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par les lois dites tabulaires', qui furent, au jagement de Cicéron et de Montesquieu, l'une des grandes causes de la chute de la république.

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Le scrutin secret était aussi inconnu en France avant la révolution les conseils des communautés, les syndics des diocèses ou des provinces, tous les fonctionnaires de l'ordre municipal étaient élus à haute voix dans des assemblées publiques.

L'Assemblée constituante, la Convention et même l'Empire conservèrent l'antique usage de la publicité du vote; la loi du 5 février 1817 ne dérogea point à ce principe. L'art. 7 de la loi du 19 juin 1820 introduisit le premier dans le système électoral l'innovation du scrutin adopté depuis et même étendu par les diverses loi de 1831 et de 1833 sur les élections municipales, départementales et générales.

La minorité de la commission provoqua eette mesure, afin de ménager à l'opposition par des influences occultes l'appui des hommes timides qui pourraient reculer devant un vote ouvertement hostile. Elle aurait désiré de plus, dit à ce sujet le général Foy', que les bulletins fussent brûlés après chaque dépouillement. Les lois de 1831 adoptèrent cette garantie nouvelle du secret des votes.

A l'exemple de l'auteur des lois tabulaires de Rome,

1 D'après ces lois on donnait aux citoyens deux tables: la première marquée d'un A, pour dire antiqua, l'autre d'un u et d'un Ruti rogas.

2 De legibus, lib. II et III.

8 Esprit des lois, t. I, p. 29 et 30.
Moniteur de 1820, no 137 p., 653.

qui invoqua pour motif la crainte du danger (metum periculi)', M. Lainé, rapporteur de la commission, chercha dans la circonspection de nos mœurs en matière d'élection l'excuse d'une innovation aussi dangereuse qu'humiliante.

Un député rappela contre le système du vote public les élections de 1792, qui produisirent la Convention et le vote régicide qui fut donné à haute voix, oubliant que les lois sont faites pour des situations normales et non pour la position violente d'une assemblée délibérant sous le poignard: le nouveau principe fut adopté unanimement, sans autre opposition que celle d'un seul député, qui protesta vainement contre cet attentat à la majesté de la loi et contre cet outrage au caractère des électeurs. Mais ni l'unanimité de la Chambre de 1820, ni l'adhésion des législatures suivantes, ne sauraient détruire à nos yeux les graves considérations qui protégent le vote public.

A l'aide du vote secret, la cabale et l'intrigue, ces deux grands fléaux contre lesquels les législateurs ont toujours tonné avec tant de force", se rendent maîtresses des délibérations, et les majorités incessamment déplacées transforment le champ de la politique en une arène mouvante où s'entrechoquent les partis : de là des dissensions, des révolutions toujours renaissantes. Le vote public, au contraire, met la conscience des

1 ROSIN., Ant. rom., p. 643.

2 Moniteur de 1820, no 129, p. 617.

3 M. DUMEILET, no 138, p. 657 du Moniteur.

↳ M. Girardin, voy. le Moniteur, no 164, p. 819.

5 Voy. dans le corps de droit, De lege Julia ambitus, ff. 48.

électeurs sous l'égide de leur honneur, et par le double rempart qu'il élève contre l'ambition et l'esprit de parti, tend à unir, à stabiliser, et devient ainsi l'une des plus puissantes garanties de l'ordre social.

Nous avons repoussé ou tout au moins ajourné l'idée d'une seule commission permanente du conseil général administrant le département concurremment avec le préfet. Le système multiple de commissions spéciales est préférable, mais à la condition d'être non facultatif, mais obligatoire. Chaque branche de l'administration publique doit être incessamment surveillée les véritables intéressés.

par

Le conseil général doit donc nommer dans son sein une commission des travaux publics, une commission des impositions, une commission des comptes, une commission des établissements de bienfaisance, une commission des prisons, une commission de salubrité, une commission de surveillance des communes, une commission des cultes et de l'instruction publique, une commission des objets divers et des affaires extraordinaires; et chacune de ces commissions doit être représentée, dans l'intervalle des sessions, par un ou plusieurs de ses membres.

C'est aux lois spéciales à déterminer la composition et les attributions de ces commissions permanentes; mais, en général, aucune mesure nouvelle intéressant, soit au point de vue du personnel, soit au point de vue du matériel, les travaux des routes et autres, les hospices d'enfants trouvés ou d'aliénés, les établissements agricoles, industriels ou scientifiques, ne doit être adoptée sans leur avoir été soumise. La présence tou

jours active de ces commissions inspirera aux habitants des départements plus de confiance, donnera aux fonctionnaires du gouvernement plus de considération. L'épreuve de ce système faite dans plusieurs États de l'Europe a donné des résultats trop satisfaisants pour qu'on puisse craindre de le voir imité en France, avec les tempéraments qu'exige l'esprit unitaire de notre pays, et la crainte exprimée par les conseils généraux qu'une décentralisation soudaine ne devînt un principe d'anarchie.

CHAPITRE IV

DES ATTRIBUTIONS RESPECTIVES DES CONSEILS GÉNÉRAUX ET DES PRÉFETS, ET DE LEURS RAPPORTS AVEC LE GOUVER

NEMENT.

SOMMAIRE

Conseil général pouvoir législatif. Préfet pouvoir exécutif. Attributions des conseils généraux relevant, les unes, du pouvoir législatif, les autres, du pouvoir exécutif. Correspondance administrative des conseils généraux. Annulation des décisions prises par les conseils généraux en dehors de leurs attributions.

Le conseil général est l'assemblée législative du département; le préfet en est le pouvoir exécutif : l'un délibère, l'autre exécute.

Le préfet est dans le département comme le maire dans la commune, mais à un plus haut degré, l'agent du gouvernement. Il est chargé de faire publier, enregistrer et observer les lois générales. Il est, en outre, chargé de faire exécuter les décisions administratives du conseil général, et de prendre lui-même toutes les mesures relatives au soulagement des pauvres et à la police des mendiants et des vagabonds; à l'inspection

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