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administrer les biens à lui appartenant du chef de sa grand mère et grand'tante paterternelles; ce qui suppose nécessairement la volonté d'accepter lesdits legs à titre uni versel;

» Attendu qu'il est de principe qu'une héredité peut être adiée (acceptée) de deux manieres, savoir, par une déclaration formelle de volonté, ou par un fait avec lequel cette volonté a une liaison nécessaire ; et que, des l'instant que l'héritier a manifesté la volonté d'accepter l'hérédité, il est obligé envers les créanciers;

» Attendu que le mandat sus-énoncé embrasse aussi la faculté de porter en justice, au nom du mandant, les actions personnelles qui pourraient lui compéter, et ainsi celles en delivrance des legs susmentionnés qui n'excedent pas la quotité disponible, lesquelles actions en delivrance ont le caractère de l'action personnelle ex testamento, ouverte contre l'intimé;

» Qu'il résulte de ce qui précède, que les art. 112, 113 et 114 du Code civil, ne sont pas applicables à l'espèce.... ;

» Met le jugement dont est appel au néant, en ce que......, sans préjudice et pour autant que de besoin, il a commis le notaire Caroly, conformément à la disposition de l'art. 113 du du Code civil, à l'effet de représenter le premier appelant, à l'intervention de son fondé de pouvoir, dans les inventaires, comptes, partages et liquidations dans lesquels il serait intéressé.... (1) ».

IV. A quel effet le notaire commis en vertu de l'art. 113, représente-t-il l'Absent pré

sume?

Cette question en renferme trois.

1o. Le notaire a-t-il qualité pour provoquer le partage dans lequel l'Absent est inté.

ressé?

Le partage étant considéré comme un échange que les co-partageans font entre eux de portions déterminées dans les biens qu'ils possedent en commun, contre les portions indéterminées qu'ils y ont respectivement (2), ou comme une vente qu'ils se font réciproquement des unes et des autres (3), le droit de le

(1) Jurisprudence de la cour supérieure de justice de Bruxelles, année 1817, tome 2, pag. 206.

(2) Quasi certa lege permutationem fecerint, scilicet, si omnes res divisa sint. Loi 20, §. 3, D. familiæ ercircundæ.

Cum permutatio rerum discernens communionem, interveniet. Loi 77 §. 18, D. de legatis. 2o. (3) Divisionem prædiorum vicem emptionis ob fixere placuit, Lo 1, G. communia utriusque judicii.

provoquer n'appartient régulièrement qu'à celui qui a le pouvoir d'aliéner.

De là vient que le tuteur d'un mineur ou d'un interdit peut bien, en sa qualité, répon. dre à une demande en partage (1), mais non pas la former lui-même, à moins qu'il n'y soit autorisé par un conseil de famille (2).

De là vient encore que, suivant l'art. 818 du Code civil, le mari ne peut pas, sans le concours de sa femme, provoquer le partage d'immeubles à elle échus qui ne tombent en communauté.

Et de là par conséquent il suit que le notaire commis pour representer un Absent présume dans le partage d'une succession, ne peut pas provoquer lui-même ce partage.

Il y a plus. Ne fût-il question que d'un simple compte à rendre et auquel un présume Absent serait intéressé, le notaire commis pour représenter celui-ci, serait sans qualité pour intenter l'action en reddition de compte.

Le sieur Mayensous, notaire, avait été nommé par le tribunal de première instance de Malines pour représenter un présumé Absent dans le compte que le sieur Pieters avait à lui rendre. Le sieur Pieters ne se pressant pas de rendre ce compte, le sieur Mayensous l'avait fait assigner pour l'y faire condamner. Le sieur Pieters l'a soutenu non-recevable; et, chose étonnante, il a échoué devant le premier juge. Mais sur l'appel, arrêt de la cour de Bruxelles, du 8 avril 1813, qui,

« Attendu que l'art. 113 du Code civil, qui autorise les tribunaux à commettre un notaire pour représenter les présumés Absens dans les inventaires, comptes, partages et liquidations dans lesquels ces derniers seraient intéresses, ne donne aucun pouvoir à pareil notaire, afin de prendre l'initiative de ces opé rations, mais seulement le droit de représenter les Absens, lorsqu'ils y sont provoqués;

» Attendu que la commission donnée à l'intimé par le tribunal de Malines, ne lui conférait et ne pouvait lui conférer d'autres pouvoirs que ceux repris en l'article précité du Code civil;

lité

» D'où il suit que c'est à tort et sans quaque l'intimé a agi directement contre l'appelant en reddition de compte ;

« Met l'appellation et ce dont est appel au » néant, emendant, déclare l'intime non-re

(1) Loi 17, C. de prædiis minorum non alienandis. (2) Loi 1, §. 2, et loi 7, D. de rebus eorum qui sub tutela; art. 465 et 817 du Code civil.

» cevable dans la demande en reddition de » compte dirigée par lui contre l'appelant; " condamne l'intime, au nom personnel, aux » dépens des deux instances (1) ».

20. Mais si incidemment à un compte ou à un partage, il s'élève une contestation entre les parties, le notaire aura-t-il qualité pour la porter en justice ou pour y défendre?

il ne

M. Proudhon (2) soutient la negative, et voici sa raison. L'art. 931 du Code de procédure porte que, lorsqu'il s'agira de procéder à une levée de scellés et à un inventaire, sera pas nécessaire d'appeler les intéressés demeurant à la distance de cinq myriamètres ; mais qu'on appellera pour eux un notaire commis d'office par le président du tribunal de première instance. Le notaire, commis dans ce cas pour représenter les inté ressés non-présens, ne peut certainement intenter ni soutenir en leur nom aucune action en justice. Il en est donc de même de celui qui est commis, dans le cas de l'art. 113 du Code civil, pour représenter un Absent pré

sumé.

On pourrait répondre à cet argument que le notaire qui est commis dans le cas de l'art. 931 du Code, de procédure, ne l'est que pour assister à la levée des scellés et à l'inventaire; au lieu que, dans le cas de l'art. 113 du Code civil, le notaire représente l'Absent présumé, non-seulement à la levée des scellés et à l'inventaire, mais encore dans le compte, dans la liquidation et dans le partage de la succession; et qu'il a par conséquent des pouvoirs plus etendus.

Nous devons cependant dire que l'argument de M. Proudhon subsiste, et voici pourquoi. Ce n'est pas seulement dans le compte, dans la liquidation, dans le partage, qu'il peut s'élever des contestations, c'est aussi à la levée des scellés et à l'inventaire. Or, le pouvoir donné à un notaire, dans le cas de l'art. 931 du Code de procédure civile, de représenter les non-présens à la levée des scellés et à l'inventaire, emporte-t-il celui de les représenter dans les contestations qui s'élèvent dans le cours de ces opérations? Non, certainement. Mais, dès-lors, comment le pouvoir donné à un notaire, dans le cas de l'art. 113 du Code civil, de représenter un Absent présumé, dans un compte, dans une liquidation, dans un partage, renfermerait-il celui d'intenter ou de soutenir en justice, au nom de

(1) Décisions notables de la cour de Bruxelles, tom. 28, pag. 171.

(2) Cours de droit civil, chap. 20, sect. 65, §. 3.

l'Absent présumé, les actions incidentes à ce partage, à cette liquidation, à ce compte?

Ajoutons que l'art. 113 du Code civil a été rédigé dans le même esprit que l'art. 7 de la sect. 2 du tit. 1er de la loi du 6 octobre 1791. Or, que portait ce dernier article? « Les notaires pourront, sur la seule réquisition d'une partie intéressée, représenter dans les inventaires, comptes, partages et autres opérations amiables, les Absens qui n'auront pas de fondés de procurations spéciales et authentiques ». Ces mots et autres opérations amiables, annonçaient bien évidemment que le législateur considérait comme telles les inventaires, comptes et partages dont il s'occupait, et par conséquent qu'il n'attribuait qualité aux notaires pour y représenter les Absens, qu'autant qu'il ne s'y mêlerait rien de contentieux.

3o. Enfin, le notaire commis par justice, dans le cas de l'art. 113 du Code civil, a-t-il qualité pour consommer définitivement le partage au nom de l'Absent présumé ?

Non. Le partage dans lequel le notaire est intervenu pour l'Absent présumé, ne devient définitif à l'égard de celui-ci que par l'homologation qui en est faite en justice. Cela résulte clairement de l'art. 838.

V. Nous avons dit sur l'art. 112, que sa disposition admet une exception relativement aux militaires en activité de service en temps de guerre; et c'est ici le lieu de dire que cette exception consiste en ce qu'à l'égard des militaires Absens, et dans le cas qu'elle a pour objet, le juge ne peut ni se dispenser de leur nommer un curateur, ni le nommer luimême.

Voici en effet ce que porte loi du 11 ventôse an 2.

« Art. 1. Immédiatement après l'apposition des scelles sur les effets et papiers délaissés par les pères et mères des défenseurs de la patrie, et autres parens dont ils sont héritiers, le juge de paix qui les aura apposés, en avertira ses héritiers, s'il sait à quel corps ou armée ils sont attachés.

» 2. Le délai d'un mois expiré, si l'héritier ne donne pas de ses nouvelles, et n'envoie pas de procuration, l'agent national de la commune dans laquelle ses père et mere seront décédés, convoquera, sans frais, devant le juge de paix, la famille, et à son défaut, les voisins et amis, à l'effet de nommer un curateur à l'absent.

» 3. Ce curateur provoquera la levée des scellés, assistera à leur reconnaissance, pourra faire procéder à l'inventaire et vente des meubles, en recevoir le prix, à la charge d'en

rendre compte, soit au militaire absent, soit à son fondé de pouvoir.

» 4. Il administrera les immeubles en bon père de famille ».

Ces dispositions sont déclarées, par la loi du 16 fructidor an 2, « communes aux officiers » de santé et à tous autres citoyens attachés » au service des armées de de la république ». Mais ici se présente une première question. Ces lois n'ont-elles pas été abrogées par le Code civil?

Il est évident que leurs dispositions ne peuvent pas s'accorder avec celles de l'article 113 de ce Code; et dès-là, elles sembleraient avoir été abrogées dès le moment où cet article a fait loi.

Mais on pourrait faire le même raisonnement à l'égard de la loi du 6 brumaire an 5, qui déclare que, jusqu'à l'expiration de certains délais après la paix générale, aucune prescription ne pourra courir contre les militaires sous les drapeaux en temps de guerre, et que leurs immeubles ne pourront pas être vendus par expropriation forcée; car cette loi n'est pas moins en opposition avec les dispositions générales du Code civil concernant la prescription et l'expropriation forcée, que celles des 11 ventóse et 16 fructidor an 2 ne le sont avec l'art. 113 du même Code.

Cependant il est certain que la loi du 6 brumaire an 5 n'a pas été abrogée par le Code civil; et il en existe deux preuves irrefraga

bles:

La première, qui est commune tant à cette loi qu'à celles des 11 ventóse et 6 fructidor an 2 elles-mêmes, résulte de deux décrets des 16 mars 1807 et 8 novembre 1810, qui ordonnent qu'elles seront publiées et exécutées, concurremment avec le Code civil, dans des pays réunis à la France depuis leur publication (1). En effet, comme l'a dit la cour de cassation dans un arrêt du 20 avril 1811, une loi abrogée ne se publie pas pour étre exécutée comme loi (2).

La seconde preuve est encore plus logique : c'est qu'après la conclusion de la paix genérale, en 1814, la loi du 21 décembre de cette année a prorogé jusqu'au premier avril 1815, en faveur des militaires qui ne seraient pas rentrés en France au moment de la promulgation de la présente, le délai pendant lequel ils devaient, aux termes de l'art. 2 de la loi du 6 brumaire an 5, continuer de jouir

(1) Bulletin des lois, 4. série, n. 140 et 327 bis. (2) V. l'article expropriation forcée, n. 2,

note I.

TOME I.

de la surséance que leur accordait cette loi. Aussi est-il d'une jurisprudence constante que les lois des 11 ventóse et 16 fructidor an 2 ont conservé toute leur force sous le Code civil, tant que la France a été en état de

guerre.

Guillaume Clément, décédé en 1807, dans l'arrondissement de Nivelles, avait laissé, entre autres héritiers, Jean-Baptiste Lacroix qui, depuis plusieurs années, était Absent pour le service militaire.

Les cohéritiers de Jean-Baptiste Lacroix, se proposant de vendre une partie des immeubles de la succession pour en liquider les dettes, s'adressent au tribunal de première instance de Nivelles, qui, par jugement du 22 septembre 1807, lui nomme le sieur Hullin, notaire, pour curateur, à l'effet de le représenter dans la vente.

D'après ce jugement, les immeubles sont vendus aux enchères, et le sieur d'Overchies s'en rend adjudicataire.

Le sieur Hullin, en sa qualité, réclame contre l'adjudication, sur le fondement que le procès-verbal n'en a été signé ni de lui ni de

son avoué.

Jugement qui en effet la déclare nulle.

Appel de la part du sieur d'Overchies; et le 24 mai 1809, arrêt de la cour de Bruxelles, ainsi conçu :

« Attendu que Jean-Baptiste Lacroix est militaire, et que les règles à suivre pour ses intérêts sont tracées par des loix particulières, notamment par celle du 11 ventose an 2, restée en vigueur, puisque la publication en a été ordonnée dans les départemens audelà des Alpes par décret du 16 mars 1807, en même temps que de celles des 16 fructidor an 2 et 6 brumaire an 5, également relatives aux militaires Absens;

» Attendu que ces lois n'ont pas été observées, et que l'on a faussement pris pour base les art. 112 et 113 du Code civil dans un cas où, en s'adressant, soit au corps où Jean-Baptiste Lacroix est attaché, soit au ministre de la guerre, on aurait pu obtenir sa procuration ce qui aurait évité toutes les formes ruineuses de l'établissement d'un curateur ou d'un notaire pour le représenter;

» Attendu que ce n'est qu'après avoir fait inutilement usage des moyens indiqués par la loi du 11 ventose an 2, qu'il est pourvu à la nomination d'un curateur au militaire Absent, et dans les formes prescrites par cette loi;

>> De tout quoi il résulte que l'intimé n'a pas été légalement qualifié, ni pour les opérations dont il s'agit, ni pour intenter la demande qui fait le sujet du présent procès;

6

» Attendu que, si les intérêts du militaire Absent ont pu être lésés, il a, par lui-même, ou par le curateur qui lui sera légalement nommé, la faculté de ne pas respecter ce qui s'est fait, de même que celle de consentir à la vente; tous ses droits demeurant intacts;

» La cour.... met l'appellation et ce dont est appel au néant; émendant, déclare ledit intimé non-recevable et sans qualité à intenter l'action dont il s'agit, et le condamne aux dé. pens, tant de cause principale que d'appel, dans lesquels dépens ne sont compris ceux qui ont été faits pour sa nomination de curateur et de notaire pour représenter l'Absent, lesquels restent à la charge de qui de droit (1) ». On trouvera au no. suivant, et à l'art. 136, no. V, plusieurs autres arrêts qui consacrent ou pré-supposent la même doctrine.

VI. Nous examinerons d'ailleurs au no. V de l'art. 136, à quelle époque la loi spéciale du II ventôse an 2 a dû cesser d'être exécutée, dans les derniers temps, après la conclusion de la paix générale, et si elle serait encore applicable de plein droit en cas d'une nouvelle

guerre.

Mais il nous reste une question à traiter ici: c'est de savoir quelle est l'étendue de l'ex ception que cette loi spéciale a introduite.

Cette loi ne dispose que pour le cas où il échoit une succession à un militaire Absent sans nouvelles. Ce n'est donc que dans ce cas que le conseil de famille est appelé à nommer le curateur dont la conservation de ses droits exige la nomination; et dès-là, il est clair que, lorsqu'il s'agit de pourvoir à la conservation de droits qui lui étaient acquis avant son départ, ce n'est plus à cette loi qu'il faut recourir, mais bien à l'art. 112 du Code civil, aux termes duquel le curateur ne peut être nommé que par le tribunal de première instance.

Voici pourtant une espèce dans laquelle il en a été jugé autrement.

En 1794, Frédéric Kuntz, mineur placé sous la tutelle de Balthazard Kuntz, son oncle, part pour l'armée comme réquisitionnaire. Plusieurs années se passent sans qu'il donne de ses nouvelles; et l'epoque de sa majorité venue, son tuteur abandonne l'administration de ses biens au sieur Heckmann, mari d'une sœur de l'Absent.

Le 6 février 1811, jugement qui, sur la requête d'une autre sœur de Frédéric Kuntz et du sieur Zimmermann, son mari, nomme un

(1) Décisions notables de la cour d'appel de Bruxelles, tome 17, page 60.

curateur pour administrer les biens de l'Absent et entendre le compte de son tuteur. Opposition à ce jugement de la part du sieur Heckmann, qui soutient que, d'après des arrangemens particuliers approuvés par un conseil de famille, il doit conserver l'administration des biens de l'Absent.

Cette opposition est rejetée par un nouveau jugement du 22 juillet 1813.

Le sieur Heckman en appelle et attaque la nomination du curateur, comme faite par le tribunal de première instance, conformément à la règle générale tracée par l'art. 112 du Code civil, tandis que, d'après la loi du 11 ventóse an 2, spéciale pour les militaires Absens, elle aurait dû être faite par un conseil de famille.

De là deux questions : l'une si la loi du 11 ventôse an 2 est encore en vigueur; l'autre, si elle est applicable à l'espèce où il s'agit, non d'une succession ouverte au profit d'un militaire Absent, mais de l'Administration des biens dont il était saisi avant son départ.

Le 3 mai 1815, arrêt par lequel la cour de Colmar,

« Considérant que, d'après les dispositions de la loi du 11 ventose an 2, c'est au conseil de famille seul qu'appartient le droit de nommer un curateur aux militaires Absens pour le service de la patrie; qu'à la vérité, cette loi a été provoquée pour l'ouverture des successions au profit de ces militaires, mais que le but évident du législateur a été de veiller à la conservation de leurs intérêts qu'ils ne peuvent soigner par eux-mêmes;

» Considérant qu'un conseil de famille est plus à même de discuter les intérêts d'un militaire Absent et de lui constituer un administrateur gérant sa fortune, qu'un tribunal qui nomme un curateur sur le simple exposé d'un individu qui peut induire sa religion en

erreur;

» Considérant, au cas particulier, que Frédéric Kuntz, de la fortune duquel il s'agit, était encore en minorité lors de son départ comme réquisitionnaire; que ses biens étaient par conséquent administrés par son tuteur, qu'étant devenu majeur pendant son service militaire, cette administration devait se continuer par ce tuteur, et qu'au cas où celui-ci aurait voulu rendre compte de sa gestion, il ne pouvait le faire qu'envers le curateur qui aurait été nommé conformément aux dispositions de la loi du 11 ventose an 2; mais qu'en aucun cas, il ne pouvait se démettre de son autorité privée, d'une gestion que la loi conservait dans ses mains, et qu'elle seule pouvait lui óter;

» Considérant que, dans l'état actuel, soit que Kuntz revienne, soit qu'il ne revienne plus, il est également important de lui faire constituer un curateur du choix de sa famille, parce que, dans l'une comme dans l'autre hypothèse, les droits des parties seront mieux soignés par le choix que le conseil de famille est interessé à faire;

» Met l'appellation et ce dont est appel au, néant; emendant, reçoit les appelans opposans au jugement sur requête obtenu par les. intimes, le 6 février 1811; ayant égard à ladite opposition et y faisant droit, rapporte ledit jugement pour demeurer comme non-avenu; faisant droit sur les réquisitions du ministère public, ordonne qu'à la diligence des intimés, il sera convoqué instamment une assemblée de famille pardevant le juge de paix des lieux, à l'effet d'y être procédé à la nomination d'un curateur de l'Absent, conformément à la loi (1) ".

Que cet arrêt ait bien jugé en décidant que l'art. 112 du Code civil n'abroge pas la loi speciale du 11 ventòse an 2, cela est de toute évidence.

Mais il a visiblement mal juge en étendant cette loi speciale hors du cas pour lequel elle avait été faite, en l'appliquant à la nomination d'un curateur qui avait pour objet la conservation de droits dont un militaire Absent s'etait trouvé saisi antérieurement à son ab

sence.

La question s'était présentée peu de temps auparavant à la cour supérieure de justice de Bruxelles, et y avait été mieux jugée.

Jean-Baptiste Catelain, conscrit de 1809, était parti à cette époque pour l'armée, laissant à sa famille le titre d'une créance de 2262 fr., qu'il avait sur le sieur Leconte. Quatre ans après, il cesse de donner de ses nouvelles. Un conseil de famille s'assemble, et lui nomme pour curateur le sieur Jacquart.

Ce curateur poursuit le sieur Leconte en payement de la créance de 2262 fr. Celui-ci soutient qu'il est sans qualité.

De là une instance qui est portée devant le tribunal de Courtray.

Où est (dit-on pour le sieur Leconte) la loi qui autorise le conseil de famille à nommer un curateur au militaire Absent, à l'effet de recouvrer ses créances actives? Voudrait-on se prévaloir de la loi du 11 ventose an 2? Mais cette loi n'est relative qu'au cas où il s'agit de faire représenter le militaire Absent dans une

(1) Journal des audiences de la cour de cassation, année 1814, supplément, page 55.

succession qui lui est echue. Cette loi n'attribue pas au conseil de famille le droit de nommer un curateur, lorsqu'il est question de faire rentrer une créance due au militaire. Ce cas, non spécifié dans la loi de ventôse, rentre dans les dispositions du Code civil, sur le fait de l'absence. Le soi-disant curateur Jacquart est donc dépourvu d'une nomination légale, et par suite il est sans qualité pour agir en payement de la somme que doit Leconte au militaire Catelain ».

Le 15 mai 1813, jugement qui, sans avoir égard à l'incident élevé par le sieur Leconte, et homologuant la délibération du conseil de famille, ordonne la continuation des poursuites.

Mais sur l'appel, arrêt du 1er. juin 1814, qui déclare le curateur sans qualité et le condamne aux dépens des deux instances,

« Attendu que les lois des 11 ventose an 2, 16 fructidor suivant et 16 brumaire an 5, loin d'être contraires aux dispositions du Code civil, relativement aux militaires. Absens ou presumes tels, ne font qu'établir de nouvelles formalités tendantes à la conservation des droits des militaires Absens, et cela seulement dans les cas spécifiés par ces lois, savoir, l'adition d'une hérédité ou un partage;

» D'où il résulte que, relativement aux militaires, il est nécessaire, en cas d'absence présumée, comme dans l'espèce, de proceder d'après les dispositions du Code civil, savoir, faire déclarer par les héritiers présomptifs l'absence du militaire, demander la mise en opposition, etc.;

» D'où il suit ultérieurement que le conseil de famille n'était pas autorisé, dans le cas présent, à nommer un curateur au militaire Catelain, et qu'il n'échéait pas, par le premier juge, d'homologuer cette nomination du curateur dans le chef de l'intime (1) »,

Même décision dans l'espèce suivante. En 1813, Joseph Bouwens, appelé par la conscription au service militaire, se rend à l'armée; et deux années se passent sans qu'on reçoive de lui aucune nouvelle.

En 1815, un conseil de famille convoqué par sa mère, nomme le sieur Dehasse curateur à ses biens.

Le sieur Dehasse, en sa qualité, fait assi, gner le sieur Stallart en payement d'une somme de 3639 fr. dont il le prétend débiteur envers l'Absent.

Le sieur Stallart se défend au fond. Con;

(1) Jurisprudence de la cour supérieure de justice. de Bruxelles, année 1814, tome 1o, pag. 262.

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