mode de gestion des propriétés départementales, 2° les actions à intenter ou à soutenir au nom du département, 3o les transactions qui concernent les droits du département, 4° les travaux faits dans les limites des ressources ordinaires ou cédés à des concessionnaires, tous ces actes de pure administration rentrent dans la juridiction souveraine du conseil de département. La commission de la Chambre des députés de 1838, rendant hommage à ces principes, proposait d'affranchir de l'autorisation préalable les actes de pure gestion des propriétés départementales. Cette proposition, combattue par le ministre de l'intérieur, fut repoussée par la Chambre; mais elle triomphera avec le temps, d'une résistance illogique. Une circulaire du ministre de l'intérieur de 1832 avait même décidé que les départements n'avaient pas le droit de louer, à leur profit, des propriétés départementales non affectées à un service public. Une autre circulaire du même ministre avait déclaré que l'assurance contre l'incendie des bâtiments départementaux ne serait pas autorisée. Devant le principe d'autonomie, toutes ces restrictions au droit de propriété départementale doivent disparaître; un conseil général peut librement et souverainement gérer, affermer, assurer un immeuble départemental. Que le ministre intervienne dans l'intérêt du service public, et que le changement de destination et d'affectation des édifices départementaux à ce service ne puisse être modifié sans son assentiment, rien de mieux; mais les propriétés patrimoniales des départements ne sont soumises au pouvoir central qu'au point de vue de la propriété, non au point de vue de la jouissance. En ce qui touche les dons et legs faits aux départements, l'art. 31 de la loi de 1838 exige pour l'autorisation une ordonnance royale, le conseil d'Etat entendu. C'est un nouvel hommage rendu au principe que le département est une personne civile, principe déjà consacré par le droit antérieur1; l'autorisation du chef du pouvoir exécutif est requise dans l'intérêt des tiers. A ce point de vue, nous l'admettons, et si la famille du donateur ou du testateur réclame, le conseil d'État doit examiner, et le gouvernement décider. Mais si l'intérêt des tiers ne se trouve pas engagé, et s'il y a dissidence entre le conseil général et le gouvernement sur la question d'acceptation ou de refus, à quel titre le ministre prétendrait-il se substituer aux représentants du département, bien plus à portée qu'il ne l'est lui-même d'apprécier les faits? Nous n'admettons pas davantage la prépondérance ministérielle dans les actions judiciaires et dans les transactions concernant les départements: pourquoi donc un conseil général ne peut-il pas soutenir un procès dans l'intérêt du département sans l'autorisation du conseil d'Etat 2? pourquoi ne peut-il pas transiger sans la même autorisation? Le droit de haute tutelle est ici sans application, et l'intérêt des départements est parfaitement garanti par les lumières et l'intégrité de ses administrateurs élus. 1 Article 910 du Code civil. Loi du 16 juin 1824, ticle 7. 2 Article 36 de la loi du 40 mai 1838. ar CHAPITRE VI DES FINANCES ET DE LA COMPTABILITÉ DÉPARTEMENTALES. SOMMAIRE. Des droits respectifs de l'Assemblée nationale et des administrations départementales dans l'établissement des impôts. Des dépenses et des recettes départementales. Progression des charges départementales. De la suppression du fonds commun. De la simplification du système des centimes additionnels. De la distinction des services. Des centimes ordinaires, obligatoires ou facultatifs. Des contributions extraordinaires et des emprunts. Des dépenses communes à plusieurs départements. De la répartition des impôts par les conseils généraux. Du recensement des populations et des propriétés. De l'évaluation des revenus territoriaux. Du règlement des comptes départementaux. De la Cour des comptes. Une règle commune, fondamentale, immuable s'applique à tous les impôts: c'est qu'il n'y a de légitimes que ceux qui ont été votés par la nation. « Il n'est pas, dit Bodin, en la puissance de prince du monde de lever l'impôt à son plaisir sur le peuple, non plus que de prendre le bien d'autrui.» Octroi de deniers et redressement de griefs se tiennent la main, disaient nos pères. Cette maxime de droit public, aussi ancienne que la monarchie et successivement reconnue par Charle magne, Philippe-Auguste 2, Louis dit le Hutin 3, Philippe de Valois, Charles VI dit le Simple, Char 1 Secunda divisio, ea quâ totius regni status, anteposito sicuti semper et ubicumque omnipotentis Dei judicio quantùm ad humanam rationem pertinebat, conservari videbatur, hæc est. Consuetudo autem tunc temporis talis erat, ut non sæpiùs sed bis in anno placita duo tenerentur: unum, quandò ordinabatur status totius regni ad anni vertentis spatium; quod ordinatum nullus eventus rerum, nisi summa necessitas quæ similiter toto regno incumbebat, mutabat. Ex quo placito generalitas universorum majorum tàm clericorum quàm laïcorum conveniebat, seniores propter consilium indicandum, minores propter idem consilium suscipiendum et interdùm pariter tractandum, et non ex potestate sed ex proprio mentis intellectu vel sententiâ confirmandum (ex Adalhard., Carol. Magn. propinquo. Hicm., epist. III, cap. XXIX). 2 Anno Domini millesimo centesimo octogesimo octavo, mense Martio, meviâ quadragesimâ, Parisiis celebratum est generale consilium à Philippo rege, convocatis omnibus archiepiscopis, episcopis, abbatibus et totius regni baronibus, in quo innumerabilis militum multitudo seu peditum sacratissimâ cruce insequiti sunt. Et propter hanc instantem necessitatem, oppido enim iter Hierosolymitarum rex affectabat cum assensu cleri et populi, quasdam decimas ab omnibus accipiendas esse eo tantùm anno decrevit; quæ dicta sancta decima Saladini, quas in præsenti libro posuimus (1188, RICORD, De gestis Philippi-Augusti). 3 Le roi Louis Hutin conclut que l'on ne lèverait tailles sans urgente nécessité et sans le consentement des trois États (1314, NIC. GILLES, Annales de France, 1339). Environ ce temps, en en suivant le privilége de Loys Hutin, roi de France et de Navarre, fut conclu par les gens des États de France, présent ledit roi Philippe de Valois, qui l'y accorda que l'on ne pourroit imposer ni lever taille en France sur le peuple, si urgente nécessité ou évidente utilité ne le requéroit, et de l'octroi des gens des États (1338, NIC. GILLES, 1339). 5 Il fut délibéré par le roi et lesdits scigneurs qu'il était expé les VII et Charles VIII, cette maxime, proclamée dient d'assembler les trois États, et le furent; et de toutes parts vindrent gens et furent renvoyés à Paris tant des gens d'église, des nobles, que des bonnes villes (1412, JEAN JUVÉNAL DES URSINS). Et qu'il étoit nécessité de se pourvoir contre les Anglois ennemis du roi et du royaume de France, laquelle chose ne peut se faire sans argent; et pour ce requéroit aux trois Etats, aide qui étoit en effet une bonne et grosse taille. A la délibération des trois États il y eut diverses imaginations et opinions. Entre les autres, ceux de la province de Rheims montrèrent que les aides ordinaires suffiroient bien à soutenir la guerre sans mettre tailles, vu la pauvreté du peuple et les pilleries à cause des divisions, et plusieurs à leur imagination adhérèrent. L'abbé du mont Saint-Jean, qui étoit bien notable, parla spécialement contre les gens des finances et ceux qui avoient des dons excessifs du roi, en montrant qu'on devoit reprendre de ceux qui avoient trop eu, et que, ce fait, le roi avoit assez pour résister aux ennemis et soutenir la guerre en employant ce qui avoit été dit par lesdits Gentiam et Panilly (ib., pag. 312). 1 Le roi ou prince, pour urgente nécessité, peut imposer tailles à ses sujets, selon la disposition de la loi ad instructionem C. de sacros-eccles., et aussi aliéner les biens de l'Eglise pour la garde, conservation et défense des fortifications. Vrai est que sur ce seroit par aventure requis le consentement des trois États, c'est à savoir de la noblesse, du clergé et du tiers-état, ainsi qu'il est accoutumé s'être fait (1426, MASUER, tit. XXXVIII, § 2). 2 Et par ce moyen que toutes les tailles, et autres équipollens aux tailles extraordinaires qui par ci-devant ont eu cours, soient du tout tollues et abolies, et que désormais en suivant la naturelle franchise de France et la doctrine de saint Louis (qui commanda et bailla par doctrine à son fils de ne prendre ni lever taille sur son peuple sans grand besoin et nécessité) ne soient imposées lesdites tailles ni aides équipollens à tailles, sans premièrement assembler lesdits trois Etats, et de déclarer les causes et nécessités du roi et du royaume pour ce faire, et que les gens |