fentimens avec ceux du Deputé General, des Deputez particuliers, du Confiftoire de Charenton, de plufieurs perfonnes fages & éclairées, qui voyoient de près l'état des af- faires, ces Directeurs ne perdirent point courage. Ils drefferent Nouvelle une requête nouvelle, qui fut envoyée le feptiéme d'Août au requéte. Marquis de Louvois. On y louöit le zêle du Roi pour la con- verfion des Reformez; dans la pensée où il étoit que l'Eglife Ro- maine étoit la veritable Epouse de JESUS-CHRIST ; mais on lui remontroit qu'il falloit bien que les Reformez, euffent une forte H 1683. perfuafion du contraire, puis qu'ils aimoient mieux fouffrir tou te forte de malheurs, que de rentrer dans cette Communion; & on faifoit voir que la contrainte n'étoit pas un moyen legitime de les y reduire. On exaggeroit en termes fort fages la force de la repugnance que les Reformez avoient pour la doctrine, les tra- ditions, le culte, le gouvernement de l'Eglife Romaine; & cel- le de l'attachement qu'ils avoient pour leur propre Religion : & on tâchoit de faire voir qu'il n'y avoit pas de juftice à vouloir les rendre odieux, & les faire perir par cette feule raison. Les moyens inouïs dont on s'étoit fervi en divers lieux pour faire des conver fions étoient rapportez en abregé; & on se plaignoit de ce que le fuccés de ces indignes expediens étoit representé au Roi comme une benediction de Dieu, & un effet de fa grace. On remar- quoit que les artifices du Clergé reduifoient les Reformez à ne fa- voir quel party prendre : qu'on traittoit de rebellion leur plus mo- defte refiftance aux effets de la paffion du Clergé : & que d'un autre côté, quand ils portoient l'obeïffance au dernier degré, on faifoit paffer leur patience pour une marque de leur difpofition à faire tout ce que le Roi leur commanderoit ; & d'un defir se- cret qu'ils avoient qu'on les ramenât à la Religion Romaine par une douce contrainte. On renouvelloit la proteftation de vou foir fubir toute forte d'extremitez, plûtôt que de renoncer à la Religion Reformée. On rappelloit le fouvenir de la fidelité de ceux qui en faifoient profeffion, reconnuë par le Roi même ; & on remontroit qu'il étoit jufte par confequent, qu'il leur fit ref- fentir l'effet de la protection que les Souverains accordent à leurs fujets fideles. Pour s'accommoder à la Politique du tems, on al- loit jufqu'à dire que les Rois ne doivent rien à leurs fujets ; & que cette protection même que les Reformez demandoient au Roi, ne leur appartenoit que comme une chofe à laquelle il vou- loit bien fe lier foi même. Cela étoit suivi de diverses confidera- tions fur les Edits anciens & nouveaux, & fur la divifion & l'a- nimofité que les maximes des Jefuïtes entretenoient entre les François : & enfin en remarquant qu'il ne reftoit plus qu'une vai- ne ombre de l'Edit de Nantes, on fupplioit le Roi de le retablir Châ- menagé, refpectueux. Les expreffions étoient humbles & mo- 1613, Nnnn ble. 1683. hommes, qui fut tué en voulant rompre la porte; & elles prirent l'épouvante à la parole d'une fervante, qui s'écria que le fecours approchoit. Ce fecours n'arriva neanmoins que quelques heures après la retraite de ces troupes: & il s'y trouva environ cinq cens hommes, qui conduifirent la Blache dans une maifon qui appar tenoit à de Durant Gentilhomme fon voifin, & fon proche pa rent Après cela ces trouppes fe retirerent; à la priere même de la Blache & de fon coufin. Suite des mouve mens. Rufes des ques. : Mais Châteaudouble irrité de ces affronts qu'il avoit reçus, amaffant encore du monde pour tenter une troifiéme entreprife, ces deux hommes en furent avertis, & retinrent auprès d'eux quelques amis qu'ils raffemblerent; & en même tems ils écrivirent au premier Prefident, pour se plaindre de ces violen ces. Châteaudouble intercepta la lettre ; & la retint après l'avoir lue. Cependant l'Evêque de Valence s'entremit d'accommodement; & fit porter parole à ces deux amis par un Gentilhomme, que s'ils vouloient faire retirer leur monde, Châteaudouble n'entreprendroit rien ; & qu'il fe chargeoit d'obtenir l'amniftie de ce qui s'étoit paffé. De Durant & la Blache accepterent la mediation de l'Evêque, & congedierent leurs amis mais le même jour, au prejudice de la parole donnée, Châteaudouble fit enlever trente-deux de ceux qui fe retiroient, & les fit conduire en prifon. Les autres craignant un femblable traitement, s'ils fe ren doient chez eux, fe raffemblerent à la Baume-Corneillane, & s'y trouverent environ deux cens. La même nuit fix ou fept cens Catholiques de la montagne de Vercors prirent les armes, & parurent le lendemain fur les hauteurs qui environnent la vallée de Quint; dans la pensée d'aller piller les Reformez habitans de cette vallée, qu'on leur avoit dit qui étoient allez à Châteaudou ble. Mais les Reformez n'ayant pas quitté leurs maisons, se mirent en état de fe defendre. Ce tumulte n'alla pas loin.. St.Ferriol Gouverneur de Die fit quitter les armes aux deux partis ; & renvoya les Catholiques chez eux. Cependant ceux qui s'étoient retirez à la Baume-Corneillane Catholi fe plaignirent de la mauvaife foi de Châteaudouble ; & recla merent les prifonniers. L'Evêque de Valence leur promit fûreté pour leurs perfonnes, & delivrance des prifonniers, pourveu qu'ils fe rendiffent dans leurs maifons; & l'Intendant de Dauphiné leur don |