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En un mot, les éléments d'appréciation sont multiples et varient suivant les établissements ou les idées de chaque patron (André et Guibourg, p. 20. Cornil, p. 110. Pic, p. 577).

§ II. Modes de paiement.

Il y a plusieurs systèmes :

1o Participation immédiate. - Le premier est celui de la distribution immédiate des sommes à répartir : chaque année, en fin d'exercice, des répartitions individuelles sont faites par le patron. la part d'intérêt de chacun lui est payée (1).

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2o Participation différée. Dans ce système, les sommes qui reviennent à l'ouvrier sont affectées à des œuvres de prévoyance sur boni individuel et lui constituent ainsi un capital ou une pension de retraite.

Quelquefois la modicité des sommes à répartir a fait pratiquer un système de répartition collective appliquée à un but d'intérêt commun de mutualité, de secours, d'instruction (André et Guibourg, p. 21). Mais la répartition individuelle lorsqu'elle est possible, est plus équitable puisqu'elle permet de tenir compte des inégalités de salaires, des différences quant à l'ancienneté, etc. (Cauwès, t. 3, p. 212.)

30 Participation mixte. -- Divers établissements ont adopté une participation dite mixte, selon laquelle les sommes, provenant de la participation sont divisées en deux parts; l'une distribuée chaque année en argent comptant, l'autre réservée dans un but de prévoyance. (Cauwès, t. 3, p. 214, André et Guibourg, p. 20.)

4o Commandite. Dans le but d'intéresser leur personnel, d'une manière plus étroite encore, à la prospérité de leurs maisons, certains patrons emploient les parts de bénéfices attribués aux ouvriers, en acquisition, à leur profit, de parts dans le

(1) L'inconvénient de la jouissance immédiate, c'est que la part qui revient à l'ouvrier et qui, en général, ne forme pas une somme assez élevée pour lui faire comprendre l'utilité de l'épargne, est engagée par avance. (Cauwès, t. 3. p. 211.)

capital de l'entreprise, c'est le système de la commandite. Il se présente sous deux formes distinctes, la participation sans copropriété dans l'entreprise et la participation avec copropriété.

Fait sans copropriété le contrat conserve toujours son caractère prédominant de louage; fait avec copropriété, ce qui se rencontre très rarement, le contrat fait de l'ouvrier participant un véritable associé dans la mesure où il contribue à la constitution de la société, mais à tous autres égards, il conserve sa qualité de bailleur de services; il peut, sans cesser d'être ouvrier, perdre sa qualité d'associé en cédant sa part d'intérêt ; et inversement, il peut cesser d'être au service du maître, tout en conservant ses droits dans l'entreprise. (Cauwès, t. 3, p. 214. Cornil, p. 119.)

SECTION III. Du droit de contrôle des ouvriers participants.

En principe, la participation aux bénéfices ne fait pas de l'ouvrier un associé véritable du patron; tout le droit qu'elle donne à l'ouvrier participant c'est de contrôler les comptes du patron (Lyon, 2 déc. 1899. Gaz. comm. Lyon, 13 janv. 1900), sans s'immiscer en aucune façon dans la gestion; c'est dire que le patron reste maître absolu de diriger son entreprise comme il l'entend, d'acheter des matières premières quand il le juge à propos et de vendre quand bon lui semble. (Paris, 19 déc. 1894. Cornil, p. 115.)

Certains industriels ont cherché à échapper au contrôle des comptes qui constitue évidemment l'inconvénient capital du système, en stipulant expressément que les ouvriers autorisés à la participation devront accepter comme exact le quantième des bénéfices qu'il leur plaira de déclarer. Si la légalité de cette clause ne peut être contestée, on doit reconnaître aussi qu'il n'y a plus véritablement participation aux bénéfices puisque la participation aux bénéfices implique le droit de partager les profits et qu'ici le chiffre exact de ces bénéfices peut être dissimulé.

TITRE IV

Modes divers de paiement des salaires.

CHAPITRE PREMIER

TRUCK SYSTEM

Le truck-system (système du troc ou de l'échange) consiste à payer tout ou partie du salaire de l'ouvrier, non en espèces, mais en marchandises, soit directement, soit indirectement, en forçant les ouvriers qui reçoivent leur paiement en argent, à s'approvisionner dans une boutique que tient soit le patron en personne, soit un de ses parents et amis, soit un contremaître ou même un employé. (Cornil, p. 129, Hubert-Valleroux. p. 192.)

Le truck-system a été vivement attaqué et, sauf le cas où le siège de l'entreprise est éloigné des centres de ressources, il n'est guère défendable.

Son premier défaut est d'empêcher l'ouvrier de se rendre un compte exact de la valeur du salaire qu'il touche: le crédit lui est facilement ouvert à la cantine où il paie au moyen de jetons et, le jour de la paie arrivé, son gain se trouve à peu près absorbé. Dès lors l'épargne, l'affiliation à une société de prévoyance ou de secours mutuels lui sont interdites.

Son second inconvénient, c'est de permettre au patron, en augmentant ou en diminuant le prix des objets qu'il vend, d'abaisser le salaire réel des ouvriers, sans toucher à la valeur nominale de ce salaire. (Cornil, p. 130. Baudry-Lacantinerie et Wahl, n. 1426.)

La pratique du truck-system a surtout donné lieu à des abus en Belgique, en Angleterre et en Allemagne et la législation de ces pays l'a interdite (1).

CHAPITRE II

PAIEMENTS DANS LES CABARETS

On paye assez généralement dans les cabarets les ouvriers qui travaillent en plein vent: terrassiers, maçons, etc. Cet usage n'est pas sans inconvénient; le lieu où s'effectue le payement engage trop naturellement l'ouvrier à écorner son salaire. Aussi, aux termes du projet de loi sur les règlements d'ateliers adopté par le Sénat le 24 avril 1894 et par la Chambre le 12 décembre 1898, les paiements ne pourront-ils plus se faire que dans l'usine ou dans l'un de ses bureaux et un jour de travail. (Voy. Bull. inspection travail, 1899, p. 185).

CHAPITRE III

PAIEMENTS DES SALAIRES A LONGS INTERVALLES

Ce système présente un double désavantage. Il force l'ouvrier à recourir au crédit et, par suite, l'oblige à subir des conditions plus onéreuses dans l'achat de ce qui lui est nécessaire : d'autre part il met entre ses mains une somme relativement considérable qu'il sera tenté de dépenser inconsidérément. (Cornil, p. 135. Stocquart, p. 154, André et Guibourg, p. 25.)

D'après le projet de loi dont nous avons parlé plus haut les paiements devraient se faire deux fois par mois, à seize jours d'intervalle.

(1) Il ne faut pas confondre avec le truck-system l'institution des économats créés par certains patrons, et surtout par des compagnies occupant un très grand nombre d'ouvriers et vendant à ceux-ci au prix coûtant, les marchandises et denrées dont ils ont besoin. Les ouvriers ne sont nullement tenus de s'approvisionner dans ces établissements; ils peuvent ne le faire qu'autant qu'ils y trouvent avantage. (Hubert-Valleroux, p. 195. P. Leroy-Beaulieu, t. 2, p. 380 et 381.)

TITRE V

Fixation du salaire.

Le plus souvent le montant du salaire est fixé par le contrat. A défaut de prix convenu, on est censé s'en être remis au prix apparent c'est-à-dire à celui d'usage. Ce sera donc au juge à déterminer le quantum du salaire, d'après les règles de l'équité, en tenant compte, en dehors des usages locaux et des salaires payés aux ouvriers occupés dans le même établissement, du mérite de l'ouvrier, de la nature du travail et de ses conditions d'exécution. (Trib. commerce Seine, 2 mai 1893. Journ, des Prud'hommes, 93, 154.)

Parfois la fixation du prix est laissée à l'arbritage d'un tiers. Si celui-ci refuse ou se trouve dans l'impossibilité de se prononcer, il faut avoir recours à l'expertise, car l'ouvrier ne peut avoir travaillé sans rémunération.

Les experts sont choisis par les parties.

En cas de désaccord entre les experts, le différend sera soumis au conseil de prud'hommes s'il s'agit d'ouvriers, au juge de paix, s'il s'agit de domestiques.

Il n'est pas nécessaire que le prix convenu entre les parties soit exactement le juste prix de l'ouvrage, il existe des rémunérations dites de famine. Malgré la disproportion qui existe entre le salaire et la valeur réelle du service rendu, le contrat ne laisse pas d'être valable. En l'état actuel de la législation,

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