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légumes du pays, patates, taros, aubergines, etc. Enfin le verger donnera des oranges, des mandarines, des mangues, des ananas, des anones, des pêches de Chine, etc., etc., car la liste des fruits tropicaux serait longue, et, si on est privé des bonnes poires et des bonnes pêches d'Europe ainsi que de tous les fruits à noyaux, on peut en réalité se contenter de ceux que produit le pays et dont quelques-uns sont exquis.

Si l'on ajoute à cela que le poisson est partout abondant aussi bien dans les eaux douces que dans la mer, on voit que le colon qui saura s'y prendre pourra bien vivre sans trop entamer son capital et attendre ainsi tranquillement les premiers produits de ses cultures d'avenir.

Ces cultures sont celles du caféier, du cocotier et, peut-être aussi des plantes à caoutchouc dès que l'on sera fixé sur les espèces qu'il peut y avoir intérêt à cultiver.

Pour les cocotiers il faut s'empresser d'en garnir tous les terrains qui peuvent leur convenir et qui ne conviennent généralement pas à d'autres cultures; ni leur plantation, ni leur entretien ne donnent lieu à de grands frais et, au bout de quelques années, on trouve là un revenu certain.

Au contraire, la culture de caféier demande de grands soins pour le choix du terrain, pour sa préparation et pour la plantation des jeunes plants que l'on sort de pépinière. Quant à la manière de faire, les avis sont partagés; les uns donnent la préférence aux plantations en montagne et sous forêt, d'autres préfèrent abriter leurs caféiers avec des bois noirs, qu'ils soient en plaine ou en montagne, et, à ce propos, je n'ai pas oublié que j'ai vụ, en 1890, détruire par le feu une magnifique forêt de 50 hectares située au bord d'une rivière : tout le bois a été brûlé sur place, puis le propriétaire a planté le tout en caféiers avec les bois noirs destinés à les abriter.

Qui a raison? Lequel des deux systèmes est le meilleur ? Il serait assez difficile de le dire, car j'ai vu des caféières des deux systèmes qui étaient également belles comme apparence et comme rendements; j'ai même vu, dans certains terrains très profonds, des caféiers ayant déjà un certain âge qui, sans aucun abri, étaient en parfait état et donnaient de belles récoltes. Mais le système le plus employé en Nouvelle-Calédonie est celui qui consiste à abriter le caféier au moyen de bois noirs, probablement pour éviter les

dégâts que font, lors des ouragans tropicaux, les grosses branches cassées par le vent qui, tombant de haut, détruisent d'un seul coup un grand nombre d'arbustes en plein rapport - les bois noirs qui sont bas ne présentent pas, à beaucoup près, les mêmes inconvé

nients.

Les caféiers commencent à rapporter à la troisième année de plantation, mais ils ne sont en plein rapport qu'à la cinquième ; alors, suivant la qualité des terrains et surtout les soins qui leur ont été donnés, ils peuvent produire de 300 à 500 grammes par pied, et même plus. Or on compte environ 1.600 pieds à l'hectare, de sorte que la récolte peut varier de 500 à 800 kilos à l'hectare, ce qui est un rendement satisfaisant, surtout quand il s'agit de café de qualité supérieure, ce qui est le cas pour la Calédonie.

Cependant, certains détracteurs de la colonisation ont été jusqu'à dire qu'il vaudrait mieux renoncer à cette culture. Je ne crois pas que les colons soient de cet avis.

Il est certain que, s'il s'agissait d'un café quelconque, analogue aux Santos ordinaire dont tous les marchés sont inondés, je n'hésiterais pas à reconnaître qu'il serait plus sage de ne pas lutter; car, étant donnée la cherté relative de la main-d'œuvre en NouvelleCalédonie, le prix que l'on pourrait obtenir couvrirait à peine les frais de culture mais tel n'est pas le cas. La vérité est que le café de la Nouvelle-Calédonie, malheureusement encore peu connu, est destiné à prendre place dans le commerce à côté des cafés de choix, comme le Guadeloupe, le Bourbon et le Martinique (s'il y en avait encore).

Voici, en effet, ce qu'en disait, il y a bien des années, le Dr Raoul dont les appréciations, qui sont celles d'un maître, n'ont été publiées qu'en 1897, quelque temps après sa mort :

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«Le meilleur café de l'Océanie est le Calédonie. Ce café, de pro«<duction récente, n'a encore été décrit dans aucun traité spécial. « Je suis heureux d'avoir la bonne fortune de le placer au rang qui « lui est légitimement dû, c'est-à-dire en tête des cafés doux du << monde entier. Comme qualité, le Calédonie vaut presque le Moka d'origine. Je le préfère cependant à ce dernier et la plupart des « consommateurs sont de cet avis. Si l'arome est absolument aussi agréable, le Calédonie offre cet avantage d'être dépourvu de « toute espèce d'âcreté et de montant. »

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« La Nouvelle-Calédonie a la bonne fortune d'être « un terroir »> « pour le café comme elle l'est aussi pour l'ananas; c'est à elle à << savoir tirer bénéfice de cette situation absolument exception<<< nelle. >>

On voit par là que le café cultivé en Nouvelle-Calédonie est, comme le Moka, du coffea arabica. Le Dr Raoul déclare avoir porté lui-même dans cette colonie, vers 1870, des grains de moka d'Arabie, et reconnaît qu'à cette époque des créoles venus de la Réunion avaient déjà importé le café de même origine, qu'ils avaient cultivé dans cette colonie.

Le café de la Nouvelle-Calédonie est donc en réalité de Bourbon auquel il ressemble beaucoup et dont il ne diffère que par un léger goût de terroir. Aussi sert-il dans le commerce à suppléer à l'insuffisance de celui-ci dont on vend partout, alors que la quantité exportée annuellement par La Réunion ne dépasse pas 4.000 kilos.

L'exportation du café de Nouvelle-Calédonie se chiffre au contraire déjà par plus de 60.000 kilos; elle augmente d'année en année et il est probable que l'accroissement des anciennes plantations et la création des nouvelles propriétés qui a eu lieu surtout de 1896 à 1902, aura pour conséquence que la quantité de café exportée dépassera prochainement le chiffre de un million de kilos.

Dans ces conditions et surtout avec l'espoir que le Gouvernement et les Chambres finiront par reconnaître qu'ils ont un devoir patriotique à remplir, en accordant aux produits des colonies françaises l'entrée en franchise en France, les colons sérieux peuvent continuer à se diriger vers la Nouvelle-Calédonie.

Toute famille de cultivateurs, disposant d'un petit capital, pourra toujours s'y créer une existence plus heureuse que celle dont on a le spectacle dans certaines parties de la France, à la seule condition que ses membres seront travailleurs, économes et sobres.

Ils pourront arriver, sinon à la fortune, au moins à l'aisance, et leurs enfants s'installeront à leur tour, créant de nouvelles familles et s'attachant au sol hospitalier de leur nouvelle patrie.

Alors seulement la Nouvelle-Calédonie finira par être peuplée comme il est nécessaire qu'elle le devienne, pour qu'elle puisse représenter dignement la France dans cet immense Océan Pacifique et y jouer le rôle auquel elle est appelée par sa situation géographique.

L. SIMON.

LES INSECTES

PAPILLONS SERICIGÈNES DONT LES CHENILLES
VIVENT EN SOCIÉTÉ

La sériciculture est à l'ordre du jour à Madagascar; elle entre dans une voie pratique et fait l'objet d'expériences conduites avec méthode, qui ne tarderont pas à donner des résultats satisfaisants. L'élevage du ver du mûrier va devenir une véritable industrie. Sans contester la supériorité du produit de Sericaria mori, il convient de jeter un coup d'œil rapide sur quelques espèces sauvages indigènes. Parmi celles-ci, le Borocera madagascariensis ou « landibé », déjà exploité par les Malgaches, doit tenir la première place. M. de Cordemoy l'a étudié dans son travail sur les soies exotiques; moimême, j'en ai dit quelques mots dans La Nature du 26 septembre 1903, et je vais aujourd'hui parler un peu des espèces qui vivent en société dans des nids ou poches soyeuses, parfois très volumineuses, suspendues aux branches ou appliquées contre le tronc des arbres.

Coquerela fait connaître le Bombyx radama et a donné de bonnes figures de l'insecte et de son nid, dans les Annales de la Société entomologique de France de 1866. Ce papillon a fait l'objet de plusieurs notes adressées au Jardin colonial de Nogent-surMarne; je crois utile de les publier ici, dans le but d'attirer l'attention sur lui.

A en juger par la différence d'aspect qui présentent les échantillons de nids que j'ai pu observer, ils sont vraisemblablement produits par plusieurs espèces.

Les chenilles tissent d'abord en commun la poche qui les abrite pendant leur évolution larvaire, puis confectionnent individuellement leur cocon à l'intérieur; le sac ainsi gonflé en contient un grand nombre. Le papillon sort en perçant l'enveloppe extérieure.

1. Officier de marine distingué, fit largement profiter la science des observations faites au cours de ses voyages et publia de nombreux travaux entomologiques dans différents recueils. Il contracta une grave maladie de foie pendant l'expédition de Syrie, à laquelle il prit part: négligea sa santé pour continuer à servir; repartit bientôt pour la Réunion et y mourut.

FICHES ACCOMPAGNANT DES ÉCHANTILLONS DE NIDS
ENVOYÉS PAR LA COLONIE DE MADAGASCAR

AU CONCOURS AGRICOLE DE PARIS DE 1902

PROVINCE DE MAROANTSETRA

Échantillons de « Miana » provenant de Mananara.
Ne fait l'objet d'aucun commerce.

Sorte de bourre de soie produite par la chenille d'un lépidoptère connu dans la région sous le nom de Mania; pourrait faire l'objet d'une industrie si la matière première est transformable.

CERCLE DE MORONDAVA

Cocons dits « le Moundo ».

Les Sakalaves appellent l'insecte qui produit les cocons, le Moundo.

Les cocons se trouvent non suspendus mais appuyés à l'écorce des arbres le long des troncs ou des grosses branches. Les cocons se forment après la saison des pluies et pendant la saison sèche. Il n'a pas été possible de trouver des insectes producteurs de ce genre de soie.

D'après les Sakalaves, qui les recherchent pour les manger mélangés à de la graisse, chaque cocon en renfermerait de 40 à 50, de la grosseur de 3 centimètres de diamètre sur 8 à 10 centimètres de longueur. L'insecte serait, d'après sa description, un ver dans le genre du ver à soie ordinaire, d'une couleur blanche tirant sur l'ocre très clair.

Les tirailleurs de Betsileo sont étonnés de la grosseur de ces cocons et n'ont pu dire s'ils avaient quelque analogie avec la soie de leur pays.

Il serait sans doute intéressant de les livrer à l'analyse afin de voir le parti qui pourrait en être tiré au point de vue commercial. Ces cocons, d'après les dires des habitants, seraient communs dans la région.

L'insecte semble indifférent dans le choix de l'arbre et de l'orien

tation.

(A suivre.)

E. FLEUTIAUX.

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