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lement parmi les syndicats patronaux, mais au sein même des syndicats ouvriers (1).

On leur a reproché, non seulement d'avoir été pris sans avis préalable du Conseil d'Etat, mais encore de violer deux principes incontestés de notre droit public. Un de ces principes, c'est que si un décret gouvernemental est absolument compétent pour régler les difficultés pratiques résultant de l'applica tion des lois existantes, il n'a aucun droit de les modifier. Le second, c'est qu'un décret ne saurait, sans excès de pouvoir, créer une institution de nature à influer sur les conditions de la vie politique ou sociale d'un pays.

Le premier principe aurait été méconnu par M. Millerand qui aurait inopportunément et non sans danger, attribué aux conseils du travail :

1o Le droit de constater le taux normal et courant des salaires et la durée normale et courante de la journée de travail, droit qui, d'après M. le sénateur Bérenger, équivaudrait en réalité à celui de les déterminer et consti

(1) Le comité directeur de l' « Union fédérale des ouvriers métallurgistes de France », l'une des fédérations ouvrières les plus importants, a pris la résolution suivante:

« Considérant que le règlement des conditions du travail et des différends entre patrons et ouvriers rentre dans les attributions des syndicats, attributions que les conseils du travail voudraient leur enlever;

« Considérant que ce serait se leurrer volontairement que d'espérer une entente permanente entre patrons et ouvriers, leurs intérêts généraux étant opposés;

« Considérant qu'il est dangereux de canaliser l'action syndicale dans de nouveaux rouages inutiles et compliqués ;

« Considérant, par l'expérience du passé, qu'il est nuisible pour les nôtres d'aller dans des milieux dont, tôt ou tard, ils subissent les influences, et que, d'autre part, cette création n'est faite que pour l'application du projet de loi sur la réglementation des grèves et l'arbitrage obligatoire que nous avons repoussé avec énergie,

Le comité fédéral, pour ces différents motifs, engage les syndicats adhérents à ne pas se faire les dupes d'une si nuisible institution. »

tuerait un véritable empiètement sur les droits du patron: 2o Le jugement des différends individuels dont les conseils de prud'hommes doivent seuls connaître ;

30 Enfin l'arbitrage en cas de conflits collectifs. Sur ce dernier point M. Bérenger insiste tout particulièrement et fait remarquer que jusqu'ici le sujet a paru assez important pour qu'on en fit une loi particulière et qu'il appartient au législateur seul de la modifier.

M. Millerand aurait porté atteinte au second principe en créant une institution destinée à modifier dans une mesure importante les rapports entre le capital et le travail.

En outre les décrets seraient antidémocratiques parce qu'ils réserveraient aux seuls syndiqués le droit de nommer les membres des conseils du travail.

Le Parlement sera prochainement appelé à se prononcer sur le mérite de ces critiques, car M. Bérenger a déposé sur le bureau du Sénat une proposition de réforme, contresignée par MM. Franck-Chauveau, Prévet, E. Labiche, Sébliné, Denis, E. Guérin et Lavertujon. Sur un rapport favorable de sa commission d'initiative, le Sénat a pris cette proposition en considération dans sa séance du 18 juin 1901.

En voici le texte : ARTICLE PREMIER. Il peut être institué par décret, sous le nom de Conseils consultatifs du travail, partout où l'utilité en sera reconnue, après avis préalable des Conseils municipaux de leur circonscription, du Conseil général et des Chambres de commerce du département, des Conseils composés en nombre égal de patrons et d'ouvriers.

Leur mission est d'être entre eux et auprès des pouvoirs publics les organes des intérêts industriels et moraux de leurs commettants.

De donner, soit d'office, soit sur la demande du Gouvernement, des avis sur toutes les questions qui concernent ces intérêts.

De répondre aux demandes d'enquête ordonnées par le Gouvernement.

ART. 2.

Chaque Conseil est divisé en deux sections com

prenant l'une les patrons, l'autre les ouvriers.

Les sections nomment chacune un président et un secrétaire pris dans leur sein. Elles délibèrent séparément; elles peuvent ensuite, soit sur l'initiative de leurs bureaux, soit sur la demande du Gouvernement, se réunir pour une délibération commune. Elles désignent un président et un secrétaire.

En cas de partage des voix elles peuvent appeler un ou plusieurs tiers désignés d'accord entre elles.

ART. 3.

Le ressort de chaque Conseil est déterminé par le Ministre du Commerce. Il ne peut dépasser les limites de lá ville ou de l'arrondissement où il est établi, sauf exception approuvée par le Ministre.

Il y a autant de Conseils que d'industries. Toutefois lorsque le nombre des industries de même nature est insuffisant, un certain nombre d'industries similaires peuvent, sur avis conforme des intéressés, être réunies en un même groupe.

ART. 4. Le décret d'institution fixe le nombre des membres de chaque Conseil. Il varie de six à douze suivant l'importance des industries représentées.

La durée de leur pouvoir est de quatre ans.

ART. 5. Les Conseils consultatifs du travail sont élus dans les conditions d'éligibilité et d'électorat et suivant les règles fixées par la loi sur les Conseils de prud'hommes.

Toutefois, dans le cas où le nombre des électeurs patrons est égal à celui fixé pour la composition du Conseil, tous en sont membres, s'ils remplissent les conditions légales d'éligibilité.

S'ils sont en nombre inférieur, ils désignent entre eux pour se compléter, soit des ingénieurs ou employés supérieurs de leurs établissements, soit des patrons appartenant à la même industrie ou à des industries similaires dans les circonscriptions voisines.

Dans les circonscriptions où l'industrie est représentée par des Sociétés par actions, les directeurs et les membres du

:

Conseil d'administration ayant la capacité électorale sont électeurs patronaux.

ART. 6. Les sections se réunissent sur la convocation du président du Conseil du travail chaque fois qu'il y a lieu de soumettre un objet de leur compétence à leurs délibérations. ART. 7. Toutes discussions politiques ou religieuses leur sont interdites.

ART. 8.

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Toute délibération excédant la limite des attribu

tions fixées par la loi est annulée par le Ministre.

Si le Conseil ou la section, une fois averti, persiste à sortir de son rôle, sa dissolution peut être prononcée.

ADDENDA

Accidents du travail.

ACCIDENTS AGRICOLES

Loi 30 juin 1899.

ARTICLE UNIQUE.-Les accidents occasionnés par l'emploi de machines agricoles mues par des moteurs inanimés et dont sont victimes, par le fait ou à l'occasion du travail, les personnes, quelles qu'elles soient, occupées à la conduite ou au service de ces moteurs ou machines, sont à la charge de l'exploitant du dit moteur :

Est considéré comme exploitant l'individu ou la collectivité qui dirige le moteur ou le fait diriger par ses préposés.

Si la victime n'est pas salariée ou n'a pas un salaire fixe, l'indemnité due est calculée, selon les tarifs de la loi du 9 avril 1898, d'après le salaire moyen des ouvriers agricoles de la

commune.

En dehors du cas ci-dessus déterminé, la loi du 9 avril 1898 n'est pas applicable à l'agriculture. (Voyez page 307).

Association internationale des travailleurs.

La loi du 14 mars 1872 dont nous avons reproduit le texte p. 266, a été abrogée par la loi du 1er juillet 1901 (art. 21).

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