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Un système multiple de commissions spéciales, composées selon les besoins des diverses branches de l'administration, serait plus pratique et plus efficace.

Plusieurs de ces commissions fonctionnent déjà d'une manière satisfaisante. Ainsi, dans les travaux publics, l'institution des conseils locaux, appelés dans certains cas à contrôler les dépenses des ingénieurs, donne l'idée de ce que pourrait devenir une commission permanente agissant comme auxiliaire du préfet dans l'intervalle des sessions, et coopérant au choix des ingénieurs et des voyers, aux traités à passer pour acquisitions de terrains, aux constructions et aux rectifications des routes, etc. Ainsi pour les bâtiments civils, une commission du conseil général aurait facilement raison des luttes fréquentes qui s'établissent entre l'architecte du département et le conseil de Paris. Ainsi pour les établissements de bienfaisance et de répression, il serait facile de perfectionner le système actuel des commissions de surveillance, et d'attribuer une part plus large aux conseils locaux dans l'administration des hospices, des prisons, sans déposséder cependant le gouvernement et les tribunaux des droits que réclame l'ordre public.

Ainsi l'on pourrait multiplier, à l'exemple de ce qui se pratique dans le Bas-Rhin', des commissions de sa

d'une commission permanente chargée de surveiller, dans l'intervalle des sessions, les décisions du conseil général. (Réponse à la soixante-troisième question.)

1 Arrêté de M. le préfet Chopin d'Arnouville, en date du 30 juillet 1835.

lubrité chargées de veiller à l'hygiène publique du département, aux épidémies, aux épizooties, à l'observation des lois et arrêtés sur la police médicale, à la propagation de la vaccine, etc. Ainsi pour le perfectionnement de l'agriculture et de l'industrie, une commission spéciale nommée par chaque conseil-général deviendrait un instrument de progrès, un moyen de mettre la production en harmonie avec la consommation, une garantie pour la foi publique contre les spéculations frauduleuses, un modérateur entre les patrons et les ouvriers dans les collisions malheureusement trop fréquentes qu'engendrent les crises commerciales. Ainsi enfin les conseils départementaux institués par la loi de l'enseignement pour seconder l'action des recteurs pourraient, malgré leur composition trop peu favorable peut-être à l'action des familles dans l'éducation publique, concourir d'une manière efficace à la régénération morale de notre pays.

Ajoutons une dernière considération. En tout il faut vouloir le possible. « Celui, dit M. de Lamartine, qui « veut tout corriger d'un coup brise tout. Le possible « est la condition de la misérable nature humaine. « Dans les desseins de Dieu, le temps paraît être un « élément de la vérité elle-même. Demander la vérité «< à un seul jour, c'est demander à la nature des choses plus qu'elle n'a à donner. L'impatience crée des illu«sions et des ruines au lieu de vérités. Les déceptions « sont des vérités cueillies avant le temps. »>

Cinquante ans de durée d'un système administratif ont dû l'enraciner dans les mœurs. Une nation déshabituée à ce point de la vie publique, et forcément

adonnée au soin des intérêts particuliers, ne peut pas s'improviser un régime de liberté absolue.

Maintenons par cette raison l'administration des préfets, mais donnons à ces agents du pouvoir central des auxiliaires dont l'influence substitue peu à peu à la routine des bureaux l'esprit sagement progressif des administrations locales.

CHAPITRE III

DE LA COMPOSITION DU CORPS D'ADMINISTRATION DÉPARTEMENTALE; DES ASSEMBLÉES DU CONSEIL GÉNÉRAL.

SOMMAIRE.

Du mode de nomination des préfets et des conseils généraux. Ancien système. Lois de 1790, de l'an VIII, de 1833. Législations étrangères. Système à adopter. Incompatibilités. Durée des fonctions. Gratuité. Réunions du conseil général. Mode de votation. Commissions permanentes.

Le corps des administrateurs du département se compose du préfet et du conseil général.

Le préfet doit être nommé par le ministre de l'intérieur. Le caractère politique dominant dans ce fonctionnaire, il faut que le pouvoir le choisisse librement. A la vérité, on doit dans ce choix consulter les convenances, et, sous ce rapport, une liste triple de candidats présentée par le conseil général pourrait être convenable. Toutefois il paraît difficile de l'exiger en lui assignant un caractère obligatoire. La liberté et, par suite, la responsabilité ministérielle pourraient en

souffrir; mais il est à désirer qu'on cesse de faire de l'extranéité, c'est-à-dire de l'ignorance des besoins du département, la qualité la plus essentielle d'un préfet. Il est à désirer que les préfectures cessent d'être des étapes placées sur la route des ambitieux, qui exploitent les fonctions publiques dans une sorte de course au clocher1.

Les conseils généraux sont essentiellement électifs; mais d'après quel mode?

Les anciens monuments de notre droit administratif nous donnent peu de renseignements sur le système d'élection aux assemblées provinciales; les édits de nos rois sont muets à cet égard. Il paraît que l'ordre du clergé et celui de la noblesse choisissaient dans leur sein des délégués chargés de les représenter; quant aux députés des communes, ils étaient ordinairement élus par le conseil de ville et quelquefois par les con

1 On peut appliquer aux préfets ce que disait Necker des intendants dans son Mémoire sur les administrations provinciales.

« L'intendant le plus rempli de zèle et de connaissances est bientôt suivi par un autre qui dérange ou abandonne les projets de son prédécesseur. Dans l'espace de dix ou douze ans, on les voit aller de Limoges en Roussillon, du Roussillon en Hainaut et du Hainaut en Lorraine: et, à chaque variation, ils perdent le fruit de toutes les connaissances locales qu'ils peuvent avoir acquises. On dirait, à voir ces changements continuels, que l'administration des provinces est une école établie pour les maîtres des requêtes, et que, destinés à gouverner un autre hémisphère, ils viennent en France s'essayer sur différents sols et sur divers caractères, tandis que le plus grand avantage de chaque province devrait toujours être le but, et l'homme le moyen.»>

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